Page 1 sur 1

Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 03 mai 2025 20:22
par Cyra Veluria Tertia
Le conflit du Sang et des Ecailles


Une expedition périlleuse

Il s'en était passé des choses pendant que Novae Verinis faisait sa petite guerre civile. Ce qui s'était passé, c'était l'Olympomachie. Une histoire des Olympiens qui se sont battus contre des Mijakiens, mais également contre Lumen. Y a eu des batailles, des morts, et il s'est passé beaucoup de trucs. Bon, ne vous attendez pas à ce que je résume tout ça, moi j'y étais pas  ! Vous avez qu'à aller lire le résumé  !

Bref.

Cornulius terminait d'instaurer sa monarchie alors que les funérailles impériales sont en cours de préparation. La nouvelle héritière du domaine Velurii apprit sur le tard cet évènement en détail, ainsi que ses conséquences. Forte de sa victoire écrasante contre l'armée républicaine, la XVᵉ légion était gonflée à bloc. Elle dut hélas ronger son frein, tout du moins pendant un temps. Une trêve avec Lumen  ? Non, parbleu, non  ! Quelle indignité  ! Quel déshonneur  ! Comment le régent en place a-t-il pu signer telle ignominie  ? Et qui était-ce, donc  ? Emhyr var Emreis, le premier conseiller impérial. Un parjure ! Cyra fulmina de pareil ordre. Mais cela put permettre à la nouvelle monarchie de Verinis de se stabiliser et de reformer ses légions. Mais aussi, de recevoir une visite impromptue.

Un agent de la secte de la Lune noire, un nain se nommant Ferdun du Glasdecuivre. Une personne au visage disgracieux se présentant comme l'émissaire du baron Greldinard. Que des noms qui étaient étrangers aux oreilles de la légate, mais pas à Altaïra, sa succube. Ce mandataire de guerre était là avec une offre alléchante. La possibilité pour Al Légate de devenir un des plus puissants membres du nouveau conseil de Mijak, une plus grande autonomie ainsi que des fonds pour le roi Cornulius, à condition qu'ils s'allient avec le baron en tant que digne héritier du trône impérial. D'une guerre civile, la légion allait-elle en rejoindre une autre  ? Le soir, la succube sacrifia des prisonniers dans un rituel sensuel et meurtrier, afin de recevoir les paroles du grand démon. Et sa réponse fut unanime.

À travers la bouche d'Altaïra, il prononça devant la légion. « Vous marcherez contre les ennemis du Baron. Vous massacrerez les faux prophètes et les usurpateurs. Ainsi, Greldinard put rajouter une alliée de choix à ses côtés. La guerre allait reprendre. Et, d'abord, il fallait frapper fort. Après avoir décidé de ne plus payer les impôts à la capitale, le roi Cornulius envoya la legio VI Hasta Flammae, commandée par Aujurius du domaine Lamerii, rejoindre une armée séparatiste, une coalition de petits domaines hostiles au gouvernement en place, voulant profiter de l'instabilité de l'Empire pour rabattre les cartes. Certaines rumeurs racontent que le baron serait en secret à la tête de cette coalition. L'objectif de cette campagne était un petit pays, mais pas des moindres. Sylvandell, le royaume aux dragons d'or. Ainsi, cette armée coalisée entreprenait le siège du pont de Sylvandell, dont les fortifications empêchaient toute progression. Le siège allait être long, bien que l'artillerie de la Legio VI arrivât pour faire de gros dégâts.

Il ne fallait pas trop attendre et risquer que le royaume parvienne à se réorganiser et à envoyer ses dragons trop vite. Et c'était là que notre légion entrait en jeu. Sylvandell. Dans la tête de notre héroïne, ce pays était fantasmé. Lorsqu'elle n'était connue que comme la Cendreuse, elle avait eu affaire à des Sylvandins, qui lui avaient narré les pouvoirs des dragons. Cette nouvelle campagne était une véritable aubaine pour elle. Bien que leurs deux pays fussent voisins, la chaîne de montagne tortueuse et dangereuse les séparant était un véritable frein à l'échange et à la diplomatie. Car oui. Les routes étaient trop peu praticables, les dangers trop importants. Entre les tribus barbares, les monstres et la géographie, y faire circuler des convois révélait de la folie. Seuls quelques rares contrebandiers le faisaient.

Alors imaginer y envoyer une légion  ? Eh bien… des contrebandières, Cyra en avait dans son armée. Et elle avait même des orcs qui connaissaient bien ces montagnes. Les Narseïdes, qui avaient comme particularité, autre que leur gouvernement matriarcal et leur cannibalisme, d'avoir été pourchassés par les Vériniens et les Sylvandins. Alors, quand Cyra leur proposa "vous allez nous guider dans cette chaîne de montagnes, nous allons envahir le pays aux Dragons d'Or", Elles étaient toutes mouillées en apprenant ça. Il allait falloir organiser une expédition des plus périlleuses. Les orcs guidaient le pas avec les Sœurs d'Acier, et qui, grâce aux esclaves maudits de Sarth, doués dans les tunnels et dans les montagnes elles aussi, s'assuraient de construire des routes et un circuit adapté pour le transport de leur réseau de ravitaillement. Il fallait faire vite, et ne pas laisser l'ennemi se préparer. Bien sûr, le royaume avait un réseau de tours de guet, mais Cyra put compter sur les Voilées pour éliminer les guetteurs avant que le signal fût lancé. Cela permit alors l'impensable.

Un matin de printemps, sur les murailles de Rive-Bougre, bastion montagnard de Sylvandell. Les soldats en garnison échangeaient des plaisanteries sur le chemin de ronde, lorsque leur camarade, sur le tour de surveillance, se mit à crier.

"Eh  ! Faites venir le capitaine  ! Je perçois du mouvement à l'est  !"

L'intéressé monta alors rejoindre son soldat, afin d'observer avec lui. Effectivement, il aperçut quelques orcs qui semblaient en surveillance.

"Hum… les Narseïdes."

Voilà bien longtemps que je ne les ai pas vus revenir par ici… Sans doute l'hiver a été rude pour elles aussi, pour qu'elles osent se rapprocher d'aussi près.

"On fait quoi, capitaine  ? Je fais sonner l'alarme  ? "
"Oui. Appelle toute la garnison et rameute le stock de flèches. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir, 2 ou 3 volées et elles rentreront chez elles. "

Mais alors qu'il venait de prononcer ces mots, un cor de guerre sonna et l'inquiéta. Ce n'était pas un son qui venait des cornes des trolls des montagnes, instrument fétiche des pillardes orcs. Non.

"C'est un cor Vérinien…" murmura-t-il en tendant l'oreille.

Il put entendre des cris de guerre dans une langue qu'il avait entendue quand il faisait son service à l'étranger. D'un seul coup, il vit à travers les différents sentiers tortueux, au loin, une armée de légionnaires déferler vers le bastion.

"C'est… une invasion  ! Les Vériniens nous envahissent  ! Va de suite sonner l'alarme et envoie un pigeon à la capitale  ! Non, envoi en plusieurs ! Au pont de Sylvandell aussi  ! VITE  !"

Et le siège de Rive-Bougre commença. Le défenseur avait l'avantage du terrain, mais il fut vite surpris par la formation rapprochée des Sœurs d'Acier, qui avançaient en faisant rempart de leur bouclier, protégeant les archères et les frondeuses de la légion. Un corps souvent sous-estimé, qui suffisait à faire des dégâts à cette petite garnison. Les Narseïdes, fortes de leurs années à combattre les montagnards, avaient pu fabriquer leur échelle et commençaient avec les Sœurs d'Acier l'invasion des murailles. En quelques heures à peine, le bastion était capturé. Peu après, la légion fêtait sa victoire en profitant d'un bon banquet dans la salle de réception. Dans la cour intérieure, d'autres savouraient ses semaines et mois de pérégrinations dans la montagne en se distrayant avec les prisonniers et prisonnières.

Certains Orcs purent enfin redéguster la viande de Sylvandien. Au bout de la salle du banquet se trouvait le régent, un certain Vragen, qui assistait à la scène, impuissant, aux côtés de ses filles et de ses fils apeurés. Mais à sa droite, Cyra se délectait de la chair de mouton qu'on lui avait servie.

"Mmh… vous, les montagnards, vous savez vivre en tout cas  ! Votre fromage est exceptionnel."
"Comment avez-vous pu…" murmura le Régent, retenant une colère. "Vous vous rendez compte des conséquences de vos actes ? La reine ne restera pas les bras ballants face à cet affront. "
"J'y compte bien. D'ailleurs, je compte sur vous pour m'en parler plus en détail, d'elle. "
"Vous avez pu avoir Rive-Bougre par effet de surprise, Légate Vérinienne. Mais, votre armée ne pourra rien contre la capitale. Avez-vous donc oublié qui nous sommes  ? La Commanderie noire et les dragonniers ne feront qu'une bouchée de vous."
La légate se ressuya les lèvres, regardant son prisonnier, l'air pensif. Il avait l'air bien sûr de lui. C'est alors que, rentrant comme une furie, une orc tapait du pied.
"La troisième du nom  ! ! ! Comment OSES-TU ? "
Nashak, la cheffe des Narseïdes, avança d'un pas orageux vers Cyra. La manière dont elle avait appelé sa légate pouvait être une raison suffisante de passer en cour martiale, mais cette dernière acceptait son insubordination avec un peu de provocation, souriant légèrement. Nashak grogna, la regardant finir son plateau de fromage avec la famille du régent à sa droite.
"Comment ça, on n'a pas le droit de manger les nobles  ?" JE VEUX BOUFFER LE CHEF  ! Tu me l'avais promis  ! "
"Non, Nashak. Tu pouvais manger les habitants, et des nobles, sauf si ce sont les régents et sa famille. Et visiblement, ce sont les seuls nobles de ce bastion. J'ai besoin d'eux en tant que prisonniers de guerre, il est possible de les rançonner."

Une des filles aînées se mit à pleurer, intimidé. L'orc grogna et tapa du poing sur la table, la faisant sursauter. Elle plongea son regard dans celui de sa légate.
"Donne-m'en juste un. Je veux pas le manger. Pas complètement. Juste jouer avec. Tu me dois bien ça. "
Cyra soupira et regarda la famille qui tremblait de peur. Elle glissa doucement.
"Bon. Je suppose que si l'un d'entre eux perd une jambe, il restera rançonnable. "
Son interlocutrice sourit, avant d'expertiser chacun des membres. Elle s'arrêta à un des benjamins, un peu plus corpulent.
"Toi. Tu m'as l'air bien dodue… les filles, on le choppe ! »
Tous tentèrent de se débattre, mais la force des légionnaires autour d'eux suffit à les empêcher de se rebeller. Et le benjamin fut tiré de sa chaise dans des cris d'horreur.
"On l'emmène où, boss  ? " demanda un des Orcs.
"Bah  ! Y a un grand feu dans cette pièce, autant jouer avec ici. Devant sa famille… Dis-moi, mon gros, tu t'es déjà mis des trucs dans les fesses  ? Sinon, t'en fais pas, on va y aller doucement  ! "


Cyra laissa ses légionnaires jouer pour se rendre sur les remparts. De là, elle put voir une scène assez comique. Runata du domaine des Sigradanii, son ingénieur en chef, guidait des Narseïdes à installer une des balistes qu'elles avaient amenées sur les murailles. Les pauvres orcs peinaient à diriger et soulever l'artillerie avec des cordes et des poulies.

"Non  ! Pas comme ça  !" Rouspéta Runata avec de grands gestes. "À gauche  ! Non, l'AUTRE gauche  ! Voilàààà… comme ça, maintenant descendez. Descendez. J'ai dit descend… MAIS NON, LÀ, VOUS REMONTEZ  ! Dans l'autre sens, la poulie  ! MAIS DOUCEMENT  ! Y a au moins 6 ans de votre salaire dans cet engin  ! BORDEL, J'AI DIS DOUCEMENT  !"

L'arme se posa enfin sous la panique de l'artilleuse, qui s'empressa de retirer les cordes avant qu'un faux mouvement d'une des orcs ne dérègle tout.

"Comment se passe la préparation des murailles, Runata ?" demande le troisième du nom.
"Les préparations ?" Répéta d'un air moqueur son artilleuse. "Rooh… mais très bien  ! Toutes mes ingénieures et techniciennes sont derrière avec mes bébés d'amour, mes balistes de 12 pieds dont je tiens ENORMEMENT, qui doivent traverser mille périples pour arriver ici, et dont je n'ai AUCUNE nouvelle, mais ça va très très bien  ! Et puis, pourquoi avoir besoin d'ingénieurs quand on a SES GROSSES BURNES de sauvage  ! On a tellement galéré à ramener ces œuvres d'art à travers la montagne, ces crétins manquant à plus de mille fois à tout détruire, mais voilà  ! On va bientôt pouvoir installer ces trois petits bijoux  ! J'espère que les autres vont venir bientôt… encore une fois, pas sûr que ces petits modèles fassent beaucoup de bobos à des dragons  !"

Car oui. Le reste de l'armée était encore en chemin. La cavalerie, mais aussi l'artillerie lourde. La légion avait exigé que les manufactures d'engins de siège les plus performantes se consacrent à la fabrication de balistes et de scorpions conçus pour l'extermination de dragons. Elles purent installer les trois premiers, des petits modèles encore jamais testés. Son ingénieure soupira en regardant le bastion.

"Légate, vous êtes au courant que ce château n'est pas conçu pour protéger dans ce sens  ? Les fortifications sont médiocres du côté de la plaine… Les bastions de Sylvandell sont faits pour empêcher les montagnards de rentrer. Pas protéger des pignoufs qui sont en bas."
"As-tu peur, Runata ?" demanda d'un air de défi, sourire aux lèvres, la commandante en chef.
"Pff… peur  ? Moi  ?" répondit, offusquée, son interlocutrice. "La seule chose pouvant m'effrayer est un tonneau de vin vide. Je dis juste que si on se prend une armée dans la face, le temps que les renforts arrivent, on n'est pas sortis des latrines. Alors peut-être que mes merveilles vont agacer quelques dragonneaux, mais si arrive toute l'armada volante, on est marron. "

Sa légate le savait. Tout allait dépendre de la pression qu'allait exercer l'armée coalisée sur le pont du Pays, empêchant la commanderie noire et la dragonnerie de trop diminuer leur effectif.

"Aujurius de la légion VI est peut-être un abruti, mais pas sur le champ de bataille.Je sais qu'il parviendra à maintenir la pression."
"Hum. Espérons-le. "
"J'ai envoyé Finusia partir dans les plaines aussi. Elle et ses filles ont pu récupérer des chevaux dans l'écurie du bastion. Elles vont faire quelques raids et récupérer des provisions."
"À la bonne heure. Moins elle est proche, mieux je me porte."
"Notre objectif est de garder ce bastion le temps que notre artillerie principale et nos cavalières arrivent. Ensuite, nous prendrons la route vers le pont, afin de tenir en tenaille l'armée de Sylvandell. "


Runata soupira, avant de reprendre intérêt pour les murailles.

"Mouais. Bah, Aujurius, c'est un homme. Et tout ce que je dis, c'est que se reposer sur l'efficacité d'un homme, c'est pas ce que j'appelle un plan sûr. "
____________________________________________

Pas très longtemps après ce moment, un pigeon arriva dans la tour de la capitale. Il était marqué venant de Novae Verinis. Le message, écrit dans une lettrine distinguée, était clair.

Reine Alice Korvander. Digne héritière du royaume de Sylvandell. Mon nom est Menera Veluria Secunda, héritière légitime du domaine de Velurii. Vous ne me connaissez certainement pas. Sachez cependant que je vous écris en tant qu'ami. Je souffre pour vous de la mort de notre empereur et j'aurais aimé partager cette peine avec vous, mais les temps nous poussent à rester fortes. Cette lettre est une aide, un appel à la vigilance. J'ignore si vous avez eu vent des bouleversements de Novae Verinis, mais le Sénat impérial qui régentait le pays n'est plus. Un roi fantoche, ennemi de l'Empereur, gouverne mes terres par la terreur et un culte immonde.

Mais là n'est pas mon propos. Ma reine, sachez que j'ai encore des fidèles à la cour, et on m'a rapporté qu'une expédition a lieu vers vos terres. Et que la légion XV prévoit une offensive secrète. J'ai peur que mon message n'arrive à temps pour que vous puissiez vous préparer en conséquence. Mais ma reine, je prie pour que vous ne sous-estimiez pas cette légion. Ma sœur en a fait les frais. Vous trouverez, à la suite de mon message, des notes de guerre relatant les différentes manœuvres, tactiques et fonctionnement de cette légion. J'espère que ces notes pourront vous aider à combattre ce mal. Je me désole de ne pas vous avoir apporté plus d'aide. Sachez que je rassemble à Lumen une coalition pour reprendre mon pays. Que les dieux bénissent votre règne.


Et effectivement, cette missive était accompagnée d'autres parchemins, détaillant avec finesse le fonctionnement de l'armée des Filles du Pacte.

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 05 mai 2025 00:52
par Reine Alice Korvander
« Ils ont pris Rive-Bougre, Majesté, et ont mené des exactions. Les éclaireurs disent que ce sont des Orcs qui en ont profité pour envahir Rive-Bougre.
- Conneries ! vitupéra l’ancien Roi de Sylvandell, Tywill Korvander. Ces Orcs obéissent aux renégats ! Ils cherchent à nous prendre en tenaille. »

Alice laissait son père parler. Les temps actuels étaient troubles. L’Empire avait connu sa plus importante guerre depuis longtemps quand les Olympiens avaient envahi Terra. Les légions du dieu Arès avaient déferlé depuis l’est, jusqu’à rejoindre la capitale. Alice, qui se trouvait alors à la capitale, avait même été tuée, avant qu’une Déesse, Scarifa, ne la ramène à la vie. Depuis, Wismerhill s’était sacrifié pour enfermer Chaos. Une mort qui n’était pas définitive, elle aussi. Alice savait que l’Empereur était revenu récemment d’entre les morts, après une période qui avait duré un certain temps. Et, pendant ce temps, l’Empire s’approchait d’une nouvelle guerre civile. L’ancien domaine de Wismerhill, la baronnie de Moork, située à l’est, était tombée entre les mains de son ancien bras droit, le Baron Greldinard. Greldinard n’était toutefois lui-même qu’un pion aux services de Haazhel Thorn, l’ancien conseiller magique de Wismerhill. Alice savait désormais que Thorn était un alias du redoutable Randall Flagg, le bras droit du Roi Cramoisi. Ils avaient perdu leur emprise sur Wismerhill, et cherchaient désormais à mettre un nouveau pion à la tête de l’Empire.

Récemment couronnée Reine, Alice n’avait même pas eu le temps d’organiser la cérémonie officielle que Sylvandell était assiégée par Novae Verinis, une province impériale qui était proche de Sylvandell. Un récent coup d’État avait eu lieu. Le Conseil Impérial n’avait pas eu l’occasion de se prononcer dessus, et tout portait à croire que les insurgés cherchaient à ouvrir un nouveau front. Tandis que les forces de Greldinard s’amassaient à l’est, il fallait attaquer depuis l’ouest. Sylvandell n’avait qu’un intérêt stratégique mineur, mais le petit royaume montagnard disposait surtout de redoutables dragons dorés. En temps normal, les Sylvandins auraient pu les déployer, mais, du fait de la situation actuelle, la plupart des dragons dorés aptes au combat se trouvaient au sein de la capitale. L’attaque des Veriniens tombait donc à point nommé !

