The Multiversity

BRAN

Que Bran soit ici n’était pas particulièrement surprenant. Le frère de Mélinda Warren n’était pas comme elle. Il était bien plus dangereux qu’elle, même si son esprit avait été brisé par cette dernière pour qu’il devienne le plus servile des serviteurs, pour qu’il devienne le grand-frère que sa sœur avait toujours voulu qu’il soit. Il avait passé toute son existence, après avoir été reconstruit, à travailler pour le compte de sa sœur, à s’entraîner et à s’endurcir. Dans cette situation, Bran avait compris que le seul moyen de protéger sa sœur était de détruire ce qui permettait à ses monstres de venir. Sa progression l’avait ainsi conduit sous le château, dans le bunker, et il avait suivi les coups de feu. Les coups de feu l’avaient guidé ici, dans cette immense salle, face au Monolithe, et... Et à Suki Tetsuhiko, cette Celkhane qui l’avait battu à mort dans le métro de Uatis city.

Il ne lui en voulait pas. De toute manière, personne ne lui ferait jamais aussi mal que sa sœur, qui l’avait torturé pendant des années. Il aurait pu la laisser mourir ici, mais avait décidé de la sauver. Un choix purement stratégique. Bran était en infériorité numérique, et ne connaissait pas le terrain. La Celkhane, derrière son comportement teigneux, était aussi une guerrière de talent, qui pouvait donc l’aider à fermer le Monolithe. Bran l’avait donc attrapé, avant de descendre en glissade le long de la surface du Monolithe, atterrissant sur le sol, pour voir que le Sans-Nom était en train de mourir, face à Miranda Thorne, la « Dame d’Acier ». La redoutable Mijakienne était donc liée à cette histoire ? Peu lui importait. La seule chose qui avait de l’importance, en réalité, était de protéger sa sœur. Ces années de torture, de cruauté, avaient eu pour effet de rendre Bran extrêmement docile, de briser sa volonté. Avant d’être transformé en vampire, il haïssait sa petite sœur, qui avait tué sa mère, il haïssait son corps parfait, qui lui rappelait celle de sa défunte mère. Bran avait un complexe œdipien qui ne s’était jamais vraiment résolu, et, quand il défonçait les fesses de sa sœur, c’était une manière, non seulement de se venger de cette dernière, de se délecter de ses hurlements d’agonie, mais aussi de satisfaire sa pulsion d’amour fusionnelle à l’égard de sa mère. En le torturant à ce point, Mélinda lui avait montré qu’elle n’avait fait que remplacer sa mère.

Bran l’aimait, tout simplement... Au-delà sa servitude forcée, il était amoureux de sa sœur. Que ce soit les Celkhanes, les démons, ou des saloperies de Nécromorphes, il ne laisserait personne lui faire du mal.

Suki abattit Miranda*, qui tomba dans le vide, disparaissant dans le trou. Le coup de feu ne l’avait pas tué, mais l’avait surpris, la blessant, et un tentacule noirâtre jaillit de ce trou abyssal, l’attrapant par la gorge, et la fit basculer à l’intérieur, dans un hurlement de terreur absolu. Le trou était immense, avec une espèce d’intense boule lumineuse en contrebas. Le long des murs, on voyait des marées de monstres en train de grimper, enfonçant leurs griffes dans la paroi, tandis qu’une masse noire émergeait peu à peu de cette lumière étincelante, amenant un monstre beaucoup plus gros.

« Coupez... Les... Tentacules... » réussit à gémir le Sans-Nom.

Bran obtempéra. En réalité, il suffit de couper deux tentacules pour que la masse du Monolithe s’écrabouille dans le trou. Le Monolithe se mit alors à luire d’une intense lueur rouge, tandis que des inscriptions, ressemblant à de longues arabesques, se mirent à briller. Des runes magiques qui scellèrent la faille, coupant le lien entre les Nécromorphes et leur maître. Les ennemis cessèrent alors de bouger, totalement inertes, mais encore en vie. C’était juste qu’ils ne pouvaient plus réfléchir, leurs cerveaux étant éteints. Le Monolithe était rabaissé.

C’était terminé.

Mais pas totalement.

Bran se tourna vers Suki. Elle était blessée. L’explosion dans le bureau avait perforé ses boucliers et son armure. Elle mourrait si on ne faisait rien, et les Celkhanes n’avaient pas de trousses de soin sur elle. Cependant, Bran avait son sang, et le sang vampirique avait des propriétés curatives. Il se pencha vers la femme, en s’étant ouvert la peau, faisant jaillir son sang, et le posa sur ses lèvres.

« Vous ne vous transformerez pas en vampire... Mais ça vous soignera. »

MÉLINDA WARREN

Ils étaient tous réunis dans la cathédrale. Celkhanes, esclaves, esclavagistes, et soldats encore en vie. Ils étaient tous là, et cela faisait une heure que Mélinda attendait, lorsque les Celkhanes eurent la confirmation que les Nécromorphes avaient été vaincus. La vampire caressait tendrement le corps de Liana, tandis que les Celkhanes étaient désormais soumises à un choix cornélien. Elles étaient venues ici pour abattre les esclavagistes, pour les tuer. Pour libérer les esclaves. Cependant, la tempête de neige continuait à faire son office, et, quand elle serait terminée, les Mijakiens seraient là. Outre cette question, pouvaient-elles abattre des esclavagistes qu’elles avaient tenté de sauver dans ce fort, et qui, dans une certaine mesure, avaient été indispensables pour fermer ce Monolithe ?

« On... On va retourner à la maison, Maîtresse ? demanda une Liana affolée.
- Bien sûr, Liana, bien sûr, ma belle... »

Liana était naturellement très inquiète. Outre sa propre vie, elle craignait beaucoup pour celle de sa Maîtresse. Pendant cette heure, les esclavagistes avaient parlé de Caelestis, qui n’était pas un plat de cuisine, et en des termes peu élogieux. Ils pensaient qu’on allait les tuer, ou leur faire subir un faux-procès, où le seul objectif serait de les abattre comme des chiens. Un esclavagiste s’avança vers elles, dans un costume rapiécé.

« Je pense que le mieux, pour tout le monde, serait que vous partiez. Nous avons perdu plusieurs des nôtres, et vous avez perdu plusieurs des vôtres... Je crois qu’il y a eu suffisamment de sang comme ça dans ce fort. Dès que la tempête sera terminée, les Mijakiens viendront nous secourir, vous n’aurez jamais, matériellement parlant, le temps de tous nous emmener. »

Les Celkhanes avaient la main pour l’instant... Mais, si jamais la tempête devenait suffisamment faible pour permettre aux démons mijakiens de passer, la situation s’inverserait... Et, dans ce cas, si les Celkhanes ne voulaient pas finir esclaves dans le cirque, elles avaient intérêt à rapidement agir de manière raisonnable... Cependant, les Celkhanes fonctionnaient rarement de manière raisonnable, c’est ce qui faisait leur charme.

Suki

Quelle merde! Depuis l'instant où elle avait tiré sur cette pute Mijakienne pour la stopper et éviter qu'elle ne s'enfuie, elle ne se souvenait plus de rien. Si, du plafond très grand dans cet endroit, des monstres volants qui tombaient comme des mouches puis... plus grand-chose. Même autour d'elle c'était calme finalement. Suki avait fini par perdre connaissance – la santé ou la fatigue? – au moment où elle se souvenait du visage de cet enfoiré de vampire. Que s'était-il passé ensuite? Elle ne se souvenait pas, Morphée l'avait bercé dans ses bras et elle ne savait rien. À vrai dire, son rêve était si agréable comparé à l'enfer qu'elle venait de vivre, elle aurait aimé dormir plus longtemps, rester avec Rinako et Holy chez elle et jouer en famille comme elles le faisaient le soir quand elles n'étaient pas obligées – l'une ou l'autre ou les deux – de dormir sur place pour préparer un exercice militaire au matin. Elle était si heureuse avec Rinako sur leur canapé avec Holy sur ses genoux qui regardait son programme télé. Elle aurait aimé continuer ce petit rêve, quelques secondes encore. Mais elle devait se réveiller afin de vraiment vivre ça d'ici quelques heures au grand maximum.

Elle ouvrait les yeux, ce même plafond en première images au réveil, un goût étrange dans la bouche, un mal de tête toujours mais plus de blessure bien qu'elle avait du mal pour le moment à le réaliser. À quelques mètres il y avait le Sans-Nom qui était aussi allongé comme toutes ses saloperies mortes sur le sol. Se redressant doucement, elle vit Wolf à ses côtés qui semblait ravi de la voir se redresser alors qu'elle lâchait ce qu'elle tenait avec les yeux. Tournant la tête vers sa cible, elle vit le vampire, frère de Mélinda Warren. Elle se fichait de son nom à lui, il n'était qu'un esclave de plus de cette putain de vampire et il pouvait bien crever, ça lui serait bien égal même si le fait d'apprendre qu'il lui avait sauvé la vie par deux fois en plus – pour les soins et sur la grue – ne risque pas de lui donner le sourire. Enfin, malgré l'arme de Wolf, cette dernière était posé à côté d'elle sur le sol. Elle aurait pu donc l'abattre quand bon lui semble mais elle ne tenait juste du regard, pas avec son arme.

« Je... »
« Ne t'en fait pas. Ils sont tous morts, le monolithe est abaissé, on attend confirmation de Leo et puisque tu es réveillé, on devrait surement tous se rejoindre d'ici peu de temps. »
« Et lui... » dit-elle a l'attention du frère de Mélinda. La réponse n'arrivait pas de suite, étrangement.
« Il... t'as aidé et sans lui, on serait surement plus là... »

Suki reposait sa tête au sol, voulant quitter ce cauchemar pour retrouver son paisible rêve! Sauver par l'ennemi, elle aura tout vu! Malgré quelques longues secondes à trouver cette situation humiliante et grotesque, elle se redressa sur les coudes, surprise de ne plus ressentir la moindre douleur. Elle avait toujours les traces de sang sur ses cheveux comme sur sa peau mais plus de douleur. Elle ignorait si Wolf maitrisait la magie blanche mais ce n'était pas le cas, juste les bases. Pour en arriver à un tel résultat avec les bases, il faudrait des heures entières! C'était étrange mais la bienvenue quand même. Recevant l'appel radio de Leo, elles avaient rendez-vous à la cathédrale avec les autres survivants. Il restait Spider et Shark* qui faisait le tour du fort avec la fonction de leur radar pour trouver quelques traces de survivants caché ici et là. Mais sans elles, il restait encore du monde dans les Celkhanes. Wolf apprenait à Suki que Bear s'était sacrifié pour les esclaves quand le plan à déborder et commencer sa chute mais pour Crow, aucune trace, aucun signe pour le moment. Était-elle morte ou juste inconsciente, personne ne savait. La mission des deux Celkhanes étaient aussi de savoir ça. Se relevant, il était évident que le frère de l'autre connasse allait venir, il restait un otage jusqu'à nouvel ordre. Mais le Sans-Nom, était-il toujours en vie?

Leo

Depuis leurs retrouvailles avec Panther, les necromrophes n'étaient plus que des cadavres debout et la majorité des survivants étaient ici. Des esclaves, des gardes, des esclavagistes, il y avait vraiment de tout. Les Celkhanes veillaient dans un premier temps à sécuriser l'endroit au cas où cela ne serait qu'un plan de la part des monstres. Juste après, les esclaves étaient mis dans un coin sans les forcer, ceux sans propriétaire, ceux voulant profiter des Celkhanes pour fuir leur vie enchainée mais ceux comme Liana, ne venaient donc pas. C'est dommage mais l'heure n'est pas à l'endoctrinage. Les gardes comme les esclavagistes étaient laissés comme bon leur semble même si, dans cette mission qui était un énorme piège tendu aux Celkhanes, ses dernières restaient humaines et soignaient donc un minimum ceux et celles blesser, au moins pour guérir leur petites blessures. Une chose plus facile à faire sur les grades que les esclavagistes mais bon... aujourd'hui était un jour un peu spécial au vu des évènements. Même si la tempête continuait, Spider et Shark cherchaient les derniers survivants alors que l'heure tournait.

Un des esclavagistes se levait pour affirmer ce qu'il pensait, qu'elles risquent de mourir et que quand même bien elles emportaient esclaves et esclavagistes, elles n'avaient pas assez de moyen vu le nombre restant... et même si tout se serait dérouler comme prévu. Oui sauf que si tout se serait dérouler comme prévu, le fort aurait sauté avec Hiver et les esclavagistes, sans les esclaves par contre. Leo, étant la chef du groupe pour le moment pris la parole, adossé à un pilonne de pierre.

« C'est vrai que vu les évènements de la soirée, nous avons dû collaborer ensemble, éviter qu'il y ait des morts autant chez vous comme chez nous. Ce fut une trêve temporaire. Mais rassurez-vous, même si je me levais et collais une balle à chacun de vous, esclavagistes, ça ne ramènera pas nos morts à la vie, comme ses esclaves. Dès que possible, nous partirons donc tout simplement avec les esclaves qui ne sont pas accrochés à ce genre de personne... »

Son regard se posa naturellement sur Mélinda et Liana.

« Donc, que vous le voulez ou non, tous les esclaves qui souhaitent couper leur chaine vont nous rejoindre, celles qui ont le cerveau brouiller ou même une sorte de syndrome de Stockholm, nous n'en ferrons rien pour le moment. Si vous pensez que c'est injuste, je peux toujours m'arranger pour vous liquider, au moins vous serez mort plutôt que vivant avec tout ce qui vient de se passer. Donc pour cette fois, nous vous laisserons en vie. »

Après tout, elles n'avaient pas encore toutes les informations concernant les preuves pour prouver que les Celkhanes n'y sont pour rien dans cette histoire. Si le Sans-Nom délivre le nom de Cassandra qui se trouve aussi dans la cathédrale, ça fera une bonne coupable qui a des réponses à des tas de questions...

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Shark*: sans faire vraiment attention, jusqu'ici j'ai nommé Shark, Jaw... ou autre chose même, peut être? Alors que chacune avait un nom de code d'animaux/insectes plus ou moins dangereux, je sais pas pourquoi requin pour moi voulais dire Jaw... Donc considérer que Jaw se nomme Shark... désolé de cette étourderie...

BRAN WARREN

C’était terminé. Son intervention avait été le point final de cette histoire. Il avait sauvé la Celkhane simplement parce qu’il avait besoin d’elle. Bran n’avait pas oublié dans quel état cette peste arrogante l’avait mis à Uatis City... Et puis, elle constituait une menace pour sa sœur. C’était son rôle de grand-frère de la tuer, non ? Il ne regardait pas les deux Celkhanes, nullement inquiet. Contrairement à sa sœur, Bran était un vampire guerrier, endurci à résister à la douleur. Sa sœur l’avait torturé pendant des années, et il en portait encore, dans sa tête, les stigmates. Elle s’était vengée de ce qu’il lui avait fait, elle l’avait brisé en mille morceaux. Bran s’était laissé mourir, mais elle l’avait soigné, encore et encore, afin qu’il s’accroche à la vie. Il n’avait jamais su clairement expliquer ce que sa sœur ressentait à son égard : de l’amour, ou de la haine ? Mais ces deux sentiments étaient-ils vraiment si différents ? Elle avait fait de Bran un esclave très particulier, un grand-frère et amant protecteur, qui s’était entraîné à savoir se battre. Ainsi, si la puissance de Mélinda reposait avant tout sur sa verve et sa plastique, celle de Bran, elle, était physique.

