YSEULT BERANGER
Franco-japonaise
La Terre, de nos jours
Faire des conneries, ça arrive à tout le monde. Cependant, on se rend bien vite compte qu'en fonction des cercles dans lesquels on évolue, la définition d'une "connerie" peut devenir très floue. Tout cela bien sûr en acceptant que parfois, la réaction de l'entourage à la "connerie" en question peut s'avérer...disons disproportionnée.
DES DEBUTS...PARTICULIERS
Tout commence dans le merveilleux Paris des années 1930. Oui, oui, ce Paris-là. Le Paris des années folles, ou en tout cas de ce qui avait succédé aux Années Folles. En l'occurrence, l'on suivra l'histoire de Benedict Beranger, fils de très bonne famille, alors en plein cursus universitaire, et qui semblait s'être amouraché d'une magnifique donzelle, gracieusement nommée Blanche Parmentier.
Et si il pouvait sembler un peu tirer sur la corde que de dire que l'amourachée était réciproque, il était cependant clairement vrai que Benedict, aussi bien éduqué soit-il, semblait du jour au lendemain n'en avoir plus rien à péter de la bonne famille. Ladite famille arqua vraiment un sourcil lorsque Benedict commença à fréquenter ouvertement Blanche, mais elle ne dit rien. Après tout, qu'il s'amuse ! Il serait bien temps pour lui d'être sérieux une fois ses études finies, un diplôme en poche, et la certitude de se marier avec une femme aussi respectable que possible lui remettrait les pieds sur terre.
Et même si le terme de "Loi de Murphy" n'existait pas vraiment à l'époque, ce qui devait arriver arriva : non seulement Benedict n'en avait plus rien à faire de cette histoire de mariage respectable après ses études, mais en plus, Blanche se réveilla un matin avec des nausées, un mal de crâne absolu, et une envie irrésistible de manger des fraises : pas de doute, la miss était enceinte.
Un vrai drame pour l'époque, et clairement un scandale qui ne demandait qu'à éclater. Mais que pouvait bien faire Blanche ? Sa grossesse ne deviendrait que plus évidente chaque mois... Non, chaque semaine. Bref, les deux tourtereaux paniquaient toujours plus chaque minute passée à réfléchir. Et heureusement, la réponse vint du ciel, en la personne de Fransesco, le frère aîné de Blanche, qui offrit aux deux tourtereaux d'emménager dans un appartement que lui-même avait acheté pas très loin de l'université.
Fransesco n'avait pas prononcé un mot de tout le long qu'avait duré l'emménagement du duo. Il ne réclama aucun loyer, ne fit aucune offre de quelconque accord financier. Il laissait simplement le duo rester sur place, sans rien demander. Et puisqu'il avait lui même tout sauf deux mains gauches ainsi qu'une formation médicale, ce serait lui qui aiderait Blanche à accoucher, malgré les protestations de Benedict qui la supplia plusieurs fois d'aller à l'hôpital. Et comment dire... Comment dire à quel point Benedict avait raison ? Accouchement assisté par un individu former ou pas, Blanche subit de nombreuses complications, et au final, au désespoir de Benedict, elle ne survécut pas à l'accouchement.
Et nul doute que si elle en avait été capable, la première pensée de ce bébé nouveau-né aurait été "Mais quel monde de merde !"
REACTION IMMEDIATE
Si l'on vous demande quelle est la caractéristique principale des années 30, la seule réponse valable est la suivante : "Ils n'avaient peut-être pas Internet ni des dispositifs sophistiqués d'espionnage, et pourtant les nouvelles circulaient encore plus vite qu'aujourd'hui." Et c'est exactement ce qui attendait Benedict. De son côté comme celui de Fransesco, la famille n'était pas contente. Pas contente du tout. Et il allait clairement falloir régler le problème, et fissa ! La famille de Blanche voulut traîner la réputation de Benedict dans la boue pour avoir tué leur fille, là où celle de Benedict cherchait à faire passer Blanche pour une fille de petite vertu qui avait détourné leur fils de son but véritable.
Et ce fut l'escalade. Au point que tout cela faillit se régler en une véritable succession de duels d'honneur. Pour dire la vérité, le premier de ces duels s'apprêtait à prendre place au moment où la question de la parentalité se posa : sans mère, on n'allait quand même pas abandonner un bébé, si ? Les deux familles étaient plutôt aisées, et encore une fois, on escalada dans l'argumentation la plus étriquée. D'un côté, il était normal que Benedict prenne la responsabilité de l'éducation de l'enfant, puisqu'il était le seul parent encore en vie. De l'autre, c'était hors de question que Benedict abandonne ses études.
Tout cela pour dire qu'au bout de deux mois de vie, Yseult, alors un bébé, en avait déjà tellement marre de la vie que son corps décida de le montrer. Virant au blanc, puis au gris, cette métamorphose mit un terme définitif à toutes les disputes en la matière... Ou plutôt, ce fut le contraire. Avant, les deux familles se seraient renvoyées la balle pendant des heures. Avec ce nouvelle élément en jeu, c'était l'inverse. Un bébé aussi unique ? Pas question que les autres parvenus ne posent ne serait-ce que leur regard sur lui ! Le summum de l'absurdité survint quand le patriarche de la famille Parmentier offrit d'adopter l'enfant en son nom propre.
