The Multiversity

Du temps avait passé depuis la première mission de Rinako ainsi que la seconde dès le lendemain, ce qui l'avait conduite à partir aider l'armée uatéenne ainsi que le groupe d'Héroïnes – du moins une partie pour une étrange mission. Suki n'avait eu que les grosses lignes car durant l'absence du sergent, elle aussi n'avait pas chômé avec sa mission en compagnie du colonel Nova Terra et les Formiens ainsi que toutes les joyeuses choses de la vie et des missions. Durant tout ce temps, elle avait à peine eu le temps de souffler. Sa mission n'avait pas duré une semaine comme Rinako mais quand même, c'était long, entre toutes les petites ou grosses missions, elle était exténuée! Elle avait à peine eu le temps de méditer sur sa soirée avec sa nouvelle camarade. Elle avait eu un petit coup dans le nez mais rien de grave, c'était surtout passé du chaud au froid qui l'avait frappée. Mais elle se souvenait de sa nuit en compagnie de Rinako, ses petites fois où elle s'était réveillée, dans ses bras, à se rendormir avec un sourire niais sur les lèvres sur son corps chaud et sur son t-shirt. Tout ça à cause d'une petite phrase lancée et renvoyée par cette dernière avant de dormir aussi avec Morphée. Elle aurait aimé en parler au réveil ou du moins dans la journée mais son absence plus le fait d'être appelée ailleurs n'avait pas aidé à en parler. Et même en une semaine, elle ne savait toujours pas comment en parler plus sérieusement, entre adultes... Adulte... Elle n'avait que dix-sept ans! Pour ce qui est de tenir une arme, la démonter, remonter, la charger, décharger, bloquer, améliorer aussi, elle savait y faire! Aborder ce genre de sujet, elle avait l'impression de monter une arme pièce par pièce avec les dents!

Déesse merci, il y avait la réunion officielle pour remettre une médaille à Rinako pour sa mission avec l'armée uatéenne. Seconde mission, première médaille, une femme qui grimpait vite dans l'armée! Un détail qui plaisait à Suki néanmoins. Cette réunion se fit au sein de l'armée, devant les troupes dans la grande base de Caelestis, en présence d'invitées que Rinako aurait pu inviter mais Suki n'avait pas jeté un coup d'œil à cette liste. Elle savait juste qu'elle serait présente avec Rinako et les cinq autres Celkhanes qui formaient le Commando – c'est-à-dire le Colonel Sokoku, Major Akisada et ainsi de suite. Rinako sera sur l'estrade, recevra la médaille, remerciement et autres avant de serrer la main et un salut militaire de la part de ses consœurs – donc elle aussi – ainsi qu'éventuellement un petit mot gentil, d'encouragement. Rinako pouvait être fière, même Suki n'avait pas encore eu de médaille à ce jour mais elle ne courrait pas après la gloire, juste à la libération des esclaves... En toute honnêteté, elle voulait quand même prendre un peu de galon sur les autres qui lui sont supérieures mais ça, ce n'est qu'un complexe d'infériorité. C'est pour ça que la médaille de Rinako ne lui fait ni chaud, ni froid. Une médaille pour le colonel Sokoku et elle grince des dents en pensant à elle. Entre certaines missions, elle avait à peine le temps de voir les petites à l'orphelinat, surtout la petite blonde de la mission avec Rinako. Chacun de ses passages l'obligeait à l'avoir accroché autour du cou comme un koala. Bien sur, elle s'en détachait facilement mais à la place, elle l'avait accroché à sa main ou sa jambe. Il y avait bien quelque chose d'étrange chez cette gamine, entre elles mais ce n'était pas son problème du jour.

Non, son problème du jour se déroulait le soir même après la remise de médailles à Rinako. Car elle lui avait promis cette fameuse sortie à un parc d'attractions si elle voulait, ce jour n'était pas encore-là mais Rinako avait souhaiter lui parler en privée ce soir et Suki proposa sa chambre. Du coup, la voilà le soir dans sa chambre à la caserne à se préparer... Donc, c'était rendez-vous ce soir pour en parler, sans avoir l'excuse d'une mission pour retarder la chose évidemment. Il valait mieux être d'accord rapidement, savoir qu'aucune des deux Celkhanes ne pensait pas de travers ce qu'elles avaient dit. Suki aura-t-elle une relation amoureuse, une vraie, enfin? Elle en savait rien mais elle allait le savoir dans quelque temps, quelques heures. Sans Rinako qui lui aurait donné ce message, jamais elle n'aurait osé lui parler de ça et un tel rendez-vous donné par Suki aurait pu être donné que si elles étaient seules, enfermé dans une pièce avec rien d'autre à dire que ça. Rien que d'y penser elle était stressée mais elle allait l'attendre donc dans sa chambre, comme prévu... Sa tenue classique d'armée, bien coiffé comme d'habitude, quelque peu anxieuse, la pauvre ne savait pas comment bien traiter ce genre de situation... Puis voilà enfin le moment, quelques coups à la porte, Suki allait ouvrir pour voir le sergent Yukimitsu. Un bref petit sourire timide ou gêné, voir les deux. Qu'allait-elle devoir faire, dire, elle n'en savait rien! À part lui faire signe d'entrée, elle ne savait pas quoi faire! En amour, même une collégienne aurait pu savoir quoi faire!

Je ne sais pas ce que j’espérais en rentrant sur Caelestis, mais je n’en espérais pas tant. À peine de foutu ruban autour de mon cou je me suis débrouillée pour disparaître. J’avais quelqu’un à voir. Chakwas, la doctoresse qui m’a mise au monde et nous a suivies ma mère et moi à une époque. Le tribunal a statué en audience préliminaire, Chakwas n’est pas tenue responsable de ce qu’elle a dû faire pour les esclavagistes qui les retenaient sa fille et elle. Mais elle n’est plus qu’une généraliste de quartier. Tant qu’elle peut vivre à l’air libre avec sa fille ça lui va bien, et je lui envie cette capacité à laisser filer. Moi je ne peux pas, et en sortant de son petit appartement mes choix sont déjà faits.

« Rinako... Ne va pas faire une bêtise. »

Sur le seuil de sa porte je reste silencieuse une seconde, triturant ma broche entre mes doigts.

« Merci pour tout, docteur. »

Je pars à grands pas jusqu’à ma chambre. Si on m’avait dit que les cadeaux des réfugiées qui me connaissent me serviraient un jour, je ne l’aurais pas cru. Bien sûr c’est joli, et très gentil de leur part. C’est surtout artisanal, rien à voir avec les vêtements fabriqués à Tekhos ou sur Caelestis. Un gros sac en de voyage en cuir qu’une famille m’a offert à mon entrée à l’armée, dans lequel je pouvais entrer toute entière à l’époque. J’y fourre quelques vêtements, une couverture, des bijoux. Une dague aussi. Avant demain matin j’aurais quitté Caelestis. Il me reste à découvrir si j’aurais une raison de revenir.

Pas de petite robe cette fois, pas de bar ni de glace. Suki est ma dernière incertitude, je n’ai aucune idée de ce qui va se passer entre nous ce soir. J’ai peut-être tort d’y aller ? Je ferais sans doute mieux de virer mon uniforme et foutre le camp loin de tous ces mensonges. Ça nous épargnerait toutes les deux. Je me dirige vers les quartiers des officiers en me disant que je verrais bien. D’une façon ou d’une autre on en souffrira toutes les deux, elle plus que moi je pense. Arrivée devant sa porte j’hésite une dernière fois, puis je frappe.

Suki Tetsuhiko. Aussi belle que cet après-midi quand on me l’a collée sous le nez pendant trois heures sans le droit de lui parler ou de trop la regarder. Aussi belle, et bien moins glaciale. J’ai le cœur qui bat vite et fort en entrant dans sa chambre, sur son invitation. Je m’efforce de sourire mais c’est difficile. Son sourire à elle n’est pas difficile à décoder, elle aurait sans doute eu le même si elle s’était réveillée près de moi il y a un peu plus d’une semaine. Le mien tremble parce qu’il retient bien plus. J’entrouvre les lèvres en cherchant quoi dire. Elle sait déjà où j’étais ce matin-là, et pourquoi.

Et puis merde ! Je franchis le pas qui nous sépare et la prends dans mes bras. Je la serre fort, enfouissant mon visage au creux de son cou.

« Pardon d’être partie comme ça. Tu m’as manqué, Suki. »

Pas de vouvoiement, pas de lieutenante, fini la comédie. Elle est tout ce qui me reste ici, tout ce qui pourrait encore me retenir et me ramener à la raison. Parce que déserter pour assouvir une vengeance à peine plus vieille que moi, au risque de mourir ou de ne pas pouvoir revenir : c’est pas qu’une bêtise. C’est de la folie, et si je la perds c’est tout ce qui me restera. Depuis la nuit qu’on a passées ensemble une seule chose n’a pas changé, la dernière qui compte encore.

Je respire à pleins poumons son odeur, l’air qui l’entoure et que je voudrais respirer pour toujours. Et je redresse la tête pour la regarder dans les yeux. J’espère...

« Je le pensais. Quand je t’ai dit que je t’aimais j’étais sincère. Je le pense encore, Suki. »

Et voilà. Trop simple, trop brutal mais c’est dit. Je suis à ses pieds. À elle de me relever ou de m’achever.

Cela faisait environ une semaine que Suki attendait ce moment, ces retrouvailles avec la dernière sergent promue et médaillée en si peu de temps, Rinako. Elle se sentait si impatiente mais aussi si stressée, ne sachant pas quoi faire ou dire dans X situation! Parfois en mission, il était bon d'improviser surtout si le plan initial ne se déroulait pas comme prévu. Elle devrait donc agir aussi de même ici, agir que sur l'impulsion, improviser quoi qu'il arrive, faire en sorte que tout fonctionne et s'enclenche comme le mécanisme démodé de ses vieilles horloges? Ce genre de chose était si rare sur Caelestis, ici, c'était surtout les choses modernes, comme à Uatis. Mais bref, elle n'était pas là pour penser mécanisme de ce genre-là. Laissant la jeune femme pénétrer dans sa chambre, une seconde fois, elle fit profil bas. Elle n'était déjà pas bien grande, même Rinako la dépassait un peu mais là, en se faisant petite, ça devait être bizarre? Elle qui était si confiante sur le terrain, la voilà si calme et étrange? Prise soudainement dans les bras du sergent Yukimitsu, elle ouvre la bouche pour tenter de dire quelque chose mais elle n'y arrive pas. Elle tente, elle bouge les lèvres mais cette situation lui est si inconnue quand elle est consciente qu'elle ne sait pas comment réagir? Analysé la situation tout d'abord! Serrer dans ses bras, sa tête dans son cou, elle l'avait manqué. Il faut se calmer... Et faire à peu près la même chose, coup de chance! C'est exactement ce qu'elle ressentait aussi!

« Je... tu m'à m-manqué toi aussi... »

Passant ses bras autour de sa taille, elle respirait l'odeur de ses cheveux roses, en sentait sa respiration sur son cou, elle se sentait soudainement apaisée. Encore un peu stressée mais avec déjà moins de pression. Elles ne pouvaient pas rester ainsi la soirée, voire la nuit et remettre la conversation a plus tard en espérant franchir peu à peu le pas pour enfin se parler et mettre les choses au clair? Non, non, non! Sinon ça ne finira jamais. Lorsqu'elle redresse la tête, c'est pour lui dire ce que Suki se demandait depuis une semaine? Une imagination? Le fruit de l'alcool mélangé à un rêve? Comme elle n'était pas clean à cent pour cent, elle n'avait pas tiré de conclusion hâtive mais là, c'était clair! Rinako n'avait rien bu, seulement mangé de la glace. Et à moins que ses sucreries avaient un effet d'alcool sur elle, elle était clean. Maintenant face à ses propos, elle ne savait pas quoi dire! Elle l'observait, cherchant à fuir son regard mais où? En bas, en haut, observer le lit, la porte, la malle, le plafond? Elle avait l'impression que guider son regard ailleurs que celui de Rinako serait un choix décisif pour sa vie. Bien sur qu'elle aussi elle l'aimait. Elle était un rien saoul ce soir-là mais la vérité est dans le vin! Ça marche aussi avec la vodka et autres alcools. Suki ouvrit doucement la bouche pour parler, au moins lui renvoyer la balle pour la mettre au courant elle aussi mais... c'était difficile!

