The Multiversity

La situation avait vrillé en une minute new-yorkaise. Désormais, les monstres affluaient dans le pont de commandement ! Des monstres morts, des zombies monstrueux qui n’avaient rien à envier aux zombies de Romero. D’abominables carcasses modifiées, des mutants monstrueux qui s’étaient réveillés par le biais d’un mystérieux signal émanant de cette planète. Benjamin suggéra d’ailleurs de quitter ce vaisseau au plus vite, et demanda à Jessica si elle pouvait générer des combinaisons spatiales. Jessica devait réagir vite. Fuir dans le vaisseau ne semblait pas être une si bonne idée que ça, mais, maintenant que le vaisseau s’était réactivé, les moteurs s’étaient eux aussi relancés, rapprochant le vaisseau de l’orbite de la planète.

« LANTERN CRUZ, LE VAISSEAU VA S’ÉCRASER SUR LA PLANÈTE. »

Jessica pesta intérieurement, et généra donc deux combinaisons.

« Il faut que vous repreniez votre forme humaine, la combinaison risque de ne pas être étanche sinon ! »

Tout en puisant encore dans les ressources de sa Batterie, Jessica recouvrit Benjamin d’une combinaison souple avec un jetpack intégré. Elle s’envola, utilisant le jetpack de la combinaison, et déploya une onde de choc pour repousser les monstres, avant de tirer sur les énormes baies vitrées du pont de commandement.

*Attends, tu fais peut-être une énorme…*

Les vitres explosèrent violemment, déclenchant un appel d’air qui projeta les Nécromorphes à l’extérieur. Ils hurlèrent en se débattant dans tous les sens, tandis que des alarmes d’urgence s’enclenchèrent, et que des panneaux de sécurité automatiques s’abaissaient à toute allure.

« Par là, vite ! »

Jessica bondit vers le trou, et généra des tenailles avec son Anneau pour retenir les panneaux de sécurité. Ceux-ci grincèrent, forçant sur les tenailles de l’Anneau, et, quand les tenailles se brisèrent, le duo réussit à sortir dehors. Une fois à l’extérieur, Jessica soupira, mais un tentacule s’enroula brusquement autour de son cou, et la tira en arrière, vers un Lurker. Jessica se concentra, et tira un rayon vert qui explosa contre le Lurker, calcinant ce dernier.

« Bordel, ces saloperies survivent dans l’espace !
-  LES NÉCROMORPHES SONT DÉJÀ MORTS, LANTERNE CRUZ, ILS N’ONT PAS BESOIN DE RESPIRER.
-  Okay, okay… Bon, éloignons-nous… »

Jessica vola encore un peu. Elle entreprit ensuite de contacter de nouveau Oa, maintenant qu’elle n’était plus à l’intérieur du vaisseau. L’Anneau s’illumina, et commença à établir une connexion… Quand la lumière verte de l’Anneau devint soudain rouge. Jessica hurla alors en sentant quelque chose lui vriller le cerveau, tandis que l’Anneau qu’elle portait était parasité par le signal émanant de cette planète :

« »

Jessica secoua la tête, sentant des flashes dans sa tête, des images indescriptibles et indiscernables. L’Anneau tremblait dangereusement, vibrant sur tout son corps… Et un Leaper en profita pour bondir sur Jessica, l’envoyant heurter le toit du vaisseau en perdition. Cela eut au moins pour effet de la réveiller, mais elle tremblait nerveusement, de grosses gouttes de sueur dégoulinant de sa tête, tandis que des Nécromorphes se rapprochaient d’elles… Quitter ce vaisseau n’allait pas être si simple !

Ce n’était absolument pas prévu de revenir sous sa forme humaine. Est-ce que Biotech aurait suffisamment puisé dans les ressources du vaisseau pour guérir leur corps en commun ? Benjamin n’avait plus qu’à espérer que ça suffirait. Tout comme il lui fallait remettre sa vie entre les mains d’une rookie complètement dépassée par les événements. Il maugréa dans sa moustache et… abandonna la lutte. Il pouvait ronchonner tout son saoul : ça ne ferait pas disparaître les morts-vivants.

« Ok ! Mais tu n’as pas intérêt à foirer ton coup. C’est ma vie que tu as entre tes mains maintenant ! »

Biotech avait fait du bon boulot. La blessure était supportable, suffisamment refermé pour se permettre un petit voyage à travers le « rien ». Mais Benjamin ne se faisait pas d’allusion. Un bon combattant verrait sa blessure et n’hésiterait pas à frapper au-dedans. Il fallait vite se poser sur cette planète !

Il était tout de même surpris. Il ne s’attendait pas à autant de liberté. Benjamin s’était déjà vu comme une sorte de poids mort. Une sorte de valise vivante relié par une sorte de cordon ombilical vert à Jessica. Ô surprise, il avait une liberté avec cette combinaison spatiale agrémenté d’un jet-pack.

« Bordel ! »

Les morts-vivants attaquaient dans le « vide » ! Jessice en faisait de nouveau les frais. Heureusement qu’il était plutôt libre de ses mouvements, sinon il aurait mal vécu de se faire bringuebaler sans pouvoir se défendre. Sauf que là… là il était sous forme humaine… dans l’espace… sans équipements et sans armes… La situation n’était pas bien meilleure qu’escomptée. De là à ce que même ses paroles soient absorbées par les étoiles et le condamne à zéro communication avec la Green Lantern…

« BORDEL ! Merde merde ET MERDE ! »

Rien de bien intellectuel. Mais Benjamin avait besoin de se vider d’une certaine pression avant d’entrer en action. Oui, il n’était pas sous forme alien. Oui, il n’était pas armé pour tirer sur les abominations. Mais ça ne signifiait pas qu’il ne pouvait rien faire. Ce n’était pas sa première virée dans l’espace. Après quelques mouvements saccadés et quelques rapides essais, il s’imprégna du système de jet-pack créer par l’Anneau.

La suite ? Benjamin fit étalage de ses compétences en vol spatial. Il fonça vers Jessica qui… semblait souffrir ? Lutter ? Il n’en savait rien mais il devait la tirer de là. Il esquiva habilement la queue du Leaper et attrapa la main de Jessica. Contre-instinctivement, il se rapprocha du vaisseau. PUTAIN ! Un de ces bébés flippants. Virevoltant dans le vide, entraînant Jessica dans ce roulé-boulé spatial : ils esquivèrent. Puis Benjamin put prendre appui sur la carcasse métallique (craignant un instant de sentir le froid mortel à travers ses semelles…) et se donner une bonne impulsion pour ruer vers la planète.

« Jessica ! Tu m’entends ? Qu’est-ce qu’il t’arrive ? Tu n’as pas intérêt de me dire que tu sues à grosses gouttes parce que ton pouvoir va te lâcher d’un instant à l’autre ! Tu as intérêt à tenir où je te ferai revenir à la vie pour te tuer de mes propres mains ! »

C’était probablement déplacé. Mais Benjamin venait effectivement de faire une plaisanterie plutôt sombre.

« Jessica… »

Cette voix rieuse, sardonique, et cruelle… Elle l’emplissait de terreur, la ramenant au statut d’une petite fille terrorisée dans sa chambre, recluse en craignant que le fantôme ne sorte de sous le lit pour l’emmener dans un monde de cauchemar. C’était son studio, celui où elle avait vécu pendant plusieurs mois en refusant de sortir, et en entendant à chaque fois la Voix qui l’appelait.

« Jessica… Jessica… »

Devant elle, le Monolithe se dressait. Une structure oblongue et biscornue au milieu d’un paysage aride, fait de montagnes édentées autour d’un immense cratère, ressemblant aux dents monstrueuses d’une planète carnivore s’apprêtant à se refermer sur vous.

