The Multiversity

[Rini Koken]

Si Rini avait été une racaille et son père un flic, elle n'aurait pas fait long feu ! Nagazo n'était pas du genre à lâcher sa proie. Avec lui, pas de garde à vue, mais une singulière et inoubliable correction pour les vilains ! La lycéenne avait menti en jouant les cachotières. Elle en payait le prix avec le supplice des chatouilles.

- Arrête ! Ah ha ha ha ha ! Arrête ! J-je-je.... je n'ai pas eu le temps d'aller aux toileeeeeeeettaaaaaaaaaaaaahahahahaha !!!

Encore un mensonge. Malheureusement pour elle, son père n'était pas dupe. Il poursuivit donc son œuvre en la faisant tournoyer dans les airs, ses gros bras musclés l'empêchant de finir emplâtrée dans le décor. La posture ramassée de la SpiderWitch passa donc inaperçue. Autant que sa question, étouffée par les crise de rire d'une étudiante en pleurs. Pourtant, Nagazo s'eut arrêté net à sa seconde demande.
Celle-là, le bourreau d'enfant l'avait bien entendue.

- Une tradition ? Ha ha ! Drôle de choix de mot. Mais ma foi, pourquoi pas ?

Rini, qui reprenait son souffle, fut surprise de voir le visage de Morgane en gros plan.

- Vas-y, tu verras : elle sera pliée de rire en un instant~

- H-hein ? Attends... quoi ? Non... non, non, non ! Pas là ! Ah ha ha hi hi hi ! Aaaaaaaaah ha ha ha ha !

Quand l'affaire finit enfin par se tasser, Morgane et Rini faisaient face au fier paternel. Tous trois étaient assis dans le salon. Nagazo paraissait tout content d'avoir "joué" avec sa fille alors qu'elle, toujours hors d'haleine, tenait à peine sur ses genoux, sa tête oscillant de gauche à droite. Sous ses vêtements trempés, la sueur avait pris le dessus, colonisant l'entièreté de son corps de jeune femme imberbe.

- Je... je vais faire un petit tour dans la salle de bain, soupira-t-elle, exsangue.

Son père eut un sourire en coin. Il allait ainsi pouvoir s'entretenir seul avec la dénommée Morgane Sparks ! Comme si tel était son plan depuis le début de leur rencontre.

- Va donc. Mais ne traîne pas trop, Rini.

Il ne le pensait pas. Elle aurait grand besoin de se laver après avoir subi la terrible "offensive des ouistitis". Morgane avait été efficace, en ciblant les zones clés. Un bon point pour elle. Une fois son amie et bienfaitrice retirée, l'intéressée prit d'ailleurs la parole.
Dès la première phrase, il l'interrompit pour exiger d'elle :

- Appelle-moi Nagazo. Ou monsieur Koken si tu trouves ça trop familier.

Il n'aimait pas les formules de respect trop pompeuses. En plus, "monsieur le géniteur de Rini" lui apparaissait bizarre. Comme s'il communiquait avec une extraterrestre ! Idée qui lui semblait toute à fait grotesque, ha !
...Ha.
La SpiderWitch reprit de plus belle. Enchaînant les phrases bien dites. Avec toujours autant de belles formules que de paroles à la limite de l'étrange.
Sa fille leur avait déniché quelqu'un de spécial. Quelqu'un... d'intéressant.
Nagazo n'avait rien contre les cas à part. Dans sa jeunesse, il ne s'en était jamais pris à moins fort que lui. Il n'avait jamais fait une tête au carré aux intellectuels. En revanche, il avait envoyé plus d'un trou du cul qui se la racontait à l'hôpital. Parfois même directement sur le billard ! Les sanglantes guerre de territoire étant monnaie courante à cette époque. Il s'estimait heureux de n'avoir fait aucun mort. Du moins, de ce qu'il en savait... ou ce qu'il avait préféré ne pas savoir.

- Hum... c'est bien beau, tout ça, mais je ne me souviens pas t'avoir déjà donné mon accord quant à cet hébergement.

Il se gratta distraitement la tête. Un peu à la manière d'un primate. Ce dont il avait l'air, assis comme il était - une jambe à plat sur le côté et l'autre plié sur le devant.

- Tu sais, Morgane... j'suis pas un beau parleur non plus. J'utilise des mots simples. Je ne me casse pas trop la tête. Je me montre tel que je suis. Et si ça plait pas, tant pis !

Il haussa les épaules.

- Bref ! Tout ça pour te dire que je ne trouve pas ton attitude très... comment dire... naturelle ? Par exemple !

Il la pointa du doigt d'un seul coup. Pour la surprendre. La faire au moins sursauter.

- Quand je te regarde là, je sais que tu te tiens sur tes gardes. Comme si tu craignais que j'allais te bouffer... te manger, pardon !

Il eut un geste d'excuse avec la main. Un mouvement interprété de plus à ajouter au panel de la SpiderWitch ?
Un petit silence plus tard, le mécanicien reprit :

- Tu ne m'as pas l'air d'être une mauvaise fille. En fait, j'ai même l'impression que Rini est prête à se mouiller pour toi.

Et puis soudain, il pouffa de rire !
C'était bien ce qui lui était arrivé, à sa gamine, en subissant cette averse de chatouilles.
Conscient de son égarement, il toussa dans son poing.

- Aheum... pardon ! Je disais donc. Vous avez l'air de très bien vous entendre, toutes les deux. C'est une bonne chose. Mais je ne tiens pas à ce que ma fille aie des ennuis à cause d'un tier. Cela m'ennuierait beaucoup. En plus de perturber le bon fonctionnement de l'entreprise familiale...