La principale entrée de Sylvandell passait par un énorme pont, qu’on appelait tout simplement le Pont de Sylvandell. Une armée verinienne s’était installée à proximité, menée par Aujurius. Il était aussi possible de contourner le pont en passant par les montagnes. C’était toutefois un passage dangereux, à travers des cols escarpés, des sentiers de montagnes, et en s’exposant au risque de tomber sur des dragons qui vous mettaient en pièces. Sylvandell disposait dans les montagnes de quelques forteresses défensives, comme Rive-Bougre. Le fort était administré par Vragen, un commandant honnête, mais peu débrouillard.

« On dit que c’est Nashak qui les mène. Les Vériniens se seraient alliés à ce clan ?
- Nous avions mené une campagne commune avec les Vériniens contre les Narseïdes. Nashak est la fille de l’ancien chef orc… »

Tywill avait combattu contre eux, quand les Narseïdes avaient mené des pogroms dans des hameaux. Les Vériniens avaient attaqué une forteresse orc avec l’aide des dragons de Sylvandell.

« Cela confirme que les insurgés servent l’Affiliation. »

L’Affiliation était un autre des bras armés de la Monarchie de la Rose. Sous ce terme, on désignait un conglomérat d’organisations criminelles diverses et variées : gangs, milices, clans sauvages… L’Affiliation répondait aux ordres de John Farson. Alice soupçonnait Greldinard d’être Farson.

Alice présidait une réunion extraordinaire du Conseil royal de Sylvandell, suite à la prise de Rive-Bougre. Son père, Tywill Korvander, y assistait naturellement. Alice orienta alors la discussion sur la lettre qu’elle avait reçue cette nuit.

« Avons-nous pu authentifier cette source ?
- Veluria Prima, Secunda, et Tertia, les trois filles de Regustus, l’Imperator… Aux dernières nouvelles. Les Renseignements Impériaux confirment que Secunda et Prima ont contesté la légitimité du nouveau régime. De plus, les renseignements joints à cette lettre sont fiables. »

Le plus grand mystère restait la prise de Rive-Bougre. Pour faire venir tant de troupes, les Vériniens avaient accédé à des cartes sylvandines pour creuser des tunnels à partir des grottes souterraines qui formaient un vaste réseau complexe sous le massif montagneux. Alice doutait cependant des chances de Secunda à obtenir l’aide des Luméens. Outre qu’un continent entier séparait les deux puissances, Lumen restait toujours l’ennemie de Mijak, et avait elle aussi ses propres problèmes à résoudre.

« Les Vériniens réunissent une force de frappe pour prendre en tenaille notre armée stationnée au niveau du pont. Les Vériniens attendent pour cela des renforts pour renforcer leur garnison à Rive-Bougre.
- Il faut donc reprendre ce fort au plus vite, mais sans trop endommager les défenses. »

Alice n’était pas forcément une grande stratège militaire, mais elle savait réfléchir, et elle connaissait bien Sylvandell.

« Voici ce que je propose. Nous allons mener une contre-offensive pour occuper les assiégeants de Rive-Bougre. Pendant que leurs troupes seront occupées, nous ferons venir une troupe en discrétion à l’intérieur de la ville pour ouvrir les portes. Avec quelques dragons qui mènent l’assaut, les Vériniens se focaliseront là-dessus.
- Vous connaissez un passage secret qui mène à Rive-Bougre ?
- Il passe depuis le Sanctuaire des Dragons, il n’est donc pas très fréquenté. C’est un ancien tunnel, mais qui doit être infesté de monstres, ce ne sera pas simple d’y progresser.
- Nous confierons cette mission à quelques Commandeurs. De mon côté, je mènerai le siège de Rive-Bougre. Quant à toi, Alice, je te charge de mener la protection du pont. Il est crucial que l’ennemi ne sache rien de notre plan pour reprendre Rive-Bougre. Ces salopes mal baisées s’attendent à ce que nous défendions le pont, donc nous allons le faire. »

La jeune tête blonde rougit un peu. Son père n’était clairement pas le plus diplomate des hommes, mais il avait au moins l’avantage de dire les choses. Quelques Commandeurs arriveront à remonter le tunnel pour s’infiltrer dans Rive-Bougre. L’expédition serait menée par Oberyn, un Commandeur talentueux et émérite.

De son côté, Alice enfila une armure de plates, puis rejoignit un dragon, Zeggar. Il n’était pas aussi puissant que Léviathan, le Prince des dragons d’Or, mais un dragon doré en imposait toujours. Zeggar se déploya, et s’envola dans les airs, en rugissant furieusement, un cri guttural que les Vériniens stationnés à l’entrée du Pont devraient entendre. Alice se posa au milieu du campement sylvandin, à l’entrée du Pont. On avait renforcé les défenses du corps de garde, et le pont était rempli de cadavres des deux camps. Les ordres de bataille avaient filé à l’intérieur du camp, annonçant une contre-offensive avec l’aide des dragons dorés. Le Commandant des défenses, Sylvain Loriot, fut enchanté de voir Zeggar se poser. Il s’agenouilla respectueusement devant sa Reine.

« Majesté, allons-nous contre-attaquer ? Les Vériniens ont disposé des trébuchets qu’ils utilisent pour bombarder notre campement
- J’en ai bien conscience, Sire Loriot. Je vous confirme une contre-offensive. Nous avons pu réunir trois dragons dorés. Je mènerai moi-même la charge. Nous avons étudié les plans de nos éclaireurs pour repérer les balistes. Nous ne pourrons pas mener de trop grosses attaques sur les défenses ennemies tant que vos hommes ne prendront pas les tourelles. »

L’armée de Sylvandell comprenait des fantassins, des chevaliers, des cavaliers, et aussi et surtout des mages de combat. Ils généraient des boucliers pour intercepter la majorité des flèches ennemies, mais les Vériniens disposaient eux aussi de mages. Les dragons allaient surtout faire diversion tandis que Loriot mènerait une charge de cavaliers. Les balistes ennemies allaient devoir se focaliser sur les dragons et non sur les cavaliers, sous peine de se recevoir un feu doré infernal. Alice comptait sur cet élément pour que les charges de Loriot permettent d’ouvrir la voie, et que le gros des troupes sylvandines attaquent ensuite. Elle espérait aussi avoir l’avantage psychologique en calcinant des tentes et des ennemis isolés. Pendant toute la nuit qui avait précédé l’imminente contre-offensive, les dragons avaient tournoyé dans les airs en rugissant. Cela faisait partie de l’affrontement psychologique.

Alice verrait bientôt si son plan allait marcher, la finalité étant de capturer Aujurius pour porter un sérieux coup à la campagne ennemie…

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 07 mai 2025 17:37
par Cyra Veluria Tertia
Un matin gris s'était levé sur le campement de la Legio VI Hasta Flammae. La brume collait aux visages comme un suaire humide, et les cendres de la veille s’élevaient encore en volutes molles au-dessus des foyers mourants. Le camp était silencieux, à peine troublé par les pas lourds des sentinelles et les bruits des cuirasses qu’on ajustait.

Aujurius du domaine Lamerii, le commandant de la VIe, marchait d’un pas lent entre les tentes. Son armure était sobre, usée aux épaules, mais propre. Sa cape trempait dans la boue. Il saluait les soldats d’un regard, d’un mot, d’une main posée sur l’épaule. Il les voyait, malgré l'effort de ses légionnaire pour le cacher à leur légat. la peur dans les yeux, les gestes répétitifs des mains qui affûtaient des lames propres depuis des heures, les regards fuyants vers le ciel.

Les dragons avaient encore volé cette nuit. Leurs rugissements avaient résonné comme des tambours divins. Ils avaient incendié une escouade en patrouille trop avancée. Et même si peu d’hommes étaient morts, l’esprit de la Légion avait été secoué.

Ce n'était pas une bataille classique. Parce qu'ils affrontaient des dragons, oui, mais pas que. Le but de leurs assauts n'étaient pas de conquérir le pont et repousser l'ennemi, du moins pas pour l'instant. C'était de maintenir la pression afin d'empécher leur armée de partir reprendre Rive-Bougre. La, il fallait être prudent. Patient. Le combat était psychologique. Et ses adversaires le savait. Eux aussi jouait sur ce plan là.

Aujurius ordonna une offensive légère dans la matinée : faire sonner les trompes, avancer des tirailleurs sur les premières arches du pont, tirer quelques volées de scorpions. Juste assez pour maintenir la pression. Juste assez pour occuper les dragons. La Legio VI Hasta Flammae était un pur produit des traditions militaires Vérinienne. Plusieurs corps disciplinaire allant de l'infanterie lourde, des archers, à la cavalerie de soutien et aux sapeurs. Sur son cheval, regardant le pont, il cria.

"1ère, 3ème et 5ème cohorte ! Marche en formation à trois ligne !"

Le corps à sa gauche entonna les ordres, lançant la marche en "Triplex Acies" pour les cohortes sélectionnée. Un cri de guerre retentit, et l'infanterie lourde, les "Hastati Caelestis", équipés de bouclier scutum longs et de pilum, avancèrent en phalange. Les balistes anti-dragon les suivirent de près.
Il jetta un oeil à l'arrière, vers une colline non loin. Cherchant du mouvement avant de murmurer.

"Quand vas-tu te décider à intervenir, sorcière ?"

Plus loin, à l’écart du tumulte, sur une colline étroite recouverte de pierre noire et de buissons secs, Altaïra observa le champ de bataille. Son visage était impassible, ses mains croisées sous son manteau déchiré par le vent. À ses côtés se tenait un homme au dos voûté, au manteau couvert d'écailles tannées. Sa barbe était grise, mais ses yeux jaunes dardaient les airs avec une vigilance animale.

Cern Voskarn, surnommé le "Vieux Griffon", était le chef d’une compagnie mercenaire peu commune : les Vents-Crocs, cavaliers de wyvernes, adepte de la traque de dragon. De sa longue vue, il apprécia la scène en cours. En effet, la Reine Alice venait de lancer son offensive. Ses trois dragons semant la panique dans les rangs, bien que généz par les baliste Verinienne. La désorganisation permit aux Sylvandins de lancer une charge de cavalerie sur l'Etat Major.

« Vous voyez? » dit-il d’une voix rocailleuse, sourire aux lèvres. « Quand on se bat avec les Sylvandins, on se focus bien trop sur les Dragons. Faut avouer que ces gros machins ont une fâcheuse tendance à être au centre de l'attention. Mais on néglige trop le corps de leur armée. Faire diversion avec leur Dragon, c'est une de leur tactique de base, Vérinienne."

Altaïra lui adressa un sourire lent, presque lascif.

« Hum. Je ne vous paye pas que pour vos commentaires de guerre. L’argent de Novae Verinis est à vous, comme promis. Mais si vous voulez la baronnie d'Aqua Vaudae, vous connaissez mes conditions. Neutralisez ces dragons.»

Il ricana.

« Ces maudits dragons sont des cousins rancuniers. Vous savez que celui du milieu à un popotin royal sur lui ? Alice Korvander. La fille de ce bon vieux Tywill. Lui et moi c'est de l'histoire ancienne...»

"On dit que vous l'avez affronté qu'une fois, et que vous aviez été laissé pour mort."

"Ah ! Les dragons d'or, ce n'est pas de la mince affaire ! Et oui j'en ai fais les frais. J'aurais adoré les réaffronter. Mais j'ai eu des différents avec Lumens, alors je n'ai pas eu de clients assez fou pour affronter la lignée Korvander. J'ignorais d'ailleurs que les caisses de Novae étaient aussi profondes..."

"Nous vous payeront à vous et vos hommes le prix juste. Ainsi que cette baronnie."

Cern souriat de plus belle. Puis il grimpa sa Wyverne, et ses huits hommes, derrière, firent de même. Les Wyvernes des Vents-Crocs étaient bien plus petits que les Dragons d'or, et surtout ne produisaient pas de flamme. Mais ils étaient mobile, et leurs crocs pouvaient percer les écailles des dragons. Avant qu'ils prirent les rènes, Altaïra demanda, songeuse.

"Simple curiosité...Pourquoi, un homme comme "Le Vieux Griffon", désire une Baronnie comme celle d'Aqua Vaudae?"

L'intéressé se mit à avoir un long soupir détendu.

"Ah...vous savez, avec l'age, les raideurs se déplacent. Je deviens vieux. Une retraite au bord de mer, avec du vin Vérinien...Comment dire non ?"

"On vous dis homme qui targue la mort à chaque assaut. Vous imaginer vous projeter en retraite est une bien étrange image."

"Oh, la mort...j'ai bien essayé de la chercher, mais elle ne semble pas vouloir de moi tout de suite. Alors autant l'attendre tranquillement sur la plage. Si je ne meurt pas d'un coup de lance ou de chute, une syrose du foie me va très bien !"


Sur ce, lui et sa troupe s'envolèrent.

De retour aux ponts.

"Légat Aujurius ! Les lignes de la deuxième cohorte ont été percé ! Une cavalerie approche !"

"Donne l'ordre de reformer les rangs ! Que l'état major lance le cerce défensif !"


C'était une formation de dernier recours, en cercle, pour se défendre sur tous les fronts. Les cavaliers adverse étaient mobile; écrasante.
L'intéressé pesta de s'être fait avoir aussi facilement. Il ne s'attendait pas à ce que les Dragons osent une attaque aussi ambitieuse. Les jours précédent, Sylvandell n'ont pas lancé d'attaque aussi ambitieuse. Les baliste ont put décocher et toucher les Dragons, mais leurs attaques ont complètement désorganisé les lignes. Sylvandell a changé de ton. Ils sont clairement passé à l'offensive. Mais les dragons n'étaient qu'une diversion.
Ce qui les intéresse, c'était lui.

"Archers ! Prenez de la hauteur, visez les cieux ! Hastati, protéger les flancs !"

Dans la confusion, Aujurius fut presque submergé. Sa première ligne était brisé, ses centurions dispersés. Il enfonça lui-même son glaive dans la gorge d’un cavalier qui s'était approché trop près. Tout autour de lui, c’était le tumulte : la fumée des flammes opaquent génant l'analyse de la situation, les scorpions mal orientés, les archers fauchés par les flammes, les cohortes désorganisées.

Ce fut alors que l’ombre fendit le ciel.

Deux wyvernes, plus petites que les dragons, mais d’une vélocité foudroyante, déboulèrent des nuées dans un cri strident. L’une d’elles frôla le cou de Zeggar, forçant le dragon à une embardée verticale. L’autre griffa un pan entier d’aile à l’un des dragons d’escorte. La coordination était chirurgicale : des piqués en tandem, des feintes, des morsures latérales sur les articulations des ailes.

Puis, le reste des Vents-Crocs arriva : alors neuf wyvernes tournoyaient déjà, harcelant, mordant, griffant. Trois wyvernes par Dragon. Pas une goutte de feu, mais une pluie de serres acérées et d’attaques éclairs. Cern Voskarn, hurlant depuis sa selle, menait la danse comme un vieux fauve domptant les cieux, sourire aux lèvres, regardant la Reine.

"Korvander ! Vous passerez mes salutations à votre Père !"

Puis il passa juste en dessous des poches d'abdomen de Zeggar, lacérant de son harpon un point préalablement percé par une des baliste de Aujurius, avant de repartir en piquet avec une vitesse foudroyante. Il hurla d'un rire frénétique, comme mue par une énergie diabolique.

Alors que dans les airs, la danse mortelle continuait, les deux puissances mythiques, dragon et wyverne, s'affrontaient dans un duel ancestral, au sol, le légat se redressa.

"Parjure de sorcière...tu te décide à intervenir que maintenant..."

Il remonta sur son cheval, et ne gaspilla pas une seconde pour réorganiser ses troupes.

"Pillum en ligne ! Reformez toutes les cohortes ! Archers, visez les cavaliers, pas les cieux !"

Le cor de son aide de camp sonna les ordres, alors que son gladius parra le coup d'un cavalier Sylvandin. Il était encore de la partie.

Plus loin, à Rive-Bougre.

"BANDE DE MULES INAPTES BOITEUSES ! Vous aviez UNE mission. Une PUTAIN de mission."

La messagère qui lui apportait la mauvaise nouvelle en a pris pour son grade. La Narseïde, à genoux, ligotée, était couverte de sang, le cuir chevelu recouverte d'une plaie, trois dents par terre. Devant elle, Runata Sigranada passait ses nerfs sur elle. Relâchant le marteau qu'elle avait dans les mains, elle se mit à faire les cents pas dans la salle commune.

"Les cordes ont lâchées vous me dites. On a pas pu le récupérer...Vous vous rendez compte du temps qu'il a fallu pour concevoir un engin de cette taille ?"

Elle venait d'apprendre que l'un des balistes lourdes était tombé dans un ravins. Il en restait deux autres, mais c'était une grosse perte pour la légion. Quelques cavaliers étaient arrivés, toutes les petites balistes étaient installés sur les remparts. Mais les grosses étaient encore en transit. Du moins les restantes.

Pendant ce temps, Cyra Veluria Tertia, elle-même, était sur les remparts. Un petit assaut sylvandin était en cours : flèches par salves, escarmouches sous les murs, quelques catapultes improvisées. Une attaque prudente. Elle observait le combat, les bras croisés. Trop léger. Trop prévisible. Trop silencieux. Oui, leur commandeur était un fin tacticien. Mais quelque chose la chiffonait.

« Ils n'ont pas amené leurs dragons,» murmura-t-elle.

A ses cotés, Felucia, une de ses centurions, haussa les épaules, l'air de rien.

« Bah, peut-être qu'ils testent nos defenses ? »

Cyra répondit sans la regarder :

« Bien sûr que non. Ce n'est qu'une distraction. La question, c'est : de quoi nous distraient-ils ? »
E
lle chercha du regard, en bas, une réponse possible. Non, il n'y avais rien qu'y lui sautait aux yeux. Son regard se posa sur la tente de celui qui avait son armure d'écaille noire.

"Ces manoeuvres, c'en est de ceux qui attendent quelque chose. Je ne sais pas de quoi. Et je n'aime pas ça du tout."

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 26 mai 2025 01:48
par Reine Alice Korvander
Bataille du Pont de Sylvandell

Alice et Loriot menaient une tactique de combat classique, mais efficace : un assaut coordonné avec les dragons, la cavalerie et l’infanterie. Les dragons dorés ouvraient la voie, perturbaient les défenses ennemies, puis l’infanterie chargeait. Alice chevauchait Zeggar, le commandant de manière presque télépathique. Le feu doré des dragons fusa sur le pont en pierre, tandis que les flèches ennemies rebondissaient contre les écailles. Alice avait pitié d’eux. Elle n’aimait pas ôter la vie, et les soldats envoyés ici étaient de la piétaille, des soldats qu’on massacrait inutilement. Elle aurait aimé privilégier la diplomatie, mais les Vériniens ne leur avaient pas laissé le choix. Alice espérait obtenir une reddition rapide de l’adversaire. Elle n’arrivait pas à comprendre cette offensive, si ce n’est dans le contexte de la guerre civile qui couvait à Mijak. Les dragons dorés soufflèrent donc, et se rapprochèrent ensuite des tours ennemies, avant de se disperser. Inutile de rester compact, ils prendraient le risque de se faire attaquer. Le campement vérinien disposait de balistes anti-dragons, des armes avec des pointes de flèches en ébonite. Pour percer les écailles d’un dragon, a fortiori un dragon doré, il fallait un équipement spécifique, des flèches standardes, et même des carreaux d’arbalètes, ne pouvaient percer leurs écailles.

