The Multiversity

[Cahir]

La taverne du Poney Dansant était un endroit assez mal famé dans les terres luméennes. C’était d’autant plus vrai depuis l’Olympomachie, où les monstres s’étaient dangereusement multipliés, ainsi que les criminels en tout genre. L’armée luméenne était dépassée, et assurer la sécurité des faubours éloignés était difficile, contraignant les hameaux et les communautés délaissées à recruter des mercenaires. C’est à ce titre que Cahir avait été recruté. Il n’appartenait à aucune guilde, il était indépendant, et coûtait donc moins cher qu’une guilde bien installée.

Il s’était fait connaître du tenancier en défendant une caravane marchande qui était venue ravitailler l’auberge. Des bandits avaient attaqué la caravane, et il avait réussi à les repousser. Avec son épée mijakienne de renom et son armure en obsidienne, il avait fait forte impression. Cahir n’était pas venu pour rien dans cette région sinistre, il recherchait d’antiques ruines elfiques situées à proximité du lac de Wyndamer. Ces ruines abritaient peut-être des artefacts puissants qu’il se devait de récupérer. Les ruines avaient été longtemps dissimulées grâce à des sorts divins, mais, depuis la chute des Dieux olympiens, ces sortilèges étaient tombés, permettant aux curieux de venir piller les ruines.

Les bandits que Cahir avait repoussé appartenaient à une bande, comprenant des déserteurs luméens, des bandits notoires, qui servaient l’Affiliation. Cahir apprit rapidement qu’ils s’étaient emparés des ruines, et attaquaient les hameaux et les villages à la recherche de prisonniers pour venir travailler dans les ruines, afin d’ouvrir les galeries, et de servir de chair à canon pour les différents pièges magiques qui s’y trouvaient.

« Et moi, j’te dis que c’est vrai ! Une beauté, plus belle que tout ce que j’ai jamais vu !
- Tu devrais commencer par admettre que tu as un problème avec l’alcool, vieux… Si tant est qu’on puisse dire que le tas d’pisse que tu t’enfiles est de la bonne gnôle, héhé… »

Des pêcheurs travaillant sur le lac parlaient d’une superbe femme, une prêtresse blonde. Un matelot jurait l’avoir croisé sur un village attenant. Les autres ne le croyaient pas, mais Cahir écouta soigneusement son témoignage. Il savait que cette femme ne relevait pas de la vision délirante du matelot, il avait reçu une missive lui indiquant qu’une Prostituée Sacrée d’Aphrodite était arrivée dans la région.

Suivant les indications du matelot, Cahir rejoignit le village, où on lui confirma que la Prêtresse était venue, mais repartie, au grand désespoir des villageois.

« Certains ont décidé de la protéger, fils, ils sont tombés amoureux de ses loches, grosses comme un saumon chacune ! »

En suivant la trace, Cahir remonta jusqu’à un chariot, et entendit les croassements des corbeaux. Il pesta silencieusement en voyant les cadavres des hommes qui s’étaient autoproclamés gardien de la Prêtresse. Cahir reconnut des traces de morsure. Le sang était frais, signe que l’affrontement devait être récent.

Délaissant son cheval, il se mit à suivre les traces, qui l’approchèrent d’autres cadavres, à moitié dévorés ou lacérés. Une force prodigieuse avait renversé la caravane, et il entendit des hurlements de loups. Cahir se précipita donc, et se rapprocha d’un grand cromlech, construction ancienne nichée dans la forêt. Les loups étaient là, traquant sans doute la jeune femme qui s’était réfugiée à l’intérieur…

[Merveil]

A vrai dire, ce n'était pas à l'intérieur dudit cromlech que Merveil s'était réfugié mais au sommet d'un des mégalithes, posé horizontalement sur deux verticaux. Surplombant la meute de loups, comportant une bonne dizaine d'individus, d'au moins trois mètres, la Prostituée Sacrée d'Aphrodite se tenait debout, la dague au poing, jetant des regards circonspects aux canidés qui se contentaient de rester au pied de la construction ; de temps à autre l'un d'eux essayait de l'atteindre en bondissant mais ses efforts étaient vains. Ce qui n'empêchait nullement la belle d'être effrayée : si jamais l'un d'eux sautait suffisamment haut et saisissait dans sa gueule l'ourlet de sa robe...

Quelque heures plus tôt, elle se trouvait dans une caravane à destination du village le plus proche afin qu'elle puisse procéder à un rite destiné à assurer l'abondance des récoltes et du bétail. En effet, en tant que Prostitué Sacrée de la Déesse Aphrodite, elle se devait d'accomplir ces cérémonies aussi bien en l'honneur de sa déité que du petit peuple qui, par son intermédiaire, reprenait foi en la divinité (sans compter qu'un heureux élu se tapait une belle partie de jambes en l'air avec Merveil, d'une beauté à couper le souffle, ce qui était loin d'être désagréable, bien au contraire).

Le convoi s'était arrêté au mitan de la nuit et ce fut à ce moment là que l'attaque avait eu lieu : des loups étaient sortis des fourrés ainsi qu'une créature lourde et massive que la belle n'avait pu distinguer à cause de la panique provoquée et de l'obscurité. Sans demander son reste, elle s'était mise à détaler comme un lapin à travers la forêt, retrouvant ses vieux réflexes de gamine quand elle était Laideron et que les gamins de son village "s'amusaient" à la poursuivre tout en lui jetant des pierres.