En d’autres termes, il n’avait rien à craindre des deux Celkhanes. Non seulement elles étaient affaiblies, mais elles se reposaient trop sur leurs armes à feu. Bran avait semé les Nécromorphes dans le château pour rejoindre le bunker. Il pouvait faire preuve d’une redoutable rapidité, et, si l’une d’elles essayait de l’attaquer, il se déplacerait rapidement pour la prendre à revers, et l’égorger. Sa priorité était de s’assurer de la sécurité de sa sœur, et il observait donc le Monolithe. Les Nécromorphes présents dans la pièce ne bougeaient plus. Ils étaient encore en vie, car ils voyaient leurs poitrines remuer, et sentaient leur sang infect, mais ils n’avaient plus de commandant pour les diriger. Ils n’étaient plus que des loques inertes. Cependant, une rechute était toujours possible. L’Mijakienne était morte, mais Bran doutait fortement qu’elle ait été seule pour organiser une telle opération.

*Le Monolithe a l’air verrouillé...*

Il vrombissait silencieusement, ses runes magiques s’illuminant, et, peu à peu, les Nécromorphes commencèrent à se disloquer, à se dissoudre, tombant sur le sol, s’effondrant. Il s’agissait après tout de cadavres réanimés, et, sans l’esprit central, ils mourraient. On aurait presque dit des Formiens.

« Le Sans-Nom est mort, Celkhanes, annonça-t-il alors. Ne vous méprenez pas, je ne vous ai épargné que parce que je n’aurais pas réussi à fermer le Monolithe moi-même. »

Il se retourna vers la Celkhane qui était debout, et qui pointait une arme sur lui.

« Je vais rejoindre ma sœur. Je vous préviens, je ne suis pas aussi gentil qu’elle. »

Bran esquissa alors un sourire, et se mit à courir. Les balles iraient toujours plus vite que lui, mais le temps de réaction de la Celkhane, lui, était moins rapide que le sien. Entre le moment où la Celkhane avait vu Bran courir, celui où elle visait, et celui où elle appuyait sur la gâchette, il s’était écoulé quelques rapides secondes. Quand elle tira, Bran avait déjà bondi dans les airs, tendant son pied en avant, et heurta la gorge de la Celkhane, avec toute sa force, la couchant sur le sol, lui faisant lâcher son arme. Il se retourna vers Suki, qui allait naturellement tenter de prendre son arme, et sa main fut plus rapide, la saisissant à la gorge, la soulevant comme un fétu de paille, serrant un peu, l’étouffant à moitié.

« Ce combat t’a affaibli, humaine. Je pourrais te briser le cou maintenant... Mais ce n’est pas ce que ma sœur veut. N’essaie pas de me retenir. »

Bran la relâcha alors, et s’en alla, partant rejoindre Mélinda.

MÉLINDA WARREN

La vampire ignorait évidemment tout de ce qui avait eu lieu en contrebas. Elle serrait Liana contre elle, tandis que les esclavagistes étaient en train de négocier leur liberté. La vampire pouvait lire l’amertume dans les yeux des Celkhanes, leur envie de les tuer. Elles réfléchissaient. Elles étaient venues ici pour tous les tuer, et une Celkhane finit par répondre à l’homme qui avait parlé, leur expliquant qu’ils pourraient vivre, mais que tous les esclaves désireux de partir le feraient. À cette idée, Liana se resserra un peu plus entre les bras de Mélinda, tandis que d’autres esclaves s’agitaient, voyant peut-être une occasion de pouvoir bénéficier de cette liberté qu’ils caressaient dans leurs rêves les plus fous.

« Une trêve ? s’exclama un collègue de Mélinda. Vous vous croyez en guerre ? Nous ne sommes que des marchands ! Si vous voulez vous battre, attaquez les Mijakiens, vous vous en prenez à des civils ! Vous n’êtes pas des soldats, ni même des résistants, vous n’êtes que de la sale vermine terroriste ! »

Cet homme ne mâchait pas ses mots, mais il renforçait la solidarité de groupe. C’était un spectacle curieux. En temps normal, les esclavagistes se tiraient continuellement dans les pattes. L’esclavage était un secteur très concurrentiel, où les plus gros écrasaient les plus faibles, et où il était très difficile de prospérer. Acheter des esclaves était très onéreux, et les banques étaient de plus en plus réticentes à accorder des prêts professionnels, compte tenu de la saturation du marché. L’offre était supérieure à la demande, entraînant dès lors une concurrence sauvage. Mélinda entreprit de se relever, tandis que des esclavagistes maintenaient des esclaves qui, visiblement, avaient trop peur de s’avancer, regardant leurs pieds.

« Vous êtes des meurtrières !
- Tuez-nous, et l’armée vous torturera ! Vous deviendrez des esclaves !
- Ah oui ? »

La douce voix de Mélinda résonna, prenant par surprise ses concurrents, qui la regardèrent. Elle souriait légèrement, tandis que les esclavagistes la regardaient.

« Toi, Jinx, si tu venais à mourir, ça ne me dérangerait pas, je reprendrais ton affaire.
- Quoi ?! s’exclama le dénommé Jinx. Infâme salope, je n’élève pas des putes, moi ! »

Mélinda lui fit un sourire carnassier.

« Et alors ? »

Jinx serra le poing, tandis que l’esclave qu’il avait amené, une jeune fille, le regardait en rougissant, avant de regarder Mélinda, s’emballant. Un sourire amusé éclaira ses lèvres.

« Voilà un cas intéressant pour vous, chères Celkhanes, claironna-t-elle. Cette esclave ne veut pas de son propriétaire actuel, mais elle ne veut pas non plus être avec vous. Je crois que m’avoir comme maîtresse la tente bien plus. »

Jinx s’empourpra, et tira sur la laisse, étouffant à moitié la jeune fille, qui se prosterna à ses pieds.

« Misérable, c’est moi qui t’ait nourri et logé ! Cette salope de Warren... »

Jinx s’énervait très facilement, et son esclave rougissait.

« Tu mériterais une correction !
- Si c’est toi qui la lui inflige, elle pleurera. Si c’est moi, elle jouira... Mon pauvre, tu ne sais vraiment pas t’y prendre... »

Bras croisés, Mélinda s’amusait. Jinx perdait son contrôle, et pointa son doigt vers les Celkhanes.

« C’est toi qui as envoyé ces pétasses ici, hein ? Je suis au courant des rumeurs ! Tu en as baisé deux à Tekhos, tes gardes l’ont raconté dans mes auberges ! Ils racontaient très bien la manière dont la grosse te suppliait, et dont l’autre, cette blondasse, se faisait prendre comme une chienne. Tu les as épargnés ! Tu as trahi Mijak ! Tu... »

Jinx ne put achever. Dans son dos, une silhouette venait de surgir, et lui brisa la nuque. Deux mains expertes jaillirent, fermes et implacables, et tordirent son cou. On entendit un sinistre craquement, et Jinx fut littéralement stoppé dans son élan. L’esclave poussa un petit cri paniqué, et le solide esclavagiste s’écroula aux pieds de Bran.

« Personne ne manque de respect à ma Maîtresse sans en payer les conséquences. »

La petite esclave était nerveuse, paniquée, fermant les yeux, recroquevillée. C’était encore une enfant, une jeune pousse qui hésitait. Aller vers les Celkhanes, ou vers Mélinda ? Mélinda se contenta de faire pointer ses griffes, et elle rejoignit rapidement la vampire, qui lui caressa les cheveux. Mélinda regarda alors les Celkhanes avec un sourire sardonique :

« Mais où est donc passée cette chère Suki ? J’ai cru comprendre que je lui avais fait forte impression... »

Suki

Cela lui faisait mal au cul de dire ça mais elle devait laisser ce vampire en vie. Il l'avait sauvé mais surtout, Suki n'avait plus la force de combattre, elle était dans les vapes, à peine remise sur pied. Elle devait rejoindre les autres, Léo, Shark, Spider, Snake, Panther, Crow et Tiger. Bear étant tombé au combat, c'était déjà une mauvaise nouvelle mais elle l'avait fait pour le bien de la cause. Faut-il encore maintenant honorer sa mémoire mais Suki n'était pas la chef, elle ne prenait pas les décisions. Elle pouvait donner son avis mais elle ne décidait pas. Bien qu'il était éloigné et que, pour le moment Suki était inoffensive envers lui, ce dernier ne le prenait pas comme ça. Wolf avait son arme braquée sur lui mais ce n'était que de la prévention. S'il montre les crocs, elle aussi. Et malheureusement, cela arrivera. Pour l'heure, seule sa nouvelle était embêtante. Le Sans-Nom est mort et les preuves qu'il avait étaient elles aussi mortes. Suki et les autres pourront toujours compter sur les quelques preuves qu'elles avaient mais bon... Cela aurait été mieux si cet homme – ou femme, qui se cachait derrière la voix robotique? – auraient laissé ses informations aux Celkhanes.

Mais la suite était étrange? Qu'il veuille rejoindre sa pouffiasse de sœur, c'est lui que sa regarde mais pourquoi venir les attaquer? Wolf fut rapidement à terre avant qu'il n'attrape Suki par la gorge pour la soulever et lui laisser un message. Non seulement cette salope l'avait humilié mais elle continue! Elle la veut en vie? Pourquoi? Elle n'avait pas eu le cran de tirer tout à l'heure à cause de cette neko mais sans elle, sa sœur aurait gagner un joli trou en plein milieu du front et elle pouvait dire adieux à ses cauchemars. S'il était si rapide, pourquoi pas simplement partir et esquiver le peu de balle qu'elles auraient pu tirer? Quel imbécile celui-là! Elle qui n'avait rien de spécial contre lui sauf le fait qu'il soit le frère de Mélinda, il venait de changer l'avis de la Celkhane à son sujet quand elle retomba au sol. Aidant sa camarade à se remettre sur pied, elles quittaient cette salle. Bien qu'elle s'était demandé si le Sans-Nom ne méritait pas mieux que rester au milieu des cadavres? Sa guilde devrait le retrouver d'une façon ou d'une autre?

Léo

Quelques esclaves sans maître se faisaient une joie de courir vers les Celkhanes, d'autres plus hésitantes marchaient vers elles, se retournant parfois vers les autres esclaves ou maître mais en regagnant quand même le rang des affranchis. Et certaines restaient dans les bras de leur propriétaire de leur plein gré ou de force. Un des mijakiens s'en prenait à elles en élevant la voix, sortant un discours qui n'était pas tout à fait faux en soi mais qui restait faux quand même car il avait oublié une chose, un détail qui fait toute la différence. Léo gardait son calme en se tournant vers lui.

« Nous ne voulons pas tuer tous les mijakiens ou lumeniens. Tu oublies que nous avons une dent que contre ceux et celles qui achètent des gens en les prenant pour des objets. Un mijakien qui vend des bijoux, des meubles ou des armes, on va le laisser tranquille, il gagne sa vie. Mais prendre un être humain pour une marchandise, ça, non. »

Léo savait que seules les femmes étaient admises sur Caelestis mais ça n'empêchait pas la jeune femme de libérer aussi les hommes emprisonnés et les laisser vivre leur vie ailleurs. Une vie est une vie. Mais évidemment, le discours de ce dernier et le sien faisait des étincelles et de nouvelles voix se levaient contre les vilaines Celkhanes qui rendaient leur commerce de plus en plus difficile. Oh mon dieu, qu'elles sont méchantes! Léo savait qu’une situation pareille aurait pu arriver et cela ne lui faisait ni chaud, ni froid. C'est la suite qu'elle n'aurait pas prévue. La vampire Warren défendait à moitié la cause des Celkhanes? Elle avait retourné sa veste pour s'opposer à ce type? Non, juste la bonne entente entre vendeurs d'esclave. Le malheur des uns fait le bonheur des autres comme on dit. Qu'ils étaient solidaires maintenant! Léo tire une balle dans la tête de l'un d'eux et les preux esclavagistes devienne des chiens autour d'un morceau de viande soudainement. Cette femme avait du caractère depuis leur rencontre, pas difficile de savoir pourquoi Suki la haïssait autant, elles étaient impossibles toutes les deux. Même en admettant qu'elle n'aurait pas été une esclavagiste, leur caractère s'opposait à toutes les deux. Les deux se crêpaient le chignon oralement, l'une tenait un harem, l'autre vendait des esclaves. Si Mélinda engagerait de véritables femmes libres avec un bon salaire et tout le reste, elle serait libre mais du moment qu'elle achète, ça reste un crime et ce, même si elle sort certaines femmes d'une mort ou une vie remplis de torture.

Mais c'est sûr qu'à choisir entre elle et un connard – ou connasse – qui torturent les gens en les vendant ou en les tuant par plaisir, l'important est de sauver des vies d'abord. Même Suki serait d'accord dessus bien qu'elle rêve de tuer Mélinda. Cette dernière les provoqua une nouvelle fois, concernant une esclave cette fois qui commençait à étouffer sous la poigne du type et déjà, des « clac » se faisaient entendre signe que la sécurité des armes était retirée et prêt à le tuer. Mais au final, ce Jinx savait certaines choses... Si Suki serait là, elle aurait fait un carnage pour ça... Kairi qui demande? Suki en chienne? Si ce vampire débarqué comme une ombre n'aurait pas fait taire ce type, la fameuse petite blonde lui aurait fait bien pire, peu importe les ordres. Elle avait un sacré égo mine de rien comparé à sa taille. Elle en rajoutait encore une couche, c'est vraiment une chance pour Léo qu'elle ne soit pas là, ça aurait été dur à gérer.

« Tu semble bien confiante, Warren mais méfies-toi de l'eau qui dort. Tôt ou tard, la roue pourrait bien s'inverser. »

D'ailleurs elle ignorait que Suki, d'une simple pression du doigt aurait tué Warren tout à l'heure et ce, peu importe l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Sans Liana, elle aurait pu tirer... mais entre Uatis et aujourd'hui, elle avait aussi avancé et elle n'avait plus que sa vie à mettre en jeu et elle refusait de jouer les connes et risquer de mourir en laissant sa compagne et leur fille seules. Ce détail jouait dans la balance mentale de la lieutenante et c'est ce qui a sauvé Mélinda il y a quelques heures... La situation pourrait bien être étrange quand deux des Celkhanes manquantes vont arriver ici.