En voyant les flèches fuser, Alice fit une embardée à Zeggar. Son dragon tourbillonna dans les airs. Alice se retrouva provisoirement la tête en bas, son corps retenu par ses sangles, mais elle grimaça en voyant l’une des flèches toucher l’une des écailles abdominales de Zeggar, qui grogna furieusement.

« Sois plus prudent, Zeggar ! » le rabroua Alice.

Tandis que les cors sylvandins résonnaient sur le pont, Alice pivota, et avisa des tentes isolées. Zeggar souffla dessus. Alice le fit ensuite basculer afin de revenir vers le pont. Les forces de Loriot se heurtaient aux solides légionnaires vériniens. Ils n’utilisaient pas la magie, mais leurs formations en tortue et leurs lourds boucliers déviaient les attaques magiques basiques et repoussaient les chevaux.

« Allez-y ! Déployez les sortilèges ! »

Depuis les rives en face, les Vériniens projetèrent des nuées de flèches. Les mages sylvandins, situés au milieu des soldats, déployèrent des boucliers défensifs, tandis que deux mages de guerre manipulaient ensemble leur mana, et déclenchèrent un puissant sortilège de Vent. Une tornade miniature se forma autour du continent situé sur le pont, et dispersa les ennemis. Loriot chargea ensuite, et les cavaliers sylvandins s’enfoncèrent dans la cohorte comme un couteau dans du beurre.

Revenant vers le pont, Alice fut alors attaquée par plusieurs wyverns. Surprise, elle entendit un homme la haranguer, tandis que sa wyvern cibla le point faible de Zeggar, faisant couler son sang. Alice se mordilla les lèvres en basculant légèrement. Zeggar rugit, et cracha un jet de flammes vers la wyverne de Voskarn. Son feu fusa en l’air, mais sans toucher la wyverne, qui comptait sur sa vélocité. Elle chercha encore à attaquer le point faible de Zyggar en basculant devant lui pour filer sous lui. Zeggar tournoya alors sur place, et son aile intercepta la wyverne en la fouettant au passage. Le harpon de Voskarn manqua ainsi sa cible, mais une autre wyverne jaillit pour perturber Zeggar, se heurtant violemment au dragon. Zeggar rugit, et parvint à planter ses crocs dans la patte de la wyverne, l’arrachant violemment. Le sang de la bestiole fusa, et le feu doré de Zeggar fusa alors, enflammant la wyverne, qui tomba ensuite au sol, se fracassant à terre avant de tomber dans l’eau.

Alice constata que l’un de ses dragons était en difficulté. Plusieurs wyvernes l’assaillaient, et le dragon se rapprocha d’une baliste ennemie, qui décocha une série de flèches. Les flèches firent mouche, atteignant le flanc du dragon qui rugit furieusement.

*Non !*

Avec seulement trois dragons, Alice ne pouvait se permettre d’en perdre un seul. Zeggar s’élança alors vers la zone de combat, prouvant sa vitesse impressionnante. Le dragon souffla, et enflamma la tour avec la baliste, puis fondit sur les wyverns pour les perturber, tandis que le dragon blessé entreprenait de se replier. Ce faisant, Alice avait néanmoins ignoré Voskarn, ouvrant le flanc de Zeggar à une nouvelle attaque…

Siège de Rive-Bougre

Avec sa muraille inférieure et sa muraille supérieure, Rive-Bougre était un nid d’aigles difficile à prendre. Tywill avait installé son camp de guerre sur une montagne en face. Ses mages de guerre se déployaient autour de compagnies d’archers et de mantelets qui avançaient dans la vallée menant à Rive-Bougre. Un véritable coupe-gorge, car des archers vériniens les attaquaient depuis les hauteurs. Fort heureusement, ils n’avaient pas eu le temps d’installer des pièges mortels, comme des fosses empoissées. Ils disposaient en revanche de réserves d’huile bouillante. La bataille se résumait pour l’essentiel à des salves d’archers des deux côtés de la gorge, tandis que les soldats sylvandins marchaient vers l’entrée principale de Rive-Bougre. Tywill supervisait tout cela, mais attendait surtout que ses hommes se positionnent près du corps de garde. Il avait bien fait d’attaquer vite, les Vériniens étaient nerveux, et, dans la précipitation, avaient même perdu l’une de leurs balistes.

Au sein de l’enceinte, Oberyn et ses hommes avaient traversé les tunnels souterrains pendant la nuit, s’aidant de cartes et de glyphes pour se repérer, tout en affrontant des putréfacteurs et autres goules. Ils rejoignirent finalement ce qui ressemblait à un mur d’enceinte. Oberyn appuya sur une encoche, et utilisa une rune qu’il posa sur le glyphe qui venait d’apparaître. La porte s’ouvrit alors vers le plafond, menant la demi-douzaine d’hommes dans une réserve souterraine.

« Prudence, nos soldats doivent être à l’extérieur… »

Oberyn et ses hommes grimpèrent les escaliers de service, et rejoignirent les hauteurs de la salle commune. En contrebas, il grimaça en voyant des cadavres. Oberyn dispersa ensuite soigneusement ses hommes, puis grimpa sur un balcon surplombant la salle commune. Une blondinette avec des lunettes s’énervait en évoquant ses balistes. Oberyn attendit patiemment. La femme tapait sur une Orc avec son marteau.

*Comme prévu, la salle commune est presque vide…*

Oberyn généra un bref sortilège pour amortir sa chute… Et sauta tout simplement. Il atterrit sur ses jambes, à côté de Runata.

« Salut à tous ! »

Sa main crachotait des éclairs, et un arc électrique jaillit pour frapper l’une des gardes. Il regarda ensuite Runata.

« Bien, ma jolie, je souhaite savoir où sont les Dustraing. »

Les Dustraing étaient le nom de la famille qui régnait sur Rive-Bougre. Oberyn plia légèrement les genoux en faisant tournoyer sa lame, qui s’électrifia sur place, des runes luisant sur sa lame.

« Pour ça, vous avez le choix entre ma manière ou la manière forte… Ce qui revient plus ou moins au même. »

Oberyn était volontairement provocateur, mais ce n’était pas pour rien si Tywill lui avait confié cette mission. De tous ses Commandeurs, il était le plus talentueux, et il comptait bien interroger Runata, et retrouver les Dustraing… Tandis qu’une partie de ses hommes profitaient de son spectacle pour rejoindre le corps de garde, et ouvrir l’accès aux Sylvandins qui avançaient dehors. Eux-mêmes n’étaient toutefois qu’un avant-goût. La véritable force de frappe de Sylvandell se tenait sur le plateau. Tywill était certes venu sans dragon, mais il avait apporté avec lui le marteau de guerre de Sylvandell, un marteau de guerre doré à deux mains dont Voskarn avait jadis fait les frais quand le marteau lui avait brisé son épée et une bonne partie de son armure.

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 08 juin 2025 14:56
par Cyra Veluria Tertia
Le Pont

Les flammes dorées de Zeggar dévoraient le ciel comme une apocalypse en marche.

Le dragon, majestueux et furieux, avait transformé les tourelles des balistes en bûchers de guerre. Son feu, plus lumineux que l’or, fondait sur les tours de bois trempé et faisait éclater les structures dans un fracas d’étincelles. Les servants de la baliste, pris dans l’incendie, n’eurent même pas le temps de fuir : leurs hurlements furent avalés par les rugissements de la bête.

Dans le ciel, les wyvernes hurlantes tournoyaient, attaquant en essaim. Elles frappaient par salves, griffant, harcelant, cherchant les articulations sous les ailes du dragon. Mais Zeggar n’était pas un simple reptile ailé, c’était un des plus grand fléau ailé de Sylvandell. Dans un mouvement d’une puissance terrifiante, Zeggar mordit l’aile d’une wyverne, la broyant, puis cracha son feu sur une autre qui plongeait trop bas. La bête fondit comme de la cire, ses os se tordant dans la chute avant qu’elle n’explose en heurtant les rochers en contrebas.

Eloigné, proche des nuages, Cern, toujours droit sur sa monture écailleuse, observait. Il ne dit rien. Il n’avait pas besoin de mots. Son regard balayait le champ de bataille comme une machine de guerre froide : il lisait les instincts d’Alice, repérait les ouvertures dans la formation des dragons, notait les tours détruites, les angles morts, les hésitations dans les trajectoires. Certes, il avait déjà perdu une unité, et une autre était gravement blessé. C'était le coût à payer.

Un long sifflement jaillit de sa bouche, suivi d’un claquement sec. Un code. Un signal.
Ses wyverniers comprirent. L’un d’eux, le plus jeune, regarda son tuteur lui donner d'autres instructions par signe et sifflement. Il eut un mouvement d'hésitation quand il comprit ce qu'il lui demandait de faire, mais le regard dur du vieux Griffon était évocateur. Alors dans un soupir, il fit une embardée violente pour s’élancer contre le flanc gauche de Zeggar, une manœuvre extrêmement dangereuse, presque suicidaire. Le dragon mordit à l’appât. Un souffle incandescent pulvérisa le cavalier et sa monture dans une gerbe de feu. Il ne resta de lui qu’un cri étouffé et une pluie de cendres.

Cern observa jusqu'au bout son jeune poulain se faire envahir par les flammes, avant de lui faire le signe de leur unité en guise de respect.

"Tu m'as bien été utile jusqu'au bout, petit gars..."

Mais pendant que Zeggar tournait la tête, Cern s'était élancé.

Sa wyverne fondit sous le dragon comme une ombre d’encre. Elle s’enroula autour de la patte de Zeggar, enfonçant ses griffes profondément dans les écailles dorées. Les muscles du dragon se contractèrent, une secousse le parcourut, mais Cern tenait bon. D’un geste fluide, il tira une fiole noire de sa sacoche, l’ouvrit avec les dents, et enduisit sa lance d’un liquide huileux. La résine crépita sur le métal, puis s’enflamma dans un brasier spectral : flammes noires, sans chaleur mais pleines de mort.

" Pour ton cœur, glorieux lézard ! Un cadeau du Baron ! "

Il visa, ajusta son équilibre sur la wyverne tremblante, et planta sa lance profondément dans le flanc de Zeggar, à l’endroit exact où battait le cœur lent et massif du dragon.

Le cri de Zeggar déchira la plaine entière. Une onde de choc jaillit de ses ailes. Le ciel vibra. Le feu doré s’éteignit un instant dans sa gorge, comme s’il avait été étranglé. Cern retira sa lance, désormais rouge de sang et brûlante de résine spectrale. Une fumée noire et épaisse s’échappait de la blessure, une corruption silencieuse qui s’infiltrait déjà dans les veines du dragon. Dans les hauteurs, Alice sentit son lien magique vaciller. Son cœur manqua un battement.

Mais Zeggar battait toujours des ailes, lourdement, titubant dans le ciel. Il n’était pas encore tombé.

Sur les dalles trempées du pont, le légat Aujurius tenait bon. Sa cape alourdie par la pluie battante collait à son armure, et sa main droite tremblait légèrement sous le poids de son glaive, noircie de suie et poisseuse de sang. Le fracas des combats, les hurlements des blessés, les mugissements des bêtes ailées… tout semblait vouloir dissoudre l’ordre et l’équilibre. Tout, sauf lui. Autour de lui, les lignes vacillaient.

Les flammes dorées du dragon avaient mis à bas des rangées entières de balistes et de tours de guet, réduisant l’architecture défensive à des cendres et des carcasses fumantes. Les fumées épaisses montaient en colonnes vénéneuses, obscurcissant le champ de vision. Les ordres se perdaient dans le tumulte. L’air était irrespirable, chargé de cendre, de métal brûlé et de peur. Il ne s'attendait pas à ce que la Reine tentent des manoeuvre aussi agressive, et avait négligé la violence des Dragons.

Mais Aujurius, le front barré d’un filet de sang séché, observait. Le cri guttural du Dragon avait perturbé un instant le combat en dessous. La douleur expressive de la bête sembla comme un soulagement pour les légionnaires. Oui, c'était maintenant qu'il fallait reprendre le flambeau. Il se tourna vers l’un de ses centurions survivants.

" Sonne. Le cor noir. "

Le centurion hésita un instant, puis hocha la tête. Un instant plus tard, le rugissement des cors de guerre fendit l’air, grave, profond, comme une bête préhistorique s’éveillant sous la pierre.

Le son porta dans les cieux, dans les montagnes, dans les tripes de chaque légionnaire.

" RANGS COMPACTS ! FORMEZ LES PHALANGES ! À MON COMMANDEMENT ! "

Aujurius brandit son glaive au ciel — le symbole vivant de la discipline vérinienne — et pointa vers l’avant, là où les lignes sylvandines s’effilochaient, épuisées par leur propre élan.

" IGNOREZ LES FLAMMES ! IGNOREZ LES CIEUX ! LE PONT EST LA VICTOIRE ! "

Les cohortes hurlèrent d’une seule voix, rugissant le nom de la Legio VI. Les boucliers se claquèrent les uns contre les autres dans un chœur de métal, les pointes de lances formèrent des lignes mortelles, et déjà les premiers blocs de soldats s’élançaient dans un martèlement de pas régulier et puissant. Aujurius courait parmi ses hommes, hurlant encouragements et injonctions. Il savait que s’il faiblissait, tout s’effondrerait. Ils n'avaient plus de baliste en fonctionnement, mais leur armée reprenait légèrement l'avantage. Alors peut-être, le pont tomberait.

Depuis la crête rocailleuse qui dominait les plaines embrasées du pont, Altaïra restait immobile, le regard rivé sur les panaches de fumée qui s’élevaient lentement dans le ciel. Son profil, découpé sur fond de nuages lourds, semblait sculpté dans le graphite. Calme, précis, cruel. Chaque mouvement des lignes, chaque cri lointain, chaque dragon blessé n’échappait pas à son œil d’experte. C’est alors qu’un galop lourd et sec brisa le silence alentour.

Cinq cavaliers surgirent, leurs montures râblées, bardées de plaques de fer noir. Ils portaient des bannières fanées, où l’on distinguait mal un blason de pic et de crâne, marqué du sceau ancien d’un clan nain montagnard, longtemps déclaré fidèle à l’Empire… et désormais félon.

Leur chef s’avança en premier : un nain hideux, au dos voûté, au visage couturé comme une souche ravagée par les vers. Une bouche tordue, un œil plus bas que l’autre, et des mains épaisses couvertes de bagues crasseuses. Il salua sans descendre de sa monture, un sourire huileux aux lèvres.

" Dame Altaïra…Je sur le Seigneur Ygvolk. Héritier de l'écu des Hauts Pics. Mon maitre, le Baron Greldinard, vous adresse ses salutations. "

Elle ne tourna même pas la tête. Son regard suivait les étouffements noirâtre de Zeggar. Les lèvres de la succube s'entrouveraient alors, comme si elle voulait goûter à la douleur de soufre du Dragon. une fois un temps de silence passé, où Ygvolk attendait une réponse de son interlocutrice qui ne vint pas, il poursuivit, sa voix râpeuse :

" On dit que les légendes mentent toujours… mais il faut croire qu’elles sont en retard sur vous. Vos légions brûle tout. Vous tenez cette guerre comme une artiste tient le pinceau. Mon maître est… impressionné. "

Toujours aucune réaction. Le silence s’étira, pesant.

" Mais il souhaite que vous… pressez les choses. Le trône ne restera pas longtemps vide. Et l’Empereur… doit être saisi avant que les vautours ne s’agitent. "

Enfin, Altaïra cligna des yeux. L’air autour d’elle palpita soudainement, comme un feu invisible qui se répandait. Un grondement grave, imperceptible, vibra dans le sol. Ses traits se métamorphosèrent lentement. Deux cornes d’onyx jaillirent de son front, ses yeux virèrent au jaune ardent, et ses lèvres s’étirèrent en un sourire effroyablement sensuel, carnassier et calme. La température grimpa brusquement. Les montures des nains piaffèrent, nerveuses. Ygvolk lui-même tressaillit, reculant d’un demi-pas. Altaïra murmura, sa voix pleine de charme vénéneux :

" Dis à ton maître qu'il n'a aucun ordre à me donner. Et que la prochaine fois qu'il m'envoie ses sous-fifres pour me parler...Je me délecterais de leurs chairs."

Elle pivota enfin vers lui, son regard incandescent braqué sur l’œil difforme du nain, alors qu'elle se lécha les lèvres en regardant le petit seigneur Nain.

" Et qu’il garde ses recommandations pour ceux qu’il peut effrayer. "

Un rire silencieux dansa sur ses lèvres. Le sol fumait à ses pieds. Un papillon prit feu dans l’air sans raison.

Ygvolk déglutit, puis s’inclina maladroitement.

" Bien… bien sûr… Je… transmettrai. "

Et déjà, il ordonna à ses cavaliers de reculer. Le vent se leva dans leur dos. Altaïra, elle, ne les regarda pas partir. Elle avait vu assez de serviteurs rampants. Elle connaissait le Baron, et travaillait avec lui. Mais sans dout considérait-elle qu'il prenait un peu trop la grosse tête en se considérant comme initiateur de la rébellion.

_____

Rive-Bougre


Si la situation semblait tourner à l'avantage de Novae Verinis sur le pont, ce n'était pas la même histoire dans le bastion.
Runata regarda Oberyn avec une fureur contenue, les dents serrées, le souffle court. Sa main tremblait encore, crispée sur le manche de son marteau d’ingénieur. Mais elle n’était pas stupide. Un seul regard vers le sol, où gisait l’une de ses gardes foudroyée en un clin d'œil, lui suffit.
Elle grogna.

" Les Dustraing ? C’est qui ces types ? J’suis qu'une servante moi ! "

Elle laissa tomber son marteau dans un bruit sourd, les bras levés, les sourcils froncés.

"C'est bon, j'me rend ! Je sais pas qui vous êtes, mais vous faites une erreur ! Et puis, je suis pas importante moi, donc autant m'oublier, ok ?"

Dans son dos, les escouades d'Oberyn avançaient déjà, glissant comme des ombres vers le corps de garde, éliminant silencieusement les quelques sentinelles. En quelques minutes, la lourde porte principale gronda, pivota, et s’ouvrit vers l’extérieur. C’était l’heure. Dehors, les Sylvandins virent la porte bouger. Le signal fut lancé, et les troupes sylvandines s’élancèrent avec une précision terrifiante. En quelques instants, des dizaines de soldats, déferlèrent à travers la porte ouverte.

Dans les hauteurs de Rive-Bougre, Cyra observait depuis un balcon flanqué de statues. Un cri retentit, puis un autre. Elle se redressa brusquement, son regard perçant la scène. Elle comprit. Trop tard.

" Ils sont dans la place… gronda-t-elle, la mâchoire serrée."

Son poing frappa le rebord de pierre. Felucia a coté d'elle peinait à comprendre ce qu'il se passait.

" Leur attaque n'était bel et bien qu'une diversion...Ils ont ouvert la porte. Ils ont une unité d'élite qui s'est infiltré chez nous !"

Cyra sentait bien que Tywill attendait quelque chose. Elle aurait du renforcer la sécurité intérieure. Ils ont donc des unités capable de s'infiltrer dans les lieux. D’un ton sec, elle aboya ses ordres.

" Déployez les cohortes ! Défendez les balistes à tout prix. Si elles tombent, nous tombons. Felucia, prends dix escouades et tiens les remparts avec ton sang s’il le faut.Que les Narseïdes défendent la cour intérieure !"

Sa championne eut un grand sourire. Enfin elle allait bouger.