Dieu qu'il détestait parler comme ça ! Il se sentait comme un vieux schnock. Un de ces râleurs chauves qui se masturbent sur leur voiture de luxe quand les gens ont le dos tourné. Nagazo dut se débarrasser de cette image horrible qu'il avait dans la tête en se la frappant par derrière.

- Putain !...

- Il y a un souci ?

Attirée par le bruit, Rini était revenue, habillée de son peignoir, ses cheveux bruns encore mouillés.

- Tu n'as pas fait semblant.

La lycéenne fronça les sourcils.

- J'ai été trop lente ?

- Je pensais l'inverse...

Rini soupira avant de venir s'installer à leur table basse.

- Morgane n'est pas la seule à avoir des problèmes de communication, si tu veux mon avis.

- C'est comme ça que tu parles à ton père ?

Ils s'échangèrent un regard féroce.

- Après avoir été torturée par ses mains, oui.

Il y eut un pesant silence...
Puis les deux pouffèrent de rire !

- Ah, Rini ! Ne change jamais, d'accord ?

- Seulement si tu me promets d'arrêter de me chatouiller. A mon âge, ça devient gênant.

Elle eut un regard pour Morgane.

- Surtout en présence d'une amie...

Nagazo réitéra son geste qui consiste à se frotter l'arrière du crâne. Rini rougit en détournant les yeux.
Son père jugea préférable d'en revenir aux affaires du jour :

- Ton amie s'est proposée de venir bosser au garage pour payer sa part. Le soir après les cours.

D'un air entendu, il regarda Morgane.

- Je n'aurai certainement pas le temps de bien la former. Tu penses pouvoir lui apprendre les ficelles du métier ?

- J'espère que tu plaisantes ?

- Hein ?

Face à son expression sérieuse, il avait l'air franchement abasourdi.
Rini lui décocha un sourire où suintait l'esprit de revanche avant de croiser les bras sur son peignoir.

- Tu pensais que j'allais te répondre par la négative ? Bien sûr que j'en suis.

- Petite impertinente... tu as voulu te jouer de ton respectable père encore une fois, avoue !

- Ce n'est pas coutume, répondit Rini en haussant les épaules et en fermant humblement les yeux. Les chatouilles sont encore toutes récentes. Et je n'arrive pas à les laisser passer.

Elle ouvrit un œil pour toiser Morgane.

- Cela vaut aussi pour toi...

Nagazo jubila en se frappant la cuisse.

- Ma parole ! Quand tu prends cet air là, je crois toujours me voir étant plus jeune. Tu ne peux pas savoir à quel point ton papa est fier~

Tout en mimant les guilis avec ses doigts pliés, il regarda Morgane du coin de l'œil.

- J'ai presque envie de remettre ça, dites donc...

- Si tu recommences, cette fois-ci, famille ou pas, je te frappe, grogna la lycéenne en se poussant de la table sur plus d'un mètre.

Derrière son air grognon, elle avait affreusement honte.
Avec Morgane, elle avait obtenu ce qu'elles voulaient tout en essuyant elle-même une sacrée défaite auprès de son paternel... qui avait collaboré avec la SpiderWitch.
Quelle journée de fous !

[SpiderWitch]

« Entendu, monsieur Koken. »

La nouvelle Morgane « Sparks » était encore en train de réfléchir au sens de la phrase du géniteur de Rini. Avait-il peur de se retrouver en tête-à-tête ? La possibilité inverse était pourtant pourvue de sens. A savoir qu’il voulait pouvoir communiquer avec elle et elle seulement. Pourquoi ? Des sujets devaient-ils être cachés à Rini ? Mieux valait cesser de spéculer et écouter attentivement.

Elle ne cillait que le strict minimum. Ce qui ne devait pas aider monsieur Koken à trouver les mots pour sortir ce qu’il avait de la tête. Morgane écoutait et notait qu’il n’avait rien d’un leader. Il avait été d’une démonstration bien plus convaincante quand il « affrontait » Rini. Là, en face-à-face pour parler, il semblait déposséder de ses outils.

Et elle ne réagit pas au doigt tendu. Probablement parce qu’elle ne « ressentit » par une menace dans le geste. Elle continua donc à écouter attentivement en conservant toujours le silence. Son temps de paroles n’était pas encore venu.

Ce qui suivit piocha à la fois dans le bon sens et l’incompréhensible. A nouveau, il semblait appartenir à la caste des guerriers. Même si elle n’en laissait rien paraitre, elle était effectivement prête à réagir à toute menace. Il le sentait et la SpiderWitch apprécia cette connaissance. Mais ce rire soudain ? Le fait qu’il trouvait qu’il s’entendait bien avec Rini ? Elle ne comprenait pas. S’il y avait un jeu de mots, même en y repensant, l’explication ne lui venait pas. Quant à savoir si elle aimait Rini ? Un concours de circonstances qui semblait porter l’empreinte des Araignées Supérieures, voilà tout.

Et Rini revint. Morgane « Sparks » comprit alors que monsieur Koken avait effectivement voulu un temps seul à seul avec elle. Rini avait été trop rapide. Une seule œillade avait suffit pour découvrir le peignoir et une hygiène incomplète. La quantité d’eau dans les cheveux lui donna l’impression qu’elle avait fait vite pour les rejoindre. Rini avait-elle eu peur qu’elle dise des « étrangetés déplacées » ? Hmm… Probablement. De toute façon, Morgane « Sparks » n’avait pas encore eut le temps de parler.

Le temps de parole pour elle n’était pas encore venu. Aucune importance. La patience était son fort. Elle ne bougea même pas. Ne rectifia aucunement sa position. Elle pouvait tenir plusieurs heures ainsi. Apprendre à faire la morte faisait partie des compétences qu’on lui avait enseigné. Et elle découvrit que Rini la considérait effectivement comme une amie. Vérité ou stratégie ? La SpiderWitch ne savait situer.