La situation restait toujours aussi tendue entre les esclavagistes, les esclaves, et les Celkhanes. Trois curieux camps, qui n’étaient guère homogènes. Les esclavagistes n’hésitaient pas à se tirer dessus, et il était certain que Jinx ne pardonnerait pas à Mélinda un coup pareil... Ceci n’avait aucune importance, ils se détestaient déjà. Jinx éduquait des femmes et des hommes pour devenir des majordomes, des serviteurs, des servantes, les envoyant travailler ensuite dans des ateliers, des restaurants, ou dans de grandes maisons privées. Rien de condamnable. Il ne battait jamais inutilement ses esclaves. Le destin de cette neko était d’être vendue à un ancien militaire mijakien, un vieux croulant qui, lors d’une bataille, avait subi une explosion trop près de lui, et était devenu à moitié sourd, avec des problèmes pulmonaires. Évidemment, entre servir un vieux croulant et une belle salope de vampire, le choix était vite fait. La neko hésitait entre les deux. Les Celkhanes ne la tentaient pas, car elle n’avait pas envie de finir soldate, et on lui avait que les esclaves étaient libérées par les Celkhanes pour travailler pour elles, les hommes étant abandonnés dans des bouges infâmes.

Mélinda, de son côté, restait surtout concentrée sur Léo. Il était curieux que Suki ne soit pas là... Sa belle petite blonde enflammée serait-elle morte ? La vampire n’osait le croire. Elle devait être plus loin... Et Mélinda avait senti Bran revenir. Bras croisés, elle savait que son grand-frère allait agir. Elle l’avait formé pour être un tueur impitoyable, et, contrairement à elle, il avait affiné ses capacités vampiriques, en faisant un ennemi redoutable. Les Celkhanes, elles, commettaient l’erreur classique des Uatéennes, de se reposer trop sur leur technologie. La Celkhane qui semblait être la chef de l’escouade regarda Mélinda, avant de lui répondre :

« Tu semble bien confiante, Warren mais méfies-toi de l'eau qui dort. Tôt ou tard, la roue pourrait bien s'inverser. »

Mélinda pencha la tête sur le côté, répondant rapidement, espiègle :

« Tu connais donc mon nom, Celkhane ? Serais-je une star chez vous ? Tu veux un autographe ? Je peux te le signer avec ton sang, si tu veux... J’ai de belles griffes pour ça... »

Ils étaient dans la cathédrale, et personne ne songeait à regarder les poutres au plafond, où une ombre se mouvait silencieusement. Son grand-frère savait être discret, et était toujours là pour protéger sa petite sœur adorée. Mélinda voulait juste occuper l’attention des Celkhanes... N’avait-elle pas un talent inné pour ça, après tout ? Elle remuait ses doigts, griffes tendues, tandis que la neko l’avait finalement rejoint, toute rouge, n’osant pas regarder Jinx. Le choix final de la neko avait été Liana, qui la faisait signe de venir, les deux nekos restant derrière leur Maîtresse.

« Rassure-toi, Jinx, je te dédommagerai pour ça...
- Tu as intérêt ! »

Elle sourit, et regarda ensuite la Celkhane.

« Ceci dit, tu as raison sur un point, ma chérie. La roue pourrait bien s’inverser... »

Bran agit avec une rapidité surnaturelle. Il bondit depuis la poutre, décrivant une belle chute libre, et s’écrasa sur l’armure d’une Celkhane, la renversant sur le sol. Depuis cette armure, il bondit en hauteur, faisant un salto pour se rétablir, et courut rapidement vers la Celkhane qui parlait à Mélinda. Sa main droite saisit cette dernière à la gorge, la souleva, et il tournoya sur lui-même, ayant rapidement ses griffes caressant son cou, tandis que sa main gauche attrapa l’arme de la femme, et la balança au loin, sa force vampirique la prenant par surprise.

« Si tu t’étais suffisamment renseignée sur moi, Celkhane, tu saurais que mon frère n’est jamais bien loin de moi... »

Même pour Bran, il aurait été impensable de neutraliser toutes les Celkhanes, mais il en tenait une en otage.

« Voilà qui me plaît, sourit Jinx.
- Déposez vos armes, mes chéries, et discutons comme des personnes raisonnables et civilisées... Ou mon frère n’aura aucun scrupule à égorger votre supérieure. »

Contrairement à Suki, Bran avait rapidement pu regagner la cathédrale, se déplaçant très rapidement, grâce à ses capacités de vampire.

Suki

Maintenant qu'elle était de nouveau sur pied avec Wolf, elle tentait de regagner la cathédrale aussi rapidement que possible sans trop se presser non plus. Elle était encore bien fatiguée de toutes ses conneries et même si, sans le savoir, le sang de vampire de Bran lui avait soigné ses blessures, en rien il ne l'avait aidé à éliminer sa fatigue. Du coup, elle trottina avec sa partenaire avec un mauvais sentiment. Il s'est barré une nouvelle fois mais leurs adversaires communs étaient mort, il l'avait tiré d'une mort certaine et avait aidé à éliminer les monstres et abaisser le monolithe. Non, Suki ne défendrait nullement ce chien de vampire mais elle n'était pas une salope au point de lui tirer une balle entre les deux yeux après tout ça. Il était le chien-chien et frère de Mélinda, pas un connard d'esclavagiste. Dans sa course, elle observait les alentours ai cas où des monstres seraient toujours présents ici et pas forcément des Necromorphes. Certaines créatures étaient d'apparence humaine. Les couloirs étaient remplis de cadavre et de sang mais plus rien ne bougeait, pas même un soupir qui signalait la survie de quelqu'un. Pourtant, il y avait bien un survivant non loin de là, plutôt une survivante. Suki et Wolf prenaient quand même le temps de vérifier ce qui se cachait dans les chambres? Au cas où quelqu'un aurait trouvé une bonne cachette et en voyant une nouvelle chambre vide mais sans trace de sang, Suki fut surpris par la bosse dans sous une couette. D'un signe de la main, elle fit signe à sa camarade d'approcher? Un survivant ou bien une autre surprise? Retirant le drap brusquement, Wolf prête à tirer, les deux Celkhanes furent surprises de trouver une petite kitsune recroquevillé, tremblante de peur avec ses deux mains sur la tête.

« Une enfant? »

Oui, une enfant, elle avait quoi? Entre huit et dix ans? À peine plus âgée qu'Holy et la petite avait un collier métallique autour du cou et aucun vêtement? Intentionnel, attouchement, elle n'en savait rien mais si dans les ventes d'esclaves, il y avait une chose qu'elle ne supportait pas, c'était de s'en prendre à des gosses, garçon ou fille! Suki tendit sa main et rassura un peu la petite renarde, essayant d'avoir quelques informations sur la petite. Apparemment, sa maîtresse avait quitté la chambre en lui disant de se cacher. Abandon ou attaque désespéré, elle n'en savait rien mais l'un comme l'autre c'était stupide, on ne laisse pas une enfant seule alors que des monstres rodent! Elle porta la gamine sur son dos, ça faisait toujours une survivante en plus à ramener! Bien sûr le rythme des pas était plus lent à présent mais Suki, Wolf et la renarde se rapprochaient doucement de la cathédrale. La petite Celkhane blonde avait bien sur ordonné à la petite de fermer les yeux pour ne pas voir ses cadavres dans le couloir. Mais alors que tout semblait doucement rentrer dans l'ordre, il y avait une couille dans le fromage à cause d'un message télépathique. Mélinda Warren faisait des siennes et la situation pourrait bien tourner au vinaigre...

Léo

La situation était grave mais Léo avait pris le temps d'avertir celles qui étaient encore dans le fort de la situation afin de retourner la situation. Léo était prise à la gorge par le nouveau vampire alors que Shark était à terre, ayant beaucoup de mal à se remettre debout. Ce n'est pas tout les jours qu'un homme tombe du ciel pour l'immobiliser. Les autres n'avaient nul choix que de baisser leur arme. Une des leurs était déjà tombée en mission, peut-être deux? Autant ne pas alourdir le bilan. Panther n'avait pas le choix, Tiger était toujours assoupi à cause de sa blessure, il fallait donc compter sur Suki, Wolf, Spider et Snake.

« Tss, donner un doigt à un Mijakien et il vous prend un bras! »

Lâcha Panther, elle n'avait pas tort, pour une fois que Léo faisait preuve de diplomatie après avoir vaincu leur ennemi commun, proposer de prendre les esclaves sans maître ou qui désirait les quitter et laisser ses connards en paix, voilà que Mélinda Warren montrait les dents avec son chien de garde. Si le plan se serait déroulé comme prévu, il n'y aurait plus de cette vampire à l'heure qu'il est? Dommage pour le plan mais ça n'avait pas fonctionné.

« Sale garce! » Lâcha Léo toujours empoignée par Bran « Où est-ce que tu es civilisé dans tout ça? Et si tu me lâchais pour commencer, je risquerais de m'énerver très vite sinon! »

Ce n'était pas seulement pour son calme que Léo était la seconde chef de cette mission mais pour d'autres raisons. Mélinda ou même Bran serait surpris d'avoir provoqué un tel fauve... Oui, si Suki a eu le nom de code Scorpion pour un léger clin d'œil à sa taille, le nom de code Leo (Lion) de cette Celkhane n'était pas pour rien.

Suki

« La putain! »

Suki s'en voulait déjà de se montrer si grossière devant une enfant mais ses mots étaient plus forts que ses pensées;

« T'inquiète pas, si ça tourne mal, on a ce plan de côté puis il y a aussi les autres qui devraient nous aider. »
« Ouais mais... Tss, ce salo... elle perd rien pour attendre! Une balle entre les deux yeux que j'aurais dû lui coller tout à l'heure plutôt que savourer ma ''victoire''! »

Sans cette neko, elle n'aurait pas perdu sa journée et aurait tiré un trait sur ses cauchemars. Mais pas le choix, elle reprenait la route en installant de nouveau la petite sur son dos alors qu'elle restait assez muette mais pas fatiguée, quoi qu'un peu peureuse vu la situation où les deux femmes ne semblaient pas les plus souriantes et joyeuses du monde. Si tout se passe bien, ça sera comme une partie de... aucun jeu de carte ou autres ne lui venait en tête, Suki avait un plan A, puis B et ainsi de suite si chaque tour foire, elle en a toujours un en plus bien que pour certains, elle n'était pas la seule à abattre ses cartes. Les trois survivantes approchaient de la cathédrale, ni Spider, ni Snake n'était ici? Peut-être ailleurs? Déjà dedans? Wolf ouvra l'une des portes en grand, avançant avec son arme en direction de la foule, apparemment, quelques personnes attendaient d'un côté, les Celkhanes et les esclavagistes étaient au centre de tout ça. Leo avait surement eu le temps de bavarder avec Mélinda et Suki approcha avec la petite sur son dos, la faisant descendre pour que Panther la protège un peu, juste au cas où en la rejoignant. À peine elle croisa le regard de Mélinda que toute sa haine faisait de nouveau surface.

« J'aurais dû te tuer, grognasse! »

Jura-t-elle entre ses dents alors qu'elle s'approchait du groupe. Son arme en bandoulière mais tout de même prête à riposter. Suki n'avait pas le choix que d'attendre que Leo ou Mélinda lui raconte la suite, maintenant qu'elle était là, elle allait pouvoir changer la donne?

Mélinda aimait bien faire un retournement de situation, surtout si c’était pour arranger la situation, et la mettre à son avantage. La situation restait malgré tout tendue, mais Bran avait ses griffes le long de la gorge de la Celkhane. Un seul faux pas, et il la tuerait. Les autres Celkhanes le savaient, et les esclavagistes hésitaient entre l’irritation et la jalousie. L’irritation, parce qu’ils craignaient que la petite initiative de la gamine Warren ne provoque leur mort, et la jalousie, parce qu’elle détenait un atout majeur dans sa manche, elle, qui n’était qu’une vulgaire esclavagiste sexuelle. Mélinda Warren savait qu’elle n’avait pas une grande réputation auprès de ses confrères. Bien que ceci ne les empêchât nullement de vouloir l’engrosser, son succès agaçait. Initialement, Mélinda avait été nommée à la tête du harem Warren pour le faire couler, mais, contre toute attente, la fille honnie de Warren avait réussi à remettre le harem sur marche, et à s’affranchir peu à peu de la tutelle mijakienne, allant même jusqu’à concurrencer les autres esclavagistes mijakiens. Le commerce sexuel représentait une part importante de revenus, et la plupart des grands esclavagistes mijakiens, des espèces de domaines aussi influents que des duchés, avaient des déclinaisons dans l’esclavage sexuel. Leurs méthodes n’étaient cependant pas aussi raffinées que Mélinda, et leurs prostituées étaient souvent de tristes morceaux de chair défoncés aux drogues, ou tellement torturées qu’elles n’étaient que des coquilles vides. C’était avant tout cette faible concurrence qui avait progressivement amené les clients à se tourner vers le harem... Ça, ainsi que les faibles prix, à l’époque, afin de relancer le harem.

« Allons, allons, ma chère Celkhane, ce n’est pas la peine de t’énerver... Vous vouliez que nous négociions avec le couteau sous la gorge... Je n’ai fait qu’équilibrer les choses... Et, aussi forte que tu sois, tu n’es qu’une humaine. Mon grand-frère est un vampire endurci. »

Contrairement à Mélinda, Bran savait se battre. Elle avait veillé à ce qu’il soit quelqu’un sachant exploiter au mieux ses capacités, ce qui en faisait un vampire particulièrement redoutable, puissant, hargneux, et teigneux. Mélinda conservait les bras croisés, tout en sentant des groupes sanguins se rapprocher... Deux humaines, et une Terranide. Elle fut assez heureuse de voir sa belle Suki arriver, avec une Celkhane, et une petite crotte qui semblait paniquée derrière elle. Une kitsune, visiblement. Le regard de Suki se riva brusquement vers Mélinda, l’incendiant sur place, et elle se mit à la haranguer d’emblée :

« J'aurais dû te tuer, grognasse !
- Grognasse ?! » s’étonna l’intéressée.

C’était une manière très injuste de parler d’elle.

« Tu ne me sembles pas très bien placée pour dire ça, Suki... Je croyais que tu serais enjouée à l’idée de me revoir, après la nuit que nous avions passé ensemble à Uatis City... »

Et quelle nuit ! Mélinda avait capturé Suki après que cette dernière ait participé à une opération musclée visant à neutraliser un trafic esclavagiste illégal dans lequel Mélinda trempait. Elles avaient fait l’amour, et Suki s’était plus ou moins écroulée, sa fierté étant comme un barrage qui s’était progressivement brisé sous le sexe prenant de Mélinda. La vampire se mit à réfléchir, se mordillant les lèvres.

« Tu es toujours aussi mignonne, en tout cas... Aussi belle qu’ingrate, en fait, moi qui t’ait procuré tant de plaisirs... »

Les esclavagistes se regardaient entre eux, parlant à voix basse.