Dans la cour intérieure, Nashak et ses Narseïdes combattaient déjà. Les arcs recourbés sifflèrent, les épées jaillirent de leurs fourreaux courbes. Les Sylvandins progressaient, mais Nashak avait formé un demi-cercle défensif, bloquant l’accès aux tours principales. Le combat faisait rage. Les Narseïdes étaient de redoutables guerrières, usant de mobilité et de brutalité pour compenser leur infériorité numérique. Menant ses guerrières, Nashak esquiva un coup, riposta par une feinte haute, puis fendit le crâne d’un capitaine d’un revers net. Sa hache tournoyait et fendait les assaillants, à elle seul et stoppa leur progression.

Mais alors, l’ombre s’abattit.

Un rugissement métallique, un sifflement, et soudain, son corps fut projeté contre un mur de la cour dans un bruit sourd et épouvantable. Le choc brisa la pierre, brisa son souffle. Elle s’effondra, le sang jaillissant de sa bouche.

"Bordel !" S'exclama-t-elle

Au centre du champ de bataille, Tywill était apparu. Dans ses mains, le marteau de guerre de Sylvandell brillait d’un éclat ancien et terrible. A la vue de cet homme, Nashak, se relevant, le regarda. Ses yeux brûlaient d’une résolution glaciale.

"Le vieux...toi et moi, on a un p'tit truc à régler..."


Malgré le choc, elle tenait toujours debout, reprenant sa hache avec poigne. Elle s'élança, et porta un coup que Tywill bloqua. L'interaction qu'ils avaient porta un coup de souffle autour, alors que les Narseïdes se battaient comme des lionnes contre la puissance dévastatrice des Sylvandins.

Sur la muraille supérieure de Rive-Bougre, le vent hurlait, charriait les cendres, le feu et les cris. Les Sylvandins escaladaient les hauteurs comme une marée inlassable, appuyés par des sortilèges d’adhérence, des grappins et des échelles renforcées. Ils étaient nombreux. Bien trop nombreux pour une défense ordinaire. Mais Felucia n’était rien d’ordinaire. Elle apparut d’un bond, émergeant comme un ouragan d’acier, sa hallebarde longue taillée dans l’obsidienne et cerclée de bronze. Son armure, cabossée et noircie par les flammes, semblait n’avoir jamais été réparée – comme si elle laissait chaque entaille témoigner de ses combats.

Elle rugit.

" ALLEZ ! DESCENTE EXPRESS POUR NOS AMIS !"

Un groupe de Sylvandins venait de poser pied sur le parapet. Felucia les balaya d’un coup de hallebarde, l’arme tournoyant comme une faux géante. Le premier adversaire fut décapité, le second projeté dans le vide en hurlant, et le troisième éventré, sa lance à peine levée. Puis elle courut – ou plutôt, fonça, chaque pas un fracas, chaque mouvement une menace. Une échelle venait d’être posée ? Elle s’y planta à califourchon, poussant de tout son poids et de ses jambes noueuses jusqu’à la renvoyer d’où elle venait, jetant les assaillants accrochés dans le vide, hurlants. Une autre ? Elle s’y jeta comme une bête, tranchant les bras agrippés au sommet de son arme furieuse, sa hallebarde fendant os et armure. Ses troupes, galvanisées, crièrent son nom.

Mais rapidement, le chaos de la bataille échappa à son jugement. À mesure que les Sylvandins posaient de nouvelles échelles sur le flanc est, elle continua de se focaliser sur la façade sud, persuadée que le cœur de l’assaut venait de là. Trop occupé à combattre en première ligne, elle manquait de vision d'ensemble pour protéger toute les balistes.

Cyra l'observa d'en haut, ses gardes d'élites l'entourant. Felucia était une bourrine. Une guerrière née, mais qui manquait de discernement et d'esprit tactique.

"Tout va reposer sur Nashak et Felucia. Elles doivent tenir la cour et les murailles, le temps que les renforts arrivent."

En parlant des renforts, plus loin, dans le réseau souterrain des montagnes.

Le dédale rocheux s’ouvrait dans un silence de mort, creusé à travers la montagne comme une plaie ancienne. L’air y était âcre, humide, saturé de moisissures et de poussières d’os. La cohorte de Demora avançait dans ce tombeau vivant, torches levées, boucliers serrés, sabots de fer claquant contre la pierre noire. Mais elles ne tardèrent pas à découvrir qu'elles n’étaient pas seuls.

Un rugissement guttural fit trembler la voûte. Puis un second. Et, dans l’ombre épaisse d’une arche effondrée, un Troll des cavernes émergea, colossal, voûté, le torse bardé de cicatrices, la gueule bordée de mousse noire. Son œil unique brillait comme une gemme malade, et ses bras massifs traînaient une massue faite de fer rouillé et de crânes liés par des chaînes.

" En formation !", tonna Demora, sa voix résonnant comme un tambour dans l’obscurité.

Les Sœurs d’Acier s’élancèrent. Le combat éclata dans la pénombre, heurt sourd contre hurlement bestial. Une légionnaire fut écrasée contre un mur, une autre éviscérée. Mais la cohorte tint bon.

Alors Elusine apparut, son armure légère tissée d’argent et d’obsidienne. Les cheveux noircis, trempés de sueur et de crasse, encadraient un visage calme, concentré.

"Entravez-le ! Je m’en charge."

À son ordre, quatre soldates se jetèrent sur les jambes du monstre, l’enchaînant avec des lanières et des crocs de fer. D’autres bondirent sur ses bras pour ralentir ses frappes. Le Troll beugla, tenta de les écraser, mais tituba.

Elusine ploya légèrement les genoux, puis bondit. Sa lance fendit l’air dans un sifflement terrible — et transperça le torse du Troll, juste sous le sternum, jusqu’au sol rocheux. Elle atterrit en glissade, haletante, un sourire satisfait aux lèvres.

"Et voilà le travail ! C'était pas si compliqué !"

Mais le monstre hurla, non pas de douleur, mais de rage. Sa main griffue, encore levée, s’abattit comme une faux, visant Elusine en pleine poitrine, qui ne s'attendait pas à une telle riposte. Et ce fut alors que le vent changea.

Un souffle chaud balaya la caverne. Une torche s’éteignit d’elle-même, et des éclairs rougeoyants dansèrent sur les parois.

Nialas, la Vuldarienne, surgit d’un recoin d’ombre.

Pieds nus sur la pierre, les cheveux tressés en longues mèches hirsutes, elle s’avança calmement vers le Troll, ses yeux blancs brillant d’une lumière intérieure. Elle murmura un chant ancien, guttural, tandis que ses doigts s’embrasaient.

"ΧύσΞΞ ΐζδ..."

Un cercle runique tourna sous ses pieds. Un poing de feu, colossal, mystique, apparut dans l’air, puis s’élança avec un sifflement fulgurant. Il frappa le Troll en pleine poitrine. Un bruit sourd. Une onde de chaleur. La créature convulsa, hurla un dernier râle rauque... et s’effondra, inerte, dans un fracas de roche et de chair.

Elusine, allongée contre le sol, ses côtes meurtries, rouvrit les yeux. Le regard encore flou, elle vit Zalkas se tenir debout devant elle, les bras croisés.

"ΆΓηϊ κλπψ ! ΦψΝΝζ, ΞΐηΓΓύ ? "

"Quoi ? Répondu une Elusine encore un peu peinée de ce qu'il venait de se passer. Un petit Vuldarien, rare homme faisant parti de la légion, se rapprocha. Il se tint à coté de Nialas. C'était son serviteur, mais aussi l'un des traducteurs de l'étrange dialecte de Vuldar.

"Ma maitresse rappelle que les trolls des cavernes sont sensible au feu et se régénère. Elle se demande jusque où votre ignorance peut aller."

"QUOI ? Elle veut se battre, la timbrée ??"

Le traducteur fit son travail, relatant les propos de la championne. Nialas répondit toujours dans sa langue, en regardant froidement la légionnaire. Le petit Vuldarien traduisit.

"Ma maitresse vous dit qu'elle vous dérouille votre grand-mère quand vous voulez."

"AH OUAIS ?"

Les deux se firent fassent, prête à en découdre, lorsque leur centurion cria pour un rappel au calme. Demora les foudroya du regard, avant de rappeler à resserer les rangs.

"Silence. Nous devons rester concentré ! Hum...mobiliser une cohorte entière dans ces souterrains est déjà assez difficile comme ça..."

"Ouais...on est sur de là où on va, déjà ?" Rouspeta Elusine. "J'ai l'impression qu'on tourne en rond dans ces souterrains !"

Leur guide, Binae avança dans un pas étouffée. C'était une ancienne esclave de Sarth, une fosse qui servait de mine dans un endroit au confins de l'Empire. On disait que certaines esclaves qui minaient à cet endroit avait développé certains pouvoirs. Mais seulement les femmes. La légion avait dépensé une fortune pour racheter toutes les esclaves féminins de cette fosse. Binae prit la parole avec douceur.

"J'entend les murmures de la Dame de l'Ouest..." Chatonna-t-elle à voix basse. "Nous avançons vers le ciel ouvert. Ce réseau souterrain est vaste. Il faudrait des années pour le cartographier."

"Il rejoindrait d'autres pans de Sylvandell ?"

"Possible...Il y a plusieurs murmures. Mais le parcourir serait dangereux et très long..."

"Tss...nous devons nous dépecher d'atteindre le bastion. Notre rôle est de prendre à revers les Sylvandins. Armelia mène l'avancé du reste de la légion vers le bastion."

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 16 juin 2025 01:38
par Reine Alice Korvander
Bataille du Pont-de-Sylvandell.

Quand le cor noir résonna, les légionnaires vériniens entreprirent une contre-offensive, qui ressemblait à un acte désespéré. Leur camp était en feu. Leurs tourelles n’avaient pas tenu aussi longtemps qu’ils l’espéraient, et, même s’ils avaient déployé des wyverns pour repousser les dragons de Sylvandell, le rapport de force était tel que le troisième dragon avait été tranquille pour enflammer les tours. Zeggar commandait naturellement aux deux autres, Amphirien et Fenduin. Le commandant Loriot grimaça cependant en voyant qu’Amphirien s’était blessé près d’une baliste. Zeggar et Fanduin foncèrent alors vers leur camarade. Zeggar enflamma la tour, se jetant au milieu des wyverns, mais Fenduin s’écarta ensuite, et souffla sur une rangée de tentes.

*Venir nous assiéger sans magie… Quelle est leur stratégie ?*

Il savait les Vériniens dangereux, mais, venir se battre sur un champ de guerre sans mages de guerre, cela relevait un peu du suicide. Le choix logique était de se disperser, d’utiliser les wyverns pour repousser les dragons… Mais le légat Aujurius fit finalement tout l’inverse, en ordonnant une contre-offensive.

« Mais ils sont devenus fous…
- Vos ordres, Commandant ?
- Resserrez les rangs autour du pont ! Ordonnez aux mages de générer des boucliers de Pierre, retenez les légionnaires. Ordonnez aux cavaliers de faire le tour. S’ils veulent abréger leurs vies, nous allons le leur rendre. »

La stratégie était somme toute plutôt simple : puisque les Vériniens allaient se ruer sur le pont, Loriot comptait les bloquer avec ses troupes devant, et les cavaliers qui avaient percé les lignes vériniennes pour attaquer le campement ennemi.

« Ensuite, il ne suffira plus qu’à ordonner aux dragons de… »

C’est à ce moment qu’un cri terrifiant déchira les tympans de Loriot. Celui-ci, comme tous les autres Sylvandins, leva la tête. Son cœur manqua plusieurs battements quand il constata que le hurlement venait de Zeggar, et que du sang se mit à couler abondamment de son flanc droit. Une lance était fichée dedans.

« LA REINE ! LA REINE EST TOUCHÉE !! »

Alice n’avait en soi rien, mais Zeggar, en revanche, était grièvement blessé. Alice se retourna vers Voskarn, et dégaina de sa ceinture son épée. S’il avait réussi un coup de maître, il s’était aussi exposé. Et, même si Alice n’était pas une guerrière, elle savait encore se battre. Elle portait une lame en or sertie de pierres précieuses magiques, qui s’illuminèrent. La lame crépita dans sa main. Elle était rattachée par des cordes à Zeggar, et tendit la pointe de son épée vers Cern… Qui vit alors un arc électrique intense en jaillir. Le tir le frappa au torse, et le projeta en arrière. S’il n’était pas bien harnaché à sa wyvern, il tomberait dans l’eau. Sinon, il restera accroché à cette dernière, mais son sort restera le même, car Fenduin jaillit alors, et referma ses mâchoires sur la wyvern de Cern, l’explosant sous l’impact, déchiquetant os, muscles et cartilages. Cern tomba donc dans le vide, mais Zeggar aussi, peinant à rester droit.

« Zeggar, il faut te soigner… »

En contrebas, le long du pont, Aujurius et les siens chargeaient les Sylvandins. Depuis les rives sylvandines, les archers de Sylvandell firent feu, et les mages de guerre suivirent le mouvement. Les flèches devinrent des flèches élémentaires, s’accompagnant de flammes ou d’éclairs étincelants, mais, surtout, la stratégie de Loriot se mit en place. Devant Aujurius et les siens, des palissades en pierre s’érigèrent. Sans magie pour les percer, Aujurius et les siens étaient coincés. Et, si Amphirien et Zeggar étaient blessés, Alice ordonna à Fenduin de s’en tenir au plan. Le dragon se retourna, et se rapprocha des Vériniens, puis souffla derrière eux, incendiant l’arrière. À ce stade, même les cavaliers sylvandins n’étaient plus forcément utiles, Fenduin décrivant des cercles autour du pont.

Loriot grimpa au sommet du corpps de garde. Un mage utilisa un sort d’amplification sonore, et il se mit à parler, suffisamment fort pour que les Vériniens l’entendent :

« Légat Aujurius, Légionnaires, cette folie doit cesser ! Vous nous avez assiégé sans raison, ne mourez pas sans raison non plus. Je vous exhorte à déposer immédiatement les armes, ou Fenduin vous tuera tous. »

Loriot avait également ordonné à plusieurs cavaliers restés en retrait de filer vers Zeggar. Alice avait en effet ordonné à son dragon de se replier, mais elle sentit ce dernier finir par prendre connaissance.

« Zeggar, non !! »

Le puissant dragon s’écroula au sol, et Alice tomba. Elle roula sur l’herbe, et atterrit contre un arbre, tandis que Zeggar en déracinait plusieurs dans sa chute, faisant des roulades aussi impressionnantes que tragiques. Le hasard avait cependant voulu qu’Alice ait attiré à proximité du groupe de cavalières mené par Finusia. Elles étaient en train d’attaquer une ferme reculée abritant des provisions quand Zeggar s’effondra au sol. Pour elles, c’était une occasion inespérée de faire pencher le cours de la guerre, mais les cavaliers envoyés par Loriot se rapprochaient également rapidement…

Rive-Bougre
Enceinte du château



« Pas importante ? Vraiment ? Alors, pourquoi toutes ces dames ont l’air aussi inquiète pour toi, ma jolie ? Et puis, pour une simple domestique, tu parles plutôt fort. »

Elle lui indiqua cependant qu’elle se rendait. Un piège ? Oberyn n’en savait rien, mais les insurgés allaient bientôt être occupés. Les hommes d’Oberyn connaissaient naturellement Rive-Bougre, ils n’eurent donc aucune difficulté à rejoindre le corps de garde, et à ouvrir l’accès aux Sylvandins.

« On dirait qu’on va devoir passer un petit moment ensemble, Madame-la-Servante. »

Oberyn sortit de ses affaires une paire de menottes, et lui ordonna de se retourner, et de mettre les mains dans son dos. Oberyn la menotta ensuite, puis l’aida à se relever.

« J’espère pour vous qu’il n’est rien arrivé de mal aux Dustraing. Vous êtes bien trop jolie pour qu’on sépare votre tête de votre corps. »

Oberyn se déplaça ensuite. La femme n’allait rien lui dire, mais il savait où se trouvaient les appartements des Dustraing. Il commença par ramener Runata à leur passage secret. Il pouvait sentir l’esprit de celle-ci s’égayer en voyant ce passage secret, cette galerie caverneuse. Oberyn l’attacha ensuite à la paroi.

« Voilà, Madame-la-Servante, je vous déconseille de trop crier, il y a des putréfacteurs et des goules par là. Je reviens vers vous dès que j’ai pu localiser les Dustraing. »

Le Commandeur se retira ensuite. Il referma la porte derrière lui, puis grimpa vers les étages. Il ne tarda pas à trouver les appartements. Il y avait des Orcs dans le coin. Oberyn en égorgea un par l’arrière, posant sa main sur sa bouche, puis se rapprocha d’une chambre entrouverte. Il grimaça en sentant une terrible odeur rance.

« La Boss avait dit de juste le croquer un peu, mais l’grassouillet était bien trop bon, hihi…
- J’vais retourner baiser l’autre pute. »

Oberyn se glaça d’effroi en constatant que les Orcs avaient dévoré l’un des enfants Dustraing. L’un des Orcs se dirigea vers une pièce adjacente à celle-ci, où Oberyn put entendre des sanglots.

« N-Nooon, pitié…
- Ta gueule, salope ! »

Oberyn inspira. Il y avait trois Orcs. Il entendit la femme hurler plus fort, puis le son mat d’une gifle. Sire Dustraing, attaché, protesta également. Oberyn ouvrit ensuite la porte. Il fit face à un Orc qui tenait dans sa main un morceau de foie. L’Orc le fixa, surpris, puis la tête de l’Orc fut séparée du reste de son corps par l’épée d’Oberyn. Il avait bondi sur lui. Le deuxième Orc, qui n’était lui aussi couché à côté du cadavre du jeune Dustraing, essaya d’attraper la hachette à sa ceinture. Il réussit même à la sortir, mais Oberyn fit tournoyer son épée, et la planta dans le ventre de l’Orc, la faisant ressortir de l’autre côté.

Le troisième Orc, entendant les bruits, se retourna alors.

« Un humain ? Ici ?! »

Oberyn attrapa la hachette de l’Orc tué, et la lança. La hachette tournoya dans les airs, et se planta dans le crâne de l’Orc, qui cligna des yeux stupidement, avant de tomber lourdement au sol. Oberyn rejoignit la chambre, et constata avec effroi que Dame Dustraing avait été violée à de nombreuses reprises, sous les yeux de son mari, de leur fille, et de deux autres enfants.

« Commandeur Oberyn !
- Messire Dustraing, je suis navré de ne venir que si tardivement.
- Notre fils, est-ce qu’il…
- Je… Je suis désolé, Madame… »

Oberyn pensa à sa prisonnière, celle qui n’avait rien voulu lui dire. Il espérait qu’elle allait devenir plus loquace, maintenant…

Rive-Bougre
Cour du château


La venue de Tywill signa l’effet d’une bombe. Il surplombait alors la zone quand ses hommes entrèrent sur place. Puis, quand la chose fut prête, Tywill inspira, et se recula un peu. Son, armure lourde était enchantée, et il courut ensuite. Il bondit dans les airs, son armure s’auréolant d’une lueur dorée, son marteau le propulsant dans les airs. Il atterrit ainsi en plein milieu de la cour, fracassant son marteau sur le corps d’un Orc qui explosa sur place, déclenchant une onde de choc qui souffla plusieurs Vériniens.