« Tu dois revenir, Jessica… Résiste à l’appel… »

Elle le voyait, immense et massif, le Monolithe, tandis qu’une comptine de son enfance résonnait à travers les haut-parleurs du vaisseau, déformée par une voix féminie triste et solitaire :

• Twinkle twinkle little star.
  How I wonder what you are.
  Up above the world so high.
  Like a diamond in the sky.
  Twinkle twinkle little star.
  How I wonder what you are

Jessica rouvrit alors les yeux, et croisa le regard de Benjamin, à travers la combinaison.

« Benjamin ! »

Elle se releva alors, et examina son Anneau. Celui-ci était entré en « mode de verrouillage d’urgence ».

« Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Je… »

Tout était un peu confus dans sa tête. Et, pour commencer, elle ignorait que l’Anneau pouvait entrer en « verrouillage d’urgence » ! Leurs combinaisons étaient fort heureusement toujours là. Jessica essayait de comprendre quand elle vit l’ombre d’un Nécromorphe au-dessus d’eux. Ils étaient à l’extérieur du vaisseau, dans une sorte d’alcôve métallique. Jessica pointa son Anneau vers la créature, mais, si l’Anneau se mit à scintiller, rien n’en sortit ! Et, avant qu’elle ne puisse comprendre, un tentacule jaillit d’une trappe d’aération derrière eux, et s’enroula autour de son cou, avant de la tirer en arrière. Elle fila à travers le conduit, heurtant des parois, avant de tomber dans un couloir. Le long tentacule la relâcha provisoirement. Jessica secoua la tête en se relevant, voyant autour d’elle une sorte de curieux mucus, comme si un énorme champignon avait poussé sur les parois, avec ici et là de grosses pustules jaunes fluorescentes. Le tentacule la cherchait encore. Jessica se mit à courir en arrière. Elle consulta encore son Anneau, et vit que ce dernier était en train de purger ses systèmes.

*Comment est-ce possible ?*

L’Anneau avait été piraté par un signal alien… Jessica était surprise d’apprendre qu’il existait une technologie capable de corrompre la technologie extrêmement avancée des Gardiens. Elle ouvrit une porte latérale, et débarqua dans une grande pièce avec des bancs renversés et des tables brisés un peu partout…

« Mais c’est pas vrai, bordel de merde ! »

Quel était la taille du piège ? Benjamin avait maintenant l’impression de lutter, non pas contre quelques créatures, mais carrément contre la carcasse entière du vaisseau. Un vaisseau qui aurait été parasité par ces créatures pour former une sorte de super mort-vivant techno-organique il-ne-savait-trop-quoi. Bref, un sacré monstre ! Une sorte de mimique de l’espace nourri par la Faucheuse.

« Jessica, j’arrive ! »

Benjamin avait accusé un temps de retard. D’abord par la surprise. Ensuite par le doute. Oui, il n’était pas un super-héros. Foncé dans une trappe d’aération pour aller sauver les miches d’une quasi-inconnue n’était pas un réflexe qui l’obligeait à ruer et mettre sa vie dans la balance. Mais il était obligé d’avouer que ses chances de survie grimpaient avec cette pauvre fille traumatisée et nantie d’un pouvoir trop grand pour elle. Ça lui rappelait ses débuts avec l’Omnitrix dans un certain sens…

Evidemment qu’une trappe d’aération ne faisait pas deux mètres de hauteur. Et, évidemment que ce n’était pas aussi nickel que dans les films. Bordel que c’était petit et sale. Mais le principal problème, c’est que ça réveillait la blessure récente. Biotech n’avait pas réussi à complètement se soigner via le hacking du vaisseau. Grognant, grommelant, Benjamin finit tout de même par arriver dans le même couloir de Jessica.

« On dirait qu’on a trouvé notre repas. Dommage, je ne suis pas fan des champignons… »

Jessica n’entendit pas la mauvaise plaisanterie. Elle fuyait un tentacule qui la poursuivait. Ne réfléchissant pas, Benjamin donna un violent coup de pied dans une paroi qui avait été transpercé par un petit astéroïde. Résultat, il était désormais équipé d’une espèce de feuille A4 de métal aux contours aiguisés. Ce n’était pas ergonomique mais ça lui permit de trancher ce qui poursuivait sa coéquipière de mauvaise fortune.

« HEY ! Tu peux arrêter de courir ! »

Une fois qu’il l’eut rattrapé, il saisit de sa main bourrue la main féminine qui était nantie de l’Anneau.

« C’est quoi cette camelote ? A moins que ce soit toi qui sois mauvaise ? Ce truc est censé augmenter nos chances de survie. Et j’ai surtout l’impression que ça s’amuse à te mettre des bâtons dans les rues. Tu es certaine qu’il n’y a pas une chose au-dedans qui a des desseins malveillants ? PUTAIN ! Désolé. L’insulte n’est pas nécessairement contre toi. C’est juste que tout ça m’énerve. J’ai envie de faire cramer cette champignonnière et de faire exploser cette carcasse à coups de TNT. »

Ne pas paniquer… Ne pas paniquer… Reste calme, sereine, car l’Anneau tirait aussi son pouvoir de la Volonté de son porteur. Alors, la règle était simple : il fallait juste ne pas…

*BORDEL !*

C’était incontestablement plus facile à dire qu’à faire ! Jessica était sous tension constante, tandis qu’elle découvrait ce qui lui semblait jusqu’à présent impossible : des limitations à son Anneau. Il devait se réinitialiser, sans doute pour retrouver ses capacités, mais, pendant ce temps, elle faisait face à ces espèces de tentacules poussant de ce mucus puant et sans doute infectieux. Jessica se déplaçait donc, mais, sans son Anneau, elle redevenait la simple et frêle femme qu’elle n’avait finalement jamais cessé d’être. Les choses auraient pu tourner court, car le tentacule l’attrapa à la cheville. Elle tomba au sol, et le tentacule commença à la tracter en arrière. Jessica heurta les parois, avant que Benjamin ne débarque en tenant à la main une arme improvisée, à savoir un morceau de mur, une énorme plaque de métal aux rebords tranchants comme du rasoir. Il planta l’arme sur le tentacule, sectionnant ce dernier. Le reste du tentacule se replia précipitamment.

Au sol, Jessica était encore secouée, et, quand elle se releva, elle n’eut même pas le temps de reprendre son souffle ou de parler à son sauveur que celui-ci laissa s’exprimer sa tension. Il désigna son Anneau comme de la « camelote », et Jessica fronça les sourcils, avant de bander ses muscles, sans même relever le fait qu’il avait dit qu’elle était « mauvaise ».

« Commence par me lâcher ! »

Elle récupéra sa main, et contempla son Anneau.

« Le signal qui émane de cette planète… Il a parasité l’Anneau. Cet Anneau perçoit lui aussi un signal, il n’est que le relais d’une énergie qui émane de ma Batterie, laquelle se recharge depuis la Batterie Centrale d’Oa. Quand j’ai voulu appeler les renforts, les deux signaux se sont croisés, ça a grillé l’Anneau. Il est en train de se réinitialiser. D’ici là, il vaut mieux faire profil bas et… »

Les parois se mirent alors à dangereusement trembler, vibrant sur place. Jessica soupira, en constatant que les monstres de ce vaisseau n’allaient sûrement pas lui laisser l’occasion de reprendre ses esprits. Ce serait trop facile, sinon ! Tandis qu’elle y songeait, derrière eux, d’autres monstres se rapprochaient, descendant un escalier qui menait à leur couloir, les échos de leurs grognements et le frottement de leurs griffes acérées contre les parois résonnant jusqu’aux oreilles de la Green Lantern…

Benjamin quitta Jessica du regard pour observer les parois trembler. Son arme d’infortune était terriblement peu pratique à tenir. Ca demandait une constante pression dans les doigts. Qui plus est, une constante attention pour ne pas se retrouver du côté tranchant et perdre ses doigts.