« Les rumeurs seraient vraies ?
- Cette salope se serait fait une Celkhane ? »

Deux, en réalité, mais elle se moquait de ces imbéciles. Elle regardait Suki en souriant, et poursuivit :

« Je te propose un marché, Suki... Je veux m’entretenir avec toi... Seule à seule, dans un endroit isolé de la cathédrale. En échange, mon grand-frère relâchera ta Celkhane. »

Qu’est-ce que Mélinda avait en tête ? Espérait-elle réussir à corrompre Suki ? Si tel était le cas, n’importe quel observateur averti aurait dit que ce n’était pas la peine, que c’était impossible... Suki semblait comme un buffle prêt à charger, ou comme un catcheur sur un ring n’attendant que le signal de l’arbitre pour mettre en bouillie son adversaire. Cependant, d’autres individus plus avertis auraient pu arguer qu’une colère aussi forte, une rage aussi intense, dissimulaient forcément quelque chose. Et Mélinda était bien placée pour le savoir. Suki abhorrait les esclavagistes, mais elle savait que Mélinda était plutôt soft dans ses manières, refusant de prostituer ses jeunes esclaves, ou de les torturer. En réalité, Mélinda devait sans doute penser que Suki la haïssait parce qu’elle l’aimait.

« Tu n’as pas d’autres options, ma belle... Du moins, sauf si tu veux déclencher un bain de sang. Je te promets de ne pas te faire de mal. Après tout, si je voulais te tuer, je l’aurais fait quand tu étais dans mon lit, non ? »

Si les collègues de Suki avaient encore des doutes, ces derniers devaient être éclaircis. Oui, Mélinda avait couché avec Suki, et, non seulement elle l’avait fait, mais elle l’avait épargné. Elle aurait pu la capturer, en faire une esclave sexuelle... On aurait payé cher pour coucher avec cette arrogante Celkhane, dans son armure de feu. On aurait adoré lui défoncer le cul, la faire couiner, la bourrer de drogues, en faire une nymphomane, briser son esprit... Elle aurait rapporté énormément d’argent à Mélinda, et, pourtant, cette dernière l’avait laissé filer. Elle pensait que Suki avait une question à lui poser, et que c’était peut-être pour ça que, en fin de compte, elle ne l’avait pas tué quand elle en avait eu l’occasion.

Cette histoire commençait à bien faire! La mission tourner au piège puis au piège général et quand ça commencer enfin à sembler être une fin plus normale, voilà que la situation n'est plus entre leurs mains. Certes il y a la fatigue mais elles ont les armes, de quoi faire trembler ses misérables! À moins de grands pouvoirs magiques ou d'ESPer, leur lance et leur épée étaient moins puissance que leur arme à feu. En quelques secondes, elles pouvaient raser cette bande de monstres révoltés. Mais qui était derrière cette soudaine révolte, ce retournement de situation? Mélinda bien sur et son tain de frère! Tss, elle qui se fichait bien de cet esclave et garde du corps à la fois. Pénétrant dans la cathédrale, elle relâcha la petite kitsune pour la guider vers Panther en espérant que cette dernière pourrait la retenir en cas de problème. Vu la situation... elle ne savait pas comment ça pouvait se terminer? Tout était possible, du meilleur comme du pire. Si Suki commença par un petit nom qui lui allait à merveille, elle enchaina avec une phrase qui en fit réagir plus d'un mais son simple regard suffisait à leur dire de se taire ou de préparer leur cercueil rapidement car Suki n'était pas connu pour être la plus calme des Celkhanes. La suite n'était pas pour lui plaire non plus puisqu'elle jetait de l'huile sur le feu. Plus elle en rajoutait, plus elle se disait qu'elle aurait dû lui coller une rafale de balles dans le crâne à cette salope de vampire! Et tant pis si la neko lui en aurait voulu ou si elle serait morte ou mortellement blessée! En fait non, elle n'était plus seule maintenant... mais ce n'est pas l'envie de la tuer qui manquait!

« Vos gueules! »

Hurla la Celkhane à ceux qui l'ouvraient pour rien dire. À ce train-là, elle risquait de faire un massacre avant même d'entendre ce que cette grognasse avait à lui dire. Ce que Mélinda avait à lui proposer était à double tranchant. Certes, Léo sera libre mais qui sait ce qui pourrait se passer ici ou avec Suki et Mélinda? Était-ce encore un piège? Pour le moment, elle ne pouvait pas risquer de laisser le leader mourir pour une broutille. Mais il y avait aussi tous ses esclaves venue d'elles-même dans le bon camp, elles ne pouvaient pas briser leur espoir... Puis il y avait cette gamine renarde... Qui sait ce qui pourrait lui arriver si la vampire venait à lui mettre la main dessus? Pas question qu'elle subisse pire que ce qu'elle avait vécu éventuellement? Suki observa ses camarades du coin de l'œil. Tss, elle avait raison, elle n'avait pas d'autres solutions...

« D'accord... »

Lâcha-t-elle un peu à contre cœur en se retournant vers ses camarades, hochant doucement de la tête. Juste au cas où, le message était lancé, maintenant, c'est vers l'inconnu qu'elle avance. Mais elle semble avoir la mémoire courte la vampire, si elle aurait voulu la tuer, elle aussi aurait pu la tuer. Elle devait la vie à sa neko, sans elle, Suki serait déjà libérer d'un bon poids et serait impatiente d'annoncer la bonne nouvelle à Kairi. Léo était donc relâché et elle se dirigea vers ses camarades pendant que Suki avançait avec la vampire, fusillant du regard ceux et celles qui se feraient des idées. Elle pouvait très bien tuer quiconque aurait quelque chose à lui soumettre. Si elle voulait l'attaquer par surprise, elle était mal partie, fatiguée, exténué, blessé – bien que ce soit plus que des traces de luette sur sa peau et de sang dans ses cheveux – Suki n'aurait pas beaucoup de chance de gagner mais elle avait encore des armes cachées sur elle.

« Je sais pas de quoi tu comptes parler mais t'as pas intérêt à me faire tourner autour du pot! Tu n'as pas intérêt à te foutre de moi non plus d'ailleurs, je suis déjà bien assez sur les nerfs pour supporter tes conneries... »

Oui, la petite Celkhane n'était pas une gentille poupée et ça se voyait. C'était aux risques et périls de Mélinda que la provoquer...

Beaucoup des esclavagistes proches de Mélinda savaient qu’il s’était passé quelque chose entre elle et une Celkhane. Au sein d’un harem presque exclusivement féminin, les secrets étaient difficiles à garder. On savait ainsi que Mélinda avait couché avec une Celkhane, un sujet amusant, toujours bon à raconter dans la catégorie des potins. Or, vu la manière dont Suki semblait fusiller du regard Mélinda, chacun comprit que la Celkhane concernée était cette petite blonde, qui aurait probablement abattu sur place quiconque se serait permise une réflexion osée. Mélinda, elle, trouvait que Suki était très belle quand elle se mettait en colère, même si elle était peu reconnaissante... Quand Mélinda lui avait labouré les fesses, la Celkhane avait été beaucoup plus coopérative. Elle craignait naturellement pour sa vie, car il était tout à fait probable que Suki lui tire dessus... Et les balles étaient aussi mortelles pour les vampires que pour les humains, si elles étaient suffisamment perforantes pour percer la peau des vampires. Suki réalisa toutefois qu’il était dans son intérêt d’accepter la proposition de Mélinda, même si elle se permit de lui signaler d’agir le plus vite possible, de manière à éviter une balle bien placée entre les deux yeux.

« J’aime aller droit au but, comme tu le sais. »

Elle sourit, et se retourna, faisant signe à Bran de relâcher la Celkhane qu’il tenait. Le vampire obéit sans hésitation, libérant de ses griffes le cou de la belle. Suki aurait alors pu la trahir, mais Mélinda savait qu’elle ne le ferait pas. Oh, elle savait qu’elle serait tentée, car elle tenait sa vengeance, mais la vampire savait aussi que l’humanité était gouvernée par la curiosité, et que Suki devait l’être à son égard. Elle voulait savoir quel était le contenu de cette proposition, et, probablement aussi savoir pourquoi Mélinda ne l’avait pas tué quand elle en avait eu l’occasion.

Mélinda s’écarta de la nef, et ouvrit une porte dans un coin, menant dans une sorte de petite chambre de prière. Elle alluma les candélabres sur un bureau, puis attendit que Suki arrive. Elle voulait qu’elles restent seules pour pouvoir mieux communiquer. Il n’y avait aucune chaise, car on priait à même le sol. La décoration se résumait à une table avec un exemplaire de la Bible Sainte dessus. Mélinda s’assit sur le rebord de la table, face à Suki, et passa une main dans ses cheveux, caressant ses mèches, en entremêlant une entre ses doigts.

« Votre mission était un foirage total, lâcha alors Mélinda, après un léger silence. Vous avez été manipulées par des individus qui voulaient se débarrasser des gens comme nous... Je suppose que tu trouves ça utile, de te débarrasser de salopes d’esclavagistes qui te baisent comme des Déesses, mais ceux qui nous auront remplacés n’auraient guère été mieux... »

Elle continuait à triturer ses cheveux tout en parlant, et s’humecta les lèvres.

« Vos commandos ne peuvent pas sauver tous les esclaves qui sont maltraités et opprimés par les autres... Oh, je ne dénigre pas votre idéalisme, bien qu’il soit un peu surfait... Mais il ne suffit pas de tirer sur tout ce qui bouge pour améliorer les choses. Supposons que tu me tues, par exemple, et je sais ô combien ça te tente... Que crois-tu qu’il se passerait ? Que mes centaines d’esclaves seraient tout d’un coup libres, et se partageraient ma fortune ? Certaines seraient profondément tristes de ma mort, et iraient même jusqu’à se suicider... Les survivantes seront offertes à de cruels démons qui les détruiront à la tâche, dans des mines sinistres, des forges infernales où les vapeurs finiront par brûler leurs peaux, leur formant d’énormes plaques sur le corps, tout en brûlant leurs nez. Tu vois où je veux en venir, ma belle ? L’Enfer est pavé de bonnes intentions... Pour schématiser, pour chaque esclavagiste que tu tues, pour chaque esclave que tu sauves, tu condamnes dix autres esclaves à une vie terrible. »

C’était un point de vue fiable, que les Celkhanes connaissaient, mais qu’elles rejetaient toujours, préférant ne pas voir les à-côtés sombres. Mélinda cessa de triturer ses cheveux, et soupira légèrement.

« Je suis sûre que tu t’es renseignée sur moi… Vu comment ma chevelure et mon visage angélique obsèdent tes pensées, tu dois tout savoir de moi... Que mon père m’a martyrisé, que j’étais sa petite pute... Et que j’ai pour réputation d’entretenir mes esclaves, ce qui les rend très productives... Mais il n’y a pas que ça. Je connais aussi des contacts, des exploitations agricoles tenues par des humains qui ne maltraitent pas leurs esclaves comme le font ces grandes exploitations agricoles mijakiennes où des milliers d’âmes sont broyées à la tâche. »

Mélinda pencha la tête sur le côté.

« En clair, ma petite et adorable Suki, je te propose mon aide... Je peux te fournir des informations sur des sales types que toi et tes copines sexy peuvent défourailler à loisir... Et je peux m’assurer que les esclaves que tes petites copines ne peuvent pas emmener se retrouvent dans une situation décente, soit entre mes délicieuses griffes que toutes adorent lécher, soit auprès d’individus de confiance. »

Elle lui fit alors un ravissant sourire, et conclut sa longue tirade :

« Je veux travailler avec toi, ma chérie. »

Suki n'aimait pas ça... cette situation, cette femme, elle avait l'impression d'entrée dans une cellule de prison et d'entendre la porte de la prison se fermer doucement derrière elle, grinçante. Un geste brusque ou trop rapide et ce sera le verrou qui se ferme pour de bon? Quoi qu'il en soit, elle n'avait pas le choix pour sauver Leo de ce putain de vampire, frère et garde du corps de Warren. Elle suivait Warren en retenant tant bien que mal ses pulsions de lui sauter dessus pour en finir une bonne fois pour toutes. Sans ce vampire auprès des autres, elle aurait pu s'en prendre à Mélinda sans risquer de mettre les autres en danger mais il y avait des esclaves innocentes là-bas et même des enfants, enfin une en ce qui la concerne. Elle ne pouvait pas risquer de la mettre en danger, même si cette vampire lui tapait sur le système. À peine seules dans une petite salle de prière, elle commença fort en la provoquant. Elle se retenait de lui cracher au visage pour ce qu'elle venait de lui dire. Croire qu'elle fantasmait sur elle, tss! Elle aurait aimé se corriger elle aussi quand elle a éprouvé de bonnes choses en étant prise par cette pute Ashardienne, elle aimait se dire que c'était Kairi qui l'excitait et rendait la chose agréable mais... elle n'était pas sotte à ce point.

Fidèle à sa réputation de chieuse, elle continua de lui parler de façon à faire croire que ce qu'elle faisait était le bien et que c'était les Celkhanes qui bossaient pour les démons. Quel ramassis de conneries. Il y avait peut-être du vrai dans ce qu'elle disait mais à l'entendre, les Celkhanes servaient à briser les chaines, ensuite, démerdez-vous! Pas du tout, elles les sauvaient, les rapatriant ailleurs, le plus souvent sur Caelestis pour leur offrir une nouvelle vie loin de ce genre de prison qu'ils osent nommer une vie normale. Elle n'avait pas tort non plus pour la suite. En secret Suki à chercher à se renseigner sur elle, non pas jusqu'à savoir son enfance, cela ne la regardait pas même si actuellement, elle apprenait des choses et ne pouvait pas être heureuse d'entendre ça. Elle se fichait de son enfance, ce n'était pas enfant qu'elle l'a traumatisé, c'est adulte. Suki s'était renseignée sur ses activités et un passé moins lointain, trouver une faille pour y glisser une bombe et écrouler la tour qu'était sa vie. Elle rêvait faire tomber son empire comme un château de cartes et la tuer que quand elle serra plus bas que terre. Bien sur, pour son harem, elle ne souhaita pas de mauvaises choses pour ses esclaves, les aider et leur faire comprendre que Mélinda était le mal. Certaines devaient être amoureuses ou idolâtrer Mélinda Warren, c'était banal chez certaines esclaves mais Suki savait qu'avec le temps et un bon traitement, elles rebondissaient.

Ce qu'elle proposa à Suki fut comme un coup de fouet. On croit rêver! Jamais l'Enfer et le Paradis ne se sont serré la main pour faire copain-copain, jamais les Uatéens et l’Astéroïde se sont tranquillement entrevus autour d'un thé, jamais les esclavagistes et les Celkhanes n'ont fait ça aussi! C'était une provocation pure et simple! Décroisant les bras en quittant son mur, elle fusillait Mélinda du regard pour lui hurler dessus.