« Bande de sales enculés de suceurs-de-moutons ! Vous osez venir nous attaquer, vous vous prenez pour qui ?! »

Tywill se redressa. Deux Vériniens s’élancèrent vers lui avec leurs lances. Le Marteau à deux mains de Tywill pivota, et en frappa un sur le flanc, l’envoyant valser cinq mètres plus loin. Le légionnaire s’envola en hurlant, et se fracassa contre un mur. L’autre légionnaire avait été déstabilisé par le coup du marteau, et se reçut un coup de pied de Tywill en plein torse, puis tomba au sol. Le pied de Tywill, engoncé dans son armure doré, se posa sur son torse.

« Quoi, petite merde ? Tu regrettes d’être venu ici, hein ? Eh bien, tu as raison ! »

Tywill lui fracassa le crâne avec son marteau, faisant jaillir le sang tout autour. Il était à la hauteur de sa réputation, une véritable machine de guerre. Tywill brandit ensuite son Marteau, qui s’illumina.

« Allez, les gars ! Défoncez-moi ces eunuques de merde. Ce ne sont pas des Peaux-Vertes baveuses et des jupettes à lanière qui nous feront peur ! »

Tywill croisa ensuite Nashak, et fronça les sourcils.

« Je t’ai épargné jadis, car je pensais que tu serais plus raisonnable que ton taré de père. Que le Patriarche me pardonne ma mansuétude, je vais t’envoyer rejoindre ton dégénéré de paternel. »

Il apparaîtrait très vite aux Vériniens que, avec la venue de Tywill, le cœur des Sylvandins s’était enhardi. Nashak s’élança vers lui. Malgré son armure monstrueuse, Tywill restait relativement souple. La hache de Nashak fusa vers sa tête, mais il l’intercepta avec le manche du marteau. Comme il le tenait à deux mains, il ne pouvait plus se servir de ses mains, alors Tywill frappa avec sa tête. Ou, plutôt, avec son heaume. Les Orcs avaient une constitution renforcée, mais, même malgré ça, le sang de Nashak décora le heaume de Tywill. Il la vit reculer. Plutôt que de perdre son temps à manipuler son Marteau, TYywill opta pour libérer l’un de ses bras, et décocha à l’Orc un terrible uppercut. Elle tomba au sol, crachant du sang par ses lèvres, tandis que le Roi lui faisait face.

« Va crever, sale pute ! »

Le Marteau tournoya alors, pour se positionner au-dessus de Tywill. Il allait frapper avec la férocité qu’on lui connaissait quand la hallebarde de Felucia le frappa dans le dos. Déstabilisé, Tywill en lâcha son marteau, qui tomba au sol. Aussi léger qu’une plume dans sa main, le Marteau de Guerre de Sylvandell retrouvait tout son poids si quelqu’un tentait de le soulever. Tywill se retourna pour voir une furie bondir sur place, et fdaire à son tour tournoyer sa hallebarde en visant sa tête. La main de Tywill s’interposa, et attrapa le manche de la hallebarde, tandis que le tranchant en métal frottait contre son heaume.

« Tu crois que je vais t’épargner parce que tu es jolie, petite fille ? »

Tywill n’avait plus son marteau, mais sa main libre crépita encore. Comme Oberyn, il chargeait un arc électrique. Il allait tirer quand Nashak planta sa hache dans son armure. Tywill hurla, et le tir partit à côté de Félucia, tandis qu’il relâchait la hallebarde de la femme. Il pivota sur place, et envoya son coude derrière lui pour repousser Nashak. La hache de celle-ci avait entaillé superficiellement son armure, mais il put retirer cette arme.

« }Tu as besoin d’une fillette pour te protéger, Nashak ? la railla alors Tywill. Tu n’as pas les couilles de ton père ! Que tous tes Orcs en soient témoin, la grande Neshak est une peureuse qui se réfugie derrière des fillettes ! Mais ne va pas te méprendre, je te buterai comme j’ai tué ton taré de père, sale pute mal baisée ! »

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 29 juin 2025 13:54
par Cyra Veluria Tertia
Les éclairs dansaient autour d’Alice comme des serpents d’or. Son regard était fixe, implacable, tandis que sa lame, tendue vers Cern Voskarn, s’illuminait dans la brume. Des pierres enchantées incrustées dans la garde pulsaient d’une lumière froide, puis un arc électrique fulgura depuis la pointe de la lame, frappant Cern de plein fouet.
Le choc fut brutal.

La cuirasse de Cern craqua sous l’impact, projetant des éclats métalliques et des filaments d’énergie violette. Le souffle coupé, le commandant sylvandin fut arraché de sa posture, projeté en arrière comme une poupée brisée. Seule la sangle de cuir qui le reliait à sa monture lui évita une chute immédiate dans les flots rugissants.Mais il n’eut pas le temps de remercier sa bonne étoile.

Un rugissement abyssal fendit l’air — Fenduin, le deuxième dragon d’Alice, surgit des nuées comme une étoile filante de flammes et de rage. Sa gueule béante, hérissée de crocs ivoirins, s’abattit sur la wyverne de Cern avec une violence cataclysmique. Le cri de la bête fut court. Sa colonne vertébrale se brisa en trois, ses ailes se déchirèrent comme du tissu, et son sang, noir et épais, éclaboussa le ciel comme une pluie funèbre.
La wyverne se désintégra dans une explosion de chair, et Cern chuta.

Son corps plongea dans le vide, filant entre les deux dragons en une spirale incontrôlée. Le vent sifflait dans ses oreilles, sa vision se troublait. Mais ses doigts tremblaient encore de lucidité. Il tira sur la chaîne qui pendait à son cou et brisa le petit pendentif d’ambre suspendu à son armure. L’éclat se dissipa dans une fine poussière bleutée, une bulel de forma autour de lui… et sa chute ralentit brutalement, comme si l’air lui-même s’était épaissi autour de lui. Ses jambes se balançaient dans le vide, sa respiration était haletante.

Un sifflement familier fendit les airs. Une chevalière wyverne. Sa créature piqua depuis la couche nuageuse, ses serres tendues, son regard fixé sur le Vieux Griffon. Elle frôla la surface de la bulle de flottaison avant de remonter en flèche et, dans un déploiement de puissance maîtrisée, attrapa Cern en vol par le harnais de son armure.

Cern se balança un instant, heurté par la reprise, puis remonta en selle avec une grimace de douleur. Il avait les côtes en feu, son armure enfoncée, et du sang coulait de ses tempes. Mais il était vivant. Il entama un sourire carnassier en regardant Fridg, sa fille et chevalière wyverne qui était venu la secourir.

"Voilà qui est excitant...kof..." Il cracha un peu de sang, et sentit son coeur palpiter à tout allure à cause de la décharge électrique. "Je suis trop vieux pour tout ça...quel est le bilan, chez nous ?"
"Il ne reste que moi, le jeune Jayro et Brodig. Sa wyverne semble mal en point..."
"Hum ! C'est donc une situation catastrophique que nous avons là..." Souria le mercenaire.

Puis il se tourna vers la Reine, et vit la peur dans les yeux d’Alice. Son dragon avait perdu connaissance, et s'en alla tomber au loin.

"On la poursuit ?" Demande sa fille.
"Hum...le contrat était de neutraliser les dragons, le reste, ce n'est plus de notre ressort."
Il jeta un oeil au dernier dragon qui continuait à se battre, fermant la fuite aux soldat d'Aujurius. Cern observa au loin du pont, et souria.
"Dépose moi, ma wyverne c'est fait broyer. Continue d'harceler ce dernier lézard. Soit prudente ! Le but est de l'occuper. Tu as encore la fiole de flamme spectrale ?"

"Oui. Je ne l'ai pas encore utiliser."
"Bien. Griffe le avec, cela suffira à étouffer ses flammes. C'est une sacré invention que nous a fourni le baron...Ne tente aucune manoveure périlleuse, on a déjà assez perdu de petit gars."
Sur ce, Fridg s'en alla déposer son Père au loin, avant de reprendre la coordination des attaques sur le dragon avec les deux restant de leur troupes.

_____________________________________________________
Sur le pont.

"Rafles d'archers ! Boucliers levés !"

Les légionnaires répondirent avec une détermination sans faille, et levèrent leur bouclier en rythme. Les flèches d'arcanes brisèrent certaines de leurs défenses, mais la plupart tenirent bon.
Le souffle brûlant de Fenduin balayait l’arrière du pont, laissant derrière lui des flammes vives qui léchaient les poutres et les cadavres fumants. Le ciel était obscurci par les cendres, et l’air empestait la suie, le sang et le métal chauffé à blanc. En contrebas, la légion d’Aujurius, engoncée dans la nasse des flammes et des palissades magiques, haletait.
Aujurius, le regard dur, la respiration hachée, se tenait encore debout, son plastron noirci par les fumées. À ses côtés, Judius, un vieux centurion borgne, le visage buriné par les années, se mit à rire d’un ton rauque malgré la situation :

"Par les os de Magnus, Légat… On dirait qu’on s’est trompé d’époque. C’est pas une guerre, c’est un foutu concours d’élémentalistes. "

Aujurius esquissa un sourire fatigué, sans lâcher du regard les murs qui les enfermaient.

"Le conflit des deux couronnes semblait si simple à coté. Des armées en ligne, des cohortes, que des choses que l'on connait bien. Ici, des dragons, des vieux bonhomme en toge qui psalmodie des murailles... "

Il posa une main sur l’épaule du centurion.

"Mais tu sais quoi, vieil ami ? C’est parfait. Je n’ai jamais voulu mourir vieux. J’ai toujours rêvé que mon nom reste gravé sur les tablettes. Si cette guerre est notre tombeau, alors qu’elle soit glorieuse."

Autour d’eux, les légionnaires s’agrippaient à leur formation, haletants, les boucliers couverts de cendres, mais le regard toujours fixé en avant. Ils étaient fatigués, encerclés, et pourtant, la flamme ne s’était pas éteinte.
Un grondement se fit alors entendre. Un hurlement de pierre brisée.
De gigantesques rochers, s’écrasèrent contre les murailles qui les isolaient, provoquant des gerbes de débris et des secousses sous leurs pieds. Les murs, bien que solides, tremblaient désormais de toutes leurs fondations. Ces rochers venaient des puissants onagres Vériniens. Certains étaient encore debout.
Derrière eux, le cor noir résonna. Un souffle profond, grave, comme le rugissement d’un dieu oublié. Le cor noir, c'était le lancement de la charge général.
À travers les flammes, les dernières cohortes, celles de réserve, les vétérans blessés, les jeunes encore pâles, et même l’artillerie de fortune rescapée du premier assaut avancèrent. Ils n’avaient plus de voie de retraite. Alors ils choisirent l’offensive.
Les flammes se refermaient derrière eux. Devant, les murs de pierre cédaient sous les assauts répétés des impacts. Une fissure apparut, puis une autre, puis une partie du mur s’effondra dans un tonnerre de roche.
Aujurius se dressa sur les ruines fumantes, le glaive levé, et hurla de toutes ses forces, défiant le mage du corps de garde :
"Loriot ! La magie n’est qu’un feu de paille face à la discipline, à l’ingéniosité et à la volonté des Légions de Novae Vérinis !"

Et dans un fracas de métal et de cris, il lança l’assaut.
Les cohortes chargèrent, unies, droites comme des lances, hurlant leur serment au milieu des flammes et des ruines. Ce n’était plus une bataille. C’était une offrande de chair et d’acier aux dieux de la mort.

_____________________________________________________
Plus au loin.

Le hameau montagnard n’était plus qu’un souvenir en flammes. Les toits de chaume s’étaient écroulés sous les coups de masse, les tonneaux de grains déversés dans la boue, et les rares villageois assez fous pour résister gisaient maintenant, enchaînés ou morts, au pied des murets de pierre. Finusia, casquée, son glaive de cavalerie encore dégoulinante, observait la scène avec un détachement glacial. Elle n’était pas là pour le sang, mais pour les vivres.

"Chargez les sacs. Et brûlez ce qui reste." ordonna-t-elle sans lever la voix.

Mais soudain, un rugissement sourd fit vibrer la vallée entière.

Un cri de bête, mais d’une intensité qui fit même reculer les chevaux. Le sol trembla. Un souffle putride, charriant des odeurs de soufre, de cendres et de sang cuit, s’étendit comme un voile. Finusia releva brusquement la tête. À travers les arbres décharnés du flanc nord, un monstre écailleux s’effondra. Un dragon. Et pas n’importe lequel. Il dévalait la pente comme une montagne prise d’assaut par la gravité, renversant pins et rochers, traînant sa carcasse fumante sur des centaines de mètres avant de s’échouer dans un champ au creux du vallon. Des volutes noires s’échappaient de sa gueule entrouverte. Sa chair était brûlée, éclatée, sa respiration sifflante.

"Par les seins de la Mère de Guerre…" murmura Finusia, les yeux écarquillés.

Elle n’avait jamais vu un dragon. Jamais vu un dragon blessé. Et jamais rêvé en voir tomber un.

"À cheval ! On descend. Vite." lança-t-elle à ses guerrières, déjà en train de seller.

La petite troupe de légionnaires de choc descendit en file rapide vers le vallon. La vapeur et la cendre leur fouettaient le visage, l’air était irrespirable. Le dragon n’était pas encore mort. Ses flancs se soulevaient par à-coups. Et là, juste au pied d’un arbre brisé… une femme inconsciente. Son manteau était riche. Ses doigts ornés de bagues royales. Une épée magique était à ses côtés. Finusia plissa les yeux. Elle ne reconnaissait pas ce visage, couvert de suie et d’ecchymoses. Mais elle sentait qu’elle était précieuse. Trop précieuse pour être une villageoise.
Elle sauta de cheval, s’accroupit à côté d’elle, la retourna.

"Qui que tu sois… tu ne sens pas la paysanne."

"Centurion ! » appela une voix plus loin. Une des légionnaires, l’oreille contre le sol rocailleux, se releva, le visage tendu. « Une troupe. En approche rapide. Des sabots… peut-être cent, deux cents cavaliers."

Finusia jura.

"On part. Chargez-la sur mon cheval, ligotez-la."

Alice, inconsciente, fut solidement attachée à la selle de Finusia, la tête ballottant mollement au rythme de la course. La troupe s’éloigna en urgence, dévalant des sentiers escarpés vers l’est, laissant le dragon derrière eux, fumant et seul dans sa propre fin. u loin, ils aperçurent les hauteurs de Rive-Bougre, et la fumée noire des combats. Les bannières sylvandines flottaient autour du château… encerclé. Finusia jura une nouvelle fois. Et alors, le cor bleu retentit. Un son profond, ancien. Un écho qui fit geler le sang de ses femmes.

Finusia freina son cheval d’un coup sec, sidérée.
"Le cor bleu ? Déjà ? Impossible…"
Elle tourna la tête vers l’ouest. Sur une corniche, les éclats d’armes s’entrechoquant annonçaient une bataille secondaire. Une cohorte de Vériniennes affrontait une escouade ennemie. Demora.
Finusia n’hésita pas. Elle fit virer son cheval et fonça dans cette direction, sa troupe à sa suite. Demora, en pleine mêlée, la reconnut aussitôt. Sa chevelure sanglante flottait sous son casque. Elle taillait dans l’ennemi avec une efficacité presque froide.

"Finusia !" cria-t-elle. "Qu’est-ce que…"
Son regard se posa sur la femme inconsciente attachée à la selle.
"Par les Enfers… c’est elle ? C’est la Reine ?"
"La Reine ? Je l’ai trouvée au pied d'un dragon. Il agonisait."
Demora pâlit.
"Qu'est ce qu'il se passe donc sur ce pont ? Tss...nous, ici nous sommes arrivés trop tard. Tout est allé trop vite. Le cor bleu a sonné. Nous devions les prendre à revers… maintenant il faut fuir."

Sans perdre un instant, les deux troupes filèrent dans les galeries souterraines que la cohorte de Demora venaient d'emprunter. À l’entrée d’une cavité étroite, une Vuldarienne psalmodia. Ses yeux brillèrent d’un éclat surnaturel. Puis elle posa sa paume sur la roche. Le sol trembla, et un pan entier de montagne s’effondra, bouchant la galerie d’un amas de pierres compactes. Personne ne les suivrait par ce chemin.
Elusine, haletante, jura en frappant du poing sur la pierre.

"C'est pas vrais ! Encore dans ces maudits tunnels ! Alors que nous sœurs se battent sur les murailles !"
"Silence Elusine !" Lui rouspeta sa centurion. "Tu as entendue comme moi, le cor bleu. Nous devons nous regrouper."
Sa championne grinça des dents, alors que Demora se rapprocha de la Reine ligotée. Elle l'observa un moment.
"Oui, c'est un sombre jour pour nous. Mais...nous avons peut-être une carte à jouer. En avant, cohorte, on avance au pas étouffé. Vous savez mieux que moi les dangers de ces galleries."

Que s'était il donc passé sur les murailles de Rives-Bougres ?
La cour intérieure n’était plus qu’un champ de ruines, saturé par les cris, les flammes et le martèlement des armes. Autour des trois figures centrales, les légionnaires Vériniens et les troupes sylvandines s’affrontaient avec une sauvagerie sans retenue. Mais à l’instant, toute l’attention semblait captée par le duel monstrueux qui s’y déroulait.
Tywill se tenait là, poings nus, l’armure cabossée, le heaume ruisselant de sueur et de sang. Face à lui, deux des plus redoutables guerrières de la légion Vérinienne : Félucia, la furie en hallebarde, et Nashak, la cheffe des Narseïdes, encore haletante, le coin des lèvres crachant un filet de sang noir.
Et pourtant, malgré la désarmement apparent de Tywill, il tenait le terrain comme un colosse, les retenant toutes deux par sa seule présence.
Il écarta les bras. Son plastron luisait. Ses mains levées crépitaient.

Dans un grondement semblable à celui d’un ciel de tempête, un dôme d’électricité explosa autour de lui. Des éclairs en arcs serrés fusèrent, fouettant violemment les corps de Nashak et Félucia. Cette dernière hurla, projetée en arrière, fumante, son armure criblée de brûlures. Nashak, elle, ploya les genoux… mais tint bon. Le courant parcourait ses veines, son sang grondait, sa chair fumait, mais ses dents restèrent serrées.
Les muscles bandés, elle planta un genou au sol, les yeux fixés sur Tywill, qui s’éloignait à grandes enjambées vers son marteau, planté comme une stèle au milieu des gravats.

" Non… "

Elle rugissait plus qu’elle ne parlait. Un râle primitif, viscéral, animal.

"Non, tu ne le toucheras pas…"

Elle bondit. Une dernière charge. Sa hache en main, le corps encore parcouru d’étincelles, elle hurla comme une ouragan.

"MEURS CONNARD !"

La hache siffla dans l’air, et Tywill, surpris par la résurgence de cette adversaire qu’il croyait abattue, tenta un mouvement de recul. Mais trop tard. Le fer mordit sa cuirasse, s’enfonça dans les anneaux, et déchira la chair.
Il gronda, recula d’un pas. Le choc l’avait atteint. Du sang ruissela sur son plastron, teintant l’or et l’acier d’un rouge profond. Nashak souriait. Elle y croyait.
Elle ouvrit la bouche pour une raillerie triomphante, mais elle n’eut pas le temps de parler.
Tywill, le visage figé dans une expression retenue, venait de récupérer son marteau, et le fit tournoyer. Le poids démentiel de l’arme fusa dans l’air, et la masse s’écrasa violemment sur le crâne de Nashak.
Un bruit mat, comme celui d’une citrouille brisée.
La chef orc fut projetée en arrière, son regard figé, son sourire encore inscrit sur ses lèvres même au moment où sa boîte crânienne explosait. Elle tomba, comme une statue qui se brise, un éclat de cervelle encore accroché à sa hache.
Silence.