Suki imita Rinako, fourrant son nez dans le cou et les cheveux de la jeune femme, fuyant son regard certes mais se montrant tout de même affectueuse. Allez, il fallait avouer ses quelques mots. Elle était capable de liquider des esclavagistes, homme ou femme, libérer des esclaves et occasionnellement liquider aussi des Formiens et elle n'était pas capable d'ouvrir son cœur à une femme? Plus jeune et moins intimidante qu'elle en plus? Bravo! Depuis l'affaire Mélinda Warren et même un peu avant, Suki rêvait d'une situation amoureuse stable, peut-être pas jouer les minettes en fleur qui s'épanouissait devant un coucher de soleil mais au moins avoir une personne qu'elle aimait à ses côtés, partager sa vie, vivre ensemble, heureuse! Et là, ce n'était plus une perche de tendue pour elle, et elle était incapable de mettre un point à cette recherche. Fermant les yeux de toutes ses forces – comme aveuglé par une grenade aveuglante – elle ouvrait la bouche, prenant son courage, elle le chargeait dans le fusil qu'était sa bouche, elle devait appuyer sur la détente qu'était son cœur pour envoyer ses sentiments. Rien de romantique mais Suki ne savait penser qu'en façon de soldate.

« M-moi... moi au-aussi, Ri... Rinako... »

La Suki détendu du soir avait laissé place à une Suki très intimidé par l'amour mais au moins elle venait de réussir cette périlleuse mission qu'était d'ouvrir son cœur. Elle s'écartait d'elle pour mieux laisser sa voix se faire entendre et que le sergent Yukimitsu puisse la voir par la même occasion mais l'un comme l'autre, ça ne serait pas facile. La voix basse mais toujours plus forte qu'étouffer sur son cou et la tête baissé, laissant au moins voir ses cheveux d'or tomber le long de son corps. Ses mains étaient jointes dans le bas du dos de la Celkhane, ayant du mal à lever le regard vers elle sans être bloqué par sa timidité amoureuse.

« Tu sais... quand j'ai appris que tu étais parti pour une mission avec Tékhos... j'étais quand même fière de savoir que tu faisais déjà tes premiers pas sans moi ou avec une autre supérieure... mais... j'étais aussi inquiète, surtout lorsque j'ai appris que tu avais été blessé... Au moins, tu vas beaucoup mieux maintenant... »

Enfin elle osa, elle releva la tête en souriant, rien d'intimidant dans sa voix, pas de sourcils froncés, elle avait l'air soudainement plus calme et plus douce, une sorte de seconde Suki, celle qui était la moins souvent présente. Recto-verso, voilà le second côté de la lieutenante de Caelestis. Son regard était plongé dans le sien quelques secondes – minutes, qui sait? – avant de rougir en détournant son regard avec un léger sourire en coin, embarrassée...

« Désolé... je suis vraiment nulle quand il s'agit... d'amour... »

Avoua-t-elle en décrochant ses mains pour les poser sur les hanches de Rinako, sans pour autant tenter quoi que ce soit. Tous ses trucs à l'eau de rose, ce n'était vraiment pas sa tasse de thé! Même si elle savait que ses parents s'étaient rencontré dans l'armée comme elle et Rinako, elle n'avait jamais posé la question de savoir comment elles s'étaient attirée? Elle connaissait leur grade, certaines de leurs missions et même quelques détails secrets de ses missions mais pour ce qui était de leur liaison amoureuse, ça restait un mystère! Comme quoi, elle aurait dû quand même se renseigner un minimum, avoir des bases pour cette situation par exemple...

Elle tremble tellement dans mes bras qu’un instant j’ai peur de me faire rembarrer. Je ne sais pas ce que je serais capable de faire s’il en m’envoyait sur les roses, mais je l’aurais bien cherché. Elle ferme les yeux, elle se force, elle va quand même pas dire non ? Déesse, je sais qu’on se parle pas souvent mais pitié qu’elle dise quelque chose !

« M-moi... moi au-aussi, Ri... Rinako... »

J’ai l’impression de prendre un coup derrière la tête. Un léger vertige me fait serrer les bras un peu plus fort autour d’elle. J’ai envie de pleurer et de hurler de joie ! Elle aussi était sérieuse : elle m’aime. Si je ne devais pas calmer mon souffle je pourrais... Aucune idée. Maintenant que c’est dit on fait quoi ? Comme elle s’écarte un peu, je remonte la main droite jusque dans son cou pour caresser sa joue. Je suis plus grande qu’elle. J’avais jamais remarqué. C’est bizarre, non ? Mais je ne l’avais jamais vue dans cet état. Je suis pas en train de rêvée quand même ? Avec ce qui m’est arrivé dans la Fourmilière j’ai de quoi douté. Je suis tellement heureuse, c’est pas croyable !

Ma joie retombe un peu avec ce qu’elle me dit. Je m’en veux qu’elle se soit fait du souci, mais d’un autre côté je suis contente qu’elle ait pensé à moi. Une semaine de coma ou je sais pas trop quoi. D’après celles qui ont recollé les morceaux j’étais pas blessée : j’étais carrément morte. Je préfère éviter les détails. D’autant que j’ai du mal à oublier le coup du vagin de Nika plein de sable, même si la dernière fois que je l’ai vu il était plus inondé qu’ensablé... Je crois que ces détails aussi je vais les esquiver.

Et le temps d’entrouvrir la bouche pour répondre je me retrouve aspirée par son regard. Qu’est-ce qu’elle est belle ! Et qu’est-ce qu’elle est timide, aussi. Difficile de reconnaître le lieutenant Tetsuhiko quand elle me regarde avec ses yeux. Elle les détourne. Je ne sais pas combien de temps on a passé à se fixer mais une ou deux heures de plus ne m’auraient pas dérangé. Elle est gênée, mais elle n’est pas la seule. Mais avec ce que je faisais hier à la même heure avec les Spänje Sisters il y a de quoi ! C’est que je compte bien en faire encore plus avec elle. Mais c’est pas encore l’ambiance.

Chacune son tic nerveux, moi je passe une mèche de cheveux derrière mon oreille.

« Bin... Je suis pas une championne non plus, mon l... Suki... Désolée, je suis nerveuse. »

Et elle était au premier rang pour voir que ce n’était pas le cas à la remise de ma médaille, au contraire. Je passe la langue entre mes lèvres. Et oui, ma fille ! Elle a un an de plus et quelques centimètres de moins : t’as aucune chance de te cacher quand tu rougis. Je prends une petite inspiration pour me calmer. Qu’est-ce qu’elle est belle... Ma main revient se nicher au creux de son cou. Je ne suis pas très sûre que ce soit le moment d’en remettre une couche avec ma petite aventure mortelle, et ça risquerait de déborder sur d’autres choses auxquelles je ne veux pas la mêler. Pour l’instant je suis heureuse de la revoir et je ne veux pas me priver de ce bonheur.

Je ne veux pas non plus lui sauter dessus comme une sauvage... En fait si, mais pas à une heure de l’après-midi. Je devrais peut-être arrêter de lui caresser la joue avec mon pouce, mais mon bras n’est pas de cet avis. Je détourne les yeux une seconde, le temps de souffler, puis je reviens à elle. Bon, au moins c’est clair : on sait pas plus l’une que l’autre ce qu’on est sensées faire ou dire. Mais heureusement on avait vaguement prévu de faire quelque chose.

« Je dois t’avouer quelque chose : on m’a demandé de rogner ma première journée de perm’ pour parader devant les Tekhanes... Mais honnêtement j’en ai pas très envie. »

Je souris de la bêtise que e vais sortir.

« Vous voulez bien couvrir mon repli de la zone de feu et m’escorter au parc d’attraction, mon lieutenant ? »

J’espère que ça va pas poser de problème. Les soldates qui s’envoient en l’air ne prennent pas vraiment soin de se cacher hors de la caserne. Une histoire d’amour c’est plus dérangeant que... Une histoire d’amour... Faut que je me ressaisisse avant de me mettre à baver. Je sais très bien que je dois avoir l’air niais de l’ado dégoulinante d’amour pour sa belle blonde. Mais je me fous bien d’avoir l’air d’une gamine attendu qu’il va se passer des choses très adultes entre nous. Et en parlant de gamine, je jette un petit coup d’œil dans la chambre.

« Et si tu as deux gros sacs... Ça fait un moment que je suis pas passée à l’orphelinat, je voudrais pas arriver les mains vides. »

Ça y est? Elle l'avait fait? Même ainsi, Rinako comme elle, étaient toujours si nerveuse mais le pire devait être Suki. Surtout qu'elle affichait d'habitude un visage si sur d'elle et là, elle avait l'air si jeune et fragile devant l'amour. Heureusement, la main de Rinako qui se baladait sur sa joue lui faisait du bien. Un petit moment de réconfort, de douceur qui lui était presque inconnue. Est-ce que c'était le début de cet amour tendre qu'elle recherchait? Un amour calme, agréable et vrai? Sans avoir besoin de boire dans un bar pour avoir de l'amour avec la première fille venue? Elle pourra s'endormir le soir dans les bras de Rinako, sans craindre la nuit, les cauchemars et surtout la solitude? Elle le voulait. Le sergent Yukimitsu avouait devoir parader devant les Uatéennes pour cette journée mais elle n'en avait pas tellement envie. Suki affichait un petit sourire en relevant la tête vers elle. Elle était à la fois si légère et si nerveuse, c'était un curieux mélange.

« C'est plutôt un devoir que tu as de montrer quelle héroïne tu as fait, tu es l'exemple de la Celkhane héroïque qui a aidé Uatis. Cependant, même si je t'aurais dit d'y aller, je dois avouer que moi aussi je veux pas te voir partir tout de suite... »

C'était égoïste, elle voulait garder Rinako avec elle. Elle refusait de la voir partir pour si peu. Rinako avait bien le droit de se reposer quand même! Bon, un petit tour à l'infirmerie pour faire dire qu'elle avait besoin de repos puis c'est tout! Les ordres étaient les ordres, surtout à l'armée mais pour une fois, elle ne voulait pas y faire attention et passer du temps avec elle tout simplement. Pour une fois qu'elle touchait du bout des doigts cet amour, ne pouvait-on pas la laisser voir ce que cela donnait vraiment? Est-ce que c'était comme dans ses rêves? Ses séries et films bidons où tout est bien qui finit bien? Elle voulait connaître ça et le vivre surtout. Rinako la sortait de ses pensées en évoquant de rendre une petite visite aux filles de l'orphelinat. C'était une bonne idée, surtout que ça devait bien faire deux jours qu'elle n'y avait pas été? Elle aurait bien été hier mais elle avait eu plus urgent à faire donc elle avait dû ne pas y mettre les pieds malheureusement.

« Je devrais pouvoir te trouver ça. »

Suki commença à ouvrir sa malle en cherchant deux sacs dedans, de quoi transporter plusieurs petits cadeaux. Suki afficha un petit sourire en fouillant dans sa malle, Rinako ne pouvait pas voir ce petit sourire mais elle lui fit quand même part de ses pensées.

« Tu leur as manqué... Elles m'ont souvent demandé où était la fille aux cheveux roses... »

Toutes ses petites têtes blondes qui lui demandait ça, c'était plaisant dans un sens de voir que Suki n'était pas la seule à venir les voir assez souvent pour qu'elles s'en rappellent. Enfin, il y avait surtout Holy à qui Suki pensait. La petite orpheline de la mission avec Rinako. Suki l'avait surnommé ainsi car elle refusait de dire son nom, elle parlait même très peu sauf avec elle. Ce n'était pas grand-chose mais elle lui demandait de dessiner avec elle, de dessiner ou la prendre dans ses bras. Les deux blondes étaient très proches même si elles ne se connaissaient pas vraiment. Suki était une adulte, Holy une enfant mais... mais c'était son petit koala qui réclamait toujours à être portée sans rien demander en retour. Juste une présence. Pourtant les filles là-bas étaient des professionnelles avec les enfants mais cette petite mangeait à peine, dormait à peine, jouait à peine, elle faisait le minimum tant que Suki n'était pas là et elle en avait pitié d'elle. Croyant être la seule qui puisse lui permettre de bien grandir, de bien se reposer, ect... Ce petit ange aussi lui avait demandé des nouvelles de Rinako d'ailleurs.