« Tu te fous de ma gueule! Après tout ce que tu m'as fait subir, tu crois que je vais effacer tout ça d'un claquement de doigt et te dire oui! J'irais t'arracher la langue en passant mon bras par ton vagin avant de te donner ma réponse Mélinda! Si tu aurais voulu m'enculer et me foutre la rage en proposant un tel truc, t'aurais mieux fait de demander ça à une autre qui se trouve ici qui aurait accepté car pour moi, tu ne fait que te foutre de ma gueule! »

Déjà elle devait supporter la vampire sans pouvoir se défouler sur elle, ensuite elle lui disait ça normalement, entre quatre yeux. Elle se prenait pour qui celle-là! Qu'elle allait tout oublier et courir dans un champ de fleurs en lui tenant la main avec comme musique de fond, Lemon tree? C'était du foutage de gueules totales! Néanmoins, une question de base se posait, qu'est-ce que qui était le mieux? Ne pas sauver au plus vite des esclaves ou en sauver d'autres esclaves? Ce qui la foutait en rage, c'est que cette connasse risquait de se faire de l'argent dans leur dos. En gros elles éliminent ses concurrents, elles leur donnent des esclaves fraichement libérer pour avoir un nouveau collier autour du cou et une nouvelle cage? Elle est pas belle la salade pour Mélinda! Quel toupet, quelle grognasse, quelle connasse tout court! Vu la haine dans les yeux de Suki, il sera difficile de lui faire entendre raison ou la convaincre. Entre elle et Mélinda, ça sera comme le feu et l'eau, des éternels rivaux.

« Sans cette neko, c'est dans un couloir avec le crâne perforé de balles que tu serais à l'heure qu'il est! Et tu viens ensuite me cracher à la gueule en me parlant de ça, de ce genre de connerie! Tu n'as vraiment aucune morale... Tu veux me faire croire que tu est une gentille Asharnadienne qui n'est pas comme les autres et pourtant... tu me dégouttes autant que les autres! »

Elle voulait bien reconnaître sans l'avouer qu'elle était plus sexy et agréable à regarder que ses gros porcs chauve et suant, qu'elle était peut-être moins tortionnaire que les autres Mijakiens... ça elle n'en avait pas la preuve après tout.... mais de là à lui dire merci, hors de question! Pas avec tous ses cauchemars dus à elle!

Cette Suki était vraiment très impulsive... La manière dont elle s’énervait était exquise. La rougeur de ses joues, le feu qui brûlait dans ses yeux, étaient autant de choses qui ne contribuaient qu’à une seule chose : l’embellir davantage. En faire une esclave serait vraiment terrible... Mélinda l’imaginait très bien en contremaître, à caresser tendrement les esclaves, et à boxer les clients qui se rapprocheraient des esclaves, et seraient trop entreprenants à leur égard. Le destin, malheureusement, en avait décidé autrement. Si Suki avait fait des recherches sur elle, Mélinda aussi s’était livrée à quelques aventures. Contrairement à la majorité des Celkhanes, Suki était née sur Caelestis. Mélinda avait été surprise. Vu le tempérament de feu et emporté de Suki, elle avait cru que cette dernière devait avoir un compte personnel à régler avec les esclavagistes. Au lieu de ça, elle était une bonne petite fanatique, formatée par les idéaux celkhans absolus et creux, ceux qui affirmaient que l’esclavage était le mal absolu, alors même que leur doctrine n’était qu’une répétition à l’envers de ce que les esclavagistes faisaient. Une sorte de reprise moderne du mythe d’Uroboros : le serpent mordant sa propre queue.

Mélinda s’attendait un peu à ce que Suki pète un plomb en entendant sa proposition. Pour être honnête, Mélinda aurait tout à fait pu s’adresser à d’autres Celkhanes, mais elle savait que le passif entre Suki et Mélinda souderait toutes les autres Celkhanes. Si Mélinda n’arrivait pas à la convaincre, alors il serait inutile de convaincre les autres. Suki n’accepterait pas un tel verdict, et elle avait sur les autres membres de l’escouade une sorte d’autorité morale qui faisait que ces dernières auraient naturellement tendance à se retrancher derrière son avis.

« Sans cette neko, c'est dans un couloir avec le crâne perforé de balles que tu serais à l'heure qu'il est! Et tu viens ensuite me cracher à la gueule en me parlant de ça, de ce genre de connerie! Tu n'as vraiment aucune morale... Tu veux me faire croire que tu est une gentille Asharnadienne qui n'est pas comme les autres et pourtant... tu me dégouttes autant que les autres ! »

Une petite moue éclaira les lèvres de Mélinda, légèrement triste. Elle avait les bras croisés, et laissa encore s’écouler quelques secondes, le temps que Suki se calme suffisamment pour que Mélinda puisse parler. Elle s’éclaircit la gorge, et reprit lentement :

« Ce que je t’ai fait subir ? reprit-elle doucement, en détachant chaque syllabe. Et qu’est-ce que je t’ai fait subir, exactement, hum ? Tu es en vie, en un seul morceau... Si j’étais ce...Cette espèce de monstre que tu sembles croire, non seulement je t’aurais donné sans vergogne à mes esclaves masculins, qui t’auraient violé comme la pire des putes au quart d’heure, mais je t’aurais également amené avec moi... J’aurais brisé ton esprit avec la même efficacité que le font mes rivaux... Sexe intensif, permanent, continuel, accompagné de drogues et de stimulants pour empêcher les femmes de dormir, jusqu’à ce que leur esprit décoche, et que le sexe soit la seule chose qui les motive... Des femmes qui, au bout de quelques mois, sont tellement défoncés et ailleurs qu’elles finissent par, dans un ultime élan de lucidité, par se suicider. »

Mélinda parlait en connaissance de cause. Elle savait comment ça marchait, et ne se leurrait pas la face. Elle connaissait les rendements, les manuels de formation. Là où elle voyait l’esclavage comme une sorte de formation spéciale, la plupart de ses rivaux voyaient ça comme une destruction de l’esprit humain. À l’aide de drogues, d’instruments de torture, de séances de viols constantes, le sujet avait progressivement l’esprit brisé, complètement disloqué, et ne devenait plus qu’une sorte de robot qui se fanait au bout de quelques mois.

« C’est toi qui m’as attaqué, Suki, toi qui m’as poursuivi, m’as tiré dessus, as torturé mon frère à mort... Tu me trouves cruelle ? Ma chère Suki, mais tu es TOUT, sauf une victime ! Tu es une tueuse de sang-froid, une meurtrière impitoyable qui n’hésite pas à massacrer des vies entières pour servir tes idéaux ! Agir pour le Bien ne rend pas tes actes moins cruels, Suki, ça te permet juste d’avoir bonne conscience... Allons, tu tues des gens depuis des années, et tu veux me faire croire qu’un simple petit rapport sexuel avec moi t’a traumatisé ? Tu peux mentir aux autres, Suki, tu peux même mentir à toi-même, mais, toi et moi, nous savons très bien que tu as adoré coucher avec moi. N’oublie pas que je suis une vampire, et que je peux sentir ce genre de choses... »

Elle appuya sur cette dernière phrase en titillant son nez, et s’avança un peu vers Suki.

« La réalité, Suki, c’est que tu as grandi en étant persuadée que les esclavagistes étaient tous des monstres cruels et sang pitié. On t’a éduqué avec ce dogme, cette croyance inébranlable qu’aucun esclavagiste ne pouvait être autre chose qu’un monstre bon à tuer. Toute ta vie s’est axée autour de ce postulat associant l’esclavage au mal suprême... Alors, dans ta logique, quand je t’ai capturé, j’aurais du te tuer, ou essayer de te transformer en esclave... Mais sûrement pas te libérer sans aucune contrepartie réelle. La vérité, Suki, c’est que je t’ai permis de voir que le monde n’est pas fait de lignes droites et parallèles, mais de courbes qui s’entrecroisent, et se mélangent... En somme, à travers mon exemple, tu as pu voir que ce que tu détestais avait des bons côtés, et que tu pouvais, engeance suprême, éprouver du plaisir en couchant avec une esclavagiste. »

Pour Mélinda, c’était limpide... Une sorte de syndrome de Stockholm, pour reprendre un schéma terrien. Mélinda avait ébranlé les plus intimes convictions de Suki, et cette dernière se refusait à l’admettre. Tout ça lui semblait tellement évident.

« C’est toi que tu détestes, Suki... Toi, parce que tu ne te reconnais plus... Parce que, pendant une nuit, tu as éprouvé du plaisir à te faire prendre par une esclavagiste, à jouir contre elle... C’est une réaction normale que de refuser de l’admettre. Ta haine envers moi est tournée envers toi. Tu as cru depuis ta plus tendre enfance que les gens comme moi sont tous des monstres, et tu as effectivement vu des monstres, des salopards... Jusqu’à voir quelqu’un qui ne t’a pas détruit, alors qu’elle en avait les moyens. Tant que tu ne l’admettras pas, ma chérie, tu ne pourras jamais passer outre. »

Mélinda décida de conclure, ayant ses bras croisés, près du mur :

« Je n’irais pas jusqu’à dire que tu m’aimes, non... Et je ne t’aime pas non plus, car tu es un peu coincée selon mes propres critères, mais... Hum... Je pense que ce qui te trotte dans la tête, c’est de savoir pourquoi je ne t’ai pas emmené avec moi... Pourquoi je ne vous ai pas prises, toi et Kairi, pour faire de vous mes belles petites esclaves, qui continueraient à me lécher les pieds dans vos belles armures moulantes... »

Si son acte n'était pas du foutage de gueule, alors toutes les lois de ce monde sont inversés. Et pourtant, cette grognasse ne disait pas que des conneries. Elle aimerait dire que c'est des conneries qui sortent de sa bouche mais tout n'était pas faux. Malheureusement. Mais pour donner déjà un point de mensonge à cette vampire, si elle aurait vraiment été capturé par Mélinda, la seconde où elle n'aurait eu un collier autour du cou et aucun moyen de fuir, elle se serrait mordu la langue jusqu'à se la couper. À cette époque, elle n'aurait rien eu à perdre, elle était seule et à part l'armée et ses parents, elle n'avait rien. Plutôt mourir que servir à un esclavagiste, elle passe sa vie à les combattre, en aucun cas les servir ne serait-ce qu'une seconde. Et elle paierait cher pour retourner dans le passé dans la boîte de nuit pour coller une balle à Mélinda à la seconde où elle l'aurait vue. Certes, Suki était la première à avoir été agressive mais c'était Mélinda qui avait résisté, si elle se serait laissé faire, il n'y aurait rien eut de tout cela. Des gens voyaient les Celkhanes comme de simples tueuses d'esclavagistes qui ne leur laissaient aucune chance. C'est faux. Si un esclavagiste n'a jamais vendu quelqu'un ou torturé une personne pour la transformer en esclaves, il peut s'en tirer. Ce qui veut dire que seuls les débutants dans ce « métier » peuvent s'en tirer mais cela prouve qu'elles ne tuent pas tout le monde.

De plus, elle n'était pas idiote, elle savait que les esclavagistes étaient tous différents même si la grosse majorité des cas sont des pourritures de première. C'est comme partout, même dans ses rangs, il y a des bonnes et des mauvaises soldates. De là à avoir aimé sa nuit avec elle et l'avoir vu sous un autre angle? Hors de question! Des bons côtés chez elle? Cette bonne blague! Sans être mauvaise langue et sans vraiment la connaître, elle pourrait dire qu'elle a beaucoup d'esclave en vie que morte mais parfois la mort n'est-elle pas préférable à l'esclavage? Elle tient un Harem, mais que se cache-t-il derrière ce Harem? Tout n'est pas que petite tenue et rose bonbon, il devait y avoir des cadavres dans les placards. Mais c'est vrai, elle aurait préféré mourir que vivre avec cette saleté en elle. Être salie pour avoir aimé ça, salie pour avoir dû supporter chaque nuit avec ses cauchemars. Quelle putain! Plus d'une fois son arme a failli lui aérer le crâne, tout ça par sa faute... Aujourd'hui, elle serait surement incapable d'agir de la sorte... Elle avait Rinako, dans quelque temps, il y aura Holy, leur nouvelle maison, tout semblait se dessiner parfaitement dans sa vie alors en finir maintenant, ça serait refuser d'être heureuse... bien que le bonheur avait parfois un prix assez lourd pour devoir vivre avec certaines choses...

Elle était bien bonne celle-là, elle devait admettre que Mélinda n'était pas un monstre pour mieux se sentir? Oui et les démons sont de gentilles personnes rouges qui ne rêvent que d'aider leur prochain et à Uatis, ce sont tous des ploucs qui ne connaissent pas le mot « technologie ». Elle la prenait vraiment pour une conne! Elle se détestait à avoir, l'espace de quelques heures, aimer leur rapport, c'est vrai mais elle l'avait fait pour Kairi. Dorénavant, il n'y avait personne ici à part elles. En dehors, il y avait des esclaves, des esclavagistes et des Celkhanes, tout pourrait finir en bain de sang si Mélinda la tue, en revanche, dans le cas contraire... quoi que son frère sera dur à neutraliser... Contrairement aux autres. Mais trop c'est trop! Face à cette provocation, Suki ne tenait plus et venait de gifler la vampire. Un coup de poing aurait été plus logique venant d'elle mais parfois, le corps agissait plus rapidement que le cerveau.

« Tu vas la fermer un peu ouais! Je reconnais que certaines choses que ta dit sont vrai... et je ferrais tous pour retourner dans le passé et changer ça... Mais de là à dire que je t'apprécie, ta tout faux! Je te le redis, si ta neko n'aurait pas été là, ce n'est pas ta petite garde du corps en armure qui aurait changé quelque chose à ta mort! T'aurais peut-être même plus de tête à l'heure qu'il est! Ce qui me trotte dans la tête, c'est cette putain de formule pour faire demi-tour dans le temps et cette preuve de lâcheté que j'ai eue à pas te faire sauter la cervelle avant l'arrivée de ta neko! Sans te donner l'occasion de dire ton dernier mot, j'aurais tiré un trait sur toi et j'aurais pu tourner la page... »

Qui sait aussi comment elle serait ainsi que tout les autres? Elle ne préférait pas y penser. Suki avait cette envie de réécrire le passé, chose impossible mais quel rêve était facilement réalisable? Sans cette erreur dans son passé, elle serait une autre femme, elle ne serait peut-être pas sur cette mission et vivrait vraiment le bonheur avec sa petite famille bien que pour le moment, sa famille n'était pas complète. Elle ne lâchait pas la vampire des yeux, tel un fauve face à sa proie, les poings serrés. Si elle ne serait pas à cours de jus, elle l'aurait bien fait griller la suceuse de sang.

« Oui, j'aurais préféré crever que faire ce que j'ai fait, oui tu est différente de certains esclavagistes que j'ai pu croiser dans ma carrière... »

Notamment cet enculé qui avait sodomisé Holy avec comme excuse qui l'avait laissé vierge. Une enfant traumatisée à vie, acte de pédophilie et il croit s'en tirer avec cette excuse? Se tuer juste après ça aurait pu être un acte aussi lâche que sensé.