Félucia, à demi redressée, les yeux rougis par la foudre, vit la scène. Son cœur se serra. Tywill, lui, haletait, un genou à terre, son marteau à ses côtés, la poitrine secouée de spasmes. Du sang s’échappait lentement de sa blessure. Il leva la tête, fixa Félucia avec une grimace presque satisfaite. Une de moins.

Du haut de la tour principale, Cyra observait la scène comme une maîtresse d’échecs contemplant son échiquier brûler. Son visage, impassible, trahissait une concentration extrême, mais son regard d’acier, lui, révélait une rage froide. Elle avait vu Nashak chuter. Elle avait vu Tywill, ensanglanté mais encore debout, brandir son marteau comme un totem de victoire. Et elle avait vu Félucia… tomber dans le piège. Quitter les murailles. Abandonner sa position pour plonger dans un duel d’orgueil. Résultat : les Sylvandins, galvanisés par leur roi, avaient investi les murs.

"Non, cela ne va pas. Trop de choses ne vont pas depuis le début de cet assaut." murmura-t-elle, d’un ton glacial.

Elle leva deux doigts. Une exécutrice, au visage peint de cendre et de sang, s’approcha.
"Fais sonner le Cor Bleu. Tout de suite."

Un battement. L’exécutrice hésita. Car le Cor Bleu… c’était le signal de la retraite générale. De la reddition du terrain. De l’échec. Et chez les Sœurs d’Acier, ce mot n’existait pas. Mais Cyra tourna légèrement la tête. Et ce simple mouvement suffit à faire comprendre que la discussion n’était pas permise.
Alors, l’exécutrice empoigna la longue trompe d’azur, dressée sur son trépied d’argent, et souffla. Un hurlement spectral déchira l’air. Un cri strident, suraigu, qui semblait surgir non d’un instrument, mais des entrailles mêmes de la terre. Les Sœurs d’Acier s’arrêtèrent, une à une, comme figées par un sort.
Même Félucia, hallebarde en main, prête à bondir sur Tywill, s’arrêta net, comme si on venait de lui trancher les jarrets.

« Quoi ? Non ! NON ! »

Elle tourna un regard furieux vers la tour, vers Cyra. Mais l’ordre avait été donné. Et nul ne désobéissait au Cor Bleu. Sur les murailles, les premières légionnaires commencèrent à reculer en catastrophe, dévalant les escaliers en colimaçon, abandonnant les créneaux, les balistes, les cadavres. Quelques-unes, paralysées d’incompréhension ou de honte, furent empalées par des lances sylvandines dans leur fuite.
Cyra, droite, inébranlable, lançait déjà les ordres suivants :

"Faites tonner les murailles. Qu’on efface notre passage."

Les Exécutrices s’étaient déjà déployées. Arcs à la main, elles approchèrent des braseros, où des flammes bleues crépitaient dans des urnes sacrées. Leurs flèches trempèrent dans l’huile, puis furent enflammées. Leurs cibles n’étaient pas les ennemis… mais les murs eux-mêmes.
Elles visaient les emplacements secrets où les esclaves maudites de Sarth avaient entassé des barils de poudre noire, dissimulés derrière des plaques de pierre.
Une volée. Le ciel s’embrasa brièvement de traits de feu.
Et puis…

BOUM.

Un pan entier de la muraille nord explosa, projetant pierres, débris et corps au sol. Une seconde volée partit, suivie d’un second souffle, puis d’un troisième. Les remparts se disloquaient avec une violence cataclysmique.
Les Sylvandins, surpris, furent eux aussi fauchés par les déflagrations. Les murailles, plutôt que d’être prises, étaient condamnées.
Cyra referma lentement sa main gantée, comme si elle écrasait la citadelle elle-même dans son poing.

« Si nous devons fuir, alors nous partirons en laissant du sel sur la terre. »

Dans la cour, Félucia reculait à contrecœur, ses bras tremblants de rage. Autour d’elle, des légionnaires fuyaient en direction de la porte regagnant les montagnes. La chute des murs avaient permis de créer un moment de suspension contre leurs ennemis alors que les légionnaires fuyaient. Des archères couvrirent la fuite, tandis que l'état-major de Cyra venaient de quitter les lieux. Féluciafermaient la marche, regardant des Narseïdes qui étaient parvenu à récupérer le cadavre de leur ancienne matriarche.

Lorsque le gros des troupes venaient de quitter les lieux, une nouvelle flèche de feu fit s'ébouler la porte vers les pans de la montagne, permettant de couvrir leur fuite. Félucia, enragé, s'en alla voir sa Légate, mais avant qu'elle puisse dire quoique ce soit, sa supérieure leva la main, la faisant taire.

"Pas maintenant. Personne ne me parle maintenant. Je ne suis pas d'humeur. On rentre au camp secondaire."
Son regard était lour de colère, mais semblait tout de même montrer d'intense réflexion. Elle n'en avait pas finit avec Silvadell.
_________________________________________________

Les montagnes, jadis silencieuses et souveraines, étaient ce soir-là parsemées de clameurs étouffées, de pas lourds, de sang séché sur les armures, et d’odeurs de souffre, de sueur et de cendre. Au creux d’une large vallée minérale, à l’abri des vents et des regards, le camp secondaire avait été dressé par la cohorte d’Armélia avec une rigueur impressionnante.

Des palissades de bois noir renforcées de plaques d’acier encerclaient le camp. Aux deux extrémités, sur des plateformes surélevées, deux balistes colossales pointaient vers le ciel, montées sur des socles pivotants et bardées de runes de stabilisation. Elles avaient été conçues pour abattre des dragons, et même les plus intrépides éclaireurs n’osaient s’en approcher sans trembler.

Des tentes militaires, sombres et ordonnées, formaient des rangées parfaites. Les ingénieurs avaient creusé de légers fossés pour canaliser l’eau et éviter les flaques. Chaque centurie avait sa zone, et les blessés étaient réunis sous des toiles plus épaisses, soignés par des prêtresses silencieuses. Malgré cette organisation impeccable, le camp respirait la tension.

Ici, le silence n'était pas celui du repos, mais celui de la défaite. Les murmures s’échangeaient à mi-voix. Les casques n’étaient pas lustrés. Les regards fuyaient ceux des officières. On essuyait discrètement les larmes sur les visages, non pour les morts, mais pour l’échec. Les Sœurs d’Acier, forgées dans le sang et l’honneur, n’avaient jamais fui.

Et elles avaient fui.
Autour d’un feu central, au cœur du campement, cinq silhouettes se tenaient en cercle, dans une lueur rougeâtre qui creusait les ombres sur leurs visages.

Armelia était assise droite, les mains croisées sur sa cuisse. Toujours impeccable, même ici. Ses traits étaient durs, mais sa voix restait posée.

"Nous avons couvert la retraite. Le feu a englouti les murailles. Et avec les éboulements, je doute que les Sylvandins n’oseront nous poursuivre ici. Mais ils ont vu notre dos."

Sa voix n'était ni accusatrice, ni moralisatrice. C'était une constatation militaire.

Finusia, un peu plus loin, appuyait ses coudes sur ses genoux. Sa lame était posée à côté d’elle, encore entachée de sang de son pillage.

"Au moins, on a capturé leur Reine. Le destin nous sourit un tout petit peu, non ? Une occasion pareille, on ne l’aura plus."

Elle regardait les flammes, ses yeux brillants, mâchoire contractée.

Félucia, assise mais agitée, rongeait son ongle avec férocité. Elle avait ôté son plastron, et son épaule saignait encore par endroits.

« J’aurais pu le tuer. Tywill. Je le tenais. Ce bâtard m’a échappé parce qu’on a sonné cette foutue retraite ! »

Elle se leva brusquement, mais Armélia leva un doigt, sans la regarder. Félucia se rassit.

« J'ai eu les rapports de bataille. Tu étais censée tenir les murailles. » répondit Armélia froidement. « Il était là pour servir d'appat. Tu as mordu dedans comme une débutante. »

Un silence lourd suivit. Jusqu’à ce qu’Elusine, plus en retrait, sa cape repliée sur ses épaules, parle enfin d’une voix agacée, presque lasse :

« Raaaaah...J'en ai maaaaaaaaaaaaaarre de ces montagnes...Des semaines à affronter goules, trolls, wyvernes des roches, tout ça pour fuir à la première bataille contre les Sylvandins ! Tu parle d'une campagne !»

Ses yeux se perdirent dans le feu. Son mental était happé par la fatigue, bien plus que son corps. Demora, jusqu’ici silencieuse, adossée contre un tronc d’arbre, regarda les quatre femmes tour à tour. Ses cheveux étaient en bataille, son visage creusé par la fatigue.

« On a été battues. Pas défaites. Il y a une différence. »

Elle lança une pierre dans le feu, qui fit crépiter les braises.

« Il faut se rendre à l'évidence, la légate a eu raison de sonner la retraite. Ils ont été plus fort que nous, sur ce coup là. Et...ils ont capturé Runata.»

Un silence suivit. Sans leur ingénieur en chef, avec uniquement deux grosses balistes, traverser les plaines allaient être beaucoup trop dangereux.
Un vent froid balaya la vallée, faisant danser les flammes et les ombres autour d’elles. Au loin, on entendait le bruit des blessés, des lames qu’on aiguisait à nouveau, des prières chuchotées dans l’obscurité.

Et, au centre du cercle, cinq femmes, forgées dans l’acier, battues pour la première fois, se tenaient dans le silence du feu. Mais pas une seule ne pensait à se rendre.

Dans les hauteurs du camp, à l’écart des cohortes principales, le quartier des Narseïdes baignait dans une atmosphère sépulcrale. Les autres légionnaires évitaient instinctivement cette zone, où l’air semblait plus épais, saturé d’une odeur de viande cuite, de sueur ancienne et de cendres. Les Narseïdes, impassibles, les traits fermés, n’échangeaient que de rares mots dans leur dialecte guttural. Le deuil de Nashak, leur matriarche, pesait comme un couvercle sur leurs âmes – mais ce deuil n’avait rien de silencieux. Il était brutal, actif, vivant, comme tout ce qui les constituait.
Cyra Veluria Tertia, la Légate, s’avança seule. Drapée dans sa cape noire bordée d’or, elle traversa leur camp sous les regards durs des sœurs orques. Elles la saluèrent – mais à peine. Une inclinaison brève de la tête, plus coutumière qu’honorifique. Cyra ne s’en offusqua pas. Elle comprenait leur douleur. Elle respectait leur colère.

Une tente de toile sombre, renforcée de cuir tanné et de totems de crânes gravés, abritait la nouvelle matriarche. Deux sentinelles Narseïdes en armes se tenaient à l’entrée. L’une souffla du nez en voyant arriver la Légate. L’autre écartant simplement le pan de tissu, sans un mot.
L’odeur métallique de sang mêlé à celle de chair fraîche la frappa dès son entrée. L’intérieur de la tente était un sanctuaire de boucherie sacrée. Au centre, sur une table de pierre basse posée sur des ossements polis, reposait le corps nu de Nashak, froid et offert. Ses chairs avaient été déjà ouvertes, ses organes soigneusement extraits et posés dans des bols de terre cuite alignés méthodiquement : foie, cœur, tendons, moelle, langue… Un feu discret brûlait dans un brasero au fond, d’où émanait une senteur légèrement épicée.

Et, devant tout cela, la nouvelle matriarche, les bras nus, le glaive encore couvert de sang à la main. Elle avait des tresses brunes épaisses, remontées en un chignon désordonné, des yeux vifs et un sourire en coin qui ne semblait jamais la quitter. Son torse était strié de marques d’initiation, certaines anciennes, d’autres fraîchement gravées, encore rouges.

"Bonsoir, Légate !" lança-t-elle avec une voix claire et espiègle.

Elle leva un bol contenant un morceau de flanc taillé proprement.

"Vous venez vous assurer d’avoir le meilleur morceau ?"

Elle éclata d’un rire guttural, sans gêne, sachant pertinemment que les Vériniennes ne consommaient pas leurs morts.
Cyra, impassible, s’arrêta à deux pas de la table. Elle contempla le corps sans détourner les yeux.

"Nashak méritait les honneurs. J’imagine que c’est ce que vous lui offrez."

La jeune Narseïde essuya la lame sur un pan de tissu, puis haussa les épaules.
"Ce serait une honte de la laisser pourrir. Elle a combattu comme une reine. Il est de notre devoir de la ramener en nous."

Elle désigna son torse, puis son ventre.

"Chaque sœur en mangera un morceau. Ainsi, sa force nous renforcera. Son courage, son souvenir, tout ce qu’elle était. Cela nous traversera la
gorge, et nous portera jusqu’au prochain combat."


Cyra inclina la tête lentement, absorbant l’étrangeté de ce rituel sans froncer un sourcil.

"Et tu es… ?" demanda-t-elle, posément.

La Narseïde s’inclina avec une théâtralité presque moqueuse.

"Kar’Zisha. Fille de l’arène d'Aqua Davoe. Sœur de Nashak par le sang versé. J’étais la dernière à la battre en duel. Elle m’avait désignée bien avant la bataille."

Elle reposa le glaive sur la table, avec une douceur presque affectueuse. C'était rare de voir des Narseïdes utiliser des glaives Vérinien.

"J’ai jamais aimé ses sermons, mais… c’était une grande gueule. Je la respectais."

Cyra regarda les bols, les viscères soigneusement préparés, et puis le visage de Kar’Zisha, rayonnant de fierté, de fureur contenue, presque exaltée.

"Tu as sa force. Tu porteras désormais sa voix. Es tu prête à endosser le titre de matriarche ?"

"Non." répondit Kar’Zisha en enfournant dans sa bouche un petit morceau de chair, qui étais entrain de cuire. Elle mâcha lentement, puis sourit avec des dents rouges de sang. "Mais je suis bien obligée. J'aime pas diriger. Mais c'était le choix de la grande gueule, alors je la respecterais."

Elle froncera les sourcils en machant le bout de viande.

"Hum...sa chaire n'est pas très tendre. Y a pas à dire, c'était vraiment une dure à cuire !"

Elle éclatera de rire toute seule, devant le regard inquisiteur de sa légate. Le rire prit quelques secondes, avant qu'elle remarque la placidité de sa supérieur et que Kar'Zisha se calme.

"Vous avez pas compris ? Dure à cuire - Dure à cuire ! Non, parce que en fait, je suis en train de la cuire et..."

"J'avais très bien compris."

"Ah."

Un silence s'installa où la matriarche reprit ses découpes et ses cuissons. Cyra ne savait pas encore quoi penser de cette nouvelle centurion. Elle ne réagit pas. Elle observa encore un instant le rite, puis tourna lentement les talons.
Au seuil de la tente, Kar'Zicha lui demanda, d'un ton plus sérieux :

"Il parait que nous avions capturé la fille de l'homme au marteau."

La Cendreuse s'arréta, avant de tourner légèrement la tête vers la bouchère. Celle ci, devant l'absence de réponse, continua.

"Mes filles aimeraient jouer avec elle."

"C'est une prisonnière et otage de luxe. Elle pourrait faire pencher la guerre, voir l'avenir du continent tout entier. Je sais le manque de retenue que vous avez, j'ai pu le constater avec les Dustraing."

"Rooh...Nashak était une Narseïde élevé à la dure. J'ai eu des cours d'étiquette vérinienne dans les arènes, je suis bien plus urbaine que ma prédécesseure..."

Elle se retourna et fit une révérence Vérinienne ecagéré, presque obséquieuse, avant de lever sa main, dans un signe d'engagement.

"Je fais le serment que nous la rendront entière. Nous la voulons juste pour une nuit."

Cyra ne répondit pas tout de suite. Elle fit un signe de tête indiquant qu'elle allait y réflechir. Et elle s’en alla, son manteau effleurant les cendres noires au sol.
______________________________________

Les galeries de la montagne étaient humides, basses de plafond, et saturées d’un air minéral où se mêlaient l’odeur du soufre, de la moisissure, et de la vieille sueur. Le silence y était un allié fragile, et chaque bruit risquait d’appeler ce qu’on ne voulait pas nommer. Les goules, disait-on, erraient parfois dans ces entrailles oubliées, éveillées par le sang ou par les chants malheureux.

Trois silhouettes avançaient dans l’obscurité relative, éclairées seulement par une torche dont la flamme dansait doucement. Deux légionnaires en armure légère, casques enlevés, leurs visages tendus par la fatigue ; et devant elles, une femme silencieuse au teint blafard, le dos nu scarifié de symboles ésotériques, une esclave maudite de Sarth. Ses yeux, sans éclat, voyaient pourtant mieux dans les ténèbres que la lumière ne saurait le faire. Elle marchait pieds nus, sans bruit, suivant un chemin qu’elle seule semblait comprendre.

" Alors, on va vers le sud, hein ? " chuchota Varenna, la plus grande des deux légionnaires, un sourire narquois en coin.
"N’importe quoi, c’est l’ouest. Regarde la mousse sur la pierre, et le sens du courant d’air !"répliqua Dreya, agacée.
"De la mousse, dans une galerie souterraine ? Tu me sors ça d'où ?"
"J’ai lu des trucs."
"T’as lu un bouquin pour dire qu’on suit le vent ? Génial. Et t’as une boussole dans ton cul aussi ?"

Le ton montait à peine, mais assez pour faire tourner la tête de l’esclave.

"Silence." souffla-t-elle, sans hausser le ton.

Sa voix était creuse, comme si elle émergeait d’un puits.
Les deux femmes se turent net. L’esclave s’arrêta devant une arche effondrée, ses doigts effleurant la pierre comme si elle la lisait en braille. Un léger sourire passa sur ses lèvres.

"C’est le nord." ajouta-t-elle.

Varenna et Dreya échangèrent un regard penaud.

"Bon… le nord, alors." marmonna Dreya.
"J’allais le dire."

L’esclave posa doucement un sac de toile contre la base de la voûte, puis déroula un long fil de liège imbibé d’huile noire, qu’elle cala précautionneusement à la pierre, puis recula lentement, laissant la mèche courir sur quelques mètres. Son calme était glaçant. Comme si elle ne redoutait ni la mort ni l’effondrement.

Tandis qu’elle œuvrait, les deux légionnaires reprirent à voix basse :
"Tu sais, j’ai entendu dire qu’elles n’ont jamais fait le rituel du sang sacré. Les Sarthiennes."
"N’importe quoi. C’est impossible. C’est obligatoire pour toutes. "
"Ah ouais ? Et t’en as déjà vu une participer ? Moi, non. Jamais."
" … " Dreya voulut répliquer, mais ses mots restèrent coincés. Elle fronça les sourcils.
" Voilà. T’as jamais vu ça non plus. Elles le font pas. Mais elles ont la rage quand même… Alors c’est quoi, hein ? Elles servent la Légion sans le serment de sang ?"

Le silence retomba. Même la pierre semblait écouter. L’esclave se redressa. Elle sortit un briquet, l’alluma contre ses ongles sales, et embrasa la mèche. Une lumière orange s'étendit comme un serpent flamboyant. Elle fit un simple geste de la main vers l’arrière, sans même regarder les deux femmes, qui se jetèrent dans une anfractuosité de la paroi.

Quelques secondes plus tard, l’explosion résonna dans les boyaux de la montagne. Un pan entier de galerie s’effondra avec fracas, projetant de la poussière et des gravats dans toutes les directions. Le choc fit trembler la roche, mais il n’y eut ni cri, ni panique. L'éboulement s'arréta à quelques centimètres de l'esclave maudite, comme si celle ci savait où elle allait s'arréter. La Sarthienne se redressa, épousseta son pagne couvert de poussière, et reprit la marche comme si de rien n’était.