Ca continuait. Encore et encore. Etrangement, Morgane n’avait pas imaginé Rini si bavarde. Toute cette situation familiale la dépassait. Le jeu des relations avait une complexité nouvelle. La SpiderWitch n’était pas étrangère à tout cela. Seulement, tout semblait plus subtile sur cette planète. Rini lui en voulait-elle vraiment ? Allaient-ils tous les trois recommencer à « se battre » ? Rini semblait le penser au vue de son bond.

Enfin il sembla que c’était à son tour de s’exprimer.

Elle commença à lever les bras en l’air en signe de « paix ».

« S’il vous plaît. Je ne pense pas que recommencer cette bataille soit pertinente. Je pense que nous devrions remettre cela à demain si vous le désirez tous les deux. En attendant, il me semble qu’éviter à Rini un deuxième séjour dans la salle de bains serait pertinent. »

Il fallait consolider le socle de base. Morgane Sparks s’était faite adoptée. Elle avait un toit au-dessus de sa tête. La priorité prochaine était de rentrer en possession d’un lit. Ce qui permettrait également de s’éloigner de la figure paternelle. Il semblait évident à la SpiderWitch qu’elle avait « séduite » monsieur Koken. Non dans un sens coïtal, bien entendu. Il semblait tout aussi évident qu’il fallait passer du temps seule à seule avec Rini.

« Sauf incompréhension de ma part, il me semble que mon être a été accepté sous ce toit. J’aimerai donc savoir où me ressourcer durant la nuit à venir. »

Autrement dit, elle feignait la fatigue et voulait savoir où se trouvait son lit. Tout comme elle était capable de rester immobile des heures durant, elle était capable d’enchaîner quelques nuits blanches. Mais la stratégie dans ce monde indiquait l’inverse. Dormir à une heure fixe pour rentrer dans le moule. Et c’est ce qu’elle cherchait à faire.

« Si je dois également passer par la salle de bain pour me dévêtir des vêtements de RIni, j’accepterais bien entendu cette condition. Je souhaite avant tout agir dans les traditions de cette famille et ne pas bouleverser vos habitudes. Je m’y plierais. »

De mots comme de corps. Car elle se courba à nouveau par politesse.

[Rini Koken]

De façon tout à fait polie et sensée, la SpiderWitch avait épargné à Rini un nouvel aller-retour dans la salle de bain. Elle ne participerait pas au jeu puéril du paternel de sa collaboratrice. Cette dernière se détendit sensiblement.

- Pas demain non plus, lâcha-t-elle, se voulant intraitable à ce sujet. Plus jamais ou je fais un malheur.

Nagazo Koken la regardait presque avec des étoiles dans les yeux.

- Cette force de caractère me rappelle aussi ta mère.

Rini comprenait très bien qu'elle puisse lui manquer mais là...
Croisant les bras sur sa poitrine, elle ferma les yeux et soupira :

- Je préfère ce comparatif à celui d'un ancien voyou.

Cela embarrassa un peu son père, qui s'était remis à se frotter l'arrière du crâne en ayant la bouche de travers.
Morgane Sparks choisit ce moment pour en revenir aux fondamentaux. Elle s'interrogeait notamment sur la pièce où elle passerait la nuit.
Question logique à laquelle Rini répondit juste après qu'elle leur eût exposé son intention de quitter ses vêtements d'emprunt.

- Pendant que tu te donneras un coup...

Elle dut s'interrompre, s'imaginant avec un brin de retard que la SpiderWitch comprendrait la chose de travers.

- Pendant que tu te laveras, je t'installerai un lit dans ma chambre.

Nagazo Koken frappa ses cuisses avant de se redresser.

- Faites comme il vous plaira, les filles ! Moi, je vais nous préparer une bonne petite bouffe pour fêter ça.

- Essaye de ne pas nous empoisonner, plaisanta Rini avec une pointe de méchanceté.

Son père eut un sourire guindé.

- Pour cette unique fois, je promets de ne pas te filer la courante comme quand tu étais petite.

Rini dut se retenir de lui jeter le premier truc qui lui était passé par la main : à savoir son chausson droit.
Nagazo Koken avait de toute façon déjà fui dans la cuisine en ricanant comme un gamin.

- Celui-là, quand il s'y met... je te jure.

Elles purent ensuite vaquer à leurs occupations. La première année dut ranger un peu sa chambre avant de préparer la couche de Morgane. Un lit assez modeste mais confortable, tout près du sol, aligné non loin du sien. Le tout était entouré d'une commode, de quelques meubles synthétiques où étaient rangés des vêtements, ainsi que de plus petits mobiliers abritant quelques divertissements. L'un deux supportait le poids d'une télé et d'une console plutôt récente. Le genre qu'elle partageait avec une camarade de classe nommée Hibari Konya, très fan des jeux de combat. Il y en avait d'ailleurs quelques-uns en vitrine, dans un compartiment prévu à cet effet. Des basses, accompagnées d'un caisson, encadraient le tout.
Je dois dire qu'avec mes sorties en douce, j'ai un petit peu trop négligé l'organisation de ma propre chambre...
Elle repositionna ses haltères correctement, sur un petit présentoir qu'elle avait récupéré auprès d'un club de sport qui avait prévu de s'en débarrasser pour un remplacement plus moderne.
En parcourant la pièce du regard, Rini survola les nombreux posters qui décoraient les murs. Certains mettaient en valeur des artistes ou des groupes pas très connus au Japon. Comme Zardonic, Combichrist, Avenged Sevenfold, The Enigma TNG, Blue Stahli, Slipknot ou Disturbed. Rini écoutait principalement du Rock, du Dubstep et du Métal. Plus rarement des OST inhérentes à des jeux tournés vers l'action. En dehors du domaine de la musique se démarquaient des illustrations de combattants qui sortaient du lot, voire de anti-héros tels que le Punisher ou le Ghost Rider.
Le Skull Raider avait des goûts assez sombres, oui.
Une fois son rangement effectué, la lycéenne s'en alla retrouver la SpiderWitch à qui elle apporta un pyjama tout propre avant de la guider jusqu'à sa chambre.