Elle avait fini par atteindre une plaine où se tenait un cercle mégalithique qui se divisait en cercles concentriques, comme les rides provoquées par un la chute d'une pierre dans l'eau. Là encore elle retrouva ses vieux réflexes de gamine en grimpant à toute vitesse sur l'un des mégalithes, utilisant instinctivement les prises de la pierre pour atteindre le tablier minéral, suffisamment haut pour que les loups ne puissent l'atteindre.

Elle était restée plusieurs heures sur son perchoir, jusqu'au lever du soleil. Loin de se décourager, les canidés attendaient tranquillement. Sans être une Ranger, elle savait que ce type de comportement était plutôt inhabituel chez un loup. Quelque chose de plus sombre, elle le sentait, était à l’œuvre...

[Cahir]

Cahir n’était pas un sorceleur, il n’avait pas leur expérience ni leur affinité avec les monstres. Il percevait néanmoins quelque chose de surnaturel ici. Les loups se focalisaient sur leur proie, ce qui permit à Cahir de se rapprocher. Il haussa les yeux en constatant que la prêtresse d’Aphrodite était magnifique. Elle se défendait avec une dague, et les loups tournaient autour du mégalithe où elle s’était réfugiée, tentant de bondir dessus en utilisant leurs griffes comme appuis. Cahir se déplaça lentement, et récupéra dans son équipement une bombe alchimique, une Ruche. Une bombe explosive qui déclenchait un incendie, et qui lui semblait être l’instrument parfait pour repousser les loups. Cahir grimpa sur un monticule de pierre, se rapprochant du mégalithe, surplombant la zone avec les loups. Il regarda autour de lui, et vit qu’il y avait au centre du cromlech un curieux glyphe sur le sol. Il vit également des crânes accrochés sur des bouts de bois encerclant le glyphe, à l’effigie du dieu Balor.

*Un rituel…*

Le guerrier n’eut guère le temps de s’intéresser à cela. Il se rapprocha du rebord, et croisa le regard de la femme. Cahir lui fit signe de la tête, et alluma la Ruche, qui se mit à siffler et à cracher de la fumée. Cahir lança ensuite la Ruche au pied du mégalithe où s’était réfugié Merveil. L’explosion n’était pas très intense, et il comptait surtout sur l’effet d’incinération. Deux loups furent calcinés sur place, et les autres se reculèrent, certains ayant la fourrure en feu. Cahir déploya ensuite une arbalète située dans son dos, et tira sur les loups. Ceux-ci rugirent, puis s’élancèrent alors vers luyi. Ajustant son tir, Cahir décocha un carreau qui heurta la tête d’un loup, transperçant son crâne. Ne pouvant faire face avec son arme de distance, Cahir dégaina alors son arme, une redoutable épée en acier valyrien, qui faucha un loup qui bondissait sur lui, le décapitant violemment. Le sang du loup jaillit, éclaboussant partiellement son visage.

Un autre loup bondit à côté de Cahir, et s’élança encore vers lui. Le guerrier s’écarta, et le loup le mordit à la main. Malgré son gant renforcé, Cahir sentit la douleur, et frappa le museau du loup avec le pommeau de son épée. Un autre loup bondit ensuite sur Cahir, et le renversa. Sa gueule allait se planter dans son cou, quand Cahir saisit une dague à sa ceinture, et la planta dans la carotide du loup. La bête couina en vomissant du sang par la plaie. Cahir repoussa le loup, et un autre lui mordit la jambe. Le guerrier serra les dents, et un deuxième loup se rapprocha, ciblant sa tête. Cahir arma son pied, et frappa la tête du loup qui lui mordait la cheville, sans lui faire malheureusement lâcher prise.

*Saloperie !*

Cahir attrapa son arbalète. Il l’utilisa pour l’abattre sur la tête du loup qui cherchait à l’attaquer au visage, puis décocha un carreau sur le loup occupé à le mordre, lui transperçant le crâne. Cahir put ainsi péniblement se relever, et fit un pas en arrière. Trois loups lui faisaient face, grondant furieusement. Cahir frotta le sol avec son épée, provoquant quelques étincelles, destinées à calmer les loups, qui grognaient en marchant lentement, hésitant à bondir pour se recevoir un coup de lame. Il offrait en tout cas une parfaite diversion à la prêtresse et à sa dague pour attaquer les loups restants…

[Merveil]

- Ah si seulement j'avais été une Druide !... pesta Merveil, j'utiliserais mon Empathie Animale, ou je ne sais quoi, pour les calmer et les inciter à me foutre la paix ! Ou alors, si j'étais une magicienne, je les ferai fuir à coups de Projectiles Magiques...

Mais elle était Prêtresse, d'Aphrodite de surcroît, et la Déesse de l'Amour n'était pas réputée pour ses talents martiaux. Il y avait bien des guerriers rattachés aux temples de la Déesse, et elle avait même entendu parler de Paladins, mais en l'occurrence il n'y en avait aucun dans les parages. Si je m'en sors, je demanderai un ou deux gardes du corps...

C'est alors qu'elle vit un homme venir vers elle. Leurs regards se croisèrent et l'instant d'après, il balança quelque chose au milieu de la meute de loups. Obéissant à quelque instinct, Merveil se plaqua au sol. Bien lui en prit car elle entendit une détonation retentir dans l'air matinal. La déflagration n'avait pas été trop forte toutefois mais ce fut suffisant pour infliger de gros dégâts aux prédateurs. Se relevant, la jeune femme constata que deux loups avaient été littéralement soufflés par l'explosion, trois autres s'enfuyaient en courant, la fourrure en feu, et les autres, pas trop touchés, se tournaient vers le nouveau venu.

