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A-t-on seulement la moindre idée de leurs revendications ?
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Les prisonniers que nous avons fait lors des premiers assauts sont de véritables fanatiques. De leurs propos confus, il en résulte une chose claire… Les Olympiens nous ont déclaré la guerre.
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C’est impossible ! »
Passé la surprise, il fallait toutefois réagir. Le Palais Impérial était en ébullition ces derniers jours. Depuis les balcons et les tours de défense du Palais, la ville brûlait. Tout autour de la ville, des camps avaient jailli, et, chaque jour, les forces olympiennes ne cessaient de se gonfler. Ils avaient bloqué la ville, et le dirigeant olympien avait commencé par les empêcher de communiquer avec l’extérieur. Quelques espions avaient réussi à s’infiltrer dans les fauconneries du Palais pour tuer les oiseaux voyageurs, empêchant ainsi les fauconniers d’alerter le reste de l’Empire. Quant aux magiciens, ils avaient vite déchanté. Que ce soit les miroirs-jumeaux, les orbes de communication, quelque chose perturbait les flux magiques reliant la ville à l’extérieur. La capitale était donc coupée du monde. Évidemment, des cavaliers avaient réussi à s’enfuir pour prévenir le gros des Légions impériales, mais, le temps que celles-ci arrivent, la capitale devait faire face.
Conscients qu’ils manquaient de temps, les forces olympiennes oppressaient les locaux. À l’aide de trébuchets, de catapultes, ils harcelaient la ville, envoyant des boulets enflammés, des carcasses empoisonnées. Plusieurs raids avaient réussi à surprendre les défenseurs, donnant lieu à des escarmouches dans les rues. Pour ne rien arranger, plusieurs quartiers de la ville faisaient l’objet d’une âpre bataille contre des bataillons de squelettes infernaux, et, régulièrement, un terrible œil divin venait survoler la ville, s’accompagnant d’un ciel violacé des plus sinistres.
Pour la puissante Samara, il ne faisait aucun doute qu’une magie supérieure était à l’œuvre. Les Olympiens avaient finalement décidé d’attaquer, et ils avaient bien agi. En venant depuis l’est, ils avaient traversé l’Empire comme un coup de couteau dans du beurre. Peu de garnisons étaient présentes, et abritaient souvent des soldats démobilisés, ou en fin de carrière. Les principales troupes étaient à l’ouest, et étaient menés par le redoutable
Maréchal Coehoorn var Emreis. Tout le monde attendait désespérément son arrivée, mais, en attendant, la ville devait se défendre par elle-même.
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Toutes leurs tentatives de percer nos murs ont échoué. Les réfugiés s’agglutinent dans l’enceinte du Palais, mais certains quartiers sont ravagés.
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Vous ne nous apprenez rien. Quel est le plan de bataille ?
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La priorité est de maintenir les défenses le long des remparts externes. On ne peut pas les laisser rentrer dans la ville, pas tant que l’évacuation des citoyens et des biens n’est pas terminée. »
Samara n’était pas membre du Conseil, mais elle était tout de même suffisamment influente pour assister à cette réunion de crise. Celle-ci était menée par le frère de Coehoorn, le deuxième homme de l’Empire, et considéré par beaucoup comme le véritable Empereur,
Emhyr var Emreis. Lui et les autres se regroupaient, non pas dans la Salle du Conseil, mais dans la plus grosse caserne du Palais, en compagnie de généraux, d’aristocrates, et au milieu des mouvements précipités des soldats.
À côté de lui, il y avait le
Comte Alucard Nostrom, un redoutable vampire. Le clan Nostrom était l’un des plus puissants clans vampiriques de l’Empire. Les perturbations magiques des Dieux n’avaient pas empêché Alucard d’avertir les siens, grâce à ses chauves-souris et à ses loups. L’arrivée des troupes du clan Nostrom était imminente, mais, dans cette attente, Alucard disposait déjà de
redoutables Lycans. Les forces de Nostrom étaient dans les rues de la capitale, repoussant les monstres, s’assurant de la sécurisation des citoyens.