- Je t'ai fait de la place dans cette armoire pour que tu puisses y entreposer tes nouvelles affaires, l'informa-t-elle en lui ouvrant ledit mobilier.

Il y avait de l'espace ! Rini Koken n'étant pas une grande collectionneuse de vêtements, contrairement à certaines demoiselles de son âge.
La jeune femme se tourna ensuite vers son lit fraîchement ajouté, qu'elle lui présenta d'un geste accueillant.

- Et ça, c'est ton nid... (Elle sourit.) Pardon. Je voulais dire : ton lit. Là où tu dormiras. Essentiellement la nuit. Parce qu'il ne faudrait pas que mon père te surprenne en train de pioncer de jour quand il n'y aura pas cours. Même si je présume que tu n'es pas du genre à abuser des siestes, pas vrai ? Que tu es une bosseuse avertie.

Qu'y avait-il d'autre à ajouter ?
Ah ! peut-être ceci...

- Je préfère te prévenir tout de suite : je suis fille unique. Ce qui veut dire que j'ai toujours occupé seule cet espace, et que je ne suis pas du tout habituée à le partager avec quelqu'un d'autre.

Pour ne pas paraître désagréable, elle haussa les épaules et ajouta très vite :

- Ne t'en fais pas pour ça. Je saurai m'y faire autant que toi.

Et c'était tout ?
Peut-être que la SpiderWitch aurait quelque questions à lui poser ?
Elle avait comme un don pour cela.

Image bonus :

[SpiderWitch]

Rini et Morgane avaient passé au final une bonne soirée. Elle avait été riche en connaissances pour la SpiderWitch. Et probablement un soulagement aussi pour le père de Rini. Ce ne devait pas être tous les jours que sa précieuse petite fille ramenait une fille à la maison. Qui plus est, une qui voulait assister au travail mécanique. Et donc Rini et Morgane s’étaient couchées l’une à côté de l’autre. Pour respecter le souhait de Rini de ne pas dormir en journée et lui donner un temps d’adaptation rapport au fait qu’elle n’avait ni sœur ni frère : Morgane n’avait pas posé une nouvelle batterie de questoins.

Tout cela pour en revenir à Cruella qui, elle, n’avait pas passé une bonne soirée. Elle était revenue chez elle avec un sale caractère. Elle envoya paitre sa mère et fit claquer la porte de sa chambre. Elle aurait aussi aimé gueuler sur ce père absent. Mais Cruella ne le connaissait pas. Au mieux, elle avait connu des sortes de père de subsititution. Mais sa mère ne les gardait jamais très longtemps. A chaque fois, Cruella se demandait à qui les prétendants étaient comparés…

Quand elle était ressortie de sa chambre, adieu l’uniforme de l’école. Choker noir à pointes. Soutien-gorge de cuir noir qui ne donnait pas l’impression de porter uniquement un sous-vêtement mais bien un vêtement. Une sorte de short très très court surmonté d’une ceinture à clous. Des bas résilles. Quelques sangles ici et là. Un blouson de cuir aux manches très amples. Et un soupçon de maquillage rouge autour de ses yeux. La seule touche sanglante de son être, elle qui avait la peau si blanche.

La mère : « Où est-ce que tu sors encore ? Le dîner est prêt à être serv-… »

Cruella : « JE SORS ! »

Dehors, elle ressassa son plan que cette nouvelle élève avait fait échouer. Ce visage « gothique » ne quittait plus sa tête. Elle semblait trop vieille. Elle était arrivée de nulle part. Elle était trop compétente. Soudainement devenue populaire… Cruella détestait déjà Morgane « Sparks ». Et elle complotait déjà pour lui faire payer le lendemain…

Elle aurait dû écarter les jambes avec ces deux amies pour former un cercle démoniaque. Ca aurait été alors le début de quelque chose. De sa nouvelle vie !



Kasumi : « Bouah, tu as une tête à faire peur ! A plisser autant le front, tu vas te choper des rides avant l’heure, Cru-cru ! ♥ »

Une jeune femme de son âge était apparue dans le champ de vision de Cruella. Avec les deux mains au premier plan de la vision de la bafouée. Deux mains formant des « oreilles de lapin » avec l’index et le majeur de dressé.

Cruella : « M’emmerde pas, Kasumi. Je n’ai pas la tête à ça… »

Malgré l’enthousiasme de la nouvelle venue, cette dernière n’en apparaissait pasmoins rassurante. On aurait pu croire qu’elle était vêtue d’une sorte de swimsuit une pièce noire. Un modèle très échancré. Mais des « accessoires » attiraient tout de suite l’œil. Kasumi donnait l’impression de s’être habillée en « néo-nécromancienne adolescente ».



Plus tard, après quelques déboires pour la victime et quelques manipulations voire harcèlement de Cruella et consorts… Une jeune femme se retrouva allongée sur le dos. Les jambes repliées et maintenues en position par des cordes rouges. Un pentagramme duquel apparu une langue absolument pas humaine pour venir lécher et très vite pénétrée une paire de lèvres intimes à nues.

