The Multiversity

A force de sillonner l'Outreterre à bord de son imposant Rampant des Terres Noires, Eviscéran avait fini par se rendre compte d'une chose : le Barbarium avait, en terme de rentabilité, ses limites. Le capitaine avait donc ressenti le besoin de se renouveler, d'étendre son business au-delà des sinistres cavernes du Sous-Monde. C'était également l'occasion pour lui de prendre quelques vacances bien méritées. Pour cela, il avait donc choisi de s'en remettre aux "bons soins" de son "ami" Vortex. Le Drow était avant tout un chercheur. Une ordure méprisable sur bien des points, certes, mais indéniablement instruite dans tout autant de domaines. Eviscéran se méfiait de lui pour cela, tout comme il le respectait pour les mêmes raisons.
Je peux toujours compter sur Véfa pour veiller à ce qu'il ne me la mette pas à l'envers.
Contrairement aux autres femmes de son équipage, la moitié Drow moitié démone n'était pas une esclave mais une partenaire commerciale. En ces termes, les bénéfices du Barbarium remplissaient également sa bourse. Elle était donc bien moins encline à le doubler, lui, plutôt que Vortek, qu'elle parvenait souvent à séduire...
J'ai suffisamment vécu pour comprendre qu'on ne peut pas faire confiance à tout le monde.
A défaut de ne pas pouvoir compter toujours sur soi-même.

Et donc, à l'aide d'une de ses trouvaille mystiques, le Nécromancien (Vortek) avait trouvé le moyen de générer un portail vers un autre monde dans lequel il avait été le premier à plonger tête la première sous les "encouragements" de son capitaine. Là-bas, de l'autre côté de la faille, le Drow avait établi un contact avec un autochtone. Un furry lapin déguisé en humain. Un homme aussi malin et sournois que lui. Quelqu'un de compétent et de haut placé. Le genre de fripouille capable de mettre en place une affaire juteuse à partir de rien.
C'est là ce qu'il avait construit pour le boss de son sombre acolyte.
Eviscéran n'était pas venu le rejoindre tout seul. Avec lui, le Brise-Monts avait embarqué ses premières esclaves : Ilge Val'jardnesk et Ökale. Des combattantes obéissantes, diablement efficaces en tant que gardes du corps. Elles avaient toutes les deux eu un certain impact sur Edwyl ; tout de même moins marquant que celui de leur puissant capitaine, avec son écrasante carrure de monstre musculeux.
Ensemble, ils avaient pu discuter à l'abri des regards et des oreilles indiscrètes. Ensemble, ils avaient réfléchi à un projet. Grâce aux richesses accumulées par le Barbarium et aux connaissances de ce beau diable d'Edwyl, tout cela fut rapidement mis en place.
Cette sainte petite ville avait grand besoin de nos divertissements.

Aujourd'hui, Eviscéran Kroch'mar, le cigare à la main, siégeait dans un énorme fauteuil en cuir, derrière un somptueux bureau en bois poli. Il écoulait ses plus belles journées au sein de ses appartements insonorisés, qui se trouvaient à l'étage d'une grande boite de nuit dont il était devenu le puissant patron. Etablissement prospère ressemblant vaguement à un vaste entrepôt, situé à l'écart des habitations, où les petites frappes traficotaient de temps à autres. Des humains puérils que le Brise-Monts avait assujettis. Leurs bénéfices étaient également les siens - il touchait une excellente commission, et eux suffisamment pour se faire plaisir sans ressentir le besoin d'en exiger davantage. Un argent sale que les canailles introduisaient souvent dans le string des stripteaseuses. Car la boîte de nuit n'en était pas qu'une ; elle était pluridisciplinaire avec ses danseuses osées, ses prestations encore plus intimes, son salon de jeux de hasard réservé aux clients VIP et bien sûr... son arène de combat souterraine où les paris inhumains allaient bon train.
Un nouvel empire à mon nom, qui s'est construit en moins d'un petit mois.
Il avait payé cher pour cela. Il avait pris des risques...
Tout ceci en avait valu la peine !