« Même cette petite que nous avons secourue lors de notre mission... Elle m'avait demandé si tu allais bien... alors qu'elle est plutôt muette... »

Elle ne connaissait pas son nom et ne lui avait pas demandé mais quand elle avait dit « elle », Suki comprenait que c'était Rinako. De la mission, elle ne pouvait se souvenir que de Suki, Rinako et Chakwas, c'est tout. Elle y tenait aussi à Rinako, jamais elle ne lui parlait des autres, les peux de fois où elle parlait, selon les femmes de l'orphelinat, c'était le plus souvent pour réclamer Suki et en sa présence, elle avait voulu des nouvelles de Rinako... Cette petite touchait Suki au cœur, elle était si adorable... Trouvant ce dont elle avait besoin, elle referma la malle en se retournant pour revenir vers Rinako, contente qu'en plus de ça, elles allaient rendre une visite aux enfants, les bras chargés de cadeaux.

« Rinako... je n'étais pas vraiment dans mon état naturel lors de notre nuit et... et je n'ai pas vraiment eu l'occasion de le te dire en face du coup mais... »

Suki releva la tête en passant ses bras autour du cou du sergent Yukimitsu, sa... sa petite amie... le sourire toujours timide mais avec un peu plus d'assurance quand même.

« Je t'aime. »

Approchant doucement ses lèvres, elle ne voulait pas la brusquer et lui laissait l'occasion de remettre ce baiser à un peu plus tard mais pour Suki, ce baiser allait conclure leur amour. Elles s'aimaient, venaient de se retrouver, confirmer leurs sentiments alors, autant poser la signature avec leurs lèvres.

Un moment j’ai peur d’avoir réveillé le lieutenant qui ne recule devant rien au nom du devoir. Mon propre sens du devoir a pris un sale coup quand il concerne mes supérieures. Je n’ai plus de devoirs qu’envers Suki, ma mère et moi. Pour la blonde de mes rêves je commence à peine à les accomplir, les autres n’auront rien à voir. Bref ! Mission : après-midi en amoureuses. Briefing : reconnaissance au parc d’attraction, récupération et exfiltration des peluches vers l’orphelinat... Des peluches et quelques autres choses, il n’y a pas que de petites enfants.

Les filles ont demandé de mes nouvelles ? Ce n’est sans doute pas étonnant pourtant ça me surprend un peu. Quand j’ai fait le compte des personnes à qui je manquerais entre deux expériences de mort imminente dans la Fourmilière, la liste a fini par se réduire à un seul nom. Et même la petite blonde ?

« Sérieux ? Alors elle s’est quand même mise à parler. C’est super ! »

Je suis contente pour elle, et je veux que ma petite amie ait le moral à fond aujourd’hui... Ma petite amie. Je suis pas près de m’y faire, même si ça me plaît. C’est quand même marrant. Un jour c’est ma supérieure intouchable que j’idéalise à mort, et une semaine plus tard c’est ma petite amie. Incroyable, impensable, trop beau pour être vrai. Mais c’est vrai et je compte faire en sorte que ça le reste.

Suki laisse les sacs pour revenir vers moi. Mon cœur repars au galop, le monde entier s’éteint, s’estompe pour ne plus laisser que ce petit espace entre nos visage. La dernière fois. Avant d’entrer dans sa chambre aujourd’hui j’y pensais tellement que ça me tordait le ventre comme si j’y étais revenue. Dire qu’il a fallu que je frôle la mort, même que je meure d’une certaine façon, pour enfin apprendre qu’il ne faut pas plus hésiter devant l’ennemi que devant ceux qu’on aime. Elle hésite trop et je suis devenue un bulldozer, ça promet.

« Suki... »

Mes lèvres frôlent déjà les siennes quand je soupire son nom, délicatement, comme je risquais de l’abîmer en le prononçant. Mes mains remontent dans son dos, l’attire sur le dernier millimètre qui nous séparait encore. Ses lèvres... Mes yeux se ferment d’eux-mêmes. Désolée les Spänje Sisters, j’en ai trouvé une qui me fait encore plus tourner la tête quand on s’embrasse. Et je ne veux pas d’un petit bécot d’adolescente, je veux un vrai baiser de femme. Ça aurait sans doute mieux rendu sur la grande roue, mais nous les soldates ont se contente très bien de l’essentiel. Ma langue se glisse entre ses douces lèvres à la recherche de la sienne. Je ne suis pas devenue fonceuse au point d’aller lui chatouiller la gorge. Quelques tendres caresses, juste assez pour me faire douter encore un peu. C’est vraiment pas un rêve ? Ça y ressemble.

Quand mes lèves quittent les siennes je garde les yeux fermés une seconde, avec un sourire léger. C’est fou comme je me sens légère ! Est-ce que j’ai déjà été aussi heureuse ? Peut-être, il y a trop longtemps pour que je m’en souvienne vraiment.

« J’adore quand tu le dis... »

Je rouvre les yeux directement sur les siens.

« Je t’aime aussi. »

Avant la fin de la journée il y a sans doute un paquet de choses que je vais devoir lui avouer. Que je ne suis plus vierge, même si elle s’en rendra très bien compte. Que quand j’étais toute seule dans les entrailles de la Fourmilière c’est à elle que je me raccrochais. Ma seule raison de revenir, ma seule alternative à la rage. Il faudra peut-être aussi que je lui avoue cette rage, d’où elle vient et dans quelle direction elle me pousse. Mais pas maintenant. Je la serre un peu plus contre moi et penche la tête pour déposer un baiser dans ses cheveux, près de son oreille. Je voudrais bien lui soupirer quelque chose de romantique mais y’a rien qui vient ! Pas de panique, un autre bisou en dit bien assez long.

Et je relâche mon étreinte, baissant les yeux avec un petit rire.

« On devrait y aller. Je commence à me dire que je passerais bien la journée entière ici à t’embrasser. Et je nous appelle un taxi, parce que les sacs sur un scooter... »

Allez ! On attrape les sacs et on y va ! Tant pis pour les Uatéennes, après tout elles ont envoyé péter les forces que Caelestis avait mobilisées pour leur opération. Officiellement je n’étais pas restée pour les aider. De leur côté aussi elles ont du monde à décorer. Moi je suis en permission, alors je vais jouer les poupées à un de leur pince-fesses pour gradées suffisantes. Je suis de plus en plus en phase avec ma réputation de gamine. J’ai seize ans et la petite copine de mes rêves : un peu qu’on va au parc d’attractions !

Parc d’attractions ! Comme il fait beau c’est blindé de monde, la cohue ! Des mamans avec les gamines, principalement. Quelques ados dans nos âges, voir un peu plus. Et à l’entrée deux commandos avec des sacs. On repartira pas les mains vides et on le cache pas !

« On commence par quoi ? La maison hantée : je la sens pas trop. Je me souviens d’une fois où ma mère a mis une patate à un monstre. Réflexe. Mais y’a les montagnes russes et la grande roue. Je pense qu’une fois devant les stands on mettra pas longtemps à remplir nos sacs. »

Je ne parle pas de la balade des amoureuses en barge anti-gravité, mais j’ai quand même envie d’embrasser ma chérie tout en haut de la grande roue.

C'est vrai que ça pouvait être surprenant de savoir que la petite commençait à parler mais elle était encore très sélective puis elle parlait quand elle en avait envie malgré tout. Mais avec ce qu'elle avait vécu, ce n'était pas tellement surprenant, il suffisait juste d'attendre un peu qu'elle s'adapte un peu et ensuite, elle sera une petite Celkhane comme les autres. Il ne lui manquera que des parents qui la chouchoute et éventuellement des sœurs, grandes ou petites. Elle allait avoir la famille que ses pourritures lui avaient volé un de ses jours, elle espérait qu'elle tombera sur des gens bien, qui sauront l'aimer vraiment et autant qu'elle aussi. En avouant véritablement ses sentiments à Rinako, cette fois, la lieutenante avait passé un petit cap dans sa lutte contre sa timidité. Les yeux dans les yeux avec la belle jeune femme aux cheveux roses devant elle, Suki approchait doucement ses lèvres pour finalement ressentir une bouffée de chaleur en elle en ressentant celles de Rinako se coller contre les siennes. Sa langue venait se coller aussi l'une contre l'autre et les deux Celkhanes se retrouvèrent dans leur bulle. Seul leur amour comptait pour elles, rien d'autre autour d'elle ne pouvait les déranger. Suki n'ose pas bouger ses mains, les laissant là où elles étaient. Ce baiser avait duré combien de temps? Suki ne saurait le dire mais quand leurs lèvres se séparait, elle ouvrait doucement ses paupières pour la voir, là, belle et parlant doucement avec sa petite voix, lui avouant aussi ses sentiments.

Une petite accolade puis un baiser près de ses oreilles, puis un second avant que sa petite amie – toujours si étrange – ne lui propose de prendre un taxi. C'était plus sur en effet. Suki allait payer aujourd'hui, tout payer. Elle lui devait bien ça pour la soirée au bar qui n'était pas au goût de Rinako. Puis quand on aime, on ne compte pas! Une fois dans le taxi, elles restaient plutôt discrète, énonçant seulement la destination alors que Suki tentait discrètement de prendre la main de Rinako au moins pour passer le voyage. Puis arrivée à destination, devant cette foule de mère et de filles, de petites amies, d'amies, il y en avait pour tous les goûts! Suki ignorait encore vraiment ce qu'elles pourraient faire mais au pire, elles verront bien. L'anecdote de sa mère dans la maison hantée eut de quoi faire sourire Suki qui risquait surement de recopier la même scène.

« Autant commencer par les attractions où l'on ne gagne rien, ça nous encombrera moins pour la suite. Mais gardons quand même la grande roue pour la fin... il paraît que c'est plus beau au coucher de soleil... »

Suki n'osait pas la regarder dans les yeux, fuyant son regard. Elle ne connaissait rien en amour mais ça ne lui retirait pas le fait d'avoir quelques notions. C'était une soldate mais c'était aussi une femme, elle avait bien le droit d'avoir quelques petits fantasmes d'adolescente en tête quand même. Mais pour ce qui était donc des attractions sans récompense, maison hantée, montagne russe, chaises tournantes, tasses tournantes aussi... ce n'était pas le genre de chose qui manquait. Il fallait que cette journée soit parfaite alors autant commencer de suite et gardez ce genre de souvenir à jamais.

« Commençons par les montagnes russes alors. On va en essayer une ou deux puis on verra si on en essaye d'autres plus tard? »

C'est vrai qu'ici, il y avait beaucoup de types de montagnes russes mais elles auront largement le temps de trouver tout ce dont elles auront envie de faire ou gagner pour ses adorables petites têtes blondes. Celkhanes d'armées ou non, elles restaient des citoyennes ordinaires ici donc elles devaient faire la queue comme tout le monde et donc, affronter les files d'attente. Bon, ce n'était pas un problème en compagnie de Rinako, ça devenait facilement moins épuisant. Devant la première file, Suki pensait déjà aux stands de tir ou autres jeux pour remporter des peluches en tous genres.

« J'ai un peu de peine quand même... toutes ses peluches que nous risquons de gagner pour les petites, ça va faire un gros manque pour tous ses stands. Espérons que nous soyons pas interdits de parc si jamais nous voulons remettre les pieds ici. »

Bien sur, c'était surtout pour la plaisanterie. Puis mine de rien, cela avançait plutôt vite, ce n'était pas trop à cette heure de la journée. À présent, elle ne devait pas seulement penser à elle mais aussi à Rinako mais au moins, elle ne sera plus seule quand elle ira chez elle... Tiens, elle devra lui faire visiter sa maison un jour? Puis sa chambre? Sans oublier ses parents mais ce n'est pas pour tout de suite. Malgré tout, avec le manque d'expérience, elle espérait qu'elle serait à la hauteur des espérances de Rinako? Elle avait peut-être un peu plus d'expérience qu'elle dans ce domaine? Ha non, elle lui avait dit dans le bar. En tout cas, contrairement à la dernière fois, cette nuit, elles n'allaient pas que dormir ensemble, l'une contre l'autre... mais ce n'était pas pour tout de suite non plus alors autant laisser le temps et s'amuser pour l'heure.