Un carreau siffla dans l'air et l'un des canidés s'écroula au sol, la crâne transpercé. S'ensuivit ensuite un combat confus entre les loups restants et le guerrier. Un instant elle crut que les bêtes avaient réussi à le terrasser mais il se défendait comme un diable, parvenant à en tuer une autre. Merveil se dit alors qu'il serait temps qu'elle réagisse, qu'elle vienne à son aide, parce que l'affaire semblait quand même mal engagée.

Elle sauta du mégalithe, se réceptionnant au sol avec une certaine grâce. Elle n'avait qu'une dague et quelques sorts de prêtresse novice, peu suffisants pour affronter des animaux pourvus de griffes et de crocs. Quoique... Elle ramassa trois cailloux de petite taille et prononça une incantation à l'issue de laquelle ils se mirent à briller durant une seconde. D'un geste assuré, elle lança le premier sur l'une des bêtes.

Quand elle était enfant, et qu'elle se nommait encore Laideron, ses seules aptitudes étaient l'escalade dans les arbres pour y chiper des pommes, la course à pied pour échapper aux autres enfants du village (même si elle boitait plus qu'elle ne courait), l'esquive et le jet de pierres où elle s'était révélée sacrément douée.

La suite prouva qu'elle n'avait rien perdu de son habileté : le projectile toucha de plein fouet le loup, l'estourbissant ; le second connut le même sort, ainsi que le troisième. La situation commençait à sentir le roussi pour les canidés, au sens propre comme au sens figuré, aussi choisirent-ils de s'enfuir, sans demander leur reste.

Poussant un soupir de soulagement, Merveil se rapprocha du guerrier.

- Ça va ? demanda-t-elle, constatant que sa jambe saignait, l'une des bêtes l'ayant mordu à cet endroit. Se baissant, elle promena sa main au-dessus de la plaie tout en prononçant une incantation à voix basse. Un doux parfum de fleur de lys se répandit à l'entour tandis que les cheveux de Merveil se mirent à voleter doucement, comme soulevés par une brise légère. Lorsque le chant prit fin, la blessure s'était refermée comme par enchantement. Un petit sort de soins, insuffisant pour traiter une blessure grave mais suffisant pour une légère, comme c'était le cas de son sauveur.

Bien entendu, quand elle s'était baissée et avait soigné le jeune homme, elle lui avait offert, sans le faire exprès, une vue imprenable sur son décolleté...

[Cahir]

Face à trois loups, Cahir ne risquait pas d’en mener large. Il n’y avait que dans les contes qu’un héros pouvait affronter seul une meute de loups. Dans les faits, sauf à disposer de pouvoir magique, le combat serait rude. Cahir restait surpris de la hardiesse des loups. Pour être aussi furieux, il fallait généralement se trouver près de leurs lieux de reproduction, ou qu’ils soient particulièrement affamés au point d’en perdre toute retenue. Sinon, leur instinct de survie primait sur le reste.

*Est-ce vraiment une mauvaise rencontre, ou une attaque ?*

Cahir ignorait qui était cette femme, mais, vu sa beauté incroyable, elle devait sûrement être la prêtresse qu’il était parti chercher. Un loup s’avança lentement, bandant ses pattes, grognant en retroussant ses babines, permettant de voir ses dents pointues. Cahir se prépara à un rude combat… Lorsqu’un projectile frappa violemment le loup à la tête. Cahir haussa les sourcils, en voyant que la pierre avait provoqué une petite explosion au contact du museau du loup, qui se mit à couiner de douleur. Les deux autres loups en furent surpris, et Cahir put voir que la mystérieuse et magnifique blonde lançait sur eux des cailloux enchantés, renforçant visiblement l’impact et les dégâts de ses projectiles improvisés. Surpris et blessés, les loups finirent enfin par laisser parler leur instinct… Et s’enfuirent précipitamment.

Soufflant lentement, Cahir reposa son épée. La femme se rapprocha, et constata vite qu’il était blessé. Un loup avait effectivement mordu sa jambe, mais son pantalon renforcé avait amorti l’impact.

« Bonjour, Madame… C’est à moi de vous poser cette question, je… Je suis venu vous prêter assistance. »

Elle observa alors sa jambe, et s’agenouilla devant lui. Cahir sentit alors une douce énergie l’envahir, et frémit. Les prêtresses d’Aphrodite maîtrisaient la magie blanche, mais c’était à travers le biais de la magie rose, alors l’utilisation de soins curatifs était toujours… Très plaisante. Ressortant du combat, l’adrénaline de Cahir battait encore dans ses veines, et il frémit donc en regardant la chevelure blonde, et, surtout, l’épaisseur de ses seins. Il se rappela vaguement les villageois, qui avaient commenté la tauille impressionnante de son balcon, et se devait bien d’admettre qu’ils avaient raison. La douce voix de la prêtresse envahit l’espace, et Cahir sentit malgré lui ses joues s’empourprer.

« Je… Me-Merci, Madame… »

Ses plaies s’étaient refermées. Elle essuya ensuite le sang. Un bandage terminerait ensuite le sort le temps que la peau, bien rougie, cicatrise complètement. Cahir avait néanmoins l’esprit confus, et constata, quand la femme se redressa, qu’il avait une furieuse envie de l’embrasser, de lui faire l’amour sur place… Et qu’il avait assurément un début d’érection.