[Rini Koken]

Ce soir là, il n'y eut pas de sortie. Pas de virée nocturne. Pas l'ombre d'une expédition punitive. La SpiderWitch, qui se faisait maintenant appeler Morgane Sparks, se montra particulièrement silencieuse alors que le Skull Raider, piégé dans son domicile, lui faisait son petit exposé des lieux. La première année n'alla pas jusqu'à l'accompagner dans la salle d'eau ; elle se voulait aussi prude que polie, et c'était bien mieux ainsi. Rini se doutait bien que l'éclaireuse se ferait très vite à leur quotidien de lycéennes.
Elles s'endormirent assez facilement, probablement aidées par le fait que ni l'une ni l'autre ne ronflait ou ne pétait pendant son sommeil...

Bien plus en forme que d'habitude, Rini Koken fut la première à se laisser glisser hors du lit. Le fait de ne pas avoir endossé son costume de motard lui ayant permis de recharger efficacement ses batteries. Elle s'occupa du bien-être de tout le monde avant de songer au sien, préparant le petit-déjeuner pour trois qu'ils consommèrent autour d'une table basse, assis sur des coussins légèrement rembourrés. Le début d'une routine matinale, en plein milieu d'une semaine que les deux jeunes femmes allaient très vite occuper avec des activités pas forcément scolaires...
D'ailleurs, en parlant de ça :

- Morgane n'a pas encore reçu son uniforme, annonça Rini à son père, lors de leur petite réunion de "famille". En attendant, je vais donc lui prêter celui que j'ai de rechange.

Nagazo Koken était le genre d'homme à savoir parler la bouche pleine sans que cela ne perturbasse la compréhension de personne.

- Si mes souvenirs sont bons, tu ne l'as quasiment jamais utilisé, celui-là...

Ne lui en tenant par rigueur pour le piètre exemple qu'il donnait à Morgane, sa fille hocha la tête avant de regarder Morgane.

- Nous possédons à peu près la même morphologie. Tu n'auras donc aucun mal à rentrer dedans.

- Vous pourriez même presque passer pour des sœurs, plaisanta le père indigne.

- N'exagérons rien, soupira la jeune femme, toujours indulgente de bon matin, avant de se mettre à débarrasser la table en vue de s'occuper de la vaisselle. Morgane, je te suggère d'aller te laver en premier ; père est bien gentil, mais il a la fâcheuse tendance à oublier de rincer le lavabo avant de quitter la salle de bain...

Tout en se déplaçant les bras chargés vers la cuisine, elle avait souri en coin.
Comme s'il était soudain retombé en enfance, Nagazo Koken étouffa un juron.

- Hé-ho ! C'est de la délation, ça, ma fille. Un coup rudement bas - du genre à toucher les parties.

L'air de s'en moquer royalement, Rini avait haussé calmement les épaules.

- J'ai appris avec le temps que les réflexions de ce genre, avec le public idéal, incitent, le moment venu, l'esprit traumatisé à se remettre en question.

- Ainsi tu espères, toi, une lycéenne en première année, donner une leçon de morale à ton propre père ?

Cela le fit doucement rigoler. Le genre de rire exprimant ouvertement l'incrédulité.

- Tu ne manques décidément pas de courage.

- Je l'ai sans doute hérité d'un homme à la tête dure, continua Rini à l'autre bout de la pièce. Je tire le robinet ; je ne vais hélas plus pouvoir t'entendre te plaindre de mauvais traitement.

- Et elle trouve toujours le moyen de gâcher mon petit plaisir, sourit-il en se relevant. Ah ! Le jour où je m'ennuierai de l'entendre n'est pas près d'arriver.

Il s'étira, ses bras musclés tendus bien haut au-dessus de sa tête.

- Je vais aller chercher le journal, fit-il en se détournant de Morgane. J'irai sans doute le lire dans l'atelier. Faites tranquillement vos petites affaires, les filles. Mon regard d'adulte attentionné se portera ailleurs que sur vos jolis minois.

- Un vrai gentleman, ironisa Rini. Toujours d'une très grande classe.

- J'ai entendu, lui fit remarquer son père qui n'avait pas encore ouvert la porte.

- Je m'en étais douté, répliqua sereinement la lycéenne.

Le début d'une belle journée ?

[SpiderWitch]

Il y avait eu de nombreuses opportunités pour intervenir. Mais Morgane Sparks avait conservé le silence. Pour ne pas les embarrasser. Spécialement Rini qui était devenue sa première alliée. Elle avait des difficultés avec cette dynamique de liens de sang. Il y avait tant de bavardages inutiles. Tout cela aurait pu se résumer au silence, au fait d’indiquer qui prenait la responsabilité du lavage de la vaisselle, qui prenait celle d’aller vérifier la livraison matinale. Mais Morgane Sparks ne dit rien et enregistra ce nouveau mode de vie qu’elle devait comprendre et assimiler.

La figure paternelle partit, Morgane entra elle aussi en action. On lui avait demandé de se laver la première, ce qu’elle fit. Elle ne provoqua pas de complications. En parfaite petite soldate, elle fut efficace et ressortit de la salle de bain avec l’uniforme scolaire de Rini qui n’avait quasiment jamais été porté. Toutefois, Morgane avait un retour à faire sur ces vêtements.

« Je ne me sens pas à l’aise là-dedans. Pourquoi cela doit-il être ouvert au-dessous pour nous ? J’ai vu les garçons et ils ne portaient pas la même chose. Le vêtement a-t-il pour objectif d’aider aux rapports de prolifération de votre race ? »

Elle avait enfilé la jupe noire, la chemise blanche avec le nœud rouge et la paire de chaussettes montant jusqu’au-dessus du genou.