Ça cogne grave dans ma poitrine, d’un coup ! J’en perds mon souffle. Elle a bien dit qu’elle voulait qu’on fasse un tour de grande roue au coucher du soleil ? J’osais pas le proposer comme ça, j’avais peur d’être ridicule avec mon envie romantique. L’embrasserais bien mais je me contente de la prendre par la main. Devant tout le monde on risquerait de choquer. J’entends d’ici les gamines demander à maman pourquoi les deux filles se mettent la langue dans la bouche en se serrant comme ça. Parce que je ne veux pas l’embrasser autrement. Je ne veux que de vrais baisers avec elle, des baisers de vraies femmes adultes, assumés.

« Alors les montagnes russes ! J’adore ça ! »

La plupart des gens vont sur les montagnes russes pour se faire une frayeur. Entre mes pouvoirs de l’air et mon entraînement de pilote je suis servie de ce côté-là. Mais je trouve ça amusant, la vitesse me grise. Je suis remontée comme un ressort, une vraie gamine ! je suis une ado qui sort avec sa toute nouvelle amoureuse pour la première fois. Le seul fait d’être avec elle est déjà un bonheur. Les manèges, les stands, la collecte de peluches, sans doute un truc à grignoter, la visite à l’orphelinat : tout ça ensemble. Et ensuite... Je préfère pas imaginer, ça gâcherait la surprise. Mais j’ai pas fini d’y penser.

Hop ! Direction les montagnes russes ! Une petite montée d’adrénaline avec ma petite amie. Qui a des remords ?

« Nous interdire de parc d’attraction ? Non, elles se sont rendues compte qu’elles avaient trop à perdre. Les membres de l’armée ont un tarif plus élevé. Alors non seulement on va pas se gêner, mais on va devoir assurer. Pas de pitié ! »

Et je ne vais pas laisser ma petite amie tout offrir non plus. J’ai hâte de voir ce que ça va donner quand on sera au stand de tir. Je sens que je vais être jalouse si ma petite amie tire mieux que moi. Ma petite amie est déjà plus douée que moi avec toutes les autres armes à feu. Je me demande si ma petite amie sait aussi se battre au corps-à-corps ? Il faudra que je pense à en parler à ma petite amie. J’en peux plus de ma petite amie ! C’est trop bon !

Je dois avoir l’air trop niaise dans la file d’attente. C’est pas long mais on s’ennuie. J’ai envie de l’enlacer, de l’embrasser, la serrer contre moi. Au lieu de ça je la dévore des yeux et me rend compte toutes les trois secondes que je me mordille la lèvre. Je dois être rouge comme une tomate. Non, une tomate aux cheveux roses c’est naze. Une cerise. J’ai faim. J’ai soif aussi. Je sais pas si je peux l’embrasser ou pas, là, devant tout le monde. Il faudra que je pense à lui demander ça aussi. Pour l’instant il faut que je la prévienne.

« La vieille Caelest'Ball. Une des premières attractions du parc, la seule qui soit montée sur rampes magnétiques avec le restaurant Pearls of Caelestis. Quand j’étais petite j’avais trop envie de la faire... »

Avec ma mère, mais j’étais trop petite. Un croche-pied à mon bonheur, un petit retour de couteau dans la plaie. Reprends-toi, ma fille ! Tu vas le faire avec ta petite amie, c’est pas rien. Mon sourire revient quand mon regard revient sur Suki.

« Il paraît que c’est génial ! »

On arrive dans la salle d’embarquement. Heureusement qu’il n’y a pas beaucoup de soldates, et encore moins avec de gros sacs vides les hôtesses gardent nos bagages. On arrive dans une pièce très sombre, seule la passerelle où on marche et la nacelle qui porte les fauteuils sont éclairées. Deux sièges avec harnais, rambarde de sécurité... Il ne manque que l’assistance respiratoire et on se croirait dans un cockpit. Les hôtesses vérifient tout ça et nous souhaitent une bonne balade. Un instant je me demande pour qui elles nous prennent. Des amies ? Des amantes ? Des sœurs ? On se retrouve toutes seules dans le noir.

« Au fait, Suki ! On peut flirter devant tout le monde ou... C’est quoi cette lumière ? »

En-dessous de nous. Soudain un claquement métallique sourd. On tombe vers la lumière pour se retrouver au grand jour, sous l’archipel. La nacelle est tenue par des vérins accroché à une armature propulsée par de grands cercles métalliques. Nous sommes au centre, ballotées à chaque virage. Quatre rails annoncent le parcours à travers d’épais anneaux qui font accélérer notre espèce de sphère. On redresse pour revenir frôler les racines de Caelestis avec au loin batteries de défense saillantes de la roche. On descend d’un étage pour passer sous une salle de restaurant qui dérive tranquillement sous l’île, sphérique elle aussi. Puis on file droit vers l’horizon et on redresse encore, on vire. Tout le parc d’attraction se déroule sous nos pieds.

« Wouhou ! Ouais ! Plus vite ! »

Je m’éclate ! Mes pouvoirs ne permettent pas d’aller aussi vite en l’air, et de telles trajectoires sont impossibles à tenir en vaisseau. J’espère que Suki s’amuse autant que moi.

La voilà cette fameuse sortie que Rinako aurait préférée avoir plutôt qu'une virée dans un bar. Aujourd'hui, c'était mieux plutôt qu'il y a une semaine, au moins là, elles étaient amoureuses l'une de l'autre et toutes les deux le savaient. Il y avait tant à faire ici en une seule journée, elle avait envie de tout faire le plus rapidement possible pour avoir la journée idéale du début à la fin! Oui mais voilà, ce n'était pas si simple, entre les attractions, l'attente, les cadeaux à gagner, un petit tour à l'orphelinat et enfin la soirée en amoureuse – s'il n'y a pas un restaurant juste avant – ça en fait des choses à faire! Mais pour commencer, il y avait les montagnes russes, de quoi s'amuser à deux, profiter un peu plutôt que de suite, dévaliser les stands de tir ou autres stands où les cadeaux étaient présents. Autant en profiter tant qu'elles ont les mains vides. Faire la queue pour ses montagnes russes rendait Rinako impatiente qui voulait faire ça depuis longtemps. À présent elle allait pouvoir le faire mais pas avec sa mère malheureusement, avec sa petite amie. On ne peut pas dire que Suki rêvait de cette attraction, elle n'était pas fan de ça, depuis toute petite, c'était l'armée qui l'attirait et donc, elle n'a pas vraiment rêvé de cet endroit. Mais en grandissant, c'est de faire ce genre de chose avec une fille qui l'aime qui lui donnait cette envie de faire ça, des sorties au cinéma, flâner dans un parc en se tenant la main. Malgré son côté gros dur, Suki était aussi très jeune femme amoureuse mais en dehors des missions évidemment. Quoi que comment allaient se passer ses missions maintenant qu'elle avait « officiellement » une petite amie?

Arrivant enfin à leur tour, elles furent installées dans la fameuse boule, bien attaché, prête à s'amuser! Une grande première pour la lieutenante mais elle allait aimer, surtout parce que Rinako était là. La jeune femme aux cheveux roses allait tenter de lui demander quelque chose avant que la sphère ne se mette en route pour voyager à travers le parc, passant sous le sol comme au-dessus de certains restaurants. Suki était plus discrète que Rinako pour montrer sa joie, seulement le sourire, quelques rires, voire de légers cris enthousiasmes mais finalement, ce n'était pas grand-chose. Comme piloter un vaisseau, les armes et le danger en moins. Le confort, l'espace et la vitre surtout. Même si elle ne parlait pas beaucoup, que Rinako se rassure, elle s'amusait tout autant qu'elle. Après plusieurs tours de haut et de bas, la sphère finissait par s'arrêter pour laisser les deux Celkhanes descendre et passer à la suite du programme. Suki faisait en sorte de ne pas être trop décoiffé avant de continuer avec son sac à la main. Il était temps de revenir sur quelque chose que Rinako voulait lui dire avant de commencer l'attraction.

« Ici, aucun problème. J'ai tellement attendu pour avoir une petite amie, je ne vais pas me gêner pour le montrer. Par contre au travail... je ne sais pas si c'est bon de le montrer? Tout de suite, d'un coup en tout cas? »

En y réfléchissant bien, il devait y avoir des couples dans l'armée, entre soldates ou officiers mais est-ce que c'était visible? Est-ce qu'elles le montraient? Suki avait du mal à le visualiser, avec certaines règles étranges à cause de ce genre de choses...

« On pourrait évidemment se voir et se bécoter en cachette et on fera taire les rumeurs une fois que tout cela sera un peu trop ébruité je pense? »

Oui car ça parle dans les casernes hein! Suki n'y faisait pas attention car en plus, on ne pouvait pas dire qu'elle fréquentait les nouvelles recrues mais les untel qui couchent avec untel, qui paraîtrait que, ça y va! Mais bon, une véritable relation arrivera tôt ou tard aux oreilles des soldates ainsi que des supérieures et là, soit les haut gradées de l'armée s'en ficheront, soit elles aussi voudraient savoir si c'est vrai?

« Puis le cacher un temps, ça pourrait être amusant? »

Un simple petit jeu entre elles? Combien de temps avant d'être surprise, d'entendre les premières rumeurs? Ce n'est pas compliqué, elle pourra la rejoindre dans sa chambre quand elle veut. À part une situation d'urgence, aucune soldate ne rentre dans sa chambre sans sa permission donc à moins d'une mission urgente ou d'une attaque, Rinako et Suki pourront dormir tranquillement dans les bras de l'autre. Bien sûr il risque d'y avoir rapidement des soupçons à voir Rinako sortir de la chambre de Suki mais qu'importe! L'amour hein!

« Si tu te sens d'attaque, je me laisserais bien tenter par ce truc? »

Ce truc, c'était la centrifugeuse! Une boîte énorme qui tourne à fond les ballons et où l'ont retrouvé scotché aux murs! Faut avoir le cœur bien accroché mais Suki pensait pouvoir le faire en tenant la main de Rinako par la même occasion? Un peu d'émotion forte et d'amour à la fois, un simple petit geste qui compte quand même beaucoup.

« Mais je ne te force pas, si tu veux faire autre chose, ça me conviens aussi. »

Suki n'avait plus cet air autoritaire tant dans sa voix que sur son visage, elle semblait plus détendue. Bien sûr ses sourcils avaient un peu de mal à quitter cet air menaçant mais c'était déjà plus sympathique comme air!

C’est trop fort ! Avec les vérins hydrauliques qui mettent trente ans à s’adapter à l’inclinaison et au roulis : on sait plus exactement où on a le centre de gravité ! Il paraît que c’est comme être bourrée, mais pour ça je peux rien confirmer. En tous cas je m’éclate ! Suki a l’air de s’amuser aussi, même si elle ne hurle pas comme sa folle de petite amie. Elle est plus discrète que moi, en tous cas comme femme. J’ai bien entendu dire çà et là qu’elle avait couché avec des sœurs d’arme, mais les potins ne faisaient jamais long feu... Ou alors c’est qu’elle s’ennuie ? Elle doit me prendre pour une gamine. Elle va me quitter !

« Haaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa ! »

Ça fait du bien d’évacuer avec un vent d’enfer en pleine face. Je sais bien qu’elle ne va pas me quitter parce que je m’éclate comme une gamine dans un manège. On arrive en fin de parcours, après un dernier coup de pompe magnétique la sphère remonte une pente de plus en plus douce. Retour dans les entrailles de l’île, aux ténèbres et aux freins de sécurité. L’arrêt est juste assez tardif pour sembler brutal. On se fait décrocher et guider par les hôtesses qui nous rendent les sacs. On sort.

Je n’ai pas à replacer ma question, en revanche la réponse... Ici, pas partout. Si c’est ma supérieure qui le dit je lui fais confiance. D’autant qu’on appartient à la même unité. D’un corps d’arme à l’autre c’est toléré, même encouragé. Mais deux amantes sur le terrain : c’est dangereux.

« Non, pas au travail. »

Et ça m’arrange. Je détourne les yeux vers un stand, l’air de reluquer les parfums de glace pour cacher un frémissement de mon sourire. Quelque part je me sens coupable, j’ai l’impression de profiter d’elle. Avec ce qui m’attend peut-être une relation secrète m’irait d’autant mieux. Précieuse, prudente, comme en danger. On pourra se voir, et ça j’y compte bien ! Attendre que ça s’ébruite, mais aussi l’éviter le plus longtemps possible. Pourquoi pas ? Pourquoi ne pas en profiter pour mettre nos désirs et nos sentiments à l’épreuve ? Comme dans les films ou les séries. Merde, j’ai déjà trouvé une excuse...