« Mais de là à fermer les yeux et dire que c'est rien, ta vraiment tout faux ma pauvre vieille... »

Depuis le début, Mélinda Warren avait réponse à tout mais Suki se demandait jusqu'où s'arrêtait son « savoir »?

« Mais de là à fermer les yeux et dire que c'est rien, ta vraiment tout faux ma pauvre vieille... »

Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais. Voilà comment Mélinda résumait les propos de Suki. La Celkhane était tellement engluée dans les préceptes celkhans qu’elle ne se rendait pas compte de la cruauté dont elle faisait preuve, et, surtout, de la profonde hypocrisie qui se dégageait de ses paroles. « Dire que c’est rien »... Que voulait-elle dire par là ? Comment interpréter rationnellement une telle assertion ? Était-elle en train de dire que le simple fait, pour Mélinda, de soumettre d’autres personnes, justifiait la potence ? Si tel était le cas, alors il fallait aussi détruire les États, et abolir toute loi, toute forme de norme, car, par excellence, par nature, une norme était contraignante.

« Hum... Donc, si je suis ton raisonnement, je suis un monstre parce que j’asservis des gens... Et toi, qui éprouves des remords à l’idée de m’avoir épargné, tu éprouves des remords... Donc, et si je continue à te suivre, tu voudrais m’abattre devant les yeux de Liana ? Je l’ai eu comme fille, tu sais... Elle me considère comme sa mère. Ce que tu as en tête, Suki, est bien plus monstrueux que ce que je fais, ou que je songe. De quel droit te permets-tu de me juger ? Te crois-tu donc aussi pure et innocente que ça pour déterminer ce qui est bon, de ce qui est mal ? Qui a autorisé une bande de jeunes filles surarmées à jouer les justicières ? Au nom de quoi vous estimez-vous être en mesure de juger des comportements que vous ne comprenez pas ? »

Mélinda décroisa les bras, et pencha la tête sur le côté, puis lui sourit, à nouveau, révélant ses belles dents pointues.

« Mais ce n’est même plus de ça dont il s’agit. Tu as le droit de te mentir à toi-même, Suki, c’est une chose que les humains aiment faire. Tu as le droit de croire que je suis le Diable incarné. Tout ce que j’en déduis, c’est que ton immaturité et ta lâcheté t’ont conduit à refuser ma proposition, et, ce faisant, à condamner d’autres esclaves à souffrir inutilement. »

Mélinda n’avait plus envie de discuter, et se retourna, avant de se diriger vers la porte de sortie. Elle estimait inutile de discuter avec Suki, qui ressemblait à ce que toutes les Celkhanes étaient : des fanatiques. Des menteuses et des hypocrites, qui n’hésitaient pas à commettre les pires exactions possibles, dès lors qu’elles étaient justifiées par le fait qu’elles attaquaient des esclavagistes. Certes, Mélinda estimait que certains esclavagiste méritaient effectivement la mort, mais beaucoup n’étaient que de simples commerçants. Il existait également quantité d’esclavagistes particuliers, ceux qui, pour permettre à une famille de survivre, acceptaient de conclure avec eux des contrats d’esclavages, aux termes desquels une personne acceptait naturellement de se soumettre au commerçant, et d’être traitée comme un esclave.

La vampire se dirigea donc vers la sortie, et posa sa main sur la poignée de la porte, prête à la pousser. Elle tourna alors sa tête vers la Celkhane, réfléchissant brièvement, et finit tout de même par sortir quelques mots supplémentaires :

« Si je t’ai épargné, Suki, c’est parce que tu étais une bonne amante, et que tu m’as fait jouir... Mais peut-être bien que c’était une erreur. Tu aimerais sans doute te dire que ta haine à mon égard est réciproque, que je te déteste, et que je te crains, mais, pour moi, tu n’es rien de plus qu’une gamine qui s’accroche à ses convictions, même quand elles sont en totale contradiction avec ce qui se passe. Je n’ai pas peur de toi. Tu me fais pitié, voilà tout. »

Il y a tant de choses que Suki détestait en ce bas monde et parlementer avec Mélinda semblait être une des choses qu'elle déteste. Deux opposés qui s'affrontaient constamment, faisaient des chocs entre eux, tentaient une approche pour finalement se repousser encore plus. Suki observa Mélinda avec ses yeux, elle lui semblait de plus en plus détestable. Elle était une belle femme, c'est vrai mais son statut faisait qu'aux yeux de la Celkhane, Mélinda était tel un zombie qui perdait sa chair pour ne laisser qu'un squelette sanguinolent. Voilà ce qu'elle était elle et tout les esclavagistes en ce monde. Une bande de démons. Tout le monde trouve à y redire aux principes des Celkhanes. Ça fait partie de leurs traditions, leurs histoires, c'est ainsi, c'est la vie, c'est la loi du plus fort. Mais tels deux ennemis jurés, pour les Celkhanes aussi, cela faisait partie de la vie. Avant même que des femmes d’Uatis proposent leur technologie à Caelestis, ce peuple avait une vision pur, idéal, un vrai coin de paradis mais en voyant ce que leurs voisins sous l'archipel fabriquait, c'était inacceptable pour Caelestis qui se jura de tenter de libérer les esclaves, faire changer tout ça. Les Celkhanes n'ont pas toujours été une troupe de femmes armée, prête à tuer des esclavagistes, dans un premier temps, elles ont cherché à résoudre cela par la parole. Uatis, Lumen, Mijak, simple vendeur, politicien, noble, elles ont tenté avec tant de gens et une énorme majorité leur riait au nez face à leur demande de cesser de soumettre les autres. Pour eux, avoir des esclaves étaient aussi normal qu'avoir une table pour manger, une assiette ou autres. Ils étaient tant habitués à cela qu'ils ne voyaient même plus le mal en leur geste, aussi simple que recueillir un chien errant dans la rue.

La vampire était en plus conne, jamais Suki n'avait dit vouloir la tuer devant cette neko mais qu'elle AURAIT du le faire avant son arrivée. Elle savait cette stupide chatte atteinte d'un syndrome de Stockholm plutôt gros. Elle disait peut-être vrai, elle la voyait comme sa mère ou autres mais avant de croire à ses paroles, elle devrait tout vérifier de A à Z. Mais passons, Suki n'était pas assez sans cœur pour détruire quelqu'un devant sa famille ou autres. Elle n'avait pas envie de tourner autour du pot pour rien. Elle en avait marre de se répéter. Ses actes étaient simplement une suite logique de quelqu'un de sensé. Faire travailler quelqu'un, soit. L'arracher de force à sa famille, lui donner à peine de quoi survivre et faire de lui un jouet, ce n'est pas être civilisé. Cependant ses derniers mots la faisaient réagir... Certes, cette grognasse se faisait du profil avec ce pseudo-marché mais... Quelle Celkhane irait proposé la mort ne serait-ce qu'à une esclave? Oui, Mélinda Warren était le diable incarné, il proposait quelque chose d'alléchant, de tentant mais devait-elle garder sa main le long du corps ou la tendre vers cette pomme? Mélinda l'avait épargné car elle était une bonne amante... de quoi se haïr soi-même. Elle n'avait pas besoin d'entendre ça, l'erreur, c'était de sa faute, elle aurait dû se laisser tomber de la fenêtre, mourir en mission et mettre un point final à sa carrière de Sergente mais elle avait voulu être épargnée, pour elle, pour Kairi. La faute, elle était sur elle, pas sur cette saloperie de suceuse de sang. Avant qu'elle ne quitte cette salle, elle eut un moment d'hésitation.

« Attend! »

Voilà qui lui laissait le choix de peser la balance. Va-t-elle l'envoyer chier une dernière fois et mettre un terme à cette blague en condamnant des esclaves, va-t-elle devenir la honte de Caelestis en faveur des esclaves? Cependant, il y avait une faille aux propos de Mélinda. Suki y repensait soudainement comme la faute qu'elle n'avait pas vue, juste sous son nez. Elle pourrait garder et prendre « soin » de celles que les Celkhanes ne peuvent emmener. Donc, tant qu'elle ne laisse aucune esclave sur le bord de la route, elle est gagnante dans cette affaire. Même privée de ça, elle pourrait se frotter les mains à voir des concurrents disparaitre, plus de bénéfice pour son harem, après, elle s'en fout de sa vie! Gardant sa colère et sa haine pour elle, elle continua de la regarder dans les yeux, prononçant une chose qui était cependant bien vraie.

« Le choix ne me revient pas. Je ne suis même pas le leader de cette mission... Et je dois m'entretenir avec mes supérieurs, ici comme sur Caelestis. »

Suki était la sergent du Commando mais il restait encore des Celkhanes au-dessus d'elle, tout comme il y avait le conseil des Cinq, celles qui sont maîtresses de Caelestis. Suki pourrait être celle qui propose le message mais ce ne sera pas elle qui en assumerait le poids sur ses épaules en cas de refus. Bien sur, tout comme elle, elles vont peser le pour et le contre. La sergente gardait les bras croisés en observant sa pire ennemie.

Pour Mélinda, les négociations étaient finies. Les choses allaient suivre leur cours. Elle se dirigeait vers la porte de sortie, et, alors qu’elle allait l’ouvrir, Suki, réellement, la surprit, en la retenant :

« Attends ! » lâcha-t-elle.

Mélinda figea sa main sur la porte, hésitant à la pousser. Que devait-elle faire ? Attendre ? Ou y aller ? Elle hésita, et, encore une fois, la curiosité fut la plus forte. Qu’est-ce que Suki pouvait bien encore lui vouloir ? Elle avait été claire, dans son refus de transiger avec Mélinda, dans ce refus net et catégorique de pactiser avec les esclavagistes. Mélinda l’imaginait mal présenter ses excuses, et la vampire n’avait pas envie de discuter en vain. Suki était aveugle contre elle-même, et elle refusait d’admettre ce qu’elle ressentait vraiment pour Mélinda. Pour la vampire, il était évident que la Celkhane voulait la tuer parce qu’elle ressentait pour Mélinda une attirance inavouable, que la vampire lui avait montré qu’on pouvait prendre son pied avec une esclavagiste, et qu’elle aurait pu, comme Kairi, finir par sombrer. Qu’elle manifeste une telle hostilité était le signe clair qu’elle se sentait coupable.

Au lieu de lui répondre, Suki préféra dévier, partir sur un autre sujet :

« Le choix ne me revient pas. Je ne suis même pas le leader de cette mission... Et je dois m'entretenir avec mes supérieurs, ici comme sur Caelestis. »

Mélinda pencha la tête sur le côté, une petite moue dubitative venant traverser ses lèvres. Elle était sceptique devant cette affirmation, et se rapprocha lentement de la femme. Ses griffes glissèrent le long du mur, raclant la paroi, avant qu’elle ne continue à se rapprocher.

« Allons, Suki, pas d’excuses entre nous... »

Elle envisagea presque de la caresser, avant de se retenir.

« Toi et moi, nous savons très bien pourquoi tu veux tant me tuer... »

Mélinda était curieuse de savoir si Suki rêvait d’elle. Certes, Suki avait été humiliée par elle. Certes, il y avait un fort ressentiment, mais il y avait aussi autre chose, un sentiment plus diffus, plus ténu.

« C’est une excuse, ça... Tu es Sergent, à ce que je sache... Et c’est avec toi que je veux faire affaire... Car tu es la seule Celkhane que je connaisse bien... Mis à part Kairi. Nous avons fait l’amour, après tout, ça permet de rapprocher. »

La vampire lui sourit gentiment, avant de tourner sur elle-même, faisant remuer sa belle robe. Elle marcha un peu, révélant ses hanches parfaites, sa silhouette de rêve.

« Je te propose un accord qui sera profitable à tout le monde. D’un côté, tes petites poupées en latex pourront récupérer certaines esclaves que vous pourrez endoctriner. De mieux, j’en récupère d’autres qui auront la chance de finir dans mon lit, et de goûter à ma divine queue, queue qui t’a fait joyeusement mouiller, si je me souviens bien. »

C’était une chose que Suki ne pouvait pas nier. Elle ne pouvait même pas invoquer l’usage d’une quelconque drogue aphrodisiaque, car la vampire ne l’avait pas drogué. Ça n’avait été que du plaisir partagé, entre femmes, rien de plus. Plus de frontières de races, d’États, d’appartenance sociale, rien d’autre que du sexe, dans sa version la plus simple et la plus pure.

« Le choix revient à toi, Suki... Mais je comprends qu’il te soit difficile de choisir. Tu me hais, je le sais très bien...Mais t’es-tu déjà interrogée sur les origines de cette haine ? Je sais que tu méprises tous les esclavagistes, comme toute bonne petite Celkhane, mais, moi, je suis sur un piédestal... Alors que, pourtant, comme tu le sais, je suis bien moins cruelle que d’autres de mes comparses. »

Encore une fois, Mélinda y revenait. Elle était le genre de femme arrogante qui aimait bien avoir raison, et, outre ça, provoquer Suki était toujours un petit régal. Elle était toujours jolie, quand elle s’énervait.

« Je suis sûre que tu fondrais sous mes lèvres si je t’embrassais... Peut-être que c’est pour ça que tu ne veux pas m’embrasser ? Tu as peut-être peur d’aimer ça, d’en mouiller ton armure... »

Est-ce qu'elle était sérieuse? Elle-même s'interrogeait sur ce qu'elle venait de dire. Pactiser avec l'ennemi, pire, sa pire ennemie. Qu'elles soient toutes les deux cibles d'une horde de monstres sanguinaires, elle aurait un peu mieux comprit cette trêve mais là, il n'y avait pas un couteau sous la gorge? Alors pourquoi? Mélinda avait peut-être usé d'une fourberie ou sans le savoir user d'un argument de poids. Condamner des esclaves comme chaque jour sur Terra. Les Celkanes ne pouvaient malheureusement pas être partout à la fois. En plus de noms et de cibles, elles pourront sauver là où la situation est la plus urgente, si ce sont des enfants esclaves, des esclaves plus que torturées, il faut bien reconnaître que ce ne serait pas un luxe de sauver en priorité celles qui ont vraiment besoin de l'arrivée des Celkhanes. Même si ça veut dire pactiser avec le diable, Suki est bien forcée de passer par-là si elle veut sauver plus de femmes esclaves sur ce monde de brutes. À moins que demain les Celkhanes aient un renfort inattendu et qu'elles peuvent couvrir plus de terrain, pour le moment il faut bien faire avec les moyens du bord. Cette pute de vampire prenait un malin plaisir à remuer le couteau dans le dos en lui rappelant qu'elles avaient fait l'amour, évoquant même Kairi. Une vraie pute! Kairi était dans cet état à cause d'elle et de son incompétence, inutile de jouer avec ses nerfs car c'est déjà un miracle que la sergente ne lui ai pas sauté au cou pour la mordre à mort comme une bête féroce.