"Et en plus, elles posent des bombes mieux que n'importe qui...Faut avouer que maintenant, si les Sylvandins veulent nous surprendre en passant par les tunnels, avec elles qui bloquent les sorties, ça va être compliqué !" chuchota Varenna.
"Elle m’a filé des frissons, je te jure…"
"Peut-être qu’elles n’ont pas besoin de rituel… parce que c’est la Légion qui a signé un pacte avec elles, pas l’inverse ?"
"Putain, mais t'es vraiment trop conne, Dreya ! Ce que tu dis n'as aucun sens !"
Leurs voix s’éteignirent tandis qu’elles suivaient la silhouette pâle, unique flamme mouvante dans les veines noires de la montagne.
____________________________________________

La tente était grande, tendue de lourdes étoffes pourpres et noires dont les motifs en fil doré rappelaient l’iconographie martiale de la Légion VI. Devant l’entrée, quatre Exécutrices montaient la garde, figées comme des statues d’obsidienne. Leurs armures aux reflets sombres luisaient sous les torches, et chacune tenait en main une longue hallebarde garnie de crocs en fer noirci. En voyant arriver Cyra Veluria Tertia, elles s’inclinèrent légèrement, reculant d’un pas sans mot dire.

La légate entra. L’odeur qui l’accueillit était celle du métal chaud, du baume médicinal, et d’un parfum discret d’encens purificateur. La tente était silencieuse, presque sacrée, tendue d’un calme que seule la magie absente pouvait produire. Car ici, toute magie était morte, ou plutôt, étouffée.
Au centre, allongée sur une couche de fourrures sombres, la Reine Alice dormait encore, une fine sueur couvrant son front. Elle portait un pagne léger en lin brut, grossier mais propre, et ses poignets étaient encerclés de menottes métalliques gravées de runes de contention. Le collier, en revanche, captait toute l’attention : un lourd anneau d’acier, serti de cristaux d’obsidienne rouge, rayonnant une lumière terne mais constante. L’artefact palpitait doucement, comme s’il respirait, absorbant toute tentative de canalisation magique.

Autour d’elle, deux esclaves hommes, torse nu, peau marquée de symboles de servitude, s’activaient avec douceur. L’un changeait un pansement sur son flanc, l’autre tenait un bol fumant de racines broyées, de cannelle brûlée et d’eau chaude. Tous deux portaient des bracelets de soumission – leurs langues, on le savait, avaient été altérées par des rites : incapables de mentir, incapables de répondre sans autorisation.

Lorsque Alice se réveillera, elle verra un médecin au bol lui tendit la boisson, baissant les yeux :

"Buvez. Ordre de la Légate. Vous devez reprendre des forces."

Si elle posera des questions, il répondra :

"Nous n’avons pas le droit de vous répondre."

Il dit cela avec calme, sans animosité, comme une machine bien huilée. Elle comprendra rapidement le pouvoir du collier autour de son cou : sa magie était comme confinée.
Alors, le bruissement des tentures se fit entendre. Les gardes laissèrent passer Cyra. La Légate entra sans s’annoncer, ses pas lourds mais précis, comme sur un champ de bataille. Elle observa un instant la scène, détaillant les chaînes, le collier, les effets enfermés dans le coffre hermétique scellé au fond de la tente, entouré de cristaux rouges et de glyphes d’emprisonnement.
Cyra Veluria Tertia entra dans la tente avec la lenteur calculée d’une impératrice inspectant les ruines d’un royaume conquis. Sa démarche était droite, contrôlée, presque cérémonielle. Rien dans son allure ne trahissait l’urgence de la guerre où le sentiment de défaite. Elle était propre. Trop propre. Alors que ses sœurs revenaient des flammes, du sang et de la honte, elle, non. Pas une trace de boue, pas une éraflure.
Sa tunique de guerre, parfaitement repassée, taillée dans un tissu militaire renforcé d’un noir profond rehaussé de broderies rouges carmin, épousait son corps comme une seconde peau. Sur sa poitrine, le sigil de la Légion VI – un glaive fendu dans un œil stylisé – brillait d’un éclat sombre, orné de minuscules fragments d’obsidienne polie.
À sa ceinture, pendait une grande rapière, fine mais redoutablement longue, dont la poignée, gainée d’un cuir sombre, était décorée d’un pommeau en forme de tête de serpent. Le fourreau, lui aussi orné, était gravé de runes militaires désignant sa victoire lors de son duel contre Veluria Prima, sa soeur ainée. Une arme de duel, de prestige… mais aussi une lame d’exécution.
Ses cheveux, tressés avec une rigueur géométrique, étaient noués à l’arrière du crâne dans un chignon tressé comme un symbole d’ordre. Quelques perles d’onyx y étaient intégrées, sobres mais éloquentes. Sa peau, couleur d’ébène lustrée, semblait absorber la lumière, aussi lisse qu’un marbre noir poli, sans la moindre cicatrice visible – une rareté chez les officiers de haut rang, et un message en soi : Cyra ne se battait pas. Elle commandait.
Mais c’est surtout son regard qui frappait. Deux yeux ambrés, fixés sur Alice, sans animosité apparente, mais chargés d’un poids immense : celui du jugement, de la stratégie, de la victoire à tout prix. Un regard inquisiteur, qui scrutait, disséquait, analysait. Elle ne regardait pas une ennemie. Elle regardait une variable. Un outil. Un vestige.
Et pourtant, il y avait dans son port une certaine forme de noblesse – une rigueur presque sacerdotale. Cyra n'était pas cruelle pour le plaisir. Elle était cruelle par fonction.
Quand elle parla, sa voix fut douce mais tranchante, comme une lame qui caresse la gorge avant de l’ouvrir. Elle fit à la reine une révérence de la noblesse Vérinienne.

"Reine Alice… Vous êtes plus belle que lors de notre première rencontre. Nous ne nous sommes jamais présentée, mais je vous avais aperçue quand je n'étais encore qu'une jeune centurion, quand je n'étais encore que la Cendreuse. Dommage que la guerre vous abîme."

Elle s’arrêta, fit un pas de côté, mains croisées dans le dos, observant les chaînes, le collier, puis revint lentement vers le lit. Elle prit une carafe de vin qui était posé ici sur un plateau d'argent, et remplit deux coupes, tendant l'une à sa prisonnière.

"Mais rassurez-vous. Je ne suis pas là pour vous faire du mal. Je viens ici pour témoigner de ma fascination. J'ai eu les rapports du début de la bataille du pont. Ainsi vous avez lancé la charge de vous même. Vous et votre Père êtes particulièrement téméraire. Je dois vous l'avouer, je ne m'attendais pas à une charge aussi périlleuse de la part de la famille Korvander durant les premiers jours de l'invasion."

Et dans ses yeux, aucune chaleur. Seulement une intelligence aiguisée, et une détermination sans faille.

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 07 juil. 2025 01:15
par Reine Alice Korvander
Sylvandell
Château Royal, Salle du Conseil


« Les Vériniens ont été mis en pièce. Des pertes sont à déplorer dans la vallée, des Vériniens ont profité de… »

Le poing de Tywill fracassa violemment la table de la salle du Conseil royal.

« Ces salopes ont pris ma fille ! C’est ça la priorité ! »

Les conseillers royaux se turent. La bataille était sur le plan militaire une victoire. Rive-Bougre avait été reprise, et le campement principal des Vériniens mis en pièce. Les dragons dorés étaient lourdement blessés, mais les Vériniens avaient été mis en déroute. Ils avaient lancé un assaut désespéré contre les Sylvandins. Le commandant Aujurius avait été capturé, ainsi que d’autres Vériniens, qui s’entassaient dans les geôles de la prison royale. Des prisonniers secondaires, car la plus importante était celle qu’Oberyn avait ramené de Rive-Bougre. Runata, l’ingénieure en chef. Ils avaient pu corroborer son identité grâce aux prisonniers et aux éléments récupérés. Tywill avait même réussi à tuer Nashak. Lourdement blessé, il avait été soigné, et avait ensuite appris que sa fille avait été capturée par les pillards vériniens. Cette nouvelle avait anéanti toutes les bonnes nouvelles de cette journée de bataille.

Tywill souhaitait récupérer sa fille au plus vite. Les Commandeurs et les dragonniers volaient dans les airs en ce moment, mais les Vériniens savaient bien se cacher, et, dans un massif montagneux aussi vaste, il était illusoire de les trouver.

« Mais que peuvent-ils bien vouloir faire de Sa Majesté ? Nos prisonniers refusent de dire ce qu’ils voulaient faire ici.
- Vous allez soumettre un ultimatum à cette province de merde. S’ils ne nous rendent pas ma fille, nous brûlerons tout leur foutu pays. Prévenez-leur qu’il n’y aura pas un seul bâtiment debout ! »

Les conseillers se regardèrent entre eux. Ils savaient très bien que Tywill pouvait être très impulsif, mais sa crainte était légitime. Outre son inquiétude père, Alice était la Reine de Sylvandell, et, si elle avait des enfants, ceux-ci n’avaient pas encore l’âge de gouverner. Il était donc impératif de la retrouver.

Sylvandell
Château Royal, Cellule de Runata


Runata avait été éloignée des autres prisonniers, elle était enfermée dans l’une des chambres du Château Royal. Aucune arme quelconque ne se trouvait là, la chambre était pour ainsi dire complètement vide, avec des barreaux aux fenêtres. La porte finit par s’ouvrir, et un homme encapuchonné entra. Il marchait avec l’aide d’une vieille canne en bois.

« Runata Sigradanii… Je crois que vous êtes notre seule prisonnière de valeur. »

Si celle-ci avait fait ses devoirs, elle pourrait reconnaître celui qui n’était pas là lors de la bataille. Son nom n’était pas connu, comme s’il avait été effacé du temps, car on disait qu’il était le plus vieil elfe de Terra. Il était l’Omniprêtre, un elfe magicien. Malgré sa canne, la seule idée d’envisager de le combattre était sans espoir. Il avait soigné Tywill, et avait également soigné les Dustraing. Ceux-ci avaient été mutilés, mais il avait pu retrouver leurs membres, et avait recollé leurs membres à moitié dissous dans les ventres des Orcs tués. Cela nécessitait une expertise en magie blanche rare, même de la part d’Archimages. L’Omniprêtre observa donc cette jeune femme. Il n’était pas un interrogateur, et personne ne l’avait encore torturé.

« Vous avez dû l’entendre, non ? Vous avez perdu cette bataille, mais vous avez paradoxalement remporté un coup décisif. Les survivants de votre légion se sont enfuis avec la Reine. Tywill envisage de vous torturer. Ne doutez pas de son expertise en la matière, jeune femme. Moi, je m’étonne que vous soyez désespérée au point d’avoir choisi de vous allier avec les Narséïdes. Vous pouvez nous remercier d’avoir tué Nashak, elle vous aurait sûrement tué ensuite. »

L’Omniprêtre s’assit ensuite lentement sur une chaise en bois qu’il venait de faire apparaître.

« Je suis sûr que vous avez déjà dû inventer des mécanismes de torture, et que vous avez dû apprécier leur utilisation. Moi, j’ai toujours trouvé que les humains faisaient preuve d’une imagination un peu trop sophistiquée. La torture, ce n’est pas très difficile. Alors, on pourrait vous soumettre à de la torture psychologique en tuant nos prisonniers sous votre nez, mais vous me semblez un peu trop égocentrée pour cela. Donc, je viens vous faire une proposition, et une seule proposition… Si vous refusez, j’ai bien peur que votre joli minois ne soit plus jamais aussi joli. »

L’Omniprêtre se racla la gorge, et sortit de ses affaires un orbe magique. C’était un palantír, un orbe permettant de communiquer.

« Avec ceci, vous pourrez contacter votre légate, sans que nous puissions la localiser. Dites-leur qu’elle pourra vous revoir si elle accepte de nous restituer notre Reine. Voici notre proposition : elle, contre notre Reine. Nous sommes même prêts à vous restituer votre commandant, Aujurius. »

Sylvandell
Camp secondaire de la Légion XV


Quand elle émergea, Alice constata qu’on lui avait retiré son armure. Elle portait un collier par-dessus son propre collier, sur lequel trônait la Croix de Sylvandell. Celui-là, si on avait tenté de lui retirer, on s’en serait brûlé les mains. La Croix était un artefact défensif qui fonctionnait avec les Korvander. Il ne rendait nullement Alice invincible, mais assurait sa défense. Elle devait d’ailleurs sans doute à la Croix le fait d’être relativement indemne. Elle comprit vite qu’elle avait été capturée, et fronça les sourcils en voyant devant elle une femme à la peau d’ébène. Alice ne connaissait pas beaucoup les Vériniens, mais elle repensa à cette lettre qu’elle avait reçue, celle qui l’informait de cette attaque.

*La légate Cyra Veluria Tertia…*

Alice la laissa parler. Elle avait des menottes immobilisant ses poignets. Celle-ci lui annonça qu’elles s’étaient déjà rencontrées. Alice resta silencieuse pendant tout le discours de la jeune femme. La femme la félicita pour avoir participé à la bataille.

« Je crois que je me souviens de vous, Légate… Quand nos deux pays ont mené campagne commune contre les Narséïdes. Je pensais que vous étiez une femme d’honneur… La Cendreuse, celle qui revenait des combats couverte de sang et de poussière. Je me souviens que votre père vous décrivait comme un modèle, une femme à la rage contenue. Comme quoi, mon père se trompe souvent. »

Un sourire triste orna les lèvres de la Reine. Elle était presque nue, portant simplement un pagne.

« Pourquoi nous attaquer ? Je sais que votre pays est en pleine ébullition, qu’il y a des conflits… Votre fascination, vous pouvez vous la garder, et vous la foutre au cul, Légate. Vous avez provoqué la mort de centaines de personnes, que ce soit vos soldats que vous avez sacrifié pour rien, ou mes propres sujets, que vous avez massacré… Et pour quelle raison ? Vu que nous sommes dans une tente, et pas à Rive-Bougre, j’en déduis que mon père vous a botté le cul. J’ignore ce que vous attendez de moi, mais, si vous voulez avoir une chance de ne pas finir brûlée vive, je vous encourage à me libérer. »

Alice n’était pas la fille de son père pour rien…

Re: Le conflit du Sang et des Ecailles [PV Alice]

Posté : 11 juil. 2025 11:58
par Cyra Veluria Tertia
Runata et l'Omniprètre

La chambre était nue, austère, presque plus une cage qu’une prison. Les murs de pierre pleuraient l’humidité, et les fenêtres, hautes et étroites, laissaient entrer un vent glacial qui mordait la peau. Un simple lit de bois, sans couverture. Une cruche d’eau tiède posée sur une table bancale. Même le seau dans le coin de la pièce semblait avoir été choisi pour son aspect humiliant.

Runata Sigradanii, ingénieure en chef de la Légion XV, était assise en tailleur au centre de la pièce, les bras croisés, l’air boudeur. Ses cheveux, d’habitude impeccablement noués, pendaient en mèches désordonnées. Elle portait encore sa tunique militaire, salie et déchirée, mais elle gardait la tête haute. Ses lunette rondes étaient légèrement fendues. Une seule chose trahissait son état : le plissement constant de son nez, comme si l’odeur ambiante ou le goût de l’air la répugnait.

Quand la porte s’ouvrit et que l’Omniprêtre entra, elle ne se leva pas. Elle le regarda avec une moue franchement agacée, le jaugeant de la tête aux pieds.

« Vous pourriez au moins m’envoyer un feu, ou une soupe chaude. Ce château est à peine moins humide qu’une fosse commune. » Elle grimaça. « Et j’ignore ce que vous appelez "repas", mais vos ragoûts ont littéralement agressé mon palais. »

On ne voyait en elle ni peur, ni résignation. Il y avait chez elle quelque chose de plus dérangeant : une absence totale d’inquiétude, une forme d’insolence contenue dans une coquille calme. Comme une machine dont les engrenages grincent doucement, mais ne s’arrêtent jamais.

Elle haussa les épaules. « Il y a des limites à la décence. Vous m’enfermez dans une glacière, sans livres, sans outils, sans quoi que ce soit. Si vous voulez m’extorquer des informations, la moindre des choses serait d’essayer de me séduire un peu. »

Lorsqu'il lui évoqua la torture, elle lui répondit sous forme de bravade. « La torture ne me fait pas peur ! Je suis ingénieure. J’en ai dessiné, des instruments. J’en ai vu, des chairs se distendre, des esprits se briser. Si vous voulez commencer, commencez. Je peux même vous suggérer quelques améliorations. » Elle lui offrit un sourire narquois, puis ajouta, railleuse : « On pourrait discuter de résistances métalliques et de températures de fusion si vous avez un peu de plomb. »

C'était de la pure bravade. Il n’y avait ni excitation, ni fierté, ni même cruauté. Seulement une distance glaçante. Comme si la douleur n’avait plus de signification pour elle.

Il sortit alors le palantír de sa manche. Une sphère lumineuse, pure, fragile, comme un œil prêt à s’ouvrir sur le monde. Et lui expliqua son fonctionnement. Que le cristal permet une communication avec sa légate. Un canal qu'ils ne pourraient à priori pas tracer. Elle avais ici une opportunité : la Reine Alice contre elle, et même le commandant Aujurius, en prime.

Un silence. Runata, un temps immobile, le fixa longuement. Puis ses lèvres s’étirèrent. Lentement. D’abord un sourire discret. Puis un petit ricanement. Et enfin, un rire. Un rire qui enfla, monta en crescendo, jusqu’à emplir toute la pièce de sa dissonance.

Un rire sec, grinçant, presque douloureux à entendre. Puis un éclat plus grave, plus profond, qui ressemblait davantage à un abîme qu’à de la joie. Elle reprit son souffle, haletante, et s’essuya les yeux comme si elle venait de voir une pièce de théâtre absurde.

« Vous êtes… Vous êtes sincère ? » souffla-t-elle, encore secouée de spasmes. « Vous pensez vraiment… que ma vie, ou celle de cet idiot pompeux d’Aujurius… vaut la vie de la Reine de Sylvandell ? »

Elle se pencha en avant, son regard brillant d’un éclat fiévreux. « La légate ne sera jamais aussi stupide. Jamais. Elle sacrifierait une ville entière pour gagner une heure de bataille. Vous croyez qu’elle hésitera à me laisser crever ici ? »

Son ton s’adoucit étrangement, mais l’intensité de ses yeux ne faiblit pas.

« Allez-y. Amenez vos crochets, vos lames, vos aiguilles. Je peux même vous faire un schéma. Avec mes dents, s’il le faut. »

L’Omniprêtre ne regardait plus simplement une ennemie. Il regardait… une coquille. Et à travers cette coquille, une présence. Quelque chose de tordu. Une entité tapie derrière les yeux de Runata. Il n’y avait presque plus d’humanité dans ce corps. Ou plutôt : ce corps était tout ce qu’il restait d’humain. Le reste — les instincts, les souffrances, la volonté — appartenait à autre chose. Quelque chose d’ancien, de cruel, de patient.

Une emprise démoniaque profonde…A dire vrais, d'autres prisonnières de Rive-Bougre présentait ces similarités. Est ce que la torture pouvait réellement servir ? L'expertise de l'Omniprètre pouvait plutôt affirmer une autre solution pour réussir à tirer les vers du nez de ces femmes damnées.

Un exorcisme. Puissant.