« Oui, ça pourrait. »

Je l’aime ! Elle doit lire dans mes pensées ou quelque chose comme ça, c’est pas possible autrement ! Je la serrerais bien dans mes bras, mais devant tout ce monde ce serait gâcher le jeu avant le coup d’envoi. Je zigzague sur quelques pas en balayant des yeux l’allée de stand qui ouvre sur d’autres attractions.

« La centrifugeuse, ça a l’air marrant. Et de toutes façons on ne pourra pas s’embrasser avant la grande roue. »

Avant la dernière attraction, la plus tranquille, celle qu’on a gardée pour la fin. Les sacs pleins de peluches, le soleil couchant, une poignée de minutes et un baiser que je meure déjà d’envie de lui donner. La journée va être longue, très longue. Et hors de question de rentrer main dans la main à la caserne. Suki a une maison à ce qu’il paraît. Elle n’y est presque jamais. Et ma chambre est assez éloignée des autres à cause des mesures de sécurités pour juguler mes pouvoirs. Mes pouvoirs que je maîtrise maintenant à la perfection. J’ai découvert leurs limites, je les ai poussés dans leurs retranchements et ils m’ont soutenue dans les miens. Je les ai perdus et retrouvés pour les libérer à nouveau. Ce n’était qu’un début, je ne vis plus dans l’angoisse de ce que je ne maîtrise pas. Ou pour une seule chose : le cœur de Suki Tetsuhiko.

« Non, la centrifugeuse me va très bien. Ça, je l’ai déjà fait : très déconseillé après un gros pot de glace ! En fait je crois que cette expérience m’a prédisposée à devenir pilote de chasse. »

Je glousse comme une conne... C’est pas amusant, c’est une torture !

« On mangera une glace après ? »

Une gros cube de glace, qu’elle m’en mette un grand coup dans la face ! D’ailleurs j’ai chaud. Je crois que la file d’attente de la centrifugeuse n’est pas aussi bien climatisée que l’autre. Ou peut-être que je fais monter la température inconsciemment ? Ça m’est déjà arrivé. Je pourrais me balader toute nue sur l’archipel, mes pouvoirs me garderaient du froid. Mais la chaleur se transmet. Je ne montais jamais la garde en manœuvre : je servais de bouillotte à tout le groupe. J’ai hâte de lui servir de bouillotte. C’est clair : ce soir je lui sers de bouillotte ! Je dois passer le message. Réfléchis ma fille !

« Lieutenant... »

Trouvé !... Enfin j’espère...

« ... Ça me gêne vraiment de vous laisser payer la moitié des travaux. En plus c’est l’armée qui se chargera du matériel. Je suis déjà la pire colocataire du monde ! Je vais pas vous laisser payer. En plus je serais pas souvent là. »

J’espère qu’elle cherche encore une colocataire. Merde ! J’espère qu’elle a vraiment une maison ! Je sais pas si je vais supporter la centrifugeuse.

Pour le moment, il n'y a pas à dire, c'est vraiment l'éclate! Bon, la lieutenante ne le montrait pas mais avait-on vu souvent Suki se comporter de façon plus femme? Plus enfantine? Peu de gens pourraient dire oui en dehors de ses parents. Que Rinako ne s'inquiète pas alors, tout allait bien même si elle était loin d'être la fille la plus expressive de cet archipel. Puis pour le moment, la discutions tournait sur un sujet un peu plus sérieux que d'avoir quelle attraction sera leur prochaine cible. Il s'agissait de leurs relations, le montrer ou ne pas le montrer dans l'armée? Oui, dehors, qu'importe, elles restaient citoyenne Celkhane et aucune loi précisait qu'il était interdit de montrer son amour pour son être aimé. Bien sur, cela ne doit pas tourner à l'exhibitionnisme ou la pornographie en pleine rue, il y avait des enfants quand même. Mais se tenir la main, s'embrasser, se regarder avec des yeux doux, tout cela était autorisé. Mais Rinako semblait aussi d'accord pour le fait qu'il faut cacher ça durant le travail. La question est, pourraient-elles tenir une journée sans un regard, un petit mot, un petit baiser? C'était une grande première pour elle mais Suki risquerait de se montrer un peu plus femme en présence de Rinako et contre son grè. Cela risquerait de laisser quelques soupçons si elles faisaient plus que se croiser dans les couloirs.

« Ha, tu ne veux pas m'embrasser de nouveau avant la grande roue? »

Suki la regardait avec un léger sourire. C'était gênant et amusant à la fois. C'était quoi pour elle? Une sorte de pari? D'obligation pour réaliser un de ces rêves comme elle avait pour adopter plus tard des enfants. Oh bien sur, elle voulait des enfants naturels et ce, même si elles sont encore loin d'aborder le sujet de qui portera l'enfant mais bon, si Rinako voulait son prochain baiser avant de quitter le parc, sur la grande roue, tout en haut avec un coucher de soleil en prime? Soit, elle acceptait l'offre! C'est vrai qu'elle avait elle aussi envie de l'embrasser encore, en essuyant un peu de sauce au coin de sa bouche au prochain repas, lors d'une petite pause sur un banc, quand l'envie la prendra tout simplement mais elle aurait tout le temps ensuite pour cela, autant faire cette fleur à Rinako et lui offrir la baiser romantique qu'elle voulait tant. Et puis, elle n'avait rien contre cette image puant l'eau de rose, c'était... beau. Elle pouvait l'avouer sans le cacher maintenant, elle avait une petite amie et si ce genre d'image lui faisait zapper la chaine de télé avant, aujourd'hui, elle serait heureuse de voir deux femmes amoureuses qui s'embrassent devant un coucher de soleil. Finie la jalousie des couples, elle était en couple aujourd'hui! Maintenant!

À la fois un souvenir d'enfance avec un pot de glace – décidément elle devait comprendre que Rinako avait une véritable adoration pour la glace – et un élément déclencheur de sa voie à suivre. Comme c'était mignon. Elle, c'était à écouter toutes les histoires de missions de ses parents quand elles étaient soldates Tékhanes, éliminant la menace Formienne et autres monstres humains ou non. Elle avait tant à lui dire sur son enfance, ses dix-sept années en tant que Celkhane, de ses premiers souvenirs à aujourd'hui, tant et tant encore à lui raconter... mais l'épisode Warren ne sera pas pour tout de suite... même s'il était possible qu'elle en ai entendu quelques échos, elle, c'était son erreur, sa revanche et elle tira un trait dessus que lorsque ce trait sera sur sa gorge baignante dans le sang... N'allons pas gâcher cette journée idéale avec ses mauvais souvenirs, qu'elle profite, merde! Quand le sergent vint lui demander pour déguster une glace ensuite, elle hocha la tête en répondant un simple oui. Déjà, Suki s'imaginait quel genre de glace? Individuel? À deux? Un cône? Un sorbet? Un esquimau? Tant de possibilité! Mais sa petite amie vint lui poser une nouvelle question en commençant par son grade? Pourquoi? Elles étaient espionnées par d'autres soldates? Apparemment non. Mais Suki avait du mal à saisir de quoi elle parlait? Travaux? Armée? Colocataire? Elle arqua un sourcil en se posant des questions, cherchant un lien à tout cela? Elle assemblait un puzzle dans sa tête mais est-ce que c'était les bonnes pièces au moins?

« De quoi tu me parles? De plus, je t'ai déjà dit de s'appeler par notre grade qu'au travail. Mais si tu veux... si j'ai bien compris en tout cas... ça me dérange pas que tu viennes chez moi? »

Cela lui ferait une bonne raison de payer un loyer au moins! Puis soyons logique, d'ici quelques années, si elle veut avoir sa petite vie de famille, ce n'était pas dans sa chambre à l'armée qu'elle allait élever une famille. Bien qu'elle tentait d'être courageuse en gardant son regard rivé sur celui de Rinako, elle jeta l'éponge en regardant ailleurs en lui prenant les mains quand même.

« Pour moi, ça allait de soi qu'on sera ensemble le plus de temps ensemble en une journée, il en va de même pour la nuit... Je me doute bien que ce ne serait peut-être pas ça au début mais... puisque le courant passe si bien entre nous... je voyais déjà ça. »

Prévoyante, en effet! Qu'importe la foule devant et derrière elles dans la file d'attente, elle garda ses mains dans les siennes en se collant à elle, posant sa tête contre son épaule. Purée ce que ça faisait du bien de se relâcher de temps en temps! Elle espérait au moins ne pas avoir compris de travers sinon elle aurait l'air cruche. Elle était amoureuse, ça, aucun doute! Tout ce qui était avenir, vie de famille, projet de famille et tout ça, ce ne sera pas pour demain, elles avaient le temps, pour le moment, elle voulait juste profiter de sa relation de couple! C'était tout bizarre de se dire ça. Quand vint enfin leur tour pour la centrifugeuse, les deux Celkhanes se mettaient évidemment côte à côte et Suki passait sa main sur le côté pour avoir celle de Rinako. Pas par peur, par amour. La barrière était en place, la sécurité avant tout puis bientôt l'engin tourna doucement, gagnant de la vitesse de plus en plus pour les accrocher aux murs. Ce n'était rien ça quand on passait la formation pour piloter, c'était bien pire que ça. Mais au moins, elles s'amusaient aujourd'hui! Qu'importe la vitesse, Suki gardait le sourire en voyant l'avenir joyeux devant elle avec la main de Rinako dans la sienne.

Bin pour le coup je me sens conne. Je ne sais pas si c’est parce qu’elle est plus âgée que moi et plus expérimentée mais je baisse les yeux en remuant les doigts dans sa main. Je me sens comme la recrue toute contente d’avoir réussi à remonter son arme quand l’instructrice lui montre le percuteur magnétique qu’elle a oublié. Et elle va s’imaginer que je serais pas restée accrochée à elle jusqu’à m’endormir, en plus ! Elle a l’air dépitée rien que de se l’imaginer, d’ailleurs. Moi je me retiens de rire et sur tout de la prendre dans mes bras devant tout ce monde pour l’embrasser.

Elle vient justement poser la tête sur mon épaule. Je penche la mienne pour lui répondre tout bas

« C’est pas toi que j’essayais d’embobiner, Suki. Les autres ne sortent pas toutes en uniformes, surtout pour aller au parc d’attraction avec les enfants. »

Et les mères de famille, dans l’armée en général elles sont plus gradées que nous. Si une sœur nous voit seulement là, gentiment collée l’une à l’autre : ce n’est déjà plus la peine de nous cacher. Je sais déjà qu’il va me falloir du temps pour combler la fille de mes rêves, lui donner la femme, la famille et le foyer qu’elle souhaite tant. Ça ne se fera pas aujourd’hui et chacune a ses démons à affronter, mais maintenant elles sont deux pour ça. Autant commencer par passer une bonne journée, une belle soirée et une loooooooongue nuit. Je ne suis pas idiote au point de lui sortir tout ce que m’ont appris les frangines perverses m’ont appris, d’ailleurs je ne suis pas équipée pour ça.

Et surtout aujourd’hui je n’ai plus à craindre de perdre le contrôle. Je suis parfaitement détendue, parfaitement heureuse, et je n’ai plus peur de déchaîner une tempête de flammes si elle m’embrasse. Un petit tour dans la centrifugeuse m’aidera peut-être à refroidir quand même. Je brûle d’une tout autre façon, et quand elle est si près de moi c’est difficile de me retenir de l’embrasser. Ma petite amie ! J’ai hâte de me réveiller à nouveau près d’elle, et de rester cette fois... Il serait peut-être temps que je me réveille, ça commence à tourner vite. Je tourne la tête pour sourire à Suki. Ce n’est pas par peur que je serre sa main comme ça, c’est juste que sinon je risque de la lâcher.

Maintenant que j’y pense, je me demande si on risque pas de faire un peu les connes au prochain vol d’entraînement. D’ailleurs il faudra que je la prenne sur mon dos un de ces quatre et que je lui fasse faire un petit tour. Il y aura autant de vent mais on prendra moins de G ! Ça donne quoi, un lifting sur des ados ? On aura la réponse en sortant. Je m’en fous, je tiens mon amoureuse par la main et je ne fais que la regarder. Sans la rambarde de sécurité je l’aurais carrément dans mes bras. D’ailleurs je pense que je vois d’ici la prochaine attraction qu’on va faire.