« Je m’appelle Cahir, Madame… Vous… Vous devez être cette prêtresse d’Aphrodite dont on a tant vanté la beauté ? Je dois dire que je m’attendais à rencontrer une beauté, mais… Vous êtes au-delà de ça… »

Cahir se sermonnait intérieurement. Il racontait n’importe quoi ! Ses paroles trahissaient sa pensée, et il savait que c’était lié à ce désir qui venait de naître en lui, ce désir qui vous faisait perdre la raison…

[Merveil]

« Bonjour, Madame… C’est à moi de vous poser cette question, je… Je suis venu vous prêter assistance. »

En entendant ces paroles, Merveil eut un petit sourire mi-ironique mi-amusé : en un sens, le jeune homme avait aidé la prêtresse contre les loups mais elle lui avait quand même prêté main forte. Échange de bons procédés en quelque sorte...

Il la remercia pour son sort de guérison puis se présenta comme étant Cahir.

- Merveil, enchantée ! fit-elle avec un sourire lumineux, qui devint encore plus radieux quand il se mit à vanter sa beauté. Certes, elle était habituée à ce que l'on chante ses louanges sur ce point et devrait être blasée mais en vérité elle était flattée surtout quand le compliment venait de la part de quelqu'un qui venait de lui sauver la vie.

Elle sentit que Cahir avait envie d'elle mais n'en montra rien.

- Bien, je pense qu'il vaut mieux ne pas trainer ici : d'autres loups pourraient venir, voire pire. Je crois qu'il y a une auberge fortifiée pas loin ; je l'ai aperçue quand j'étais perchée sur ce mégalithe. Ce sera l'endroit idéal pour nous restaurer, nous reposer et faire plus ample connaissance.

Elle avait dit ces derniers mots en lui jetant un regard en coin, dans lequel brillait une lueur malicieuse...

Un quart d'heure plus tard ils franchirent le seuil de La Dame Blanche. Il n'y avait pas encore trop de monde à cette heure-ci, aussi y-avait-il un léger brouhaha dans la vaste salle. Brouhaha qui cessa aussitôt quand Cahir et Merveil firent leur apparition. En fait le silence était tel qu'on aurait pu entendre une mouche péter (si tant est que ces insectes étaient capables d'émettre des flatulences). Inutile de préciser que ce n'était pas la présence du guerrier qui avait provoqué ce phénomène...

Ils se dirigèrent vers le comptoir où l'aubergiste qui, avant leur entrée, était occupé à nettoyer un verre avec un torchon (à croire que tous les tenanciers des quatre coins de la planète, sinon de l'univers, se livraient invariablement à cette activité).

- Une chambre et un repas chaud pour moi et mon compagnon ! fit-elle d'une voix mélodieuse au patron qui mit un temps à recouvrir ses esprits.

[Cahir]

Pour le coup, il suffisait de lire les yeux de Cahir pour comprendre que Merveil ne le laissait pas insensible… Qu’on lui jette la première pierre ! Maintenant que la menace des loups était évacuée, il dut attendre que Merveil lui rappelle de partir pour hocher la tête.

« Je… Euh… Oui, vous avez raison, Madame ! »

Cahir venait du Poney Dansant, mais Merveil préféra les guider vers La Dame Blanche, une autre auberge qui avait l’avantage d’être protégée. Merveil n’ayant plus de monture, Cahir siffla pour appeler son cheval, et grimpa dessus. Galamment, il proposa à Merveil de grimper en tendant sa main, mais la prêtresse d’Aphrodite grimpa derrière lui sans aide. Cahir soupira brièvement en sentant l’énorme poitrine de la femme s’enfoncer dans son dos. Il savait que la magie rose permettait de gonfler la poitrine des femmes, et il fallait bien s’attendre à cela venant d’une prêtresse d’Aphrodite. Originaire de Mijak, et de la haute société mijakienne, Cahir connaissait le culte d’Aphrodite, qui disposait au sein de la capitale d’un temple, et qui figurait parmi les cultes les plus populaires de l’Empire. Tout en chevauchant vers l’auberge de La Dame Blanche, Cahir se remémorait ces fois où, quand ses parents allaient au temple d’Aphrodite, le jeune Cahir était consigné chez lui. Il avait déjà eu la chance de voir plus jeune une prêtresse d’Aphrodite dans la domus de sa famille. Cahir pensait que c’était la première fois de sa vie qu’il avait eu une érection, en la voyant depuis la mezzanine de la cour…

L’apatride revint à lui en se rapprochant de l’auberge. Une palissade en bois épaisse entourait l’auberge, avec des archers installés sur des miradors. La porte de l’enceinte fut ouverte, et Cahir délaissa son cheval. Les gardes de l’auberge louchèrent sur la poitrine magnifique de Merveil, sans que cela ne la surprenne… Et le même spectacle s’opéra à l’intérieur de l’auberge, où les conversations se turent. Cahir et Merveil rentrèrent donc, et Merveil, de sa voix mélodieuse, sollicita une chambre. L’aubergiste opina lentement de la tête, et offrit à Merveil sa meilleure chambre. Cahir rejoignit leur chambre, et défit son armure, ainsi que son épée, qu’il laissa dans la chambre. Il se retourna ensuite vers Merveil. En étant seul avec elle, il avait bien du mal à se retenir, et avait désormais une belle érection.

« Je vais me laver, Merveil, on se retrouve pour le repas, d’accord ? »

Le guerrier se rendit ensuite dans la salle de bains. Une baignoire d’eau chaude avait été installée. Nu, il commença par se masturber avant de s’y rendre, et jouit finalement très vite, visualisant son sexe se perdre dans les monts moelleux de Merveil. Apaisé, Cahir put ensuite se laver, nettoyant son corps des traces de sang des bêtes. Il descendit ensuite en contrebas, et, comme on pouvait s’y attendre, Merveil attirait déjà autour d’elle bien des hommes. Cahir les invita à s’écarter, et s’assit face à elle.