Il y avait désormais du bruit au loin. Du bruit qui se rapprochait. Benjamin grogna une nouvelle fois dans sa barbe alors qu’il portait le regard au loin, en direction de l’escalier. Ils avaient encore une poignée de seconde avant de faire face à une nouvelle vague cauchemardesque.

Il fit alors quelque chose qui allait probablement augmenter la frustration de Jessica d’un nouvel étage : il lui saisit à nouveau le poignet de sa main.

« Tu sens ma main autour de ton poignet ? Tu sens à quel point je ne le prends pas avec douceur ? Bien ! Concentre-toi là-dessus. Repense à tout ce que je t’ai dit et qui t’a énervé. Voilà ! Tu la sens cette énergie en toi. Ca te dévore. Ce n’est pas sain. Mais tu sais quoi ? Sans ton précieux Anneau, c’est la seule source de pouvoir sur laquelle tu puisses compter. »

Est-ce que Benjamin connaît cette division des Lanterns qui concentre leur pouvoir sur la colère. Non. Il ne connaît pas ces Red Lanterns. Il ne sait donc pas à quel point son discours pourrait être mal perçu. Que ce soit de l’injure, de la traîtrise ou une façon de la pousser sur la mauvaise pente.

« Tu n’es pas faible, Jessica Cruz. Même sans ton précieux Anneau, même avec la panique qui conquiert ton système, tu parviens encore à réfléchir et m’expliquer des trucs. Mais en attendant, et il va falloir attendre, on doit agir. Alors tu arraches un morceau de ce maudit vaisseau et tu en fais une arme. »

Il la tira dans la direction inverse des escaliers d’où se rapprochaient les grognements et le supplice du métal sous les incisions des griffes. Il l’approcha d’une partie du vaisseau qui n’était pas sous l’influence de l’espèce de champignon et lui ordonna silencieusement de faire un choix. Un morceau de plaque. Un morceau de conduite. Peu importait, mais qu’elle prenne quelque chose.

« Est-ce que tu sais où nous emmener ? Est-ce que tu sais où on pourrait se retrancher le temps de récupérer de nos blessures ? »

Il se rapprocha d’elle et serra encore un plus fort sur son poignet entravé.

« Ou est-ce que je dois faire le pari d’une dernière transformation alien pour tenter un voyage dans le vide jusqu’à cette planète qui est parvenue à te battre à distance ? »

Benjamin essaya de l’encourager. Jessica ferma les yeux en rougissant, et elle dut bien admettre que ses mots d’encouragement lui allèrent droit au cœur. Quand elle rouvrit les yeux, elle hocha la tête.

« On s’éloigne, vite. »

Les Nécromorphes se rapprochaient rapidement. Jessica n’avait pas vraiment répondu à ce que Benjamin lui avait demandé, car elle n’avait aucune réponse à lui formuler. Sortir d’ici ? Faire un trou dans ce vaisseau ? Où se cacher ? Jessica ne faisait que naviguer à vue depuis qu’elle était dans ce vaisseau ! Elle courut donc le long du couloir, ses pieds heurtant la surface molle. Elle allait là où le tentacule avait voulu la traîner, et sentit son Anneau fourmiller un peu. Elle se retourna alors, et parvint, en se concentrant, à tirer une décharge d’énergie qui frappa le plafond, et fit s’effondrer le plafond derrière eux, bloquant les Nécromorphes. L’un des monstres fut même écrabouillé sous les débris.

« Bon… Vous avez beau être insupportable, Benjamin, vous savez parler aux femmes ! Malheureusement, l’Anneau continue à se recharger… Allons voir par là, on trouvera bien un endroit où se cacher. »

Ils arrivèrent jusqu’à une porte donnant sur une grande coursive. C’était un ancien quartier d’habitation, et, alors qu’ils marchaient, Jessica entendait des accents de musique. Elle fronça les sourcils, se demandant si elle n’était pas en train d’avoir des visions. Elle continua à se déplacer, jusqu’à rejoindre une sorte de mezzanine surplombant un grand hall dévasté. Il y avait des traces d’impact, et un énorme trou au plafond, témoignant de l’intensité des combats.

« On devrait pouvoir se cacher ici, dans l’une de ces pièces… »

Jessica descendit les marches menant à la place centrale. D’anciens écrans plats gisaient au sol. Jessica ouvrit une double porte sur la gauche, et arriva dans un autre dortoir. Elle ouvrit une nouvelle porte, et fit irruption dans un studio minuscule… Où elle eut une vision.

*Jessica…*

Jessica sursauta en se retournant. La voix venait de son dos, c’était celle de Volthoom ! Mais, derrière elle, il y avait Benjamin.

« Je… Je commence à délirer… »

Elle secoua la tête, et rentra à l’intérieur de la petite pièce. Elle faisait la taille d’une petite cellule, avec un lit superposé et une table devant. Les colons ne devaient s’y rendre que pour dormir. Un écran artificiel se tenait devant, capable de générer de fausses images de paysages, ou des messages. Au moins, les Nécromorphes semblaient avoir perdu leur trace, mais le vaisseau continuait sa route vers Tau Volantis.

« Vous… Vous avez déjà géré des trucs de ce genre ? »

Ça ressemblait à une question piège. Si Jessica avait avoué plus tôt que Benjamin n’était pas complètement insupportable, ce n’était toujours une franche et belle camaraderie entre les deux. Alors cette question, à savoir s’il avait déjà géré des trucs de ce genre ? Est-ce qu’elle parlait d’elle-même et ses délires ? Ou de devoir survivre dans une sorte de cimetière volant ? Les deux se valaient. Mais il décida de prendre l’option la plus sure.

« Ouais. En fait, je dirais même qu’à mon niveau, ce n’est pas normal de se retrouver dans autant de bourbiers. Ce devrait être l’aventure, enfin la mésaventure d’une vie. Moi, j’en ai vécu un sacré paquet de vies si on devait compter comme ça. »

Benjamin décida de s’asseoir sur le lit. Celui en-dessous. Il n’avait pas envie de faire une acrobatie avec sa blessure qu’il traînait au bide depuis le début de cette emmerde dans les étoiles.

« Le plus malheureux ? On s’y habitue petit à petit. Comme ces militaires qui s’habituent à tuer durant les missions. Enfin, on dit s’habituer. Mais c’est une fausse vérité. Si on ne prend plus les chocs dans la gueule dès qu’on appuie sur la détente, pour l’exemple, les effets s’accumulent et squattent une partie de votre tête. De votre âme, bref, peu importe en ce qu’on croit. Pour reprendre les militaires, après, il y a les stress post-traumatiques. De belles merdes qui flinguent une vie. »

Ses yeux descendirent sur l’Omnitrix et il ajouta :

« Et on passe tous par là… »

Ses yeux se brouillèrent. Les souvenirs affluaient. Les premiers voyages avec Grand-Père et son insupportable de sœur de Gwen. Puis les années qui passent. Les incroyables aventures. Les rires. Et… les premières morts.