Plus le temps passait plus elle rêvait de son corps criblé de balles en tous genres, morte comme elle devrait l'être depuis quelques heures maintenant. Sa colère n'était pas facile à cacher et cela se voyait comme le nez au milieu du visage. Elle proposait même de garder certaines esclaves, la putain avait lu à travers son plan... Ce n'était pas un plan bien travailler et bien ficelé vu sa fatigue le peu de temps devant elle, il était évident qu'elle n'allait pas dire oui et que Suki la piège en ramenant un véritable paquebot volant pour emporter tout le monde et ne pas laisser une miette à cette connasse. De plus elle insultait déjà ses pauvres femmes et encore une fois, elle aussi. Si seulement elle pouvait la fermer! Oui... elle avait effectivement aimé cela et malheureusement, elle n'avait pas l'excuse de la drogue pour se dire qu'elle n'était pas elle-même. Elle avait fait tomber le masque ce soir-là mais ce fut pour Kairi et pour sauver sa vie. Tss, si elle aurait franchi les portes de la mort, elle n'en serait pas là aujourd'hui. Sa mâchoire se faisait de plus en plus serrer, ses dents risqueraient à force de se fissurer tellement la pression était forte. Si elle se lâchait, pas seulement Mélinda mais tout le monde finirait bien par entendre les nombreuses insultes qu'elle aurait à lui cracher ainsi que ses quatre vérités. La voir lui tourner autour comme un prédateur... elle avait envie de piéger le sol et la faire exploser à son prochain pas devant elle, tiens... Moins cruelle que les autres, c'est ce qui se disait mais elle n'avait aucune vraie preuve que c'est le cas.

« C'est ce que tu dis... »

Lâcha-t-elle simplement en l'observant. En tout cas c'est vrai, elle était sur un piédestal, mieux perché pour qu'elle puisse mieux lui loger une balle dans le crâne avec un fusil sniper. Face à sa dernière provocation, elle lui prouvait qu'elle était toujours prête à la tuer, peu importe la situation.

« Fourre ta putain de langue dans ma bouche et je me ferais une joie de la couper avec mes dents. »

C'était dit de façon si glaciale, ça aurait surement refroidi les ardeurs de la vampire en chaleur. Cependant, comme elle commençait à reparler, elle ne se privait pas pour ajouter une ou deux conditions à son tour.

« Il est hors de question en tout cas que tu prennes des jeunes esclaves ou que tu sépares des mères et leur enfant. S'il le faut, je te fous une balle en pleine tête pour que tu l'imprimes bien dans ton cerveau. Ta peut-être eut une enfance difficile, ça, je ne fais que répéter ce que tu m'as vaguement dit, alors privent pas les gosses de leurs parents, de leur enfance. »

Qu'est-ce que ça avait d'excitant de violer des gosses, d'en faire des putains? Suki avait toujours le visage d'Holie quand elle l'avait trouvée, allongé sur le ventre, sur le bureau de ce pervers, ce n'était pas le visage d'une enfant souriante qu'elle avait sous les yeux, même pas le visage d'une enfant, c'était celui d'une innocence brisée à tout jamais. Alors qu'elle garde sa queue et celle de ses client/es au chaud car vivant, jamais une enfant foutra les pieds dans son harem.

« Maintenant, si ta rien à ajouter, on peut quitter cette pièce. »

Bien sur, il restait des détails à régler mais pour se faire, Suki devrait déjà montrer sa faiblesse à ses supérieures et assumer cette honte pour le bien de sauver certaines esclaves, pas toutes malheureusement...

La petite Suki était aussi froide qu’un iceberg, mais Mélinda ne doutait pas une seule seconde ses motivations. Elle pouvait le voir dans ses yeux : Suki voulait la tuer, la massacrer, et la décapiter pour exhiber son scalp au-dessus de sa cheminée. La vampire ne se faisait aucun doute sur ce point, mais ce n’était pas pour autant qu’elle allait paniquer. Suki ne serait pas la première personne au monde à désirer sa mort. Elle n’avait proposé de l’embrasser que pour la taquiner, parce qu’elle savait que c’était le genre de propositions qui la mettraient en pétard. Suki fulminait sur place, mais accepta malgré tout, sous conditions, la proposition de Mélinda. La vampire en fut ravier, mais ne sourit pas, car les conditions exposées par Suki la troublèrent... À travers ses demandes, elle percevait chez Suki une représentation de sa personne qui n’était pas conforme à la réalité. Elle ne dit rien sur le coup, car elle mémorisa cette assertion, son cerveau se mettant à nouveau à carburer à toute allure. Suki finit par la rappeler à la réalité :

« Maintenant, si t'as rien à ajouter, on peut quitter cette pièce. »

Bras croisés, la vampire releva alors la tête, une petite moue venant traverser son visage. Ce qu’elle avait « vaguement » dit... Était-il possible que Suki ignore donc tout de l’enfance de Mélinda ? Qu’elle ne sache pas qui elle était vraiment ? Que son enquête sur elle ait été aussi parcellaire ? La Celkhane était prête à sortir, prête à en terminer pour de bon avec la vampire, mais cette dernière n’avait pas encore tout à fait fini.

« Je n’ai pu dormir dans un vrai lit qu’à l’âge de dix-sept ans, lâcha-t-elle simplement. Tu ne sais donc rien de mon enfance, Suki ? Comment peux-tu prétendre me connaître, si tu ignores tout de moi ? »

C’était une question purement rhétorique. Mélinda s’avança un peu, décroisant les bras, et se mit à préciser un peu le contenu de sa pensée, à évoquer son passé :

« Mon grand-frère m’a violé à l’âge de cinq ans, en me sodomisant. Il le faisait sous le regard de mon père, qui riait de bon cœur, et me fouettait à chaque fois que je pleurais, ou que je le suppliais. Je n’avais pas le droit à une chambre pour dormir, rien de plus qu’une petite cellule plongée dans l’obscurité, avec un seau pour faire mes besoins, et aucun vêtement. Rares étaient les fois où on m’autorisait à prendre des douches, et c’était toujours dans de l’eau sale. Diable, ferait-on couler un bain pour la petite Mélinda ? Vois-tu, si mon père avait juste eu un peu d’amour pour moi, un tant soit peu d’affection, aussi faible qu’elle soit, il m’aurait tué... Mais il me haïssait, tout simplement. Il ne voulait pas que je meure, il voulait que je souffre. Je suis née en tuant ma mère, Suki. Un enfant non désiré, car mon père avait déjà un héritier, une naissance difficile, qui a emporté ma mère. Pour mon malheur, j’avais réussi à survivre, en emportant avec moi la beauté de ma mère. Je n’ai jamais connu le moindre câlin durant mon enfance, jamais la moindre caresse, le moindre sourire d’affection... J’étais le pire qui puisse être, un enfant qui avait commis un matricide. Je baignais dans le sang dès ma naissance. »

Elle planta son regard dans les yeux de Suki, silencieusement, ménageant une courte pause, avant de reprendre :

« Il y a des enfants dans mon harem, des enfants en bas-âge... Je crois que tu devrais aller faire un tour dedans, ma belle. Mon harem ne propose pas de pédophilie, contrairement à d’autres harems. Les enfants sont éduqués par les autres servantes, éventuellement par leurs parents s’ils en ont, afin de me servir, et d’être prêts, une fois que leur désir se sera éveillé, à honorer leurs obligations. »

Mélinda haussa ensuite les épaules.

« Tu t’obstines à voir en moi un monstre, Suki, mais, sur bien des côtés, je suis beaucoup plus magnanime que toi. J’accepte les hommes, et aucun de mes protégés n’est battu, ni entraîné à devenir une machine à tuer. Ceux qui me rejoignent ont peur seul but d’apprendre à manier le désir. Ce ne sont pas des hommes de mort, comme toi, mais des hommes d’amour, des femmes de beauté et de rêve, qui enchantent les nuits de leurs partenaires. Il n’y a rien de répréhensible là-dedans. »

Elle crut alors bon de conclure, et rajouta donc :

« J’ai été privée de mon enfance, j’ai été privée du réconfort d’une mère... Je suis la mère de substitution des orphelins qui viennent à moi, mais je trouve qu’il n’y a rien de plus beau que de voir une mère serrer son enfant dans ses bras pour lui donner le sein. N’es-tu pas d’accord ? Ou trouves-tu plus attirant de faire sauter la cervelle d’un esclavagiste en te reposant simplement sur tes convictions ? »

Mélinda venait l'empêcher de partir en ouvrant la bouche, commençant à déballer son passé devant la Celkhane. Cette dernière s'étonnait que son ennemie n'ait pas cherché à tout connaître de sa naissance à ce jour. Mais qu'elle se fiche de son passé? Certes, elle avait appris certaines choses, des choses que bons nombres de gens peuvent avoir accès avec plus ou moins de facilité mais Suki n'était pas de celles qui cherchaient dans toute la merde qu'elle a pu chier pour trouver son point faible. Mélinda Warren était un vampire mais elle restait simple à tuer. Ce n'était pas un démon à qui ont devrait d'abord couper un bras, lancer une invocation, puis de l'eau bénite et faire trente-six tâche avant de le voir enfin tomber pour de bon. Un bon chargeur vidé en pleine tête et ça serait étonnant de la voir se plaindre d'un mal de crâne horrible. La regardant sans la moindre honte, elle levait un peu sa tête à cause de sa taille en lui disant simplement la vérité.

« Je me fiche de ton passé de bébé ou de petite fille Mélinda. Ce n'est pas contre une gamine que j'ai envie de passer mes nerfs mais contre une vampire qui tient un harem. »

Oui, pourquoi ça l'intéresserait de savoir à quel âge elle a eu sa première dent de lait qui soit tombé? En quoi cela va l'aider à vouloir tuer l'objet de ses cauchemars? Au mieux, elle avait commencé à fouiller dans son passé quand elle a commencé à grimper les échelons de la société Mijakienne. Mais étant parti sur sa lancée, la vampire commença à lui raconter son enfance, dans les grosses lignes du moins. Ennemie ou non, c'est vrai que Suki ne souhaitait pas ça, même à cette conne de Mélinda. Violer un enfant est une des choses qu'elle déteste voir ou apprendre. Surtout maintenant, ce simple aveu lui remettait en mémoire la façon dont elle avait trouvé Holy et l'excuse minable de cet esclavagiste qu'elle avait défoncé le crâne. Le père de Mélinda n'était qu'un être abject et quand bien même la naissance d'un enfant emporte avec malheur la vie de celle qu'il a aimée, est-ce une raison de la détester? Mélinda n'était pas le diable après tout? Quoi que... Quand bien même ce serait le cas, elle n'a pas pris de couteau et ouvert les entrailles de son frère ou d'un autre par pur plaisir. Difficile à croire de la part de Suki mais elle imaginait Mélinda comme une petite fille heureuse si jamais sa mère aurait été de ce monde et qu'elle n'aurait pas vécu tout cela. Leur rencontre aurait même ne jamais avoir lieu mais ça, elle ne le saura jamais.

Leur regard se fixait, chacune semblait défier l'autre avec un simple regard, se faisant face comme lors d'un duel. Le premier coup pourrait bien être le dernier alors prudence.

« Sur ce point-là, je te rejoins en cette rare occasion. Je préfère de loin voir une famille heureuse que venir me faire chier à courir des putains de pédophiles et vendeur d'humains! Mais quand je pose les yeux ailleurs, que ce soit à Mijak, à Nexus et j'en passe, même s'il m'arrive de voir des familles heureuses, des mères qui serrent dans leurs bras leurs enfants, je vois aussi des enfants enchainés qui cherchent désespérément leur parent du regard et inversement, des parents paniqués qui savent ce qui risquent de leur arrivée mais qui s'inquiètent quand même pour leur enfant. Avant de me traiter de monstre, moi, ainsi que toutes les Celkhanes, pense à un truc Mélinda. Qui est le monstre? Celle qui voit tout ça mais reste bien confortablement dans son harem à songer à qui elle va acheter ou baiser ou bien celles qui se lèvent et viennent retirer toutes ses vies des mains de leur « propriétaire »? Oh oui, on est des monstres à les tuer et les maltraiter mais qui a commencé le premier? Je doute fort que des enfants aient réussi à foutre un collier autour du cou d'un adulte pour le rouler dans la boue et le violer. »

L'éternel débat entre une Celkhane pure souche et une Mijakienne qui défendait les traditions de son peuple et du bien fait de l'esclavage. Elle va encore sortir que c'est la loi du plus fort, c'est la vie, dans son harem, c'est différent mais à écouter les esclavagistes, c'est toujours différent chez eux. Ils n'esclavagisent que les criminels, ils sont bien traités en réalité, ce n'est pas eux les propriétaires, ils ont tous une bonne excuse et rare sont ceux qui ont des couilles pour avouer leur crime.

« Crois-moi, j'en suis sincèrement désolé pour ton connard de père. C'est pas en me disant tout cela que je risque de retourner ma veste et faire comme si on ne s'était jamais rencontré. Mais comme je te l'ai dit, ton passé en tant que martyr ne m'intéresse pas. C'est ce que tu es devenue que je déteste! Et va pas croire que tu es une sainte sous prétexte que quelques gosses sont bien traitées et, ou avec leur parent dans ton harem que c'est fini. Tu finis quand même par les prostituer. Alors en allant dans ta logique, je vois mal quelle mère serait fière de voir sa fille écarter les jambes pour se faire prendre par un gros porc de noble Mijakien! »

Qu'on soit d'accord, même faire la pute pour une beauté en or, ça serait mal vu. Suki était une mère aussi, enfin, légalement, bientôt et elle sait qu'elle ne pourra qu'être fière dans plusieurs années de la voie suivie par Holy mais vendre son corps fait partie des choses où elle sera obligée d'agir et dire stop. Il n'y a pas de honte à aimer cela mais de là à en faire un métier, ça non. Mais pour en revenir au passé de Mélinda, si les Celkhanes avaient été opérationnelles lors de sa naissance, si elles s'étaient déjà alliée à Uatis, obtenant armes et moyens de transport, auraient-elles pu sauver Mélinda? Malgré son apparence de jeune fille, Mélinda devait bien avoir des années derrière elle. C'était peut-être pour ça aussi qu'elle refusait d'abandonner face aux Celkhanes... Elle ignorait quelle âge elle avait vraiment mais les vampires étaient aussi connus pour leur longévité... Elle observa Mélinda en haussant un sourcil.

« Simple curiosité et soi franche, tu nous haïs, nous les Celkhanes car nous n'avons pas pu venir te sauver étant jeune? Si nous aurions pu intervenir à cette époque, tu penses que tu serais resté de quel côté? Vers celui de femmes qui auraient pu te trouver une véritable famille aimante et vivant en paix où bien tu aurais souhaité rester sur Terra et commencer une nouvelle vie à Uatis? »

Elle redoutait un oui mais à l'époque où Mélinda avait vécu cela, les Celkhanes étaient un peuple vivant sur l'archipel simplement, voulant déjà partager avec les autres leur paix et leur façon de vivre mais les Celkhanes de type soldates sont en réalité assez récente. Elles n'ont même pas un siècle à dire vrai. Si ça se trouve, si elles auraient pu agir à cette époque-là, Mélinda aurait pu être une Celkhane heureuse... et non celle qu'elle était aujourd'hui. Mélinda était libre de choisir sa réponse mais elles laissaient toujours le choix aux esclaves, Uatis ou Caelestis. Et pour les hommes, à part les petits garçons, ils pouvaient se débrouiller et selon la troupe, elles pouvaient les déposer ailleurs que les laisser au milieu des cadavres. Elle était quand même curieuse d'entendre le point de vue de Mélinda à ce sujet?