« On peut dire que vous ne passez pas inaperçue, Merveil… Je suis navré si j’ai pu vous incommoder, mais… Pour ne rien vous cacher, vous êtes d’une beauté rare, Merveil. Est-ce pour ça que vous avez rejoint le culte d’Aphrodite ? »

[Merveil]

Ils montèrent dans leur chambre, la meilleure de l'établissement et elle l'était, assurément : spacieuse, elle était meublée avec goût et sentait bon la cire d'abeille. Un grand lit à baldaquin se trouvait au fond - devant une cheminée circulaire qu'un employé avait allumé au préalable - suffisamment grand en fait pour que quatre personnes puissent s'y coucher sans trop se gêner. Dans le coin opposé se trouvait une table ronde de taille moyenne et quatre chaises, idéal si l'on voulait prendre ses repas dans la chambre.

Cahir se débarrassa de son armure et de son épée et lui dit qu'il allait prendre un bain, en attendant de se voir pour le repas. Merveil hocha la tête : un bon bain ne lui ferait pas de mal vu le combat qu'il avait mené contre les loups. Pour sa part, la prêtresse n'en avait pas besoin d'autant, se contentant de faire un brin de toilette, se rafraichissant le visage dans une cuvette d'eau propre puis de réarranger sa chevelure. Malgré les récents évènements, la robe de Merveil était toujours aussi blanche et propre, n'avait aucun accroc ni déchirure, comme si elle venait tout juste de sortir de l'atelier de tissage : la Déesse lui avait fait un cadeau des plus merveilleux en lui offrant ce vêtement.

Quand on pense à "objet magique", on a tout de suite en tête les épées enchantées pouvant trancher la roche la plus dure comme dans du beurre, les anneaux d'invisibilité, les boucliers capables d'arrêter la charge d'un taureau, les armures protégeant contre les coups de massue d'un géant, les ceintures procurant la force d'un troll, etc. Mais on oublie que parfois ils peuvent revêtir des formes plus anodines comme une robe ou une tunique.

Merveil descendit dans la salle et aussitôt redevint le point de mire de l'assistance. Elle n'était nullement gênée de cette attention, s'en réjouissant même, elle qui attirait autrefois les moqueries et les rires méchants quand elle était Laideron. Dans les deux cas, elle ne laissait pas indifférent et il valait mieux une attention excessive que l'indifférence...

Cahir vint une bonne dizaine de minutes plus tard. Durant ce laps de temps, on lui avait payé à boire, offert quelques friandises et un petit attroupement s'était formé autour d'elle. Le jeune homme leur fit signe de déguerpir, sans animosité mais sans douceur non plus et s'assit en face d'elle.

« On peut dire que vous ne passez pas inaperçue, Merveil… Je suis navré si j’ai pu vous incommoder, mais… Pour ne rien vous cacher, vous êtes d’une beauté rare, Merveil. Est-ce pour ça que vous avez rejoint le culte d’Aphrodite ? »

Merveil ne répondit pas tout de suite, détaillant le guerrier qui avait meilleure mine et plus fière allure une fois le sang et la crasse enlevés.

- Eh bien, pour être honnête, je me suis abritée d'un orage sous le porche d'un temple d'Aphrodite et en attendant que le beau temps revienne, j'ai un peu visité le lieu de culte, discuté avec deux ou trois membres du clergé de la Déesse et, de fil en aiguille, ai décidé de rejoindre les rangs de ses prêtresses. Étonnamment, ils n'ont pas fait de difficultés pour m'y accueillir...

[Cahir]

Cahir avait délaissé son armure pour une tunique médiévale plus souple. Il constata vite que la présence de Merveil ne cessait de le troubler. Sa grande beauté était redoutable, mais il n’y avait pas que sa beauté. Son odeur, sa robe… Tout en elle était un appel à la volupté, au luxe, au désir… Elle lui expliqua avoir rejoint le culte en s’étant tout simplement abritée d’un orage en étant sous le porche d’un temple dédié à ce culte. Elle avait fini par se familiariser avec le culte, et par devenir une prêtresse. Il sourit quand elle avoua n’avoir pas eu trop de difficultés à les rejoindre.

« Ça, je ne suis pas si surpris que toi… Vu les attroupements que tu provoques… »

Lui-même faisait appel à toute sa discipline d’ancien chevalier mijakien pour rester stoïque, et pour s’efforcer de regarder ses yeux, et non la colossale poitrine qui se tendait sous sa robe. De fait, même s’il s’était rapproché, les autres clients continuaient à les observer. Et tous n’étaient pas aussi courtois que Cahir. Prenant conscience qu’il l’avait tutoyé, les joues de Cahir s’empourprèrent.

« Désolé, je ne voulais pas paraître cavalier en vous tutoyant… On m’a parlé d’une prêtresse d’Aphrodite à une auberge, et, si je vous ai cherché, c’est aussi parce que j’ai besoin d’aide. Voyez-vous, je cherche à atteindre un ancien sanctuaire à proximité du lac de Wyndamer. On m’a dit que ce sanctuaire elfique avait été scellé il y a des éons, mais, suite à l’Olympomachie, les sceaux ont été rompus. Je suis venu enquêter sur ce sanctuaire, et je me suis dit que l’aide d’une prêtresse d’Aphrodite ne serait pas de trop. Et puis, vu votre beauté, je me suis aussi dit que vous deviez savoir vous défendre. »

Vu sa beauté, en effet, elle devait sûrement avoir des gens qui traînaient lourdement autour d’elle. Cahir n’avait qu’à voir certains regards pour comprendre qu’il valait mieux qu’il reste près d’elle cette nuit. Il se racla la gorge, et lui expliqua que sa mission lui avait été donnée par une organisation conçue après l’Olympomachie par plusieurs dignitaires mijakiens, la Nouvelle-Confrérie de Maturin, qui comprenait notamment parmi ses membres la vampire Mélinda Warren, qui était elle aussi devenue récemment une prêtresse d’Aphrodite. L’organisation comprenait aussi l’une des filles de la Déesse, la Reine Alice Korvander.