Benjamin plaqua sa main devant ses yeux. Pour donner bonne allure, son pouce et son majeur se grattèrent les tempes. Comme s’il faisait un effort pour réfléchir. Alors qu’en réalité, ses yeux se brouillèrent de l’humidité de la tristesse…

Puis il secoua la tête, se releva et fixa l’écran éteint. L’idée de redevenir Biotech et fusionné avec cet appareil dormant était tentant. Tant pour la recherche d’informations que pour continuer le processus de réparation de son bide blessé.

« Bref ! On est donc enfermé dans cette petite cellule. J’aurai presque envie de te conseiller de piquer un somme. Ce n’est pas rassurant de t’entendre dire que tu délires. Et puis, qui sait, ça accélèrerait peut-être le processus pour ton Anneau ? »

Jessica avait probablement rêvé… Benjamin lui expliqua qu’il était habitué à ce genre de choses, avant de parler de militaires. Il suffisait de lui lâcher un peu la bride pour qu’il parle beaucoup. Jessica ne l’écoutait pas vraiment, mais entendre une voix la rassurait. Cette cellule était petite, très petite… Elle n’était pas particulièrement claustrophobe, plutôt agoraphobe, mais elle se disait que, si ces monstres débarquaient, ils seraient dans de beaux draps. Cependant, si l’Anneau n’avait pas pu les détecter initialement, ils faisaient maintenant du mouvement. Cela commença donc à lui donner une idée. Elle observa encore son Anneau. Benjamin proposa qu’elle dorme pour qu’elle reprenne des forces.

« Malheureusement, nous manquons de temps. Ce vaisseau a été légèrement décalé de là où il était, et il est attiré par l’orbite de la planète. Mais, vu son état, les trous partout, l’absence de boucliers, et la coque fissurée… Il risque surtout de fondre en plein vol. On doit sortir de là avant. Ensuite, on rejoint cette planète, et on pourra ensuite partir.
-  NÉGATIF, LANTERN CRUZ. »

Jessica fronça les sourcils. L’Anneau avait parlé à haute voix, de sorte que Benjamin avait aussi pu l’entendre.

« L’INTÉGRITÉ DE MON ANNEAU N’EST PLUS GARANTIE. J’AI ÉTÉ PARASITÉ PAR UN SIGNAL EXTERNE. LES PROTOCOLES DE SÉCURITÉ D’OA SONT FORMELLES, VOUS NE POUVEZ PAS ME RAPPROCHER DE LA BATTERIE CENTRALE D’OA, NI FAIRE UN SAUT DANS L’HYPER-ESPACE.
-  C’est une blague ?!
-  IL FAUT APPELER UNE ÉQUIPE DE GREEN LANTERNS DEPUIS LA SURFACE DE CETTE PLANÈTE. ISL VIENDRONT AVEC UN ANNEAU DE REMPLACEMENT, ET POURRONT ME SÉCURISER.
-  Pourquoi je ne peux pas voyager en hyper-espace ?
-  LE VOYAGE EN HYPER-ESPACE CONSISTE À FRANCHIR LES LIMITES DE NOTRE DIMENSION, À VOYAGER ENTRE LES DIMENSIONS, ENTRE LE TEMPS ET L’ESPACE. HABITUELLEMENT, CE TYPE DE VOYAGE EST SDANS DANGER, MAIS, AVZEC LE PARASITAGE DONT J’AI ÉTÉ VICTIME, SI LE SIGNAL PIRATE DEVAIT À NOUVEAU ÊTRE ÉMIS EN VOL SUPRALUMINIQUE, VOUS RISQUERIEZ D’IMPLOSER. »

Une hypothèse qui n’était effectivement guère séduisante. Jessica se pinça les lèvres. L’Anneau pouvait maintenant parler, en tout cas, signe qu’il allait mieux.

« Et qu’est-ce que c’était que ce signal ? D’où émanait-il ?
-  CE SIGNAL A LA MÊME FRÉQUENCE QUE LE SIGNAL QUI A RÉANIMÉ SES CORPS. IL ÉMANAIT DE LA PLANÈTE.
-  Peut-iul affecter les êtres vivants ?
-  VOUS ÊTES SENSIBLES À CETTE ONDE COMME À N’IMPORTE QUELLE ONDE, LANTERN CRUZ. »

Cette voix qu’elle avait entendue… Venait-elle de ce signal ? Elle soupira, et se concentra ensuite. Elle généra alors une construction, et forma devant elle une petite tablette.

« Vous avez déjà vu Aliens ? Le 2, le film de Cameron… Voilà… C’est un détecteur de mouvements. Maintenant que ces saloperies se déplacent, on devrait pouvoir les repérer si elles se rapprochent. »

Le détecteur de mouvements émettait des ondes radio tout autour de lui, et analysait sur l’écran les obstacles qu’il rencontrait.

« On devrait se dépêcher, chercher une nouvelle ouverture, et partir d’ici… Puisque vous êtes à la fois le spécialiste et le mâle Alpha, vous passez devant. »

Comment résister à tant de charme ? Benjamin n’ajouta rien sur le moment mais sourit à Jessica. Si elle tenait tant à ce qu’il ouvre la voie, étant donné qu’il était « le spécialiste et le mâle Alpha », alors il ouvrirait la voie.

Benjamin passa seulement la tête hors de leur petite chambre pour observer les environs. Il ne voyait aucune créature. Ce qui semblait normal étant donné que Jessica venait de créer un détecteur de mouvements. Donc ça semblait fonctionner.

*Mouais. Même si on sait où se trouve les pas-beaux, ça ne nous donne pas la possibilité de les combattre. Je crois qu’elle n’a pas créer ce dont on a besoin. *

Alors Benjamin ne sortit pas. Il se retourna vers Jessica parce qu’il avait eu une idée. En tout cas, il fallait qu’elle lui explique pourquoi elle n’avait pas créé la « machine » qu’il avait en tête pour pouvoir s’aventurer vers le danger.

« Tu as créé un détecteur de mouvements. Très bien. Ton anneau a aussi dit que tu pouvais voyager en hyper-espace ? Sans déconner ? Ça ressemble à un truc que seuls des vaisseaux impossiblement compliqués peuvent faire. Bon, soit. Admettons que ton artefact hacké contienne autant de potentiel. Alors explique-moi une chose avant que ton « spécialiste » entre en action : pourquoi est-ce que tu n’as pas créer ou ajouter une espèce de fonction de cartographie ? A base d’écho comme les chauve-souris par exemple. Parce que, c’est bien beau de savoir que ça va bouger, mais je ne sais pas si tu as remarqué. Je ne porte pas d’armure imposante et je n’ai pas un gros fusil à pompe 2.0 dans les mains. »

Benjamin était en quelque sorte paumé. L’Anneau se régénérait tout seul. L’Anneau semblait avoir une volonté et exprimait le fait d’être remplacé. Pour Benjamin qui vivait avec l’Omnitrix, il avait cru que l’Anneau serait unique. Comme son Omnitrix. Mais non, ça semblait être une sorte de super artefact fabriqué à la chaîne et facilement remplaçable. Quoi ? Il ne connaissait rien aux Green Lantern ? Effectivement. Mais il ne refusait jamais d’apprendre. On apprenait jusqu’au jour où on décédait de toute façon.

Jessica répondit assez rapidement aux suggestions de Benjamin :

« Le détecteur de mouvement permet aussi de faire une carte. Il envoie des ondes radar, et établit une carte à partir de la manière dont les ondes rebondissent sur les parois. »

Un mécanisme finalement assez simple. Le duo sortit de la chambre, et s’avança dans les quartiers d’habitation. Toujours aucune âme qui vive, et le radar de Jessica ne détectait aucun signal. Elle avait l’impression d’être comme les Marines de Aliens 2, s’enfonçant dans les coursives du complexe, inconscient de la mort qui planait autour d’eux… Sauf que, contrairement à eux, Jessica avait vu de très près ces Nécromorphes. Le duo marchait donc, rejoignant une sorte de grand atrium central en piètre état. La coursive principale était effondrée, ne laissant plus qu’un chemin vers l’école.