Eviscéran se leva de son siège et, les mains rangées dans le dos, se tourna vers la vitre blindée qui donnait sur la scène en contrebas.
Oh, qu'il paraissait fier en contemplant ce spectacle obscène où les humains, agglutinés autour d'une bar de Pole Dance sur laquelle se tortillait l'une des leurs, se soulageaient de leur argent en dons et en boissons !
Dommage que leur alcool soit si faible.
Seulement pour ses papilles. Ses clients, eux, devaient souvent être ramassés à la pelle dans ses locaux et jetés dehors comme du fumier...
Ce qui ne les empêchait pas de revenir le lendemain. Et le surlendemain.
Ils ne représentent aucune menace, contrairement à ce supposé trublion.
Eviscéran Kroch'mar attendait sa venue avec impatience. Edwyl lui avait parlé de ce souci en devenir. De cette jeune femme incapable de tenir en place, et qui avait l'habitude de fourrer son petit nez n'importe où. Cette intrépide créature figurait dans le contrat qu'il avait passé avec le lapin blanc. Pour le conclure, le Brise-Monts devait la remettre à sa place.
Je n'ai rien à craindre d'une humaine.
Ses championnes non plus. Elles étaient puissantes, en plus d'être habillées pour se fondre dans la masse.

Ilge Val'jardnesk :

Ökale :

Armée de son éternelle matraque cloutée, la première jouait son rôle de cerbère (videuse) à la perfection. Là où la seconde, beaucoup plus détendue, se pochetronnait en étant accoudée au bar. Ce qui ne l'empêchait pas de garder un œil sur son environnement ! Enfin... un "œil" façon de parler puisqu'elle était aveugle.
Deux potentiels obstacles pour la vigoureuse Emmy Stan ?

- (Emmy) : Okay Martha chérie. Je suis en place devant la boîte nuit que tu m'as parlé toute à l'heure. Putain du peu que je vois, ça a l'air de grouiller de monde là-dedans. Il y a une file de dingue pour entrer, alors qu'il est même pas 23 heures. On entend même la musique depuis la file...

- (Martha la chatte domestique) : Fais attention Emmy. Je te rappelle que tu n'es là qu'en observation. Donc tu évites de te faire remarquer et ne fais aucun grabuge à l'intérieur. D'après les infos que j'ai obtenu au fil des derniers jours, il se pourrait bien qu'un homme dangereux et nouvellement arrivé en ville, répondant au nom de Evisceran, collaborerait étroitement avec notre cher maire "adoré". Il faut que nous découvrions de quelle manière il opère avec cet endroit et si nous devons prendre cette nouvelle menace rapidement au sérieux.

- Ouais, ouais, je sais. On a déjà fait toutes les récaps avant. T'inquiète mimi, c'est juste une mission de reconnaissance. Je me faufile à l'intérieur discrète comme une ninja. J'observe tranquille dans mon coin sans faire d'emmerde, sauf si bien sûr on vient me faire chier. Et puis j'interroge quelques clients en faisant genre que je suis nouvelle et que j'aimerai avoir des infos sympas sur cet endroit. Sur ce je file. A toute, ma boule de poils sur pattes préférée.

Honnêtement, ça avait pas l'air compliqué. Cette mission "anti-crime", n'était même pas une baston. Puis c'est pas comme s'il fallait s'infiltrer dans un truc méga chaud, du genre de ce qu'on voit dans les films d'actions, avec les caméras, les lasers et tout le peloton d'ahuris qui sert juste de sac de frappe gratuit et qui se ramène à la moindre alarme. Donc, juste avant de filer à l'intérieur et pendant que je finis d'attendre, je vérifie les derniers messages du groupe des potos que j'ai reçus.