« Il existe une organisation terroriste, l’Affiliation… Enfin, c’est plus une espèce de nébuleuse de différentes organisations criminelles sous une bannière commune. J’ignore ce qui se trouve dans ce sanctuaire, mais cela intéresse aussi l’Affiliation, et cela ne présage rien de bon. Je sais que vous étiez venue ici pour bénir des récoltes, mais je pense que notre rencontre n’est pas totalement liée au hasard. Je serai honoré que vous acceptiez de me prêter votre concours, Dame Merveil. »

Parler de sa mission lui avait fait oublier ce désir à l’égard de Merveil qui refusait de partir totalement…

[Merveil]

« Ça, je ne suis pas si surpris que toi… Vu les attroupements que tu provoques… »

Merveil ne répondit pas tout de suite, jetant des regards à droite, à gauche et derrière elle.

- Mieux vaut un excès d'attention, même négative, que l'indifférence... répondit-elle avec une petite pointe de malice dans la voix. Sinon, il vous faut savoir que je ne suis pas vraiment une prêtresse au sens propre du terme mais une hum... comment dit-on déjà ? Une Élue Divine, voila c'est ça ! Grosso modo, les Élus Divins ont une sorte de connexion avec leur divinité, plus intime on va dire. Nous lançons les mêmes sorts que les prêtres mais nous le faisons sans apprentissage particulier ; pour faire une comparaison, c'est comme les Ensorceleurs et les Magiciens : les premiers ont un don inné pour la Magie tandis que les seconds ont acquis leur Art par l'étude et la pratique.

Merveil se versa un peu de vin dans sa coupe, vin qu'on lui avait offert, et en proposa à Cahir d'un geste gracieux. Elle but une gorgée du breuvage avant de poursuivre :

- Les Élus Divins ne sont pas rattachés à un temple en particulier et sont donc libres de parcourir la lande, portant la bonne parole de leur dieu ou déesse. Personnellement, ça me convient parfaitement : j'aime le grand air et les grands espaces et n'aime pas être claquemurée dans un lieu précis, dans une routine quotidienne. Et puis bon, Aphrodite est une divinité point trop exigeante, clémente même et non un de ces dieux complexés et cul-serrés qui vous font passer de démons en désert, vous soumettent à mille épreuves stupides pour tester votre foi, vous obligent à vivre dans la pauvreté et l'abstinence avant de vous faire périr de façon douloureuse et spectaculaire sous les prétextes les plus futiles, quand prétextes il y a. Et puis avec elle, je ne manque ni de distractions, ni d'exercices physiques...

Elle avait prononcé ces dernières paroles avec un petit sourire coquin, qui en disait long sur la nature de ces distractions.

Cahir, entra dans le vif du sujet : suite à l'Olympomachie, un sanctuaire secret avait été dévoilé et il était possible qu'une organisation nommée l'Affiliation, et qui n'avait pas l'air de comporter des bons samaritains, soit intéressée par cet endroit. Cahir avait reçu comme mission de s'y rendre, si possible avant les sbires de l'Affiliation et l'aide de Merveil ne serait pas de trop.

Quand elle entendit le nom de "Maturin", cela la fit revenir quelques années en arrière, du temps où elle était Laideron : Maturin était en quelque sorte l'idiot du village où elle vivait, le seul en fait qui lui avait témoigné de la gentillesse et qui l'avait protégé à quelques reprises contre les garnements. Merveil se demanda ce qu'il était devenu par la suite. Pour masquer son trouble, elle but une nouvelle gorgée de vin avant de répondre :

- C'est d'accord ! fit-elle simplement, d'une voix forte et déterminée. On aurait pu s'attendre à ce qu'elle prononce une phrase du type "j'en serais fort honorée." ou "je suis flattée que vous ayez pensé à moi pour cette noble quête !" mais de temps à autre la jeune femme aimait faire preuve de simplicité.

- Mais, dites-moi, reprit-elle d'une voix plus douce, votre présence dans le champs de mégalithes n'était pas vraiment due au hasard, n'est-ce pas ?

[Cahir]

Une Élue Divine… Cahir en avait déjà entendu parler, mais la religion n’était pas sa spécialité. Merveil était donc une prêtresse, mais pas uniquement. Son statut particulier la rendait finalement assez volage, capable d’aller où bon lui semble, sans être forcément rattachée à un temple. Cahir assimila cela aux paladins, qui bénéficiant de la grâce de leurs dieux, et pouvaient aller où ils voulaient pour défendre les lieux de culte ou mener des croisades. La spécificité de Merveil était aussi liée au fait qu’elle partageait une connexion spéciale avec Aphrodite, un lien particulier qui lui permettait de bénéficier de ses faveurs, et de pouvoir utiliser plus facilement que d’autres ses compétences.

« Je vois… Vous êtes une femme pleine d’atouts. »

En tout cas, la prêtresse accepta de le suivre. Cahir se réfugiait dans un léger vin cuit que l’aubergiste remit. Il n’y avait pas que sa poitrine ou sa beauté qui étaient hors du commun : son odeur, sa voix… Tout en elle exsudait le désir, la beauté, le charme… Cahir n’avait jamais rencontré une femme pareille, et il s’était absorbé dans ce qu’elle disait, observant la façon dont ses lèvres remuaient, se visualisant les embrasser, se lover contre elle…

Merveil l’interrogea alors sur sa présence dans le champ de mégalithes.