Camp secondaire de la Légion XV – Tente de commandement

Un silence tendu s’était installé après les mots tranchants de la Reine. Mais Cyra, contrairement à ce qu'on aurait pu croire, ne réagit pas par colère. Au contraire, son regard s’éloigna légèrement, se perdant un instant vers un point invisible au-delà des toiles de la tente.

Les volcans du Nord…

Elle se souvenait. C’était une autre vie. Elle n’était alors qu’une centurionne fraîchement promue. La Cendreuse. Pas encore la voix du démon. Elle et ses troupes avaient combattu aux côtés des Sylvandins contre les séparatistes impériaux et les Narsïdes, dans les cendres et les laves de la chaîne de l’Obsidienne. Elle avait vu la bravoure d’Alice à cette époque, et elle s’en souvenait bien.

« Je vous avais trouvée digne, alors, » dit-elle doucement, comme si elle s’adressait à un souvenir plus qu’à la femme attachée en face d’elle. « Mais j’étais jeune. Naïve. Faible. »

Elle revint brusquement au présent, son regard dur retrouvant celui d’Alice.

« Ce que je fais aujourd’hui n’est pas par passion. Ni par plaisir. Mais par nécessité. »

La voix de Cyra devint plus grave, presque rituelle, comme une litanie qu’elle aurait déjà récité mille fois.

« Les morts que vous déplorez sont un mal nécessaire. Chaque vie arrachée, chaque bras perdu, chaque cris dans la nuit... sont les pavés d’un chemin que nous avons choisi de suivre. »

Elle s’approcha légèrement, les yeux plissés d’une intensité étrange.

« Nous voulons la chute de cet Empire. Nous voulons son cadavre, desséché, profané, étendu devant nous. Nous voulons le corps de l’Empereur, sans ses oriflammes, sans ses mascarades. Et nous voulons voir ses alliés – ses ducs, ses prêtres, ses dragons de parade – brûler avec lui. »

Sa voix semblait presque venir d'ailleurs. Le "Nous" ici résonnait d'une manière énigmatique. Mais à peine eut-elle ouvert la bouche pour poursuivre qu’un claquement sec retentit à l’entrée de la tente. Une jeune légionnaire, haletante, couverte de poussière et visiblement essoufflée par une course précipitée, se pencha dans l’encadrement.

« Légate… un message… urgent, du pont de Sylvandell… »

Cyra s’interrompit, ses yeux noirs foudroyant la messagère qui lui tendait un rouleau scellé. Elle le prit, s’excusa brièvement auprès d’Alice sans la regarder.

« Nous reprendrons cette conversation. »

Elle sortit de la tente, déroulant le parchemin d’un geste sec. À mesure qu’elle lisait, ses sourcils se froncèrent. Le souffle devint court, puis rageur. Et enfin, dans une explosion de colère, elle frappa de toutes ses forces contre l’une des poutres soutenant la structure, la main encore gantée. Un cri étouffé monta de sa gorge :

« Aujurius… imbécile d’aristocrate dégénéré… ! »

Le bois gémit sous le choc, mais la légate n’en avait que faire. Le rapport évoquait un possible regroupement des forces royales. Le Roi Tywill ne digérait pas la capture de sa fille. Et Cyra savait que sa légion ne tiendrait pas en terrain découvert face à une contre-offensive dirigée par les dragons de Sylvandell.

Sans attendre, elle fit appeler ses aides de camp. Quelques minutes plus tard, autour d'une carte partiellement déroulée, elle lança ses ordres d’une voix sèche.

« On lève le camp. Dans trois heures. Marche forcée vers les contreforts. »

Une de ses subalternes, la vétérane Marcia, tenta une objection :

« Légate, nos Soeurs sont fatiguées. Et démonter et charger les balistes, les tentes, les réserves… cela prendra au moins cinq heures. Nous risquons d’abandonner des pièces précieuses. »

«On les abandonne. » trancha Cyra, sans même lever les yeux.

Un silence surpris s’ensuivit.

« Ne prenez que le minimum. De quoi marcher et se battre. On brûlera les plans, les cartes, les codes. Je préfère perdre du matériel que de finir dans les mâchoires d’un dragon doré. »

Ses aides hochèrent la tête, serrées, mais convaincues. Cyra, les poings crispés, regardait l’horizon. Elle n’avait plus le temps. Il fallait fuir avant que le courroux royal ne s’abatte sur elles comme un orage d’acier et de feu.

Quelques jours plus tard, dans la salle du trône de Petra

Les portes monumentales de bronze s’ouvrirent lentement, révélant la vaste salle du trône de Petra. Les dalles de marbre noir et d’or luisaient sous la lumière filtrée par les vitraux aux armoiries de Novae Verinis. Deux rangées de statues colossales de rois passés bordaient les murs, fixant de leur regard vide la délégation qui s’avançait. L’air était lourd, empli d’un silence pesant, presque religieux, brisé uniquement par les échos des pas.

Cyra Veluria Tertia avançait d’un pas calme, revêtue d’une toge de ville couleur cendre, brodée de fils rouges sombres aux motifs de foudre et de chaînes. À sa ceinture, aucune arme : elle n’en avait pas besoin. Sa simple silhouette suffisait à susciter crainte et respect. À ses côtés, Altaïra, dans une longue robe d’obsidienne aux reflets huileux, marchait sans bruit, comme une ombre vivante. Son sourire était discret, mais ses yeux pétillaient d’un feu dangereux.

Derrière elles, escortée par quatre Exécutrices, se trouvait Reine Alice Korvander. Les chaînes avaient été retirées. Une toge blanche plissée selon la mode vérinienne lui avait été imposée. Des servantes lui avaient appris à la porter : ce n’était pas un vêtement de déshonneur, mais une cage élégante, tissée de symboles subtils de soumission.

Au fond de la salle, dans un silence glacial,le Roi Cornulius faisait les cent pas devant son trône. Il portait son armure d’apparat : acier noirci gravé d’or et de pourpre, surmontée d’un lourd manteau de drap impérial. Son visage était fermé. Rasé de frais, les tempes grisonnantes, son regard, autrefois incandescent, semblait aujourd’hui plus terni par l’âge que par l’échec.

Quand les trois femmes s’arrêtèrent à distance du trône, il pivota lentement vers elles. Un long silence s’étira. Puis, d’une voix lasse et glacée :

« Enfin… Voilà la fameuse Reine déchue. »

Son regard jaugea Alice de bas en haut. Il fronça légèrement les sourcils, comme s’il évaluait un objet reçu en retard et légèrement abîmé. Il descendit lentement les marches du trône, son manteau traînant derrière lui.

« J’avoue, je l’attendais. Le joyau promis. » Un léger rire, amer. « Une reine captive… à quel prix. »

Il se tourna vers Cyra et sa conseillère.

« L’assaut du pont s’est soldé par un désastre. La Légion, encerclée à Rive-Bougre, a dû battre en retraite. L’artillerie d'Aujurius ? Anéantie. La cavalerie ? Dispersée. Les dragons de Sylvandell ont fait des ravages. Le duc Lamerus me fait pression pour récupérer son fils Aujurius en otage. »

Puis il pivota vers Altaïra :

« Et votre plan, Dame Altaïra ? La conquête de Sylvandell ? L'Empereur qui allait me rapporter gros ? Tout cela pour finir par fuir dans les galeries. DU VIN !»

Des serviteurs accoururent aussitôt. Une cruche précieuse et des verres furent apportés en hâte. Le roi arracha un verre qu’on venait à peine de remplir et l’avala d’un trait. Des verres furent proposés aux trois femmes présentes. Cornulius, cramoisi, reprit :

« Et ce n’est pas tout. Ce vieux Tywill, là-haut, menace à présent de brûler tout le pays. Et maintenant, voilà que nos frontières du sud sont menacées par un certain Ghurran ! Un chef orc qui a réuni une horde à ses bottes ! »

Il tourna les talons, puis jeta, amer :

« Et ironie suprême… Notre seul triomphe, nous le devons à un étranger. Un parvenu, à peine introduit dans nos cercles, qui a fait tomber la Reine lors d’une embuscade chanceuse. Et me voilà contraint de l’élever au rang de Duc d’Aqua Vaudae. Vorskarnus, qu’il se fait appeler. Comme si la construction de toutes ces armes de siège ne m’avait pas déjà ruiné ! »

Il vida son second verre, puis regarda tour à tour les deux femmes :

« Alors dites-moi… engeance du démon… Que dois-je faire maintenant, hein ? Le Parlement m’accable, la plèbe murmure… et la moitié des sénateurs veulent que je leur rende cette précieuse Reine. »

Altaïra s’avança d’un pas fluide, le verre à peine effleuré dans sa main pâle. Sa voix était douce, presque enjôleuse, mais glacée de maîtrise :

« Votre Majesté… n’accordez pas d’importance aux bêlements de ces brebis galeuses. Le royaume n’est pas faible. Il est seulement impatient. »

Cyra ajouta aussitôt :

« Les ateliers tournent à plein régime, Sire. Les balistes sortent par dizaines. Leur portée, leur cadence… tout a été perfectionné. Nous n’avons jamais été aussi prêts. Et ne vous inquiétez pas de cet Orc. Ce ne sont que des bêtes sauvages, et nous savons comment les chasser. »

Altaïra claqua alors des doigts.

Les portes s’ouvrirent une seconde fois. Des serviteurs apportèrent plusieurs amphores scellées. Puis, entre deux d’entre eux, une grande cage en fer fut traînée. À l’intérieur, une créature reptilienne sans ailes, un jeune Drake des montagnes, grognait et tournait en rond, les yeux fous.

Cornulius plissa les yeux, méfiant.

« Qu’est-ce que cette mascarade ? »

Altaïra s’approcha de la première amphore et brisa le sceau. Une odeur fétide, lourde et métallique, emplit l’air.

« Une petite dépense que j'ai faites auprès du Baron, Sire. Pour un feu… particulier. »

Elle plongea lentement sa main dans le liquide noir. Lorsqu’elle la ressortit, une flamme noire courait sur ses doigts, sans les brûler. Elle laissa la flamme danser lentement, silencieuse, comme une langue d’ombre. Tous sentirent un froid surnaturel. Elle se tourna alors vers Alice, un sourire en coin :

« Cela vous rappelle-t-il quelque chose, Reine Korvander ? Ce feu… ne brûle que certaine chair. Il consume l’âme. Les cœurs purs, surtout. »

Un silence pesant s’abattit.

D’un geste, Cyra fit signe à une Exécutrice. Celle-ci s’approcha d’une amphore, y plongea sa lame, et la ressortit en flammes noires. Un murmure d’effroi parcourut les gardes présents.

« Les dragons… » dit Altaïra, « …ne seront plus un problème. Qu’ils approchent d’une ville, et ils connaîtront la morsure du feu spectral. Les balistes sauront accueillir ces bêtes. »

Alors, l’Exécutrice transperça le flanc du Drake à travers les barreaux. La créature hurla. Un cri rauque, abominable, qui résonna contre les parois de pierre. La flamme noire rampa sur ses écailles, étouffant peu à peu sa vitalité. Il se convulsa, se cogna aux barreaux, cherchant un souffle qui ne viendrait jamais. Altaïra et Cyra regardaient la scène avec une satisfaction sombre. La douleur du monstre n’était pas une démonstration. C’était un message. Cornulius, figé, laissa échapper un long souffle. La flamme noire reflétait dans ses yeux fatigués une lueur nouvelle.
Un mélange de crainte… et d’espoir.

Le silence était tombé. Même le souffle mourant du Drake s'était dissipé, ne laissant que l'odeur de chair brûlée et de magie noire dans l'air. Le Roi Cornulius, le regard fixé sur la créature agonisante, demeura un moment debout. Puis, lentement, pesamment, il retourna s’asseoir sur son trône. Son verre vide tomba au sol dans un tintement sec. Ses mains jointes tremblaient à peine. Un silence pesant s’installait de nouveau, lorsqu’Altaïra s’avança.

Ses hanches ondulaient comme un serpent en pleine danse rituelle. Le tissu noir de sa robe fluide semblait glisser sur elle comme une seconde peau. Elle s'approcha du trône, les flammes éteintes sur sa main désormais sèche, et s’arrêta devant Cornulius avec un sourire à la fois espiègle et dangereux. D’un geste doux, elle posa sa main sur son épaule, puis s’assit sans demander l’autorisation, sur ses genoux, comme une amante impertinente. Le roi, d’abord figé, ne dit rien. Il sentait sa chaleur, son parfum mêlé de myrrhe, de sang et de soufre.

Elle approcha ses lèvres de son oreille. Une légère brume d’ombres s’échappait de ses yeux, et l’iris d’Altaïra devint d’un rouge ardent, presque liquide. Son murmure s’enfonça dans l’esprit du roi comme un dard venimeux.

Altaïra, susurrant au roi : « Nul besoin de vous inquiéter, Majesté… »

Ses doigts caressaient distraitement son torse d’armure.

« Vous allez… augmenter les impôts. Pour l’effort de guerre. C’est la seule voie. Si un Duc ose protester, vous le traiterez de parjure, et vous menacerez de lui envoyer la Légion XV. Ce n’est pas une suggestion. »

Ses ongles, discrets, griffèrent à peine la peau sous le col de sa tunique. Et sa main descendit pour caresser son torse.

« Vous allez aussi écrire au roi Tywill. Vous lui proposerez un échange. Sa future Reine, contre le corps de l’Empereur. Rien de plus. Rien de moins. »

Les ombres ondulaient autour du trône, et les torches semblaient vaciller dans un rythme étrange, pulsant au tempo du sortilège.

« Et au Parlement… vous direz qu’une nouvelle campagne arrive. Que chaque cité prépare ses défenses. Que des amphores de feu spectral seront envoyées… ainsi que des ingénieurs pour leur apprentissage. Et que quiconque rechigne à obéir… connaîtra la même fin que le Drake. »

Elle le fixa alors, yeux dans les yeux, et ce fut comme si les pensées du roi s’effaçaient.

Cornulius, d’un ton détaché, presque docile, articula :

« …augmenter les impôts… parjures… Légion XV… corps de l’Empereur… campagne à venir… amphores… ingénieurs… »

Il hocha lentement la tête. Ses rides se détendirent. Il semblait… plus calme, mais aussi moins lucide. Altaïra caressa sa joue.

« Voilà… c’est bien. Vous êtes un bon roi, Cornulius. Un roi utile. Et n'oubliez pas : qu'importe le nombre de mort ou de ville perdue. Ce qui compte, c'est l'Empereur. »

Puis elle se releva sans brusquerie, essuyant son doigt sur le bras du trône. Les ombres retombèrent comme un rideau.

Derrière elle, Cyra ne bronchait pas, affichant u sourire pervers. La magie de la succube lui faisait toujours des choses. Sa main ira caresser les fesses de la Reine Alice, comme par provocation. Elle connaissait cette forme de contrôle, et elle savait qu’Altaïra n’avait pas encore montré toute l’étendue de ses pouvoirs. Les Exécutrices, quant à elles, restaient aussi muettes que des statues de basalte. Quant à Alice, elle avait tout vu. Et tout senti. La magie… l’emprise… la corruption douce.

Pour la première fois, elle comprenait que la guerre n’était pas qu’une affaire de troupes et de dragons. À Petra, la véritable arme… c’était Altaïra.

Le roi s’était retiré dans ses appartements privés, le pas alourdi par l’ivresse… ou la magie. Les lourdes portes du trône se refermèrent lentement dans un grincement de fer et de bois sculpté. Un silence précaire s’installa.

Cyra, toujours droite, son regard d’ébène braqué sur la Reine captive, s’approcha d’un pas mesuré. Sa longue tunique de guerre rouge carmin claquait à chacun de ses mouvements. Elle se pencha légèrement vers Alice. Sa voix, rauque mais maîtrisée, murmura à son oreille avec une sincérité troublante :

« J’aurais aimé que nous reprenions notre conversation… »

Son souffle chaud, trop proche, glissa contre la peau de la Reine.

« …Mais j’ai fait une promesse. Et vous avez une autre destinée. »

Elle resta une seconde de plus, comme pour capturer la peur ou la colère dans les prunelles d’Alice, puis se redressa, et claqua des doigts. Deux Exécutrices, drapées dans leurs capes de cuir noir et d’étoffe pourpre, reprirent leur position aux flancs de la prisonnière. Derrière, Altaïra s’éloignait déjà, la démarche féline, le regard levé vers les vitraux voûtés.

« J’ai des plans à ajuster. Le Baron m’attend… » lança-t-elle d’un ton presque chantant, avant de disparaître dans une volée de marches latérales.

La Reine fut alors guidée à travers les couloirs du palais. Le marbre froid des galeries royales contrastait violemment avec la chaleur humide qui montait peu à peu à mesure qu’elles descendaient.

Ce qui troubla Alice, plus encore que l’architecture étrangère ou les runes anciennes gravées dans les murs, fut la présence nombreuse et décomplexée des femmes de la Légion XV dans les couloirs. Aucune autre bannière que celle de Cyra ne semblait flotter dans ces ailes du palais. Des légionnaires circulaient, détendues, en petits groupes. Certaines étaient armées, d’autres non. Plusieurs portaient des toges ouvertes sur des corps puissants, cicatrisés, tatoués de symboles démoniaques ou martiaux.

La captive royale comprenait soudain que la Légion XV était chez elle, ici. Plus qu’une force militaire… une caste. On l’amena jusqu’à une lourde porte de bronze ouvragée, dont les motifs représentaient des femmes nues traînant des hommes enchaînés dans des brasiers. Au-delà, une salle de bains privés s’ouvrit. Vaste, voûtée, creusée à même la roche, où des vapeurs sulfureuses s’échappaient de bassins d’eau chaude alimentés par une source naturelle.

Des Narseïdes étaient déjà là. Certaines nues, d’autres en sous-vêtements rituels. Elles se prélassaient, fumaient, échangeaient des rires rauques. Une d’entre elles chantait une complainte de guerre ancienne. Toutes se retournèrent à l’arrivée de Cyra et de la Reine. Et un silence se fit. Pas hostile. Pas moqueur. Mais excité.

Cyra, avec un sourire, recula, et après un clin d'oeil aux Orcs, elle quitta la pièce en fermant la porte dorée. Laissant Alice dans ces bains, avec comme seule compagnie les Narseïdes et les Executrices.

Les Exécutrice restèrent les seuls armées, veillant sur la Reine. L’eau était chaude, parfumée d’herbes étranges et de résine.

Dans le fond de la pièce, une Narseïde musclée, complètement nue, s’approcha d’Alice et, avec un sourire narquois, l'interpella :

« Détendez vous, Reine Korvander ! Tu es parmi des femmes. Il n’y a pas de honte ici ! Ne vous inquiétez pas ! J'ai promis à la Légate de pas vous manger !»

Des rires rauques éclatèrent dans les vapeurs. Kar'Zisha regardaient Alice avec une avidité non dissimulée. Sa peau vert feuille, marqué par les combats d'arène, soulignait sa musculature, ses pectoraux et muscles saillant, alors qu'elle faisait profiter de la Korvander de sa nudité.

"Moi, c'est Kar'Zisha ! Chuis la nouvelle patronne des Narseïdes. Y a votre daron qu'a fait un gros SPROTCH à la boss !"

Elle ria grassement, et ses camarades rièrent de bon coeur elles aussi. Puis, avec un regard plus pervers, elle posa ses mains sur la toge de la Reine, pour la dénouer, et faire tomber le peu de tissu sur elle.

"Vous devez être fatiguée, après tout ce voyage...Faut avouer qu'on a forcé la marche ! La légate elle est dure là dessus...Et vous devez avoir besoin d'un bon bain ! Venez avec moi, je vais vous aider..."