Le temps que je réponde, il mon tour arrive pour entrer. Je me retrouve alors face à une meuf au look vraiment badass. Une blonde en décolleté moulant noir, avec short de sport noir et plus large que ses hanches presque faites en métal. Vu comment elle est taillée et qu'elle regarde tout le monde, on comprend qu'il faut vraiment pas la faire chier et qu'elle est pas là pour rigoler. Alors quand je passe devant elle, je la salue. Elle, sans sourire bien évidemment, sans répondre avec les bras toujours croisés comme si elle aimait faire concurrence à un lampadaire mal éclairé, elle me regarde du coin de l’œil quand je passe la porte d'entrée. Putain ils l'ont bien choisis pour faire ce job. Si tous les employés sont tous comme elle, Martha va pouvoir illico mettre cet endroit en priorité classé dix étoiles.

Quand je me retrouve à l'intérieur avec d'autres gens et que traverse le couloir qui mène jusqu'à une lourde double porte, c'est là que je vois la totale de l'endroit. Une musique électro qui va à fond les balles, avec des lumières partout. Un gigantesque bar dans l'un des coins de la salle, avec des clients ramassés dans des canapés autour de tables, qui picolent comme des trous ou qui fument comme des pompier en manque d'éteindre des incendies. Une grande piste de danse qui se trouve un peu plus loin. Et surtout, surtout le truc qui semble intéresser tout le monde ici, avec des mecs et des meufs tous presque à poil et qui se trémoussent en faisant du pôle dance devant une paire de gusses affalés. Quasi que des mecs qui bavent, avec la langue jusque par-terre. C'est donc à ce moment-là que j'en profite pour sortir de la poche, la petite caméra wifi que j'accroche autour du cou et qui est directement connecté avec le téléphone. Là, je commence à mettre en route le live de ce soir. Après avoir continué de mater un peu tout ça et en attendant que le monde rapplique, un premier groupe se forme, en plus de mes amis qui sont connectés en mode VIP.

C'est en commençant à me laisser entrainer par l'ambiance et en laissant tourner le live, que je danse un peu sur cette musique de mafieux en herbe, qui était quand même pas mal foutue. Puis, je sais pas si c'est fait exprès parce que cette meuf aussi elle traîne sur mon live ou si elle est venue me brancher, mais une fille vraiment bien foutue avec un décolleté vert et une mini-jupe verte vraiment super sexy, vient s'approcher de moi pour discuter. Voila une occasion parfaite pour commencer à essayer d'apprendre peut-être des trucs sympas dans le coin...

- Salut ma belle. Toi aussi t'aimes bien venir dans ce genre d'endroits stylés pour t'éclater, quand tu te fais chier chez toi toute seule, avec un chat parfois un peu relou qui te parle toute la journée?

Ilge n'avait pas cherché à la recaler. Pourquoi ? Eh bien, parce qu'elle l'avait reconnue, cette potentielle enquiquineuse ! Edwyl avait été bien assez précis dans sa description. Une rouquine à la bouille insolente avec des couettes. Et surtout cette salopette bleue dont elle n'avait pas pour habitude de se séparer. Comme si la bougresse en possédait plusieurs exemplaires de rangés dans son placard.
Peu de temps après son passage, la semi-ogresse bloqua la file d'attente.
Celui qui s'était apprêté à entrer lui décocha un regard de malappris.

- Hey ? C'est quoi, l'blème ?

- 'Y a que c'est ma pause, cracha le plus sérieusement du monde celle que l'on appelait l'Implacable. Alors je vais la prendre tout de suite, et toi et tes petits copains vous allez attendre bien sagement que je sois revenue, pigé ?

- Putain, mais t'es pas sérieuse ?!

- Il caille, dehors !

- On est dans un courant d'air, bordel. On s'les gèle grave !

- Et ça fait déjà quinze minutes qu'on poireaute, en plus !

- Super, super, les coupa la barbare avec un sourire ironique. Ça veut dire que vous n'êtes plus à ça près.

Elle leur claqua la porte au nez et s'en éloigna. Dans son sillage, elle les entendit jurer et taper sur le métal comme des sauvageons.

- Tss ! Quelle bande de cons. Et quel putain de boulot de con, aussi, tiens !

Ilge aurait bien voulu se défouler sur cette greluche qui l'avait devancée mais son maître le lui avait formellement interdit, prétextant qu'il souhaitait la découvrir de ses propres yeux avant qu'ils n'entreprennent quoi que ce fût la concernant. Une affaire pénible aux yeux de la barbare, qui dut s'en aller informer Ökale de l'arrivée de l'intruse.