« Pas vraiment, non… Comme je vous l’ai dit, votre réputation vous a précédé, j’ai été à une auberge où on m’a parlé de vous… En des termes tout à fait élogieux, je vous rassure. Ils m’ont donné une indication pour vous retrouver. Je ne savais pas que vous seriez en danger, mais on m’avait demandé de vous retrouver, en pensant que vous pourriez m’aider avec les sceaux et les glyphes du sanctuaire. »

L’ancien apatride sortit de ses affaires un parchemin. Il le tendit à Merveil, qui put reconnaître l’encre si spécifique utilisée par les cultistes d’Aphrodite, ainsi que le sceau du Grand-Temple de la capitale de Mijak. La Grande Prêtresse demandait à Merveil de prêter son assistance à Cahir.

« J’aurai pu vous le remettre plus tôt, mais je ne voulais pas que vous vous sentiez forcée de m’aider. Je suis heureux de constater que votre courage est à la hauteur de votre beauté… Et vous prie de bien vouloir m’excuser si j’insiste un peu trop sur votre beauté… »

Une chose semblait claire avec Cahir, il était plus doué à manipuler sa lame qu’à courtiser les dames, a fortiori une telle beauté !

[Merveil]

« Je vois… Vous êtes une femme pleine d’atouts. » conclut Cahir, suite aux informations fournies par Merveil quant à sa qualité d’Élue Divine d'Aphrodite.

Cette dernière sourit et servit le guerrier qui avait accepté une coupe de vin. Ce dernier était épicé et réchauffait aussi bien le corps que l'âme.

- Oh oui, j'en ai de sacrés, des atouts... sourit-elle à l'homme qui répondit ensuite à la question du pourquoi du comment de sa présence au cercle de mégalithes, sauvant Merveil des loups.

Bien entendu, leur rencontre n'était pas fortuite : Cahir se trouvait dans une auberge quand il avait entendu parler d'elle par des paysans du coin, en termes élogieux, cela allait de soi (comprenez par là qu'ils avaient fantasmé sur sa paire de seins), indiquant à Cahir la direction qu'elle avait prise, avec la caravane. La suite était simple à deviner : il avait dû tomber sur ce qu'il restait du convoi, puis utilisé ses talents de pisteur pour la retrouver juchée sur l'un des mégalithes, encerclée par les loups.
A vrai dire, on lui avait demandé de la retrouver afin de solliciter son aide concernant ce mystérieux sanctuaire, appuyant ses propos en lui montrant un parchemin portant le sceau du Grand Temple d'Aphrodite de Mijak et dans lequel la Grande-Prêtresse demandait à la jeune femme de prêter assistance à Cahir.

« J’aurai pu vous le remettre plus tôt, mais je ne voulais pas que vous vous sentiez forcée de m’aider. Je suis heureux de constater que votre courage est à la hauteur de votre beauté… Et vous prie de bien vouloir m’excuser si j’insiste un peu trop sur votre beauté… »

- Hé hé, vous ne seriez pas en train de me faire la cour ?! demanda-t-elle avec un air faussement innocent, posant une main sur sa poitrine. Quoi qu'il en soit, quand partons-nous pour ce mystérieux sanctuaire ? Demain, au chant du coq ? Mieux vaut pas trainer si l'on ne veut pas se faire doubler par les membres de la secte Machin-chouette...

[Cahir]

Lui, lui faire la cour ? Cette idée fit naître chez le jeune homme une chaleur inhabituelle. Il est vrai que Merveil avait d’indéniables arguments, d’incontestables atouts. À ce stade, il était toutefois difficile pour Cahir de prétendre qu’il ressentait autre chose qu’un simple désir physique, bestial, sexuel. Très clairement, il ne connaissait pas assez Merveil pour prétendre être amoureux d’elle, et il n’était d’ailleurs nullement convaincu que la jeune femme soit en quête d’une quelconque relation amoureuse. Elle était libre et indépendante, trop forte pour envisager une relation sérieuse. Et puis, lui-même n’avait pas vraiment de foyer, c’était un aventurier, il n’avait pas vraiment le temps de penser à ce genre de choses, à se sédentariser.

Prenant soudainement conscience qu’il était resté silencieux un peu trop longtemps, Cahir se racla la gorge, et revint sur ce qu’elle avait dit.

« Oui, il vaut mieux partir demain matin, c’est dangereux de voyager de nuit, et… Enfin, il faut bien se reposer un peu. »

Difficile de contourner ce qu’elle avait dit. Cahir ne craignait pas vraiment de se faire devancer par les forces de l’Affiliation, il savait où était le sanctuaire, et, à vrai dire, le sanctuaire devait grouiller de monstres. Que des bandits l’attaquent en premier et perdent des hommes, cela l’arrangeait plutôt bien. Il était surtout venu en éclaireur, pour sécuriser des reliques, et restaurer la protection de l’Olympe sur ce site sacré. Restait néanmoins le sujet central, qu’il avait pudiquement concerné : Merveil, et ce qu’il éprouvait pour elle.