On sort de là toutes ébouriffées, et même si on marche plus droit que les autres je saute sur l’occasion de passer un bras derrière la taille de ma petite amie. Les écrans dans le couloir de la sortie montrent les bonnes tronches aux sourires forcés, et les filets de bave des victimes de la centrifugeuse. Sauf sur un écran où deux filles se tiennent par la main en se regardant, leurs visages nimbés d’un flot or et rose. Je ne peux pas m’empêcher de rire en nous voyant comme ça au milieu des toutes ces femmes qui ont mal au cœur, et de leurs gamines qui veulent un deuxième tour.

« Elles sont craquantes, tu trouves pas ? Un petit souvenir ? »

Je plante un petit baiser sur sa tempe et je sors ma carte de crédit de ma ceinture. Il faudra penser à vite sauvegarder ces images, les clés de ce genre ont tendance à vite se dégrader. Retour à l’air libre et il me semble qu’on avait parlé d’une glace. On file au premier stand venu. Dans le catalogue Yukimitsu je ne vois rien pour la première sortie avec ma petite amie. Mais j’ai une petite idée que je ne manque pas de soumettre à ma jolie blonde.

« Tu crois que c’est trop cliché si on partage une glace vanille-fraise ? »

Sinon c’est noisette-menthe givrée à la limite pour les yeux, mais je pense que ça serait pas un bon mélange. Une barquette avec deux cuillères en plastique et nous voilà reparties. Je tiens la glace, après tout c’est elle qui paie toutes les attractions depuis le début. On déambule à petits pas dans la foule, l’une tout près de l’autre. J’adore la regarder. Regarder sa main qui tient la cuillère, qui monte vers ses lèvres. Je baisse la tête une minute. Je sens que je rougis et je n’arrive pas à dompter mon sourire. Plus j’essaie de le tenir plus il grandit.

« Pour moi aussi ça allait de soi. »

Je relève les yeux vers elle, et je sourie de plus belle. Je suis heureuse, je n’y peux rien alors pourquoi lutter ?

« Je veux pas te quitter de la journée... Je veux rester avec toi jusqu’à ce soir et... Et demain matin tu te réveilleras pas toute seule. »

Cette journée pouvait être plus merveilleuse qu'elle ne l'était mais soyons lucide, ce n'était que le début de cette magnifique journée, il n'y avait pas de quoi précipiter les choses. Chaque chose en son temps sinon, tout faire en même temps, ce serait fatigant et certaines choses ne pourront être faite correctement. Tout d'abord la centrifugeuse, après... elles aviseront. Quoi qu'il en soit, elle joue les durs au travail mais maintenant qu'elle avait une véritable petite amie, jouer les filles amoureuses ne la dérangeait pas. Collé à Rinako, c'était si agréable. Elle était impatiente d'être à ce soir, non pas pour avoir sa première fois avec une fille qu'elle aime vraiment – pas que plutôt – mais pour dormir avec elle dans son lit. Nue, toutes les deux, collée l'une contre l'autre, un petit morceau de bonheur, il y a pas à dire. Rien que de l'imaginer, ça lui plaisait déjà. Une fois dans l'attraction, elles se tiennent la main, le regard de l'une vers l'autre, à croire que l'attraction ne servait que de décors. Tout le monde criait de joie ou de peur et elles, c'est à peine si elles ouvraient la bouche! Leurs cheveux suivaient la loi de la vitesse mais sinon, une fois sorties de cette machine, elles marchaient bien plus droit que les autres! Cela s'appelle l'entrainement mesdemoiselles! À voir la photo, Suki souriait simplement en l'observant, tenant absolument à avoir un double pour son portable, ça sera surement son nouveau thème! Pour ce que Rinako proposait, la lieutenante se demandait ce qui était cliché? Partager une glace en amoureuse ou l'allusion des couleurs? Jaune pour Suki, Rose pour Rinako? Leurs cheveux quoi!

« Et même si c'est cliché, ce n'est pas important? Va pour la vanille-fraise. »

C'est vrai quoi! Elle ne va pas s'interdire des choses car c'est clichés! Sinon adieux la grande roue avec le ciel orangé! Marchant à travers la foule, elles faisaient attention à ne pas heurter quelqu'un et piochaient avec sa cuillère dans la glace que Rinako tenait, portant simplement la cuillère à sa bouche avec un petit sourire en coin. Rinako vint la sortir de sa marche en lui avouant quelque chose qui ne pouvait que la faire sourire de plus belle, laissant le rose lui monter aux joues à trop regarder Rinako dans les yeux. Jusqu'au petit matin... Adieu mauvais rêve ce soir, bonjour belle matinée! Avec sa petite amie, elle ne voyait pas ce cauchemar de Mélinda venir lui pourrir sa nuit, la réveiller en sueur, en criant et parfois même, en risquant de faire une énorme connerie! Pour sur, elle ne devra en aucun cas lui parler du flingue sous son matelas... ni même de ce qui lui arrive de faire avec dans la salle de bain... elle avait une petite amie à présent, pas question de se faire croire pour une cinglée!

« Me réveiller avec toi, je pense avoir du mal à trouver mieux comme réveil? »

Ha si, avec leur fille entre elles. Mais ce n'était pas le moment de bondir dans le futur mais rester juste à la période amoureuse. Réveil coquin, nue, s'endormir aussi en tenue d'Ève, se balader même ainsi dans la maison si le cœur le lui en dit! Car s'il y a un enfant à la maison, pas question de faire ce genre de chose! Les règles, c'est comme à l'armée, Suki est stricte là-dessus. En passant devant un autre stand, Suki regardait machinalement dans la direction avant de s'arrêter en fronçant un peu les sourcils. C'était amusant et... troublant.

« Je ne sais pas si on a été caricaturées ou si c'est un hasard mais ça ne te rappelle rien? »

Elle pointa les peluches accrochées avec sa cuillère en plastique, une rangée de lapin de toutes les couleurs faisait la joie de plusieurs enfants qui passaient devant. En plus, chaque lapin avait sa propre expression et quand on voyait le jaune, il fronçait les sourcils, petits yeux, mais pas d'un air méchant, plutôt blasé comme Suki. Et non loin, un lapin rose avec de grands yeux, tout sourire. Ce ne serait pas du plagiat? Avaient-elles le droit à des droits d'auteurs? Si elle trouve un lapin bleu avec une forte poitrine, ça sera Sora et sans le savoir, le Commando des Celkhanes et adapté en bande de lapin en peluche!

« Et si on lui demandait de nous en garder un jaune et un rose de côté? Avant de partir, on vient les récupérer comme ça. »

Rinako aura sa Suki-bunny et elle-même aura sa Rinako-bunny. Ça pourrait être un premier cadeau d'amoureuse, le truc tout mignon dans le début de relation. Puis en piochant dans la glace, elle tendit sa cuillère à Rinako pour qu'elle utilise la sienne. Bah quoi? Si elles n'avaient pas le droit de s'embrasser avec la grande roue, elles pouvaient s'embrasser indirectement!

Plus ça va plus j’ai envie de l’embrasser. Quel meilleur réveil que toutes les deux ? Je n’en vois pas, mais il faut dire que je ne me creuse pas trop la tête. Je voudrais déjà être au lit avec elle, bien au chaud dans ses bras. Je suis devenue une sacrée perverse depuis quelques dizaines d’heures mais ce qu’on pourrait faire n’est qu’un détail du moment qu’on est ensemble. La voir froncer les sourcils me donne encore plus d’envies affectueuses, c’est que je préfère ma petite amie avec le sourire. Mais je manque d’avaler ma glace de travers en voyant ce qu’elle me montre.

« Ouais... C’est presque trop ressemblant... T’as vu la bleue ? On dirait le Colonel Sokoku... Sauf la poitrine. »

Dans le commando on est vraiment très strictes sur les règles : les gros obus sont pour les supérieures. Je pouffe de rire en imaginant les lapines en peluche pendant le briefing, pour un peu je lâcherais la barquette de glace. Je suçote la cuillère de Suki en écoutant sa proposition avant de lui rendre la béquée. Minute, ma fille : ça c’est pas un geste qu’on fait entre bonne copines. Mais si je m’écoutais lui servirais la glace directement avec ma langue.

« Ok, mais à ce stand... En fait non, à tous les stand : on gagne un cadeau de chaque ! »

Ça devrait suffire pour un anniversaire général à l’orphelinat, et j’ai envie de me la péter un peu devant ma petite copine. Avec un fusil de précision je suis un vrai boulet, avec un fusil d’assaut je suis potable, une mitraillette dans les mains je me débrouille, mais avec un flingue... C’est la seule arme que je maîtrise à la perfection, et je ne mettrais jamais mieux ce talent à profit que pour offrir une lapine en peluche à ma Suki d’amour. Je lui tend une autre cuillérée de glace à la fraise en tendant la barquette vers un grand bâtiment.

« En attendant : on va faire ça ! »

Et il y a quand même des chances qu’on craque et qu’on s’embrasse, là-dedans. La maison hantée ? Non : le Z-G Dedalus ! Le labyrinthe en apesanteur, aux salles et aux couloirs capitonnés, rien de vraiment fort en adrénaline. Rien de sombre non plus, ambiance station spatiale. Une attraction très prisée des amoureuses, mais bien plus fréquentée que la grande roue. Difficile d’y trouver un coin tranquille pour ne serait-ce qu’un baiser en privé, avec tout monde qui flotte dans tous les sens. Enfin, il paraît... Mais c’est d’autant plus excitant. Encore quelques cuillérées de glace et la barquette vide file à la poubelle.

« La gravité zéro sans combi, et en moins de cinq heures de vol. C’est une attraction assez récente, je l’ai jamais faite. »

Au moins Suki aura une de mes premières fois. Encore que je n’ai pas encore bu d’alcool. Moins romantique que de faire de moi une femme, mais je sais bien que si je n’avais sauté le pas avec une autre je n’aurais jamais eu le courage de lui avouer mes sentiments.

C'est vrai que ses peluches étaient assez troublantes... Mais ce n'était peut-être qu'une coïncidence? Quoi qu'il en soit, ça restera un cadeau pour Rinako ainsi que pour quelques petites. Avec toutes les peluches qu'elles vont gagner, elles ne vont pas liquider un stand mais en piocher sur plusieurs donc chacun aura sa mascotte. En attendant, Rinako lui montre une nouvelle attraction entre deux cuillères de glace, Z-G Dedalus? Inconnu au bataillon! Ça ne semblait pas être une attraction classique pour Suki, un labyrinthe en apesanteur, moui. C'est surtout que c'est nouveau, elle ne savait pas vraiment si c'était une bonne ou une mauvaise chose? C'est qu'il y a du monde, aucun moyen d'être vraiment seule et tranquille, pourtant ça aurait été une bonne occasion pour une ou deux choses, même si Rinako attendait la fin de journée ou après-midi pour la grande roue, Suki avait envie d'embrasser sa petite amie. Elle n'en avait jamais eu et voilà qu'une fois que c'est fait, elle veut patienter pour cela. Privée de baiser mais pas de câlin ou se tenir la main donc ça passe encore. Le temps de jeter un cadavre de ce qui était une barquette de glace que Suki retrouve la main de sa petite amie.

« Eh bien allons-y alors. C'est juste que je risque de ne pas te lâcher une fois en apesanteur, je.. je veux pas... me... s-s-s-séparer de toi. »

Un peu cliché ou mignon? Certes mais Suki avait tellement feuilleté de série ou livre avec ce genre de petites phrases ou petits mots ridicule mais qui semblaient faire effet. Et bien que ce soit tout rose entre elles pour le moment, elle préfère avec le maximum de balle dans son pistolet pour tirer de nouvelles balles d'amour sur Rinako. Mouais, faut éviter ce genre d'allusion en vrai. Jamais vu ou entendu dans des films et même... ça ne semble pas être très romantique mais bon, Suki et l'armée quoi. Dans une nouvelle file d'attente, les deux Celkhanes amoureuses – parmi tant d'autres – se tenaient la main en avançant doucement un certain temps avant d'attendre de nouveau, puis reprendre la marche le temps que certaines montes là-haut ou en descende.