Heureusement, celui qui apporterait la réponse serait Fransesco. Lui-même n'était pas un enfant désiré. Et il savait bien qu'une jeune fille qui serait, elle, à l'opposé (à savoir, trop désirée) aurait une vie encore pire que la sienne. Alors il fit la seule chose raisonnable, à l'issue d'une looooongue conversation avec Benedict : il disparut à la faveur de la nuit, l'enfant sous le bras, une valise sous l'autre. Direction la gare la plus proche, un ticket de train en poche pour... n'importe où, en fait. L'important était de mettre Yseult en sécurité, hors de portée des griffes de ces fanatiques.
APRES PARIS...
...le Japon. Aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est là que le voyage d'Yseult la mènerait. Elle avait tout juste un an lorsque Fransesco posa le pied en territoire nippon. N'étant clairement pas dénué de ressources, il parlait un japonais maladroit, mais compréhensible. Forcément, il était un gaijin, et en tant que tel, il aurait été en droit d'attendre un traitement abominable. Mais heureusement, Yseult était un bébé, et quoi que l'on ait pu dire du japon impérialiste des années 30, il y avait une chose que personne n'aurait osé faire : abandonner un bébé dans le froid de l'hiver. Yseult fut récupérée par un trio de femmes qui vivaient seules. Fransesco, lui, fut tout simplement mis dehors, avec la seule et unique garantie d'avoir le droit de revenir voir l'enfant une fois par semaine. Une conclusion que l'on pourrait trouver dure, mais Fransesco n'avait pas fait tout ce chemin pour que cela s'arrête là. Il reviendrait donc, une fois par semaine, tout au long de l'enfance d'Yseult.
Et lorsque la jeune fille eut passé la barre des dix ans, elle parlait aussi bien français que japonais. Mais le véritable tournant de sa vie se produirait plusieurs années plus tard. Alors âgée de 14 ans, elle fit la rencontre d'une "grise", comme elle... Et pas n'importe laquelle : Kiki Ishimonji, la Sorcière de Seto. Une femme qui s'était déjà fait un nom dans la région, et qui, lorsque l'existence d'Yseult devint un peu plus "publique", décida se s'occuper de ce cas. A l'époque, la Sorcière de Seto était terrifiante au point que nul n'osa s'opposer à elle. Personne... Pas même Fransesco. Il ne fallut pas longtemps pour que la sorcière le fasse tomber sous son charme...
Sa seule figure paternelle étant remplacée par une figure maternelle toute puissante ou presque, Yseult n'avait pas vraiment le choix, et suivit la femme redoutable. Celle-ci lui apprit bien des choses par la suite, la plupart étant des choses qu'il n'aurait jamais dû être donné à un humain de connaître. Et dans l'intérêt du suspens et du mystère, je n'en dirai rien non plus. Après tout, le coeur a ses raisons que la raison ignore...
LA NOUVELLE YSEULT
Dix ans s'écoulèrent. Dix ans durant lesquelles Kiki ne fut pas seulement la mère adoptive d'Yseult. Elle devint sa seule amie, sa confidente... son amante, même, passé un certain seuil. Tout semblait être fait pour garder Yseult sous son emprise, pour des raisons que quiconque un tant soit peu familier avec le folklore japonais connaîtrait rien qu'à regarder Kiki. Après tout, elle avait déjà enchâssé le joyau de sang dans le front de la jeune fille...
Âgée de 25 ans à ce moment, Yseult finit par retrouver la trace de Fransesco, que Kiki avait jeté comme une vieille chaussette dès qu'elle avait eu ce qu'elle voulait de lui. De son oncle, ne restait plus grand-chose, une vraie épave émotionnelle, mais qui s'était juré de sortir sa nièce de là. Il ne laissa pas vraiment le choix à Yseult, et chercha à la ramener avec lui en France, par la force si nécessaire. Yseult se surprit à ne pas résister... et autant dire que si une personne en prendrait ombrage, ce serait bien la Sorcière de Seto.
- Tu es à moi, gamine !
- Nous nous reverrons dans un siècle !
Et la Sorcière de Seto de projeter Yseult dans une faille spatio-temporelle, la projetant littéralement 90 ans dans le futur... en 2025.
ET AUJOURD'HUI ?
Aujourd'hui, une seule certitude : nous sommes en 2025, Yseult vient tout droit des années 30, et elle a absolument tout à apprendre ! Carte bancaire, internet, compte en banque, progrès de la médecine, Internet... Autant de notions qu'elle devra explorer de fond en comble !
Elle n'est sûre de rien, hormis une seule et unique chose : dans 10 ans, peu importe qu'elle soit prête ou non, la Sorcière de Seto reviendrait la faire sienne, d'une manière possiblement encore pire qu'à l'époque...