« Je ne tiens pas à vous mentir, Merveil. Je vous trouve magnifique, d’une beauté à couper le souffle… Ce qui ne devrait pas vous surprendre. Je pense que vous feriez douter l’orientation sexuelle de n’importe qui. Aussi, il serait sans doute préférable que je vous loue une chambre à part, car, si nous devions dormir dans la même chambre, je ne suis pas sûr de ce que je pourrais faire… Et je refuse de vous manquer de respect, ou que vous interprétiez mal l’attirance que j’ai pour vous. »

Il se racla à nouveau la gorge, et avala un peu d’eau.

« Il… Il fait chaud tout d’un coup, non ? »

[Merveil]

Cahir était d'accord pour partir dès le lendemain, jugeant inutile de voyager de nuit. Puis, d'une voix quelque peu enrouée par l'émotion, il enchaina sur sa beauté (pour ne pas changer) avant de lui dire qu'il serait plus sage qu'ils fassent chambre à part, histoire d'éviter tout débordement.

Merveil l'avait écouté sans rien dire, la main sous le menton, se contentant dans un premier temps d'enlever discrètement son escarpin droit avant d'effleurer de son pied nu le mollet du jeune homme pour ensuite remonter sensuellement vers la cuisse puis l'entrejambe, caressant cette dernière partie avec un curieux mélange de force et de douceur. Malgré la calotte en cuir, elle pouvait sentir à quel point il était dur, aussi dur que du bois sec.

Durant toute l'opération, elle avait rivé son regard sur celui du jeune homme, un regard mi-gourmand mi amusé, un demi-sourire aux lèvres. Quand il eut fini de parler, ou plutôt de bredouiller, elle lui dit simplement :

- Viens !

Un mot d'une seule syllabe mais chargé d'une puissance extraordinaire dans la bouche de la prêtresse d'Aphrodite qui se leva ensuite pour gravir l'escalier menant à sa chambre, suivie par les regards hallucinés des autres convives de l'auberge. Même la servante restait hypnotisée par le lent balancement des hanches de la belle quand elle avait monté les degrés...

Ils entrèrent à l'intérieur et Merveil s'avança au centre de la pièce et défit les bretelles de sa robe, exposant sa poitrine opulente. Les mamelons étaient déjà raidis par l'excitation et la lumière mourante du feu de cheminée renvoyait des reflets étranges et chatoyants sur sa peau nue. Elle laissa choir son vêtement qui glissa au sol dans un doux murmure. Si l'on exceptait son cache-sexe, elle était complètement nue, offrant le spectacle de son corps parfait aux regards de Cahir.

[Cahir]

En un sens, Cahir aurait préféré affronter de nouveau les loups sauvages que croiser le regard envoûtant de Merveil. Il avait beau être un guerrier expérimenté, avoir mené avec brio ses classes militaires, il avait l’impression d’être un jeune puceau en train de courtiser sa dame. Oh, comme tout ça le mettait mal à l’aise ! Il se sentait si… Faible. Il ne pouvait pas lutter contre la beauté de Merveil, et ressemblait à tous ces types qui lui tournaient autour à l’auberge. Cahir aurait voulu avoir plus de stature, plus de hauteur, mais il fallait une femme comme Merveil pour vous rappeler que, aussi évolué et civilisé que vous êtes, il subsistait toujours en vous une part reptilienne, une âme sauvage et passionnelle. Cahir sentait ce désir nihiliste, cette soif. Son ultime digue, c’était finalement que Merveil accepte de céder à cette passion commune, ou qu’ils fassent chambre à part. Il se masturberait, ou il s’entraînerait durement, pour penser à autre chose que sa longue chevelure, ce parfum enivrant, ses yeux dans lesquels il se plongeait… Ou, bien sûr, son incroyable paire de seins.

Il frémit en sentant le pied de Merveil caresser sa cheville. Ensuite, elle ne lui laissa pas le choix. Elle attrapa sa main, et ils filèrent à l’étage, sous les regards envieux et jaloux des clients de la taverne. Cahir n’y pensa même pas, et, le temps qu’il reprenne ses esprits, Merveil était nue face à lui.

« Oh… »

Elle s’offrait à lui, dans le plus simple appareil, ne portant qu’un très léger cache-sexe doré. Cahir déglutit, sentant sa gorge s’assécher encore, tandis que plusieurs fonctions de son cerveau s’éteignaient, et que d’autres s’enclenchaient… Comme quand il s’apprêtait à se battre. C’était toutefois une épée en chair qu’il allait sortir de son fourreau.

« Merveil… Vous êtes magnifique… »

Cahir se déshabilla alors. Il ne portait pas son armure, et défit rapidement sa chemise, puis tira sur les nœuds de son pantalon, qui tomba au sol. Ses chaussures suivirent dans la foulée, tout comme son boxer. Il finit ainsi tout nu. Un torse glabre, finement musclé. Ici et là, on voyait quelques cicatrices, les traces des combats qu’il avait eus au cours de sa vie. Et, enfin, un sexe joyeusement dressé, raidi et au garde-à-vous. Cahir franchit lentement l’espace qui les séparait. Un feu crépitait dans l’âtre de la cheminée. Il y avait une peau de bête sur le sol, une peau d’ours blanc. Merveil était dessus, et lui la rejoignit. Il sentit ensuite les seins de la femme glisser contre son torse. Sa poitrine colossale échappa toutefois brièvement à son attention. Son regard, ce regard… Oh, ces yeux intenses, irrésistibles !

Il posa ses mains sur les hanches de Merveil, caressant sa peau chaude et douce.

« Tout en toi est incroyable… »

Sa main remonta pour appuyer sur la nuque de Merveil. Il se pencha encore, et l’embrassa tendrement, sa verge en érection se frottant contre la peau nue de Merveil, glissant sur son cache-sexe… Et il maintint le baiser, soupirant doucement contre elle.