« Simple curiosité et sois franche, tu nous hais, nous les Celkhanes car nous n'avons pas pu venir te sauver étant jeune ? Si nous aurions pu intervenir à cette époque, tu penses que tu serais restée de quel côté ? Vers celui de femmes qui auraient pu te trouver une véritable famille aimante et vivant en paix où bien tu aurais souhaité rester sur Terra et commencer une nouvelle vie à Tékhos ? »

De quel côté... L’image fit sourire Mélinda, qui se mit alors à s’avancer, lentement. Visiblement, son histoire avait troublé Suki plus qu’elle n’osait se l’avouer. La vampire le comprenait, et elle n’avait rien à cacher. Son histoire était authentique, et s’éloignait des circuits manichéens que Suki connaissait : le riche esclavagiste, le bourgeois descendant d’une famille de bourgeois, et qui ne s’était jamais posée de questions sur ce qu’il faisait. Mélinda avait eu un parcours différent : née esclave, elle était finalement devenue ce qui, alors qu’elle était humaine, lui avait semblé être le pire des cauchemars, et la plus horrible des situations. Comment expliquer un tel retournement de situation ? Comment le justifier ? La Celkhane peinait à dissimuler son trouble, ce que sa question exposait. Elle faisait donc sourire Mélinda, qui se mit à marcher autour de Suki.

« Ton compliment implicite me va droit au cœur, Suki, mais sache que, à cette époque, ton bel archipel n’existait pas. J’ai plusieurs siècles d’existence. Je suis née peu de temps après la Guerre Civile de mijak, si tu veux tout savoir... Quelques mois après que l’Empereur Fou ait été banni. Ton État est beaucoup plus récent. »

Caelestis avait été fondée à la suite d’un désaccord entre des Uatéenes au sujet de la politique de neutralité prônée par Uatis. Des Celkhanes renégates avaient décidé de fonder Caelestis, un archipel volant composé de six îles, et qui, en volant dans le ciel, échappait à la loi uatéene, et à sa politique de neutralité. Quand Caelestis avait été fondée, Mélinda était déjà une esclavagiste depuis longtemps établie.

Tout en continuant à marcher, Mélinda aventura brièvement un doigt en se tenant dans le dos de Suki, caressant le pourtour de son armure, à hauteur de l’épaule.

« Et puis, les armures comme ça, même si c’est affreusement sexy, ce n’est pas pour moi. Je ne vous hais point, Suki. Si c’était le cas, je ne t’aurais jamais laissé repartir, et je t’aurais emmené, toi et Kairi, dans le plus infâme des bouges terrans qui existent. Tu ne le comprends donc pas ? »

Mélinda avait joint ses mains dans son dos, un sourire angélique sur les lèvres.

« Tu me prêtes des sentiments qui n’existent que dans ta tête, des inventions de ton esprit pour justifier la haine irrationnelle que tu me portes. Ce n’est pas de la haine que je ressens à votre égard, Suki. Au mieux, vous m’exaspérez par votre philosophie simpliste et biscornue... Au pire, vous m’effrayez par cette même philosophie absolutiste, qui vous permet de justifier toutes les exactions possibles, dès lors qu’elles sont commises au nom d’un intérêt supérieur. Vous me faites penser à l’Inquisition, prête à commettre les pires actes au monde, au nom de Dieu... Et j’ai tendance à avoir peur de ceux et celles qui veulent me détruire. »

La vampire décroisa les bras, et s’écarta un peu. Elle venait tout de même de faire une assez grosse révélation, en avouant que Suki l’effrayait... Mais, en un sens, c’était humain... Bien qu’elle ne soit pas humaine. Suki voulait la tuer, et avait les moyens de le faire.

« Que crois-tu donc, Suki, hein ? Que j’ai vraiment eu le choix ? Je n’étais pas censée finir comme je le suis... La vengeance envers mon père, c’est tout ce qu’on m’a donné. On m’a transformé en vampire pour m’insérer dans un échiquier politique, afin de supprimer l’un des derniers soutiens du Roi Fou. J’ai été désignée pour tuer mon père, et on m’a donné son harem, dans l’espoir que je me coulerais, et que ce bâtiment serait repris par les rivaux de mon père. J’avais une sainte horreur de l’esclavage quand j’ai repris ce harem. J’étais comme toi, Suki. Je voulais libérer toutes les esclaves martyrisées par la démence de mon père, dont l’esprit avait été corrompu par la folie du Roi Cramoisi. Et tu sais pourquoi j’ai décidé de reprendre son activité ? Pourquoi j’ai décidé, contre toute attente, de reprendre le flambeau ? »

C’était une question rhétorique. On pouvait sentir le ton de Mélinda s’accélérer, au fur et à mesure qu’elle parlait. Elle ne tarda pas à répondre à sa propre question, car Suki n’aurait jamais pu y répondre toute seule, et aucune de ces suppositions n’aurait été la bonne. L’avarice de Mélinda, son goût pour l’argent, sa luxure... Tout avait une raison fondamentale.

« J’étais seule... Rien de plus qu’une enfant qui avait peur du noir. J’avais passé ma vie dans une petite cellule noire avec un seau en bois pour seul meuble. Je ne voulais plus de ces haillons, je ne voulais plus de ces cellules grises... Je voulais pouvoir goûter à la joie d’un vrai lit, d’un vrai repas, à des caresses, des câlins... Mais ne vas pas croire que tout cela n’était qu’égoïsme de ma part. J’aurais pu les libérer, et, même avec ma peur d’être seule, je l’aurais fait... Mais le sort qui attendait ces pauvres hères n’était pas celui de la félicité promise. Si mon harem avait coulé, si j’avais décidé de ne pas devenir une esclavagiste, tous ces gens, ces misérables et ces esclaves, ces gens qui m’avaient soutenu alors que je croupissais dans ma cage... Ils auraient fini entre les mains de bourreaux, ils auraient été torturés par des esclavagistes cruels, ou envoyés dans des camps de travail, condamnés à travailler comme des forçats. Alors, je les ai protégés... Je leur ai offert une vie de rêve, j’ai partagé ma fortune. Les cellules ont été transformées en magnifiques chambres, avec des dorures, des broderies, je les ai parés de beaux atouts. C’est elles qui ne voulaient pas être libres, Suki. C’est elles qui m’ont demandé de les protéger. »

Mélinda s’était retournée, en la dévisageant, sans aucune réelle lueur d’agressivité dans le regard.

« Et c’est ce que je continue à faire avec leurs descendances... Quand bien même vous auriez été là à cette époque, je n’aurais jamais laissé ces femmes entre vos mains. Qu’auriez-vous fait de leurs frères ? De leurs enfants ? Vous les auriez séparés ? Envoyés où ? Dans des endroits qu’elles ne connaissent pas ? Dans les usines de Uatis, où elles auraient respirés du soufre à longueur de journée en s’asphyxiant les poumons ? Ne me fais pas rire avec ton prétendu paradis, Suki. La terre promise n’existe pas. Caelestis est incapable de se projeter autrement que dans le conflit et dans le rapport de force. Ce n’est pas étonnant, si la plupart des esclaves que vous libérez deviennent elles-mêmes des tueuses, traquant les démons que nous sommes. Je ne vous aime pas, car votre idéologie encourage la haine et la mort, et toute idéologie qui encourage la haine de l’autre est à chier, peu importe les justifications qu’elle y trouve. »

Cette fois, la vampire avait beaucoup parlé, et se racla lentement la gorge, avant de secouer la tête.

« Et je les condamne à se prostituer, c’est un fait... Mais je pense qu’elles préfèrent ça à l’idée de devenir des tueuses comme toi. Et puis, les rares qui sont définitivement hostiles à cette idée trouvent toujours des occupations secondaires. Je suis bien connue pour abandonner très difficilement mes protégés. Je leur offre un avenir sûr, stable, radieux, et la protection de pouvoir vivre paisiblement. Tout ce qu’elles ont à faire, en contrepartie, c’est coucher avec des hommes et des femmes. Ce n’est pas ce qu’il y a de mieux, mais chacun y trouve son plaisir. Si tu penses qu’elles sont si mal traitées que ça, Suki, tu n’as qu’à venir dans mon harem. C’est avec plaisir que j’y accepterais ta belle petite bouille. »

Était-ce une nouvelle provocation ? Ou quelque chose d’autre ? Mélinda avait passé de longues minutes à se confier, à expliquer ses choix, et à les justifier. Pour elle, tout lui semblait être logique.

« Aucun regret pour le baiser ? » conclut-elle alors.

Suki venait de lui poser cette question sans trop d'arrière-pensée? Une simple curiosité après en avoir appris un peu plus sur l'enfance de sa pire ennemie. Mais en revanche, où l'avait-elle complimenté? Même indirectement? Elle se faisait des idées celle-là encore! Où était ce fichu compliment? Dans son crâne de tarée encore? Sous prétexte qu'elle lui pose une question où elle ne menace pas de la tuer, elle la complimente? Et puis quoi encore?! Ce n'est pas fini de se droguer?! Une chose est sûre en tout cas, elle n'aimait pas la voir tourner dans son dos de la sorte. Elle restait beaucoup trop sur ses gardes avec Mélinda pour croire que ce n'était qu'une simple discussion. Elle se méfiait, de peur qu'elle tente un truc louche. Elle serrait ses poings quand elle passa les mains dans son dos mais elle l'avait à l'œil, il lui restait suffisamment de magie à présent pour éviter une mort directe si elle l'attaque, elle aura de quoi se défendre sur le coup mais ensuite? Car entendre de la bouche de cette dirigeante de harem qu'elle ne la haïe pas, elle sa pire ennemie? C'était une insulte pour Suki qui ne se privait pas pour lui rappeler à la moindre occasion qu'elle ne l'aimait pas mais alors, pas le moins du monde! Au moins, même si elle se moquait d'elles – les Celkhanes – en prétextant qu'elles l'exaspérait, elle en était aussi effrayé... Mouais, elle se rattrape un peu mais ce n'est pas ça qui rattrape son autre insulte.

« Ne nous compare pas à eux. »

Elle sortait cela comme une langue de serpent. Ces idiots ne sont que des idiots avec leurs idées. Caelestis est bien différent mais comme partout, Mélinda ne garde que les grosses lignes et les idées reçurent. Des femmes qui veulent libérer les esclaves en ne gardant avec elles que les femmes, se fichant des hommes. La vampire continua de lui parler de ce qu'elle aurait aimé faire de ce harem, de la façon dont elle voyait Caelestis et du reste. Toujours les mêmes rengaines. Les gens – plutôt les esclavagistes – les craignent sans même les connaître, quelle idée! Elle conclut sur deux choses qu'elle refusait, la première étant de mettre les pieds dans ce harem, si elle fait cela, ce ne sera que pour libérer ses pauvres filles, la seconde étant de fantasmer sur elle. Une véritable trainée celle-là!

« Arrête de fantasmer sur moi! » la mit-elle en garde face à ce comportement. Elles étaient véritablement opposées, Suki était sérieuse dans tout ce qu'elle faisait alors que Mélinda donnait l'impression d'être trop sûre d'elle et parfois enfantine. « Tu es comme les autres, tu sais de nous que les rumeurs qui circulent sur nous. Tu serais surement surprise de savoir qu'il y a des hommes sur Caelestis? Nous les haïssons mais qui somme-nous pour interdire un petit garçon de suivre sa mère? »

Oui bon, c'est vrai qu'ils étaient élevés comme des futas, plutôt des shemale mais ça ne change pas grand-chose, peu de personnes voyaient la différence. Ce n'est pas elle qui fixe les règles après tout. Puis avec l'âge, ils subissent de quoi devenir une femme, véritable, sous l'apparence du moins – au moins de quoi éviter d'avoir une trop forte pilosité déjà. Le reste était en option.

« Comme tout le monde, tu répètes ce que tu entends mais tu ne sais rien... Si demain tu entends que les Celkhanes ont des ailes d'Anges, tu vas les croire? Toutes les femmes sauvées ne sont pas destinées à devenir militaire. Certaines cherchent à se venger et obtienne une formation militaire, soit, mais d'autres cherchent à éviter tout cela en trouvant un travail normal, à vouloir élever sa famille. Crois-tu que nous somme là que pour distribuer des armes comme des bonbons à des enfants? Tu ne sais rien, Mélinda Warren. »

Sur la fin, son regard méprisait la vampire. Ça parle beaucoup mais ça parle surtout pour ne rien dire. Il y avait du vrai dans tout cela, certes mais aussi du faux. Quoi qu'il en soit, maintenant que les choses semblaient finies avec ce... marché, elle avait du mal à l'accepter quand même. Elles pouvaient retourner voir les autres, pour les Celkhanes, tenter de retrouver les restes de Bear et une éventuelle trace de Crow? Elles n'avaient aucune nouvelle d'elle après tout. Mais avant de se diriger vers la porte, il y avait une chose qu'elle devait confier à son adversaire car elle était quand même dans le lot, deux ennemies avec un ennemi commun apparemment.

« Concernant cette soirée, sache que nous ne sommes pas à l'origine de ces monstres. Notre but était de libérer des monstres que les gardes auraient pu repousser en usant leur tête. Nous avions pour but de libérer des monstres classiques mais quelqu'un a apparemment changé les codes ce qui a libérer aussi les monstres et le monolithe par la même occasion. Quelqu'un a essayé de nous faire porter le chapeau en tuant de nombreux esclaves mais comme tu as pu le voir et le vivre, tu étais sur la liste de celles qui devaient mourir par « notre » faute. La coupable est morte malheureusement mais elle ne devait pas être seule à tirer les ficelles. Une marionnette voulant jouer avec des marionnettes, trop de fils pour que cela tienne sans que des nœuds se forment selon moi. Reste à savoir qui a eu idée de ce spectacle macabre? »

Vu le nombre d'innocents qui sont mort, Suki ne comptait pas les laisser rire dans l'ombre et comptait bien les tuer à la moindre occasion, tant qu'elle a les preuves. Des innocents morts, une voire deux Celkhanes tombées au combat, ça faisait beaucoup. Oui, elle se fichait des esclavagistes.

« Ton frère devrait pouvoir prouver ce que j'avance, il était là à combattre les monstres quand on a tenté de reboucher le trou avec le monolithe. Si tu parvenais à trouver des informations sur eux, je serais curieuse de les entendre... »

Maintenant, si elles sont d'accord, elles peuvent retourner retrouver les autres...

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