« On devrait aller par là… C’est le seul chemin, de toute manière. On devrait bien finir par trouver un moyen de quitter ce vaisseau. »

Ils s’avancèrent dans un couloir sombre, jusqu’à rejoindre un mur avec des peintures plus vives, dorées, comme pour évoquer le soleil. Une double porte se tenait là, avec, au-dessus, plusieurs lettres grosses et criardes formant un « ÉCOLE » devant être sympathique.

« Le processus de terraformation d’une planète prend parfois des années, alors, quand les colons ont des enfants, il faut bien les éduquer. Cela doit quand même être assez sinistre… »

La porte s’ouvrit. L’école comprenait plusieurs sections regroupées autour d’une cour de récréation artificielle. Il y avait de la pelouse artificielle, des animaux en plastique formant le décor, et un ciel peint en bleu. En voyant tout cela, Jessica ne put s’empêcher de penser à ce clip français, Respire, où des enfants jouaient dans un parc artificiel. Les différentes sections de cours étaient faites par tranches d’âge, et, à en juger par certaines classes, les cours devaient être pour certains assurés par des androïdes. Jessica perçut brusquement un signal émanant de l’une des salles. À chaque foi, le duo était bercé par le bruit habituel du sonar, un « BIP » simple qui résonnait toutes les cinq secondes pour annoncer que le radar avait fait un balayage… Mais, soudain, le signal se fit plus strident, car un deuxième « BIP » se fit entendre. Jessica regarda son radar, et vit un point blanc dans une pièce à proximité.

« Soyons prudents… »

Jessica monta un escalier, se dirigeant vers le signal.

BIP ! BIP !

Elle continua sur sa lancée, s’aventurant dans le couloir, jusqu’à rejoindre la bonne porte. Jessica se concentra alors… Et la porte s’ouvrit brusquement. Surprise, elle vit une silhouette derrière.

C’était une Gynoïde, visiblement une ancienne professeure.

« Vous… Vous n’êtes pas des parents d’élèves, n’est-ce pas ? »

C’était flippant. Découvrir une école dans une carcasse de vaisseau abandonné était flippant. Comme faire face à un androïde ressemblant quasi identiquement à une personne vivante. Découvrir le moindre défaut rendait la créature artificielle monstrueuse. C’était pour ça que Benjamin préférait interagir avec des robots qui ressemblaient à des choses abstraites. C’était ainsi plus évident d’avoir une conversation. Mais il dérivait. Il devait se recentrer et oublier cette pelouse artificielle ou ces jouets de plastique flashy.

*Je peux comprendre l’idée d’apporter une impression de vie dans une prison de métal. Mais ça me rappelle ces stupidités. Cette vidéo où j’avais découvert des professionnels venir sur des terrains pour peindre des pelouses. Putain ! Peindre des pelouses pour donner l’illusion d’une pelouse parfaite. Quelle espèce stupide on peut être parfois… *

« … »

Qu’est-ce que c’était encore ce merdier ?... Découvrir une personne (plus ou moins) vivante était déjà surprenant. Mais la question lui avait donné le même effet que recevoir un terrible coup de poing dans le ventre.

Il regarda alors Jessica. Puis la Gynoïde. Et de nouveau Jessica. La situation était tellement insolite. Anormale ? Peut-être. En tout cas, Benjamin ne pouvait que se demander si ça ne sentait pas le piège… Non ! Il devait penser autrement. Si cette Gynoïde avait survécu aux monstruosités du vaisseau, ça pouvait donc donner lieu à plusieurs scénarios. La pseudo femme en face d’elle n’était pas si inoffensive que le laissait paraitre son statut de professeure. Ou alors, c’était ce lieu qui était équipé pour se défendre face aux vagues d’assaut. Dans tous les cas, il fallait creuser la question.

« Moi et ma tendre moitié avons essayé. Mais nous n’avons jamais réussi à procréer. N’est-ce pas, ma reinette ? »

Bien entendu, il fallait que Benjamin fasse du Benjamin. Mais il n’avait pas poussé le jeu jusqu’à enlacer Jessica. Il ne voulait pas qu’elle se crispe, le rejette et fasse tout foirer avec la Gynoïde.

« Mais plus sérieusement, on se posait une question. Comment pouvez-vous assurer la sécurité des enfants ? »

Derrière la plaisanterie se révélait maintenant la question sérieuse. Jessica n’allait pas pouvoir le critiquer. Enfin, elle allait au moins devoir admettre que même dans ce genre de situation : Benjamin restait fiable. Lucide. Et efficace.

Au moins, il y avait une constante dans cette histoire de fous : Benjamin arrivait toujours à la faire sortir de ses gonds ! Elle haussa imperceptiblement les sourcils quand il signala à l’androïde qu’ils n’avaient pas encore eu d’enfant, puis se mit ensuite à parler plus sérieusement. Il interrogea l’androïde sur la sécurité des enfants. La professeure regarda autour d’elle en clignant des yeux, et ce fut quand elle se retourna que Jessica grimaça. Son dos avait été déchiré, ouvert en deux par une sorte de profonde lame. Plusieurs fils électriques avaient été tranchés, ainsi que des circuits imprimés. Visiblement, cette androïde avait été attaquée, mais elle n’avait pas intéressé les monstres qui peuplaient ce vaisseau.

« Les enfants sont en retard… Je ne peux pas faire cours si les enfants ne sont pas là, et nous allons avoir du retard dans le programme… »

L’androïde ne leur répondit pas vraiment. La Gynoïde se retourna, et se rendit vers son pupitre. La classe était totalement vide, avec des pupitres abritant des moniteurs avec des ordinateurs.

« Je vais devoir prendre des notes… Vous veniez chercher vos enfants ? Oh, je crains qu’ils ne soient tous morts. Vous voulez bien signer un formulaire de décharge ? L’école n’est pas responsable en cas de décès.
-  Cette boîte de conserve est déréglée, elle ne nous sera d’aucune aide… »

Jessica examina néanmoins les pupitres. Savoir que des enfants étaient probablement morts ici lui serrait le cœur, mais c’était là la dure et triste réalité de la vie. Il n’y avait que dans les fictions que les enfants avaient des totems d’invincibilité. Jessica ne nota rien de particulier au début, puis vit ensuite des traces de griffe. Jessica constata rapidement que les élèves qui étaient entrés ici avaient de toute évidence disparu, mais elle devint blême en voyant au sol des vêtements de petite taille rapiécés. Un enfant avait abandonné là sa poupée de latin.

« Dans un triangle rectangle, le cosinus d'un angle est le nombre égal à la longueur du côté adjacent divisée par la longueur de l'hypoténuse. Qui veut bien aller au tableau pour illustrer ce que je viens de dire ? Andreï ? Pourquoi ne lèves-tu pas la main ? Vous voulez vraiment que je fasse tout le travail, hein ! »

Lae robot attrapa un stylo spécial, un encreur qu’on utilisait sur un papier fin et qui permettait d’avoir une copie numérique. Il y avait toutefois bien longtemps que le stylo avait perdu son encre, et qu’elle n’avait plus de papier. L’androïde se mit donc à écrire sur le mur, traçant un triangle rectangle. Convaincue qu’elle ne trouverait rien d’utile, Jessica se dirigea donc vers la sortie.