« Si je dois effectuer des mouvements acrobatiques, la jupe provoquera des réactions qui pourraient être contraires à mon intention initiale. Mais, en combinant mes observations passées et en tirant des conclusions, je suppose qu’il n’y aura pas de temps dans la journée où nous devrons procéder à quelques prouesses physiques ? En ce cas, ma question est la suivante : qu’allons-nous faire de cette journée ? »



De son côté, Cruella avait peu dormi de la nuit. En fait, elle avait même passée une nuit blanche à torturer à base de sexe et de rituel une pauvre femme. Cette dernière était maintenant portée « disparue ». Bientôt, on pourrait voir son visage sur des affiches de recherche dans la rue. Et peut-être même à la télévision selon si elle était importante ou non. Mais Cruella s’en fichait. Elle n’avait été qu’un exercice. Et surtout une sorte de punching-ball.

Elle allait (presque) mieux. Elle attendait maintenant une certaine Morgane Sparks à l’entrée de l’école. Les gens qui passaient à côté d’elle faisaient naturellement un petit détour. Si Cruella était une petite célébrité, les gens ne désiraient pas s’arrêter. Leur instinct primitif parlant à leur place. Puis ils parlaient ensuite entre eux plus loin, loin des oreilles de Cruella, arguant qu’elle avait « mis la dose en maquillage ce matin ». Le rouge autour des yeux lui donnait un air de prédatrice. Et la couleur de son épiderme dissimulait les cernes.

« Morgane Sparks. »

Car les deux femmes se croiseraient nécessairement.

« Suis-moi. On doit parler. »

Elle comptait l’emmener dans un local sportif. En compagnie de Kasumi et d’une autre, un piège avait été déployé. Le genre à immobiliser la victime pour la conduire sur l’autel. Certes, ce n’était pas une table en pierre ancestrale. Il faudrait se contenter d’une table aux pieds rabattables. Peu importait. La valeur du sacrifice ne changerait pas. Un démon serait convoqué et il obéirait un temps limité à celle qui ne savait pas encore qu’elle était la fille du Baron Kowaï.

[Rini Koken]

La SpiderWitch n'avait pas traîné ; Rini n'avait pas encore commencé à essuyer la vaisselle qu'elle était déjà sortie de la salle d'eau, avec son uniforme scolaire sur le dos.
Sorcellerie ?
Elle ne partagea pas ses doutes. Encore une fois, Morgane Sparks fut plus rapide. Et Rini fut bien contente que son père n'ait pas entendu sa réflexion - somme toute assez constructive - par rapport au fait que les filles étaient obligées de porter une jupe au lieu d'un pantalon à l'instar des garçons.

- Euh... Non, Morgane. Je ne pense pas que le but premier soit de nous inciter à copuler. Il s'agirait plutôt d'une... d'une mode ? D'une tendance de l'époque ?

Qu'est-ce qu'elle lui avait fait dire encore ?
La SpiderWitch avait comme un don pour la foutre dans l'embarras !
Sorcellerie, ça aussi ?
Pensée stupide mais bénigne qui l'invita aussitôt à se déraidir.
L'éclaireuse parmi les Araignées en rajouta une belle couche en approfondissant sa dérangeante pensée.

- Rassure-toi : tu ne devrais pas avoir à sauter partout, ou à escalader je ne sais quel immeuble ; en classe, nous sommes supposées étudier avec les autres.

Elle n'entra pas dans les détails. Rini prit plutôt congé, direction la salle de bain où elle se prépara comme convenu. Après quoi elle ramassa ses affaires scolaires, enfila ses chaussures et souhaita une bonne journée à son paternel.


Elles ne parlèrent pas beaucoup sur le chemin de l'école. Ou tout du moins pas plus que nécessaire. Rini se voulant avant tout concise et franche. Il n'était pas question de donner trop de grain à moudre à la curiosité de sa nouvelle camarade ! C'était un coup à ce qu'elle finisse les joues complètement rouges bien avant même de poser un pied devant le lycée.
Tu es un rempart, Rini Koken. Une forteresse ! Imperturbable, tu te dois de le rester.
Plus que jamais, sa vie, aujourd'hui, relevait du combat. Une comparaison honorable dans la mesure où, postée à l'entrée du lycée de sorte à ce que tout le monde puisse la remarquer, une nouvelle challengeuse les attendait de pied ferme.
Lorsqu'elles passèrent à côté, Cruella prononça le nom de couverture de la SpiderWitch. Une froide interpellation qui faillit bien mettre à mal les défenses de sa solide accompagnatrice.
Comment se fait-il qu'elle connaisse déjà son nom ? Je ne l'ai pourtant inventé qu'hier.
Refusant de se laisser décontenancer, la pugiliste regarda la "petite célébrité" droit dans les yeux.
Il y eut un blanc sonore où personne ne bougea, ne remua ne serait-ce qu'un pauvre cil...

- Non, finit par dire la plus normale des trois jeunes femmes. Nous allons être en retard. Continuons, Morgane.

Comme si de rien n'était ? Aussi simplement que ça ? Vraiment ? Cruella allait-elle tolérer qu'elles lui tournassent ainsi le dos ?
Tant qu'elle ne les toucherait pas, Rini n'en avait cure, de sa réaction - ou même de ses caprices.
Aussi, quand la fausse élève et son aide de camp reprirent leur chemin, la seconde se tenait naturellement sur le qui-vive.

- Elle ne t'a pas saluée, lui expliqua-t-elle sans ralentir. En considérant le ton employé, la suivre naïvement aurait été une mauvaise idée.

Rini ne regrettait en rien sa décision. Célébrité ou pas au sein du lycée, elle ne pouvait pas accepter pareil comportement.
Sans doute que la brave Koken aurait fait une excellent déléguée de classe ?
Un temps qu'elle préférait consacrer à des tâches autrement plus complexes et sportives.