« Tu sais, je n'ai que consulter le rapport de ta mission avec les Tékhanes. Est-ce que c'était dur pour toi? Dangereux? Est-ce que je... t'ai manqué? »

Bah oui, si Rinako l'aimait depuis longtemps et était parti au matin avec une Suki légèrement alcoolisé la veille, lui avouant son amour, est-ce que la lieutenante du Commando était présente dans ses pensées? Rinako le fut, surement moins qu'elle dans les pensées de Rinako mais après tout, après la soirée passée avec elle, la fin du moins, elle avait quelques doutes sur ce qu'elle aurait pu dire ou entendre. Certes il s'était passé certaines choses avec Nova Terra près de Tékhos mais... même si elles s'étaient dite ses quelques mots d'amour, elles n'étaient pas encore en « couple »... Puis bon, rien ne disait dans les rapports que Rinako n'ait rien fait non plus? Toute façon, elle avait le droit, Suki était coupable déjà et de plus, comme elle le pensait, elles étaient vraiment amoureuses et en couple depuis ce matin, pas depuis hier ou une semaine donc, elle ne lui jettera aucune pierre. La marche dans la file d'attente reprenait un peu avant de s'arrêter de nouveau, bientôt leur tour... Est-ce que c'est autorisé de poser un congé de quelques jours? Vu son grade, beaucoup de gens comptaient sur elle, sur Rinako aussi mais elle avait envie de profiter de sa compagnie sans se cacher quelques jours... Au moins elle pourra se réconforter déjà de l'avoir avec elle le soir – sauf les soirs où au petit matin elle devra faire un entrainement surprise pour ses troupes – mais bon, ça sera toujours ça de bien.

Ses mères feront une drôle de tête le jour où elles apprendront que leur fille n'est plus célibataire... Elles savaient que leur fille n'était pas une fille qui récoltait des petites amies en un claquement de doigt mais bon, tout se fera petit à petit. Elle voyait déjà sa vie avec Rinako comme elle l'avait imaginé depuis longtemps. La petite amie, une fille qui plait à ses parents, de même pour Suki sauf qu'en l'occurrence, elle ne connaîtra jamais sa belle-mère. Quelques années plus tard, les voilà parent avec une sublime petite fille, puis au fil des années, des nouvelles petites viennent agrandir la famille. Certaines marcheront sur les traces de leur parent en choisissant la carrière militaire. D'autres seront peut-être médecin, vétérinaire, avocate, danseuse, chercheuse, bref, ce qu'elles ont envie de faire puis elle espérait pouvoir vivre assez longtemps pour pouvoir tenir un jour dans ses bras leur petite fille et devenir une grand mère aussi douée que lorsqu'elle était maman. Puis après... ce n'était pas important, elle volait construire une vie heureuse et aujourd'hui avec Rinako, elles posaient ensemble les premières briques de futur qui semblait palpable sous ses doigts. Elle était amoureuse et les Déesses ne savent pas à quel point elles peuvent rendre cette fille heureuse rien qu'avec cette journée... pourvu qu'elle ne finisse jamais.

Suki a l’air de flotter sur un petit nuage et je n’ai qu’à poser les yeux sur elle pour ressentir la même chose. Elle ne veut pas me lâcher, elle ne veut plus me quitter. Qu’est-ce que j’ai envie de l’embrasser ! Ici, devant tout le monde, la serrer contre moi, glisser les doigts dans ses cheveux, poser mes lèvres sur les siennes... Ma Suki. Je me contente de garder les doigts glissés entre les siens, nos bras croisés et serrés entre nous. Je tourne la tête pour souffler un petit rire à son oreille.

« T’es trop craquante comme petite amie ! Je vais vraiment faire des jalouses. »

Il y a foule à l’entrée du Z-G Dedalus. On est pas les seules à se tenir la main, mais les autres ne craignent de se câliner tendrement ou de se faire de petits bisous. C’est encore plus dur de me retenir... jusqu’à ce que la blonde de mon cœur parle de la mission. Pour moi c’était il y a deux jours, j’ai passé une semaine dans un coma artificiel pendant qu’on me remontait pièce par pièce comme une épave. C’est encore frais et finalement tout s’est passé en si peu de temps. Trente-six heures d’un cauchemar impensable, puis les Zéroïnes, les frangines coquines... Je rougie sans doute un peu rien que d’y penser, mais il y a bien d’autres choses qui se bousculent dans ma petite tête.

« C’était... C’était l’horreur. Dès le départ et ça a fait qu’empirer jusqu’à la fin. »

Je préfère lui passer les détails sur le nombre hallucinant de femmes que j’ai vu se faire massacrer. Il y a aussi Rayka, Mastermind et tous ces plans pourris que je n’aurais jamais dû seulement imaginer. Et il y a ce que je me suis bien abstenue de rapporter à quiconque. Mais il y a bien une chose que je peux essayer de lui dire. Je remarque que ma langue passe d’elle-même entre mes lèvres. Je relève les yeux vers elle avant qu’elle ne s’inquiète de ma nervosité.

« Tu m’as beaucoup manqué, Suki... Même si j’évitais de penser à toi... On est tombées sur un télépathe qui... qui aurait pu se servir de mes sentiments pour toi. »

Si je n’avais pas passé mon temps à me demander ce que ma mère aurait pensé de moi, cet enfoiré aurait vite vu comment j’avais quitté Caelestis. S’il avait agité Suki comme un épouvantail devant moi je serais vraiment devenue dingue. Je me détourne d’elle le temps de chasser un frisson, mais ça passerait plus vite avec un câlin. En plus j’ai beau penser ce que je viens de dire je me suis quand même tapé deux grosses perverses hier juste après le déjeuner. Ta meilleure raison de rentrer mais t’as fait un sacré détour, ma fille !

Je fais semblant d’écouter les consignes de sécurité histoire de me changer les idées. Je connais hors de l’atmosphère, pas de raison que ce soit plus dangereux ici. Il faut vraiment que je sorte tout ça de ma tête. Heureusement nous entrons déjà dans le sas. Signaux lumineux et sonores assez doux dans un cadre bien blanc et rassurant, aseptisé. Très vite je me sens plus légère. Je lève les bras et donne un petit coup de talon qui me fait prendre appui au plafond.

« Tu entends ?... Pas de valve du système d’aération qui claque... Pas de grincement de la superstructure à cause des corrections orbitales... Ça fait trop bizarre ! »

La porte face à nous est ronde, elle roule dans la paroi et dévoile un embranchement de trois couloirs. Droite, gauche et milieu, ronds comme les pièces auxquelles ils conduisent. Les murs sont capitonnés, tout comme les suites de barreaux qui relient les portes entre elles comme des échelles. J’attrape le premier qui vient, puis je lâche la main de Suki pour me défaire de mon sac et l’envoyer flotter droit vers sa tête. Je profite de la diversion pour remonter l’échelle à toute vitesse en riant.

« Je croyais que tu voulais pas te séparer de moi ? »

Et je pars dans le labyrinthe. Je sens que quand elle me rattrapera elle aura bien mérité un petit baiser en attendant la grande roue.

Elle nage en plein bonheur, il n'y a pas à dire! Elle peut penser que ça serait mieux dans quelques années avec des enfants et tout ce qui va avec mais Rinako était sa première petite amie, c'était sa première histoire heureuse en amour alors tout ce qui est enfant, c'est au second plan et elle y penserait vraiment que si elles en parlent. Pour le moment, c'est juste Rinako qui compte, c'est tout. Et même si dans la queue, il y avait surtout des couples, il y avait quelques enfants accompagnés de leur parent, famille ou autres. Elle préférait prendre des nouvelles du sergent, voulant un peu plus de détails qui n'est pas dans le rapport, elle ne demande pas de tout savoir mais une ou deux choses qu'elle aurait pu oublier de mentionner même si c'était une question pour savoir son état qui l'intéressait surtout. Elle allait bien même si elle devait éviter de penser à elle à cause de leur ennemi Mastermind. En effet, elle avait lu dans le rapport les étranges pouvoir de ce fou dangereux. Heureusement, il n'est plus de ce monde. Et elle espérait surtout qu'elle n'avait pas trop souffert avec ce type! Même mort, Suki serait capable de lui faire mal encore! On ne sous-estime pas une femme amoureuse, surtout si elle est dans l'armée! Une fois la machine en route, les voilà qu'elles se soulevaient doucement dans les airs, c'est vrai que c'était bizarre ici comparé à d'habitude. Mais plutôt que rester collée l'une contre l'autre, Rinako lâche sa main avant de lui envoyer le sac vide en pleine figure.

« Tu veux jouer à ça? J'arrive alors! »

Et à son tour, elle plissait ses genoux pour rejoindre le plafond en s'accrochant à l'échelle et continuer en empruntant le même chemin que sa petite amie... C'est toujours si étrange de penser cela! En entrant dans le labyrinthe, il y avait un choix, droite ou gauche? Le commun des mortels avaient tendance à prendre à gauche en majorité. Elle observa la gauche mais comment trouver un indice ici? On ne pouvait pas dire l'odeur non plus, de plus Suki n'est pas une chienne! Allez, elle avait confiance! Elle prenait à gauche en arrivant sur un chemin qui partait encore plus haut. Fastoche! Elle grimpait pour rejoindre le haut et regarder la suite du programme... un chemin unique, bon, aucune hésitation pour le moment alors. Elle continua le chemin mais au prochain tournant, elle avait à peine eu le temps de voir quelques cheveux roses tournés à gauche encore une fois. Il n'y avait pas trente-six personnes avec des cheveux pareils ici, c'est possible mais ça ne court pas les rues. Elle accélérerait un peu le pas en arrivant au tournant pour se faire attraper par Rinako? Zut, elle qui voulait la surprendre! Raté! Mais c'était un ratage qui avait du bon vu ce petit câlin et ce baiser surtout. Elle avait changé d'avis et le faire maintenant plutôt que la grande roue? Ouf, la tentation était si forte depuis tout à l'heure.

Suki gardait ses mains autour de Rinako pour l'embrasser contre le mur, ne faisant plus qu'un en l'embrassant délicatement, elle adorait ce baiser, elle va adorer les prochains. Elle sentait les mains de Rinako dans ses cheveux mais Suki s'en fichait pour son cas, elle tenait Rinako. Puis avec ses gants, elle ne va rien sentir. Vivement ce soir, elle va sentir Rinako et ça ne sera pas que pour ses cheveux. Sa langue se mariait parfaitement avec la sienne, se frottant contre elle, passant de sa bouche à la sienne. Et quand vint le moment de se séparer, Suki était un peu gourmande cette fois puisqu'elle poussa sur la pointe des pieds en susurrant un dernier petit:

« Encore un. »

Avant de rejoindre ses lèvres et de les embrasser une nouvelle fois, ne se lassant pas de ce goût pour le moins unique. Cette fois ce fut plus court mais elle ne rechignait pas quand elles devaient séparer leurs lèvres. Elle avait encore ce petit sourire timide sur les lèvres, ses joues un peu roses. Il va lui falloir du temps pour vaincre cette timidité qui n'était pas son genre pourtant... sauf en amour apparemment. Elle se décolla lentement d'elle sans pour autant la fuir.

« Qu'est-ce qu'on fait ici maintenant? À toi de me chercher? On continue le chemin sur notre petit nuage? »

Plutôt que choisir, il y avait déjà une troisième option plus intéressante sur leur chemin, elles n'allaient pas tarder à trouver une petite fille en pleurs qui avait perdu ses parents à force de trop s'éloigner en voulant faire le jeu toute seule, comme une grande. Même si elles ne combattent pas de Formien ou de d'esclavagiste, elles restent des femmes luttant pour la paix, même les petites paix.

Un peu que je veux jouer à ça ! Et j’espère bien qu’elle arrive. Je m’enfuie, je profite même de mon pouvoir pour mieux glisser dans l’air. J’ai cet avantage sur elle, mais je ne veux pas vraiment la semer. À gauche, puis en haut. Je m’arrange pour rester sur le pourtour du labyrinthe, ça limite les croisements et les chances qu’elle perde ma trace. Je viens juste d’avouer mes sentiments à ma petite amie, je vais pas la larguer ! Arrivée au bout de la coursive j’attrape la poignée pour jeter un œil en arrière. Personne... Une ombre ! Je file. Elle m’a sans doute aperçue, mais ne doit pas se douter l’embuscade. je passe les pieds sous les poignées et m’accroupis juste à la sortie du tunnel.