« On devrait poursuivre notre route, cet endroit est vraiment trop macabre… »

Benjamin pensait à nouveau au fait que plus les androïdes étaient perfectionnés et ressemblaient à l’homme, plus le moindre défaut les rendait monstrueux. Et cette gynoïde accumulait les faits contre elle. D’abord sa capacité à pouvoir toujours agir malgré la blessure (quoique, il devrait plutôt penser à une destruction pour un être mécanique) dans son dos. Sans compter son discours froid concernant la mort des enfants qui entraînaient des procédures de paperasserie.

« Je suis d’accord avec toi sur ce point. Cette salle de classe et cette professeure sont macabres. Mais je me demande si on devrait vraiment partir sans exploiter ce qu’on a à notre disposition. »

L’Omnitrix à son poignet était un puits à faiseur de miracles. Seuls son caractère têtu et sa batterie étaient vraiment préjudiciables. Benjamin était en train de se demander s’il n’allait pas faire appel aux capacités de Biotech.

« C’est plus ou moins la première personne vivante qu’on croise dans ce cercueil volant. Même si elle est complètement tarée, elle doit savoir des choses. Elle attend les enfants et elle sait en même temps qu’ils sont morts. Ça m’évoque des bugs et des mélanges de temporalité. Mais ça me dit surtout qu’elle a des souvenirs et toujours une capacité à réfléchir. »

Il fallait qu’il réfléchisse et vite. Toujours penser au contraire. Et quelle était le contraire dans cette situation ? Ecouter Jessica et se barrer de cette salle de classe. Ce qui impliquait d’aller ailleurs, mais où ? Benjamin n’allait pas supporter longtemps d’errer au hasard en espérant trouver une voie de sortie sur fond de « bipbip » issu par l’appareil de la Green Lantern. Non, il lui fallait des faits solides.

*Ouais, en fait, j’ai déjà pris ma décision. *

Alors il porta l’Omnitrix devant soi pour tourner le cadran jusqu’à voir la silhouette de l’alien technologique. Puis sa main enfonça le mécanisme et la mutation débuta. Le corps organique perdit sa structure osseuse et tout son système d’organes pour devenir un système organique. Pendant un  bref instant, il y eut la douleur de la mutation. Puis cela passa et Benjamin devint Biotech.

« Madame la professeure, il me semble que vous et moi allons nous synthétiser. »

Biotech se tourna vers Jessica et fit apparaitre l’esquisse d’un sourire sur son corps liquide.

« Peut-être que cela donnera à mademoiselle l’envie de faire des enfants ? »

Puis il reprit son sérieux et, tel un parasite, devint une masse liquide et s’infiltra dans le corps et le système de la gynoïde. Il allait s’emparer d’elle et surtout, surtout accéder à ses souvenirs. Savoir ce qui l’avait blessé. Comment était mort les enfants. Mais essentiellement, savoir comment quitter ce foutu cercueil !

Jessica n’était pas très enjouée à l’idée de laisser Benjamin synchroniser, ou fusionner, avec cette professeure. Et si ça le déréglait également ? Mine de rien, elle ne connaissait rien des pouvoirs et des effets secondaires de son Omnitrix ! L’androïde qui était face à eux avait clairement vécu trop longtemps, et Jessica n’avait pas spécialement envie que cette expérience ait des conséquences négatives sur Benjamin. Faisant néanmoins preuve de son audace habituelle, il signala à Jessica que cela lui donnerait peut-être l’envie de faire des enfants… Ce qui, naturellement, fit immédiatement réagir cette dernière !

« Hey ! »

Curieusement, elle sentit ses joues s’empourprer, et croisa les bras en signe de renfrognement.

« Tâchez d’être un peu sérieux… »

Elle déglutit ensuite en le voyant se transformer, se liquéfiant comme le T-1000 dans « Terminator 2 », puis alla recouvrir le corps de l’androïde… Ce qui, pour Jessica, était quand même assez dégueu à voir ! Benjamin, de son côté, put donc accéder à la banque mémorielle de la professeure…

- - - -

…Et il vit à travers ses yeux une salle de cours bien différente, lumineuse, avec des couleurs vives, et des fenêtres illuminées, donnant sur des paysages verts. Grâce aux canaux de ventilation, le vaisseau diffusait des odeurs agréables, et générait des images artificielles à travers les fenêtres, montrant la forêt, montrant le paradis de rêve qui attendait les colons sur Tau Volantis. Sur le tableau, une image du théorème de Pythagore, la professeure demandait aux élèves d’aller sur le tableau pour présenter ce théorème. On pouvait aussi voir une série d’équations sur un autre bord du tableau. Les enfants des colons suivaient des formations accélérées. Ils portaient tous des uniformes de colons assez similaires.

« Maîtresse Hansley, il paraît que nous approchons de la Terre Promise !
-  Vous déviez du sujet du cours, jeune cadet… Mais je constate bien, à votre taux d’adrénaline, que vous n’êtes pas concentrés à ce cours. Aussi, puis-je vous le concerner, notre colonie approche en effet de la Terre Promise. Nous devrions en survoler l’atmosphère demain… »

Les enfants étaient heureux, heureux de pouvoir enfin fouler la Terre Promise tant attendue, de pouvoir explorer les énormes prairies vertes. On la décrivait déjà comme une « super-terre », une planète tellurique abritant des ressources phénoménales formidables !

- - - -

Elle rouvrit les yeux en sortant précipitamment de sa capsule de chargement. Alix Hansley venait d’être réveillée trop tôt. Elle entendit les sirènes d’alarme, et vit devant ses doigts d’épaisses tâches rouges, tout en entendant des hurlements. Elle assimila rapidement cet élément à du sang, et vit devant elle un homme qui courait, cherchant à fuir quelque chose… Avant que quelque chose ne le transperce au milieu du dos. Une pince ressortait de son ventre, et Alix le vit tomber devant elle, se vidant de son sang, avant qu’une créature ailée issue d’un cauchemar sinistre ne se colle à lui, et ne lui enfonce une longue aiguille dans le crâne, diffusant une substance en lui.

La créature et les monstres qui l’accompagnaient ne s’attardèrent pas sur Alix, qui vit au bout de quelques minutes le corps du malheureux ingénieur se tortiller sur place, avant de grogner, et de muter, se transformant. Ses os s’étirèrent, déformant de manière grotesque et horrible son corps, afin de le faire ressembler à ces autres monstres qui envahissaient progressivement le vaisseau…

Il y eut un court instant d’hésitation quand il entendit et vit la réaction de la Green Lantern. C’était la première fois qu’elle était aussi peu crédible dans ses réponses. Ça manquait de… mauvais sentiments. De là à dire que son charme héroïque l’avait touché… et puis il passe à autre chose. Son esprit devint celui de Biotech. Les vicissitudes de la vie humaine n’étaient pas intéressantes pour la machine. Les informations dans la tête de la gynoïdes, ça et seulement ça faisait chauffer d’excitation le cerveau bio-technologique.