[SpiderWitch]

Morgane nouvellement Sparks écouta les recommandations de sa guide. Elle conserva le silence tandis qu’elle apprenait qu’il ne fallait pas suivre la dénommée Cruella. A jamais ? Ou la rencontre était-elle seulement retardée à un plus tard qu’il fallait définir ? Car la SpiderWitch n’aimait pas laisser une affaire en suspens. En partie par sa propre curiosité titillée. En autre partie parce que les êtres humains et leurs émotions étaient un sujet délicat. Elle ne croyait pas à un simple non qui changerait irrémédiablement le Destin que tricotait la dénommée Cruella.

Cruella : « Où est-ce que vous croyez aller ?... »

La lycéenne aux cheveux noirs et blancs n’avait pas haussé le ton. Pourtant, la menace avait valeur d’ordre d’immobilisation.

Cruella : « Vous… »

Il y avait une lueur mauvaise dans les yeux de Cruella. Ca dépassait de loin la simple rivalité scolaire. Ce n’était pas qu’un problème de célébrité usurpée. Sa mère en avait fait les frais au matin. En voulant savoir où sa fille avait passé la nuit, en demandant des explications de par son rôle de mère : elle avait fini à moitié assommée après que sa tête est cognée contre le rebord d’une étagère suite à une gifle magistrale. Trop hébétée et trop effrayée par cette soudaine violence, elle avait baissé la tête et gardé le silence…

Cruella : « Si vous croyez que j’ai envie de passer du temps avec toi, Morgane, vous vous trompez. C’est le professeur principal qui m’a missionné. Je crois qu’il ne comprend pas le cas de Morgane et voudrait en parler avant que tout le monde se retrouve en salle de classe. »

Ainsi, la fille du Baron la jouait stratégique. Si son aura et sa demande ne pouvaient être acceptées sur ses propres critères égoïstes, elle allait rejeter la faute sur les sommités scolaires. Refuser l’autorité japonaise ? Dans un pays empli de traditions et de règles ? Les conséquences ne tarderaient pas à tomber. Pour preuve, un ministre avait été destitué parce qu’il avait accepté comme présent des kilos de riz. (hrp : fait véridique)

« Je vais te suivre. » finit par répondre Morgane.

*Je n’ai pas peur de cette femme. Au besoin, je n’aurai qu’à l’hypnotiser. En fait, c’est probablement un excellent scénario pour moi. Si je peux hypnotiser ce professeur principal pour faciliter mon immersion dans ce monde. *

« Tu n’es pas obligée de me suivre, Rini Koken. Tu n’as pas à veiller constamment sur moi. Tu en fais déjà beaucoup. »

Pendant un bref instant, un rictus déforma les traits de Cruella. Sa psyché avait déjà basculé du mauvais côté. Avant Morgane Sparks, elle avait déjà établi un plan pour provoquer un rituel démoniaque. Mais depuis cette nuit blanche, elle avait franchi un cap. Il y avait une femme qui avait subi des sévices d’ordre surnaturel et sexuel jusqu’à réduire son âme en charpie et la donner en pâture à des molosses démoniaques. Maintenant, il lui fallait conclure un véritable pacte. Avec un vrai et puissant démon.

[Rini Koken]

La noire et blanche n'avait pas renoncé à ses brimades. Comme toutes les harceleuses, elle ne se sentait réellement vivante qu'en empoisonnant son entourage. Morgane Sparks, hélas, était inexplicablement devenue sa cible du jour. Rini ne la sentait pas beaucoup, cette histoire de doute au sujet de la future victime et de cette soi-disant commission passée auprès du professeur principal en personne. Cela puait. Trop fort pour qu'elle ne puisse pas y fourrer son nez de justicière de l'ombre.
La SpiderWitch avait pris sa décision - celle de suivre la détestable Cruella. Dans son costume de parfaite étudiante, l'éclaireuse ne voulut pas pousser le vice au point de forcer sa collaboratrice à les suivre dans ce potentiel guet-apens.
Je crois que tu te trompes, Morgane Sparks. Sans doute que tu ne prends pas les choses à la légère par respect pour l'importance de ta mission. Mais je suis persuadée qu'en tant qu'étrangère à notre environnement, tu n'as pas tout à fait conscience du danger.
La première année secoua doucement la tête.
Elle aussi avait pris sa décision.

- Je préfère tout de même t'accompagner, dit-elle avant de regarder Cruella droit dans les yeux, juste au cas où.

Elle y ajouta tout de même un demi-sourire. Dans le genre qui respire la confiance et l'audace.

- D'ailleurs, tu n'aurais pas oublié quelque chose ?

La question ciblait la SpiderWitch mais Rini, sans cesser de regarder miss blanc et noir, observa volontairement un temps de silence avant d'ajouter sobrement :

- C'est moi qui suis supposée te faire visiter les lieux. Et je ne léguerai cette mission à personne.

A son ton, Cruella pouvait facilement biter qu'il était parfaitement inutile d'engager la moindre négociation à ce sujet.

[SpiderWitch]

Elle bouillait intérieurement. Cruella en avait plus que marre de ce duo agaçant. Elle avait enfin réussir à convaincre la dénommée Morgan avec son mensonge. Mais voilà que l’autre se greffait au groupe. Elle essaya de se calmer en sachant que ses amies l’attendaient dans la salle piégée. Elle parvint même à sourire en imaginant qu’avec deux victimes au lieu d’une seule pour le rituel démoniaque, la récompense n’en serait que meilleure.