Une main fine gantée de jaune arrive, mais alors qu’elle file vers le rebord du seuil je glisse la mienne en-dessous et tire. En apesanteur Suki est encore plus légère qu’une plume, mais elle garde une masse à peu près équivalente à la mienne et j’ai peut-être sous-estimer l’inertie de mon mouvement. Traduction ? Je manque de nous faire partir toute les deux en arrière ! Je lâche un petit rire en passant ma main libre dans son dos pour l’attirer à moi. Ma petite amie, mon grand amour j’espère. Je plie les genoux pour pencher en arrière et me retrouver dos au mur. Ma main remonte dans son dos jusqu’à sa nuque.

Ses lèvres, enfin ! Dommage qu’on porte des gants, je voudrais sentir sa peau. En attendant J’ai ses lèvres, et sa douce langue qui caresse la mienne. Je voudrais rester comme ça toute la journée, les yeux fermés à respirer son souffle. Ma Suki d’amour ! J’ai hâte qu’on soit vraiment toutes seules, qu’on puisse enfin se dire et se faire tout ce qu’on veut. Se câliner pendant des heures en se disant des mots tendres, s’embrasser encore et encore...

« Encore ? »

Mais avec plaisir ! Je me serre contre elle et savoure une fois de plus sa délicieuse bouche. Si je me retiens pas j’en réclamerais encore un après, et un autre, un de plus... Mais si on passe la journée à se bécoter, la grande roue ne sera plus si magique. Mais elle est trop craquante quand elle sourit comme ça ! Il faut vraiment la maîtrise de soi d’une commando d’élite pour se retenir de la câliner comme une peluche. Courage, ma fille ! Ça viendra ! Je la relâche pour nous laisser flotter, avec une petite moue.

« Hmmmm... Le petit nuage est tentant, mais surtout envie de... »

Je m’interromps de moi-même et tourne la tête, fronçant soudain les sourcils.

« T’as entendu ? »

J’ai bien cru entendre... Un gémissement ! Ça recommence. Une toute petite plainte sanglotante, et ça vient de tout près. Je donne un petit coup de talon contre le mur pour filer vers une pièce voisine. Une grande pièce, trop grande pour la petite fille qui y flotte roulée en boule. Elle a quoi ? Huit ou dix ans ? La pauvre gamine est bien trop petite pour atteindre un mur et il ne semble y avoir grand-monde dans le coin pour l’aider. À part nous, bien sûr ! Je me propulse doucement vers elle.

« Vient par-là, toi... »

On est pas dans un trou à rats plein de connards pervers, la gamine est bien contente de voir arriver quelqu’un et m’ouvre grand les bras. Sur Caelestis les mères n’apprennent pas à leurs filles à fuir les étrangères comme la peste, encore moins quand elles portent l’uniforme. On est pas encore de l’autre côté qu’elle s’accroche comme un koala en geignant à mon épaule.

« Je sais pas où sont mes mamans.
- T’inquiètes pas, mon petit ange. On va les chercher ensemble. »

Je relève les yeux vers Suki qui m’a suivie. Je lui souris sans rien dire, je ne pense pas qu’elle va me reprocher de différer nos petits câlins pour aider une fillette perdue. Je détends ma prise sur le corps frêle de la petite fille, et guide sa main jusqu’à une poignée.

« Je m’appelle Yukimitsu Rinako. Et ma copine c’est Tetsuhiko Suki. Et toi, comment tu t’appelles ?
- Megumi, madame... Takahara Megumi.
- On va retrouver tes mamans, Takahara Megmi. »

Et nous voilà parties. Je laisse la gamine avancer toute seule, juste derrière elle prête à rattraper une nouvelle mésaventure. Mais je ne surveille pas qu’elle. Je ne peux m’empêcher de jeter de petits coups d’œil à Suki. Ma petite amie, et peut-être bientôt plus encore. Elle veut une famille, je n’ai pas oublié. Je la revois dans l’ascenseur avec cette pauvre gamine martyrisée, qui ne semble pas s’en remettre sauf quand ma petite blonde d’amour lui rend visite. Elle va l’adopter, j’en suis certaine. Seule ou en couple, avec moi ou une autre elle deviendra la mère de cette gamine. Il n’y a qu’elle pour ne pas encore l’admettre vraiment.

Et malgré tout ce qui se passe en ce moment dans ma vie, malgré tous les secrets et les dangers, je me vois déjà avec elles.

Cette petite séance de câlin et de baiser n'était pas faite pour lui déplaire! Si ça aurait pu durer plus longtemps, elle n'aurait pas été contre! Enfin, il fallait bien en garder pour la grande roue et surtout pour leur nuit d'amour! Là, c'était détente et mamours, après c'était un peu de tendresse en donnant un peu de joie à toutes ses petites et ensuite, c'était interdit aux enfants! Mais une fois leur petite séance, elle comme Rinako avait pu entendre les gémissements qui provenaient un peu plus loin et sans vraiment avoir besoin de le demander, les deux soldates se rapprochaient de la source des gémissements pour trouver une gamine qui avait perdu ses parents. Ha oui, c'était grand ici, il faut faire attention. Suki suit sa petite amie cueillir cette petite au milieu de cette grande salle et qui s'accroche à elle un peu comme l'avait faite cette petite quand elles étaient sur Terra. Voir Rinako avec cette petite ne rendait pas Suki jalouse, au contraire, elle pensait qu'elle n'avait pas de mal avec les enfants, qu'elle aussi pourrait faire une mère formidable. Certes, elle ne se base pas que sur ça mais elle rend visite souvent aux petites, elle est appréciée par ces dernières, c'est déjà des points en plus que Suki aime chez Rinako. Face aux enfants, la lieutenante n'était pas ce petit soldat qui avait l'air en colère, elle restait souriante et accueillante. Ce n'était pas les enfants qu'elle détestait après tout.

Suki prenait un peu d'avance sur elles une fois qu'elles avaient atteint un endroit où avancer tranquillement, elle passe à coté de Rinako en tenant sa main quelques instants.

« Je vais me rendre à l'accueil pour faire passer le message. Autant ne pas inquiéter ses parents trop longtemps. »

Plus de peur que de mal, heureusement mais Suki préférait rendre les parents de cette gosse moins inquiète que maintenant. Les pauvres, elles devaient fouiller tous les recoins pour la retrouver. Par chance elle trouve une des jeunes femmes présente dans l'attraction pour guider celles qui sont un peu perdues ou cherche une sortie pour stopper l'attraction ou les toilettes aussi. Elle fit passer le message à propos de la petite Takahara Megumi puis en un simple contact radio, les parents étaient prévenus dans l'attraction, ils n'auront qu'à chercher leur petite fille à l'accueil ou avec cette jeune femme s'ils la croisent avant. Suki patientait avec elle puisque Rinako n'allait pas tarder à arriver et une fois la petite entre de bonnes mains Suki la salue avec la main avant de rependre la route avec Rinako, sa petite amie. Quelques mètres à peine plus loin, elle ne peut pas s'empêcher de reprendre sa main.

« Tu étais si belle avec cette petite. Toi aussi tu ferras une bonne mère, je suis sûr. »

Mine de rien, maintenant qu'elle parlait d'enfant, ce n'était pas simplement avec une collègue de travail mais bien avec la femme de sa vie. Mais elle ne préférait pas parler de ce genre de chose maintenant. Elle savait en ayant entendu une ou deux conversations que parler de ce genre alors que ça faisait peu de temps que deux femmes sortaient ensemble, ça pouvait jeter un froid. Alors elle évitait même si Rinako comme Suki savaient toutes les deux un peu de choses à ce sujet. Changement de sujet! Elle se tourna vers Rinako en souriait, tant qu'elles étaient ici, il ne fallait pas oublier une chose entre les souvenirs, les restaurants, les attractions,...

« Rinako, une fois sortis d'ici, allons faire une photo! »

C'est vrai qu'elle y tenait à son souvenir de sa première sortie avec sa première petite amie! Que ce soit une photo, une peinture, un simple transfert pour leur portable ou leur pc, qu'importe, elle voulait le tout! La photo pour chez elle, le fond d'écran pour son portable, le papier peint pour son écran d'ordinateur! Mais comment? Sur quel fond? Celui du parc? Un cœur? Trop classique mais... des fleurs? Des bonbons? Il va y avoir du choix mais au moins, Suki tenait à faire cette photo!

Comment en pas lui sourire à la seconde où elle pose la main sur la mienne ? Et pourquoi, en fait ? Il ne m’en faut pas plus pour être heureuse. Et je dois bien reconnaître que quand elle nous dépasse, la petite et moi, j’en profite un peu pour reluquer ses fesses. C’est vrai qu’elles sont moulantes, nos combinaisons. Pas étonnant que des grosses perverses fantasment sur nous. Mais à quoi je pense alors que je suis sensée veiller sur une enfant ? Tu files un mauvais coton, ma fille ! J’ai jamais pigé cette image, faut dire que j’ai pas vu beaucoup de coton dans ma vie.

Suki va avertir quelqu’un, mais elle ne va sans doute pas trouver les parents tout de suite. Je peux perdre un peu de temps pour rassurer la pauvre gamine perdue. D’ailleurs ma petite blonde d’amour a filé comme une anguille, on est loin des petits gestes hésitant de ma protégée. Pour moi c’est enfantin de la dépasser en tournant pour arriver face à elle avec un grand sourire.

« N’aie pas peur, Megumi. Tes mamans sont pas loin. Et c’est pas si compliqué d’avancer en apesanteur. Tu veux que je t’apprenne ? »

Bien sûr qu’elle veut ! Un petit entraînement avec une commando, de nombreuses gamines en rêvent sur l’archipel. Alors c’est parti ! Je lui explique comment avancer, comment doser ses gestes, n’être ni trop brutale ni trop faible. Je crois que son moment préféré est celui où elle travers une pièce aussi grande que celle où je l’ai trouvée, et elle arrive de l’autre côté toute seule. On finit par faire la course, et évidemment...

« J’ai gagné !
- Si tu montes en orbite tu seras une vraie petite flèche. »

Allez ! La fillette est en de bonnes mains et ses génitrices anxieuses sont en chemin. Moi j’ai une journée de rêve à étirer avec ma petite amie. Ma Suki d’amour ! Quel plaisir de retrouver sa main, j’en frissonne. Et je frissonne encore à sa remarque. Je baisse les yeux, je sens mes joues chauffer. Une bonne mère, moi ? Je ne suis déjà pas capable de m’occuper de moi-même, en ce moment moins que jamais. Mais elle me rend bien assez folle pour me voir avec des enfants, même des petits-enfants, de l’avancement et la retraite. Je n’ose rien répondre sur le coup, je ne trouve rien d’assez... Je ne sais pas.

Par contre, une photo, c’est déjà plus abordable !

« On y va tout de suite ! »

Je crois que je vais m’acheter un appareil, histoire qu’on puisse en faire d’autres. Non, mieux : je vais lui en offrir un ! Je pense qu’elle aimera. Pour l’instant je garde ça dans un coin de ma tête. Nous voilà dehors et serre sa main dans la mienne pour l’entraîner à travers le parc d’attraction. Il y a des coins bien connus avec des appareils automatiques, le tout est de savoir quelle vue nous ira le mieux. Je tire ma petite amie en trottinant. Il y a une esplanade garnie qui remonte en direction de la grande roue, garnie de stands, de bancs et de tables. Juste un peu plus loin une large passerelle monte doucement sur quelques mètres vers une terrasse.

« Ici ! Toutes les deux devant la grande roue. »

Comme si je lui laissais d’en placer une avant de la planter devant la colonne étroite. Je fais péter la carte avant de venir me coller à ma belle blonde d’amour avec un grand sourire. Je pose la tête sur son épaule alors que l’appareil fait le point. Mes doigts glissés entre les siens serrent sa main alors que le décompte commence. Trois... Deux... Un... je tourne la tête juste à temps pour le déclic avant de laisser filer un petit rire.

« Hihi ! Ça va nous faire une jolie photo ! »

Et j’ai bien envie de voir la tête de Suki surprise par un petit bisou en traître.