Alors il se laissa glisser dans les flashs de mémoire de celle qui avait un nom : Alix Hansley. La première partie aurait eu de quoi redonner de l’espoir au héros blasé qu’était Benjamin. De la lumière. Des enfants curieux. Des fenêtres montrant des paysages de luxuriantes forêts. Puis avant même que la deuxième partie commence, l’esprit de Biotech récupéra un souvenir dans la tête de Benjamin. Celui d’un roman du nom de Silo. Il y avait aussi des écrans dans cette tour complètement enterrée. Des écrans qui masquaient un monde de désolation par des paysages eux aussi luxuriants. Ouais, Benjamin le héros blasé aurait pu ajouter « Je vous l’avais dit… »

Assister impuissant à la mutation d’un innocent via les yeux d’une machine sans sentiments. Il y avait de quoi créer des problèmes dans un cerveau d’être humain fait pour ressentir. Qui plus est, un organe fabriqué pour ressentir l’empathie. Sauf que cette empathie humaine devait se conjuguer avec une froideur de bio-machine. Le cerveau devait s’auto-tromper pour parvenir à accepter la réalité et ne pas se détruire. Ca laissait des séquelles. Ca aboutissait à une jeune héros de dix ans plein d’énergie à un vieux briscard blasé par tout et tous…

« Je… Je les ai vu. Les enfants. »

Derrière la voix aux accents de machine insensible, Benjamin s’exprimait sous les traits de Biotech. Et s’il y avait un manque de tonalité qui créait les couleurs des émotions : Jessica pouvait tout de même entendre ce que Benjamin cachait : à savoir son cœur. Et dans ce cas précis, la douleur de ne pouvoir rien faire pour sauver l’innocence.

« Il faut que j’y retourne. Que je replonge dans les mémoires de la gynoïde. Non, d’Alix Hansley. Elle avait un prénom. Non, elle en a toujours un. Même si elle est… mourante. »

Se transformer en alien. Procéder à des fusions de type synthétisation, parasite ou autre avait toujours des effets secondaires. Jessica s’en était inquiété et s’en inquiétait toujours vraisemblablement. Mais Benjamin en souffrait depuis l’âge de ses dix ans…

« J’ai vu un homme mourir. Son crâne transpercé pour y mettre quelque chose. C’est ce quelque chose qui l’a transformé. Je l’ai vu. Tout va si vite… »

Tandis que Benjamin avait sa vision, Jessica surveillait les environs, mais les monstres n’étaient pas par là. Toutefois, Benjamin ne tarda pas à lui parler. Il avait eu une première vision, et connaissait le patronyme attribué à l’enseignante cyborg : Alix Hansley. Il indiqua avoir vu une sorte de mutation, de transformation. On avait transpercé le crâne d’un homme pour y insérer quelque chose. Jessica fronça les sourcils. Elle n’arrivait pas encore vraiment à comprendre la nature de ces choses, car son Anneau ne les avait pas identifiés, et ne détectait aucun signe de vie en eux, même quand les corps étaient animés et les attaquaient.

*BIP ! BIP !*

Jessica regarda son radar. Deux petits points blancs apparurent, avant de s’éloigner. Elle se pinça les lèvres, nerveuse.

« D’accord, mais… Soyez prudent, d’accord ? »

Elle ne savait pas trop comment cette interaction marchait, mais ça ne la rassurait pas beaucoup. Benjamin replongea ensuite dans les souvenirs distordus de Madame Hansley.

- - - -

Ses élèves ! Alix s’inquiétait naturellement pour eux, ce qui n’avait rien de surprenant. Elle avait été programmée ainsi. Elle constata vite que les monstres ne s’intéressaient pas à elle, et en déduisit tout aussi vite que cela venait de sa nature cybernétique. Pour autant, ils la percevaient, car, quand elle faisait du bruit, ils se retournaient vers elle. Alix se déplaçait donc avec prudence, tandis que son processeur tournait à toute allure, cherchant quel protocole de sécurité appliquer. L’accès vers les écoles étant bloqué par des portes de sécurité, elle parvint à rejoindre le pont de commandement.

« Bon sang, il y en a partout !
-  Mais d’où viennent ces saloperies ?
-  De cette maudite planète, vous croyez quoi ? On n’aurait jamais dû autoriser les soldats à revenir ! »

Alix comprit vite que les problèmes avaient commencé sur Tau Volantis. Les colons avaient installé une colonie là-bas, Providence. Des opérations de forage avaient été réalisées, et avaient permis de déterrer une structure étrange… Un Monolithe. Suite à cette extraction, les colons avaient progressivement commencé à tomber malades. Fatigues, migraines, les symptômes allaient en empirant : illusions, hallucinations, insomnies conduisant à des crises de somnambulisme… Providence avait été mise en quarantaine, et les communications avaient commencé à saturer en raison d’une forte tempête qui avait secoué Providence. Finalement, les quelques retours qu’ils avaient eu suite à la tempête étant des plus obscures, le vaisseau avait envoyé une patrouille sur place, l’Escouade Delta.

Cette patrouille était revenue en indiquant avoir été attaquée, et le Commandant avait eu un long débat avec ses subordonnés, jusqu’à finir par aller contre l’avis de plusieurs de ses lieutenants, en ouvrant un quai pour permettre à la navette militaire de revenir. Le quai avait été mis sous quarantaine, et des soldats avaient extrait l’Escouade Delta. Plusieurs d’entre eux étaient restés sur la colonie, visiblement morts, tandis que les autres étaient ébranlés. Ils avaient été placés dans l’infirmerie, toujours en quarantaine, tandis que leur vaisseau avait été examiné. Les instruments de bord du pont de commandement av aient ensuite perçu de puissants signaux anormaux venant de la planète. Par la suite, les membres du vaisseau avaient eux aussi commencé à ressentir les symptômes des colons de la station Providence. Maux de têtes, migraines carabinées… Les semaines avaient passé sous une tension croissante, exacerbée. Fallait-il appeler des renforts, au risque de propager une éventuelle épidémie ? Le Commandant s’y refusait, tandis que les membres de l’équipage continuaient à rêver. Cela rappela d’ailleurs à Alix un souvenir…

- - - -

« On a tous rêvé, Maîtresse Hansley, on rêvait ensemble ! »

C’était une séance de méditation. Des séances collectives destinées à souder le groupe, et à lutter contre les troubles psychologiques induits par le fait de voyager dans un vaisseau, et de grandir à l’intérieur. Les élèves se réunissaient en cercles, et parlaient de choses et d’autres, dans le but de se détendre. Cependant, le sujet de cette conversation était un peu particulier, car les enfants avaient fait tous le même rêve. Alix était un robot, elle pensait de manière cartésienne. Les rêves collectifs étaient pour elle un fantasme, alors elle avait pensé que les enfants lui jouaient un tour.

« Ne soyez pas ridicules, les enfants, ce que vous me racontez est impossible.
-  Mais si ! On se tenait tous la main, et on volait en bas ! Le Monolithe nous appelait. Les croyants ont raison, Maîtresse !
-  Brandon, ce n’est pas le lieu pour débattre de cela ! »

Les Croyants… Un terme spécifique, lié à la situation actuelle. Depuis l’éveil du Monolithe et les migraines, une secte avait émergé au sein du vaisseau : les Croyants. Ils vénéraient le Monolithe, et laissaient des messages, des slogans faisant office de mantra : « VOTRE CORPS EN ÉCHANGE DE VOTRE ÂME, TELLE EST L’UNITÉ ! »

Un concept qui rappelait l’église de l’Unitologie. La secte affirmait que le Monolithe était un moyen d’unir les individus, et que le Monolithe exigeait un sacrifice. Qu’on lui abandonne son corps, afin d’être détaché de cette enveloppe physique réduite, et de pouvoir devenir éternel, une âme intemporelle, unie avec les autres par la magie divine du Monolithe. Autant dire que cela n’avait aucun sens pour Alix, raison pour laquelle elle ne pouvait que réprimander les élèves… Mais ceux-ci avaient rêvé qu’ils volaient au-dessus de Tau Volantis, et pouvaient décrire avec fidélité la station, tout en se dirigeant vers l’immense Monolithe, emplis d’un sentiment de béatitude et de bonheur sans fin…

Biotech sortit à nouveau de la vision que lui donnait la gynoïde.