Samara reconnut également
Avacyn. Aussi surnommée «
La Purificatrice », elle était une Ange très particulière, car, sans être rejetée encore par les Cieux (ce qui se voyait à ses ailes blanches), elle se tenait proche des Mijakiens. D’après ce que Samara avait compris, Avacyn était initialement un agent de liaison entre Lumen et Mijak, résultant de l’époque où, avec l’Eld, les trois États avaient fondé l’alliance. Elle agissait aussi sur Terra pour supprimer les traces résiduelles des Grands Anciens.
Accompagnant également Emhyr, la
Duchesse Isabelle Bloodwood avait assuré Emhyr que son mari se déploierait rapidement. Comme bien d’autres familles impériales de haute lignée, les femmes étaient à la capitale, tandis que les hommes restaient dans leurs domaines, afin de former les armées, chacun étant ainsi libre de multiplier les amants sans crainte de jalousie. Bloodwood avait du sang de démon dans le corps, et, sous son apparence belle, se dissimulait une rose fatale.
Proche de Bloodowood, la
Duchesse Anastasia Janbert représentait également la puissante aristocratie mijakienne. Samara, qui avait déjà eu l’occasion de coucher à plusieurs reprises avec elle, savait que Janbert faisait partie des domaines touchés. Le duché de Janbert se trouvait à l’est, mais la possible mort de son mari, loin d’attrister Anastasia, semblait au contraire l’enchanter.
«
Et qu’en est-il de l’Académie impériale ?
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Celle-ci tient toujours, et recueille tous les jours davantage de réfugiés. »
Ce n’était pas Samara qui avait répondu, mais une autre magicienne,
Miria. Amante régulière de Samara, Miria était aussi dangereuse au lit qu’au combat. Elle était l’un des rares membres totalement humains présents autour de la table.
Emhyr passait les troupes en revue. Tout le monde savait que la capitale impériale comptait, pour sa défense, sur plusieurs forteresses se situant autour de la capitale. Les Olympiens avaient attaqué celles-ci, et en avaient pris une bonne partie. Aux dernières nouvelles, d’autres tenaient toujours. Emhyr voulait utiliser les quelques bastions encore intacts pour pouvoir assurer l’arrivée des renforts. Il savait que Coehoorn était en marche.
«
Nos espions signalent également que Lumen rencontre des problèmes. Ce n’est donc pas un problème exclusivement mijakien. Ange Avacyn, un avis sur la question ? Je croyais que les Cieux ne toléraient pas ce genre d’actions.
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Les Dieux sont réputés pour n’en faire qu’à leur tête, a fortiori les Olympiens. Jadis, les Anges assuraient une fonction arbitrale entre les différents panthéons et entre les humains. Mais, après le Grand Conflit, ce n’est plus le cas. Tout ce que je peux vous dire, c’est que l’ordre d’attaquer les royaumes terrans ne vient pas du Conseil des Archanges. »
Difficile de dire si ces explications suffirent à contenter Emhyr, mais il enchaîna sur autre chose.
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Les Olympiens ont reçu des renforts. Ces foutus canons mettent nos murs à rude épreuve.
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Que faisons-nous pour cela ? s’enquit Samara.
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C’est précisément pour ça que je vous ai convoqué, Samara. Fort-Lapointe dispose de régiments de cavalerie que je compte envoyer dans un raid pour attaquer les canons. Je compte sur les magiciens pour les aider. »
Samara acquiesça.
«
Les canons sont situés à un endroit spécifique de la carte. Nous allons donc mener une attaque depuis l’intérieur de la ville. Les magiciens feront partie de cette attaque, mais la véritable attaque viendra de Fort-Lapointe. Les cavaliers profiteront de la bataille pour attaquer les canons.
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Mais je croyais que Lapointe était assiégée…
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C’est exact, mais Lapointe dispose d’une poterne discrète par laquelle les cavaliers pourront sortir. »
Fort-Lapointe faisait partie de ces forts limitrophes à la capitale. Situé dans un col montagneux, Lapointe disposait d’une solide protection naturelle, mais également de plusieurs galeries souterraines partant sous le fort. Voilà qui changerait les pensées de Samara, qui se concentrait depuis un certain temps à tenter de rompre le sortilège magique qui avait immobilisé le harem Warren. Un véritable mur magique s’était abattu autour, qu’elle entendait bien faire sauter.
Mais, en attendant, elle comptait bien participer à l’effort de guerre contre ces foutus canons…