- Elle est là. Alors arrête de picoler et va la brancher, tu veux ?

- Mouais, soupira la Caverneuse, qui évacua un rôt spectaculaire avant de s'essuyer la bouche d'un revers de main. Tu ne voudrais pas plutôt qu'on se la fasse à deux ? Histoire d'expédier tout ça en un tournemain...

Elle agita négligemment une main vers la piste de danse.
La barbare la regarda de travers.

- Joue pas les imbéciles. Tu sais très bien ce qu'on risque en poussant le bouchon trop loin.

Ökale lui décocha un sourire narquois.

- Toi, l'Implacable, tu as peur que le terrible Brise-Monts nous passe dessus ? Et depuis quand tu te soucies de mon bien-être, j'peux l'savoir ?

- Depuis que tu te noies les neurones avec cette merde, dit-elle en lui arrachant la chope des mains avant de lui souffler au visage : Va faire ta part !

D'une tape dans le bas du dos, elle la força à descendre de son tabouret.

- Quelle plaie...

- Et ne te trompe pas de personne, l'aveugle !

Ökale s'esclaffa.

- C'est jamais arrivé. Ça n'arrivera jamais. Et par-dessus tout, ma bourrine, je t'emmerde~

Ilge la regarda s'éloigner avec un petit sourire au coin des lèvres. Ökale n'était pas sa meilleure amie et son amante pour rien. Son handicap visuel était depuis longtemps pour elles synonyme de plaisanterie.

Même si elle ne voyait rien et que la musique lui défonçait allégrement les tympans, la telluriste arrivait parfaitement à s'orienter sur ce terrain là. Sa cible bougeait bien au milieu des autres. Sa signature énergétique lui apparaissait très clairement. Ökale l'intégra soigneusement à sa mémoire avant de tenter une approche. Elle s'était mise à danser, elle aussi. Tout proche de la fameuse rouquine, qui ne tarda pas à la remarquer.
Ma belle, qu'elle a dit ? Le poisson a eu vite fait de mordre à l'hameçon !
En bonne hypocrite, elle rit de son commentaire incompréhensible au sujet d'un chat doué de parole.

- Et comment ! J'm'y aventure toutes les nuits quand mon singe de compagnie ne vient pas me refiler son linge sale.

Par l'intermédiaire de cette comparaison crue, son sourire s'accentua. Ilge, toute en muscles, était gaulée comme un gorille. Il lui arrivait d'être vache avec elle - presque autant qu'avec les autres. La concernée le lui rendait bien. C'était de bonne guerre, après tout. Entre championnes, elles se comprenaient mieux que personne.

- Ouaip ! J'suis une putain d'habituée, tu saisis ? A tel point que le boss, moi, j'le connais personnellement !

Elle était un peu éméchée, oui. Mais bon ! Elle arrivait à tenir debout et, par-dessus le marché, à aligner quelques pas de danse qui n'avaient rien à envier avec ceux des novices d'à côté. Rien d'étonnant à cela dans la mesure où pour combattre, Ökale se reposait énormément sur ses appuis. Tout passait par ses jambes. Y compris sa maitrise de la terre.

- J'sens que tu bouges bien, ma puce ! Bien mieux que tous ces glandus qui nous entourent. (Elle feignit la grimace.) Heureusement qu'je ne peux pas les voir, sans quoi je leur aurais sans doute vomi dessus.

Elle alla plus loin, feignant cette fois-ci la déglutition.
Cela la fit rire - éclater de rire, même ! Pourtant, elle se calma très vite.

- Tu veux peut-être que j'te le présente ?

Elle n'attendit pas avant d'enchainer :

- Attention, j'te préviens : c'est un vrai dur à cuire !

Puis elle se remit à danser. Comme si de rien n'était.

- T'as du pot parce que j'propose pas ça à tout le monde~

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Dans la gueule de l'Orc noir [PV Emmy Stan]

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