« Jessica ? J’ai une solution pour nous aider à nous en sortir. Mais pas encore pour simplement sortir. »

Débuta alors le récit de la vision puis du souvenir de la première vision. Biotech, considérant son être biotechnologique, était aussi efficace qu’un rapport froid militaire. Il n’omit aucun détail. Il déploya même des efforts pour donner un maximum d’informations à Jessica quitte à ce que cela prenne des plombes et surcharge son petit cerveau d’être humain déjà traumatisé avant cette mésaventure Tau Volantis.

« Je disais donc, je peux nous aider à nous en sortir. Moi et mes aliens, on peut devenir invisibles à leurs yeux. Je pourrais vous accueillir en moi. Vous faire disparaitre des radars tandis qu’il ne resterait plus qu’un être cybernétique. Actuellement, Biotech, moi, avons une partie biologique. C’est elle qui nous trahit et nous rend visible à ces choses. »

Seulement, il fallait trouver un alien complètement cybernétique à 100%. Inévitablement, il devait y en avoir un. Enfin, peut-être pas. Un robot ne pouvait contenir de l’ADN. Donc même le plus robot de ces aliens contiendrait une part infinitésimale de vie qui serait repéré par leurs ennemis ? C’était un problème…

Et pendant que Biotech réfléchissait, le temps se déroulait. Sans compter qu’il devait aussi trouver une forme qui permettrait d’héberger Jessica comme si elle était un bagage. Plus que cela, il ne fallait pas qu’elle devienne une gêne quant aux questions de déplacement. Voire de fuite. Ou même de pugilat, peut-être.

Cela faisait beaucoup à penser. Et penser était une activité en solo. Avait-il raté une ou plusieurs réponses de Jessica ? Peut-être. Cet état de concentration était énergivore. Sans compter le fait qu’il avait été blessé au ventre auparavant. C’était impossible que son corps ait entièrement récupéré. Même en bénéficiant des capacités de ses aliens.

Mais cette manie a perdre la notion du temps, à se perdre dans des schémas de pensées : était-ce entièrement lui ? Voilà qu’il devait réfléchir à un autre problème. Et qui sait, peut-être que réfléchir ne faisait que l’enfoncer davantage dans le problème. Car il y avait une possibilité pour que la synchronisation avec la gynoïde déficiente soit à double sens. Et que cette dernire le « vampirise » ? « L’empoisonne » ? Peu importait. Il y avait un scénario où la gynoïde gagnait contre Biotech. Mais était-on dans ce scénario ?

Et… quelle était la première question à laquelle il devait trouver une réponse, déjà ?...
…
.

*BIP ! BIP ! BIIIIIPP !!*

Le détecteur de mouvement s’affola encore, perturbant un peu Jessica quand Benjamin lui annonça qu’ils allaient devoir fusionner ensemble. Elle regarda brièvement son cadran, mais les points blancs s’éloignèrent encore. Elle se mordilla ensuite les lèvres, puis regarda Benjamin, et même la Gynoïde. Alix Hansley avait les yeux hagards. Benjamin en avait appris un peu plus sur ce qui s’était passé ici… Un virus venu de la planète, voilà comment Jessica interprétait la chose. Une colonie installée sur Tau Volantis, Providence, avait déterré quelque chose, et ce quelque chose les avait rendus fou, puis était monté à bord de ce vaisseau. Une force psionique, qui avait commencé à attaquer les colons dans leurs rêves. Ces enfants qui faisaient un rêve mutuel… Jessica n’aimait pas ça. Plus elle en apprenait, et plus elle commençait à paniquer. Une espèce d’horreur lovecraftienne… Et le nom de cette colonie, Providence… Triste ironie du sort, puisque c’était aussi le nom de la ville où avait vécu Lovecraft. Jessica le savait, avant d’être enfermée chez elle, elle avait eu son trip’, et, comme beaucoup d’anciens gothiques intéressés par l’occultisme, elle avait fait son pèlerinage lovecraftien, le Lovecraft’s College Hill Walking Tour.

Jessica chassa tout cela de ses pensées.

« Non, je ne vais pas fusionner avec vous, Benjamin. Déjà, parc e que c’est trop flippant, mais aussi parce que cela risque de perturber mon Anneau… Qui est déjà très perturbé !
-  Les enfants faisaient des rêves mutuels. Je les ai accusés de mentir, parce que c’est impossible. Un rêve, c’est quelque chose d’interne, un message à soi-même. On ne peut pas conditionner les rêves, on ne peut pas… »

Alix marchait lentement, et attrapa un balai poussiéreux à qui il manquait la brosse. Elle passa le balais pour nettoyer le sol, provoquant des bruits de claquement quand la manche en bois heurtait le sol.

*TOC ! TOC !*

La Gynoïde soliloquait :

« Je dois préparer la classe pour eux. S’il y a trop de saleté, mes supérieurs vont me sanctionner, et je veux enseigner, j’aime enseigner… J’étais en train de leur apprendre les principes de la terraformation. »

Jessica se retourna vers Benjamin.

« Avec ce que vous avez appris, on en sait assez. Il faut qu’on se tire de là, qu’on sorte de ce système. Ensuite, je pourrais prévenir mes supérieurs, ils viendront en renforts, et on pourra fermer tout ce secteur. »

Jessica se tut brusquement, avant de réfléchir. Son visage s’illumina brusquement.

« Ou alors… Ce vaisseau doit nécessairement disposer de communications externes, d’une balise radio. Il suffirait que je m’y rende. Mon Anneau peut remettre en marche le système, et émettre à destination d’Oa ! Ensuite, il suffira d’attendre que les renforts viennent ! »

Ce plan lui semblait être le meilleur qui soit. Simple, basique !

« Bien sûr. Un jeu d’enfant ! »

Benjamin, sous sa forme de Biotech, avait tout de même du mal à imaginer en quoi être abrité au sein de lui pouvait être flippant en comparaison des choses qui défiaient la mort dans une carcasse qui ne demandait qu’une dernière traversée de météorite de part en part pour finir aux quatre coins des étoiles…

« Et quand les créatures passeront à côté de nous, il nous suffira d’être parfaitement immobile pour ne plus exister selon leur perception du monde. »

L’ironie d’un être bio-technologique ne devait peut-être pas frapper de suite. A cause d’une voix qui était faible en modulations et émotions. Mais Jessica allait très vite comprendre que Benjamin n’adhérait pas à 100% à son plan.

L’intelligence de Biotech continuait de tourner à plein régime. Il y avait quelque chose qu’elle avait dit et qui ouvrait une possibilité. Il fallait qu’il ramène au-devant de sa conscience ce qui attendait à l’arrière-plan de son inconscience. Mais quoi ?

« Cet anneau a une conscience ? »

Le doigt de Biotech se rapprocha pour pointer l’anneau de la Green Lantern.

« Et il a un potentiel de traverser les étoiles pour contacter ta base ? »

Le doigt continuait à se rapprocher. Tout comme la réflexion dans sa tête se poursuivait.

« Peut-être que l’Omnitrix pourrait se nourrir de l’énergie de l’Anneau. Ma capacité a me synthétiser dans la technologie associée à cette compétence de créer ce qui manque via l’imagination. Oui… oui… cela pourrait réussir. »

Biotech observait la salle de classe en relativement bon état. Puis il observa la Gynoïde.

« Utiliser cet environnement comme navette de secours. Utiliser cette Gynoïde comme unité centrale. M’utiliser moi pour donner de la consistance et des ordres au tout. Et utiliser cette lumière verte provenant de l’Anneau pour créer ce qui manque et y apporter une source d’énergie. Cela me parait être un plan bien plus sensé que simplement lancer une bouteille dans la mer d’étoiles et attendre passivement. »