« Je ne m’interposerais pas entre toi et ta mission. J’ai été entraîné et éduqué pour accomplir les miennes. Je comprends donc. Viens donc avec nous, Rini Koken. »

Cruella : « Qu’est-ce que c’est que ça, vous deux ?! Vous vous foutez de ma gueule ? Personne ne parle comme ça. Ou alors ces ploucs du club de théâtre. »

« C’est mon phrasé. Il est ainsi. Rini m’a déjà prévenu que je m’exprimais étrangement. Mais à force de vous côtoyer, l’adaptation tendra vers plus de votre naturel à toutes les deux. Mais précède-nous, je t’en prie. Emmène-nous au rendez-vous. »

Cruella : « Le rendez-vous ? Quel rend-ah oui ! Le professeur principal, bien sûr. Tu m’as perturbé à parler comme ça. Ouais, allons-y. »

Elles entrèrent toutes les trois à l’intérieur du gymnase. Quelques virages dans un couloir et Cruella invita Morgane et Rini à entrer dans le bureau du professeur d’éducation physique. Elle leur fit remarquer que le professeur principal devait être quelque part, non loin. Que c’était de leur faute à toutes les deux. Le retard s’était accumulé. Une fois au-dedans, il y eut un bruit de serrure verrouillé. Depuis l’autre côté de la porte, Cruella prétexta que c’était pour ne pas avoir à les chercher toutes les deux une fois qu’elle aurait retrouvé le professeur principal.

« Fort bien. Nous ne bougerons pas d’ici. Nous t’attendons. »

En réalité, Cruella s’en alla dans les vestiaires. Elle en avait marre de l’uniforme scolaire. Il fallait qu’elle se change pour être à l’aise dans le cuir de la nuit dernière. Elle irait ensuite rejoindre ses deux copines et à eux trois, elles pourraient alors commencer le rituel démoniaque. Une version moderne à base de yoga, figure géométrique et ancien langage.

Bientôt, elles se tiendraient les mains. Les jambes en grand écart toucheraient les pieds les unes des autres pour former un pentacle. Les ténèbres sombreraient. Les symboles géométriques prendraient vie d’une luminosité d’un autre plan. Et ainsi, comme si le sol était devenu liquide, une tête commencerait à sortir du point central. A la manière d’un accouchement insolite.

En attendant, Morgane était en compagnie de Rini. Elle s’était assise pour faire face à la chaise vide de l’autre côté du bureau. S’il fallait attendre, elle attendrait. L’école ne pouvait être un environnement hostile, se disait-elle. Toutefois, elle restait aux aguets. Mais elle remarqua probablement l’agitation de celle qui serait bientôt promise à être sacrifiée pour payer le prix du passage entre deux plans.

« Est-ce intéressant que nous passions autant de temps dans la thématique des disciplines sportives ? Peut-être ma question est-elle déplacée ou inintéressante. Mais il m’a semblé qu’il était judicieux de troubler le silence pour combler ta tête de bruit. N’hésite pas à me corriger si, une nouvelle fois, j’agis étrangement. »

[Rini Koken]

La mission, le devoir... des notions qui n'étaient pas étrangères à la SpiderWitch. Pour son bien, Rini n'hésiterait pas à en abuser. Un petit peu de travail en rab' ne lui ferait pas de mal non plus. La monotonie de la scolarité s'en retrouvait brisée. La première année n'allait pas cracher sur ces petits changements - bienvenues ou non.
Cruella, par contre, avait l'air sur les nerfs.
Rini laissa Morgane gérer la situation. Bien qu'étrange d'attitude, elle n'en demeurait pas moins suffisamment grande pour clouer le bec à cette pimbêche. Lors de leur échange, la pugiliste nota tout de même quelque chose d'encore plus suspect chez leur camarade au teint laiteux.
Mon imagination qui me joue des tours ? Non. Plutôt mon instinct qui ressort.
L'émissaire du professeur principal les emmena donc dans un bureau... qui n'était pas celui du bon personnage. Ledit bureau était celui du professeur d'éducation physique. Rini protesta doucement, sans témoigner de stress, mais Cruella avança des arguments qui les mettaient, Morgane et elle, en faute. Elle n'insista pas davantage.
Jusqu'à ce que la pimbêche disparaisse de l'autre côté de la porte et fasse tourner la clef dans la serrure.

- Tu nous séquestres, maintenant ?

A en croire Cruella, ce n'était pas le cas. Elle souhaitait les retenir ici en attendant d'aller chercher le professeur principal.
Celle-là, on ne me l'avait encore jamais faite...
Rini regarda Morgane. Cette dernière ne se doutait de rien.
J'ai peine à croire qu'il soit intelligent de confier la clé d'un bureau qui ne lui appartient pas, à cette mal élevée.
Morgane s'était assise face au mobilier. Sa compagne s'en était abstenu. Elle observa la porte verrouillée un instant avant de prendre en compte les paroles calmes et posées de sa coéquipière d'infortune.

- Non. Tu fais bien. Je préfère quand tu t'exprimes.

Elle ne tarda pas à bouger, contournant le bureau avant de se mettre à fouiller dans les tiroirs. En quête d'une autre clé, oui. Rini préférait ne pas avoir à forcer la serrure ou, pire encore, la briser avec une partie de son don.

- J'ai la désagréable impression que nous avons été piégées, Morgane. Car personne de sensé, dans cet établissement, qu'il soit élève ou enseignant, n'aurait dans l'idée de retenir un tiers dans une quelconque pièce.

Heureusement qu'elle n'était pas claustrophobe. N'ayant pas trouvé ce qu'elle cherchait, Rini posa ses mains en appui sur le mobilier et soupira.

- Ce rendez-vous n'est qu'une farce de mauvais goût. A l'image de celle à qui, manifestement, tu ne reviens pas...

Elle déposa son regard sur la porte. D'un geste du menton, Rini redirigea l'attention de la SpiderWitch dessus.

- Tu penses être capable de l'ouvrir sans l'abîmer ?

La première année pourrait tout aussi bien la crocheter. Mais cela lui prendrait